bande dessinée - bande dessinée. 1 PRÉSENTATION bande dessinée, récit fondé sur la succession d'images dessinées, accompagnées le plus souvent de textes. La bande dessinée est un mode d'expression propre au XXe siècle, bien qu'il soit né antérieurement ; il se distingue nettement des genres narratifs qui lui sont pourtant apparentés, tels le roman ou le roman-photo. Les bandes dessinées sont publiées sur des supports extrêmement divers : dans la presse généraliste, qui peut leur consacrer une fraction de page (une simple bande, que l'on appelle un « strip «) ou plusieurs pages -- voire des suppléments spéciaux --, dans des magazines spécialisés, ou sous forme d'albums contenant une ou plusieurs histoires. Souvent humoristique, surtout à ses débuts (d'où son nom de « comics « en anglais), la bande dessinée s'est élargie aux genres les plus divers : l'aventure, le policier, l'espionnage, le western, le fantastique, l'érotisme, etc. Au cours du XXe siècle, elle s'est imposée comme le 9e art, aux côtés du cinéma (7e art) et de la photographie (6e art). 2 LES PRÉCURSEURS DE LA BANDE DESSINÉE 2.1 Les gravures de William Hogarth Rowlandson (Thomas), les Voyages du docteur Syntax Héritier de William Hogarth, le caricaturiste et graveur Thomas Rowlandson (1756-1827) a brocardé la société britannique de son temps, s'en prenant plus particulièrement au ridicule de « caractères «. Réalisés à l'aquarelle, ses dessins sont émaillés de stéréotypes comiques. Rowlandson a connu son plus grand succès avec les Voyages du docteur Syntax, une série d'illustrations parues de 1812 à 1820, dont le « héros « (ici représenté sur son cheval) est un pasteur et professeur ridicule. The British Museum On peut considérer comme premières bandes dessinées, au sens moderne du terme, les réalisations de William Hogarth, qui utilise la gravure satirique pour ridiculiser les vices et les travers de la société de son époque ( la Carrière de la prostituée, 1732 ; la Carrière du libertin, 1735) et publie une série de pamphlets moralisateurs sous la forme d'une suite d'estampes s'enchaînant à la manière d'un récit. Hogarth a de nombreux successeurs en Grande-Bretagne, notamment Thomas Rowlandson (1756-1827), qui crée en 1809 le personnage du docteur Syntax. 2.2 Les histoires en images de Rodolphe Töpffer En 1827, s'inspirant en partie des gravures de Hogarth et du docteur Syntax de Rowlandson, dont il existe une traduction en français, le Suisse Rodolphe Töpffer (1788-1846), maître de pensionnat à Genève, commence à écrire l'Histoire de M. Jabot, récit humoristique composé de lithographies. Il réserve d'abord ses créations à ses élèves et à ses amis, puis, à partir de 1833, encouragé par les éloges de Goethe, il les édite ( les Amours de M. Vieuxbois, 1839 ; Histoire de M. Cryptogramme, 1845). Töpffer est également l'un des premiers théoriciens de ce nouveau genre, qu'il analyse dans son Essai de physiognomonie (1845). Ses albums sont par la suite traduits, mais également largement copiés et plagiés : dès le XIXe siècle, les illustrateurs français Cham (Histoire de M. Lajaunisse, 1839), Gustave Doré (les Travaux d'Hercule, 1847) et Caran d'Ache (les Courses dans l'Antiquité, 1881) reprennent le principe des « histoires en images «, principe que l'on retrouvait déjà dans les images d'Épinal diffusées par la maison Pellerin depuis le milieu du 2.3 XVIIIe siècle. Max, Moritz et Ally Sloper À la suite de Töpffer, l'Allemand Wilhelm Busch (1832-1908) publie à partir de 1865, dans le journal munichois Fliegende Blätter, les aventures de Max und Moritz, une série d'histoires mettant en scène un duo de garnements jouant des tours pendables à leur entourage. Son style est largement imité, en particulier par le Britannique Charles Henry Ross, créateur en 1867, avec la scénariste française Marie Duval, du personnage d'Ally Sloper, un héros paresseux et roublard conçu pour le journal Judy. Très populaire, Ally Sloper devient en 1884 la vedette d'un hebdomadaire bon marché, le Ally Sloper's Half Holiday. En Grande-Bretagne, la série est considérée comme la première bande dessinée moderne. 3 LA BANDE DESSINÉE AMÉRICAINE 3.1 Les pionniers McCay (Winsor), Little Nemo in Slumberland Petit garçon plongé dans le pays des rêves, Nemo vit chaque nuit des aventures merveilleuses. Amoureux d'une jeune princesse, la fille du roi Morphée, il découvre des contrées insolites et grandioses en compagnie de Flip, un garnement masqué affublé d'un cigare. La série connaît dès ses débuts un succès considérable et devient rapidement l'un des plus grands classiques de la bande dessinée américaine.Winsor McCay, Little Nemo in Slumberland, planche parue dans le New York Herald en 1908. National Archives Nombreux en Grande-Bretagne, les illustrés humoristiques sont également légion aux États-Unis, avec des titres comme Puck, Judge ou Life. Cependant, dès les années 1890, ces hebdomadaires doivent faire face à la concurrence des grands quotidiens d'information, qui débauchent leurs meilleurs dessinateurs pour leur confier l'illustration de leurs suppléments dominicaux en couleurs. Ces nouvelles rubriques sont en effet des armes de poids dans la guerre des tirages comme celle qui oppose un moment le New York World de Joseph Pulitzer et l'Evening Journal de William Randolph Hearst. Traitant le plus souvent de l'actualité, usant d'un humour destiné essentiellement aux adultes, les bandes dessinées sont conçues en fonction du lectorat du journal. Très vite, elles représentent le meilleur moyen d'entretenir un suspense au jour le jour, avec de nombreuses aventures à épisodes, telles Little Nemo in Slumberland de Winsor McCay, Wash Tubbs de Roy Crane, The Yellow Kid de James Guilford Swinnerton, Little Orphan Annie d'Harold Gray, ou encore Thimble Theatre d'E. C. Segar, dans lequel Popeye le marin fait sa première apparition en 1929. Cette activité se révèle rapidement une véritable manne financière. Les droits cédés à d'autres journaux, la création de jouets, de dessins animés, de spectacles radiophoniques inspirés des héros des illustrés, les licences de commercialisation de produits à leur effigie sont en effet des moyens rentables de multiplier les profits. Les distributeurs de bandes dessinées disposent ainsi de moyens financiers leur permettant de développer leur production, d'élargir leur audience et de conquérir de nouveaux débouchés. Dès les années 1920, la bande dessinée américaine commence à s'exporter en Europe et à renouveler ses thèmes. 3.2 Les premières grandes réalisations Premiers dessins de Mickey (1927) Souris la plus célèbre du monde, Mickey (ou Mickey Mouse) apparaît en 1927 sous les traits de crayon du célèbre dessinateur-scénariste-producteur américain Walt Disney. À l'origine, Mickey est un personnage de dessins animés (Plane Crazy, 1928). Mais très rapidement, la souris devient également un personnage de bandes dessinées, touchant ainsi un très large public. Propulsé au rang de star dès les années 1940, Mickey devient l'emblème du citoyen américain et des valeurs américaines. Le personnage subit alors de profondes modifications scénaristiques et graphiques : Mickey prend allure humaine sous la forme d'un détective honnête et droit, évoluant dans une société de consommation qui bat son plein. SYGMA/Corbis Vers 1920, les éditeurs américains cherchent à diversifier les genres et à s'éloigner de la bande dessinée humoristique qui constitue jusqu'alors l'essentiel de la production. L'apparition d'un nouveau genre, le récit d'aventures, donne alors naissance à la bande dessinée réaliste. L'archétype du genre est peut-être l'adaptation d'un roman d'Edgar Rice Burroughs, Tarzan, seigneur de la jungle (Tarzan of the Apes, 1912), qui paraît en 1929 sous la forme d'un strip quotidien. Dessinée par Hal Foster, le futur créateur de Prince Valiant (1937), l'oeuvre connaît un succès immédiat. Donald Créé en 1934 par Art Babbit et Dick Huemer, Donald s'est rapidement imposé comme l'un des personnages phares des studios Disney. Après des débuts fracassants sur le grand écran, Donald devient également un personnage de bandes dessinées dans le Journal de Mickey. Il est tout naturellement présent dans les parcs d'attractions Disney, comme ici au Walt Disney World d'Orlando, en Floride. Kelly-Mooney Photography/Corbis Dès lors admis, le principe de la bande dessinée d'aventures donne lieu à toutes sortes de variations, mettant en scène des détectives justiciers (Dick Tracy, créé par Chester Gould en 1931), des magiciens dotés de pouvoirs extraordinaires (Mandrake, qui voit le jour en 1934 grâce à Lee Falk et à Phil Davis), des personnages de science-fiction (Buck Rogers, créé en 1929 par Philip Nowlan et Dick Calkins ; Flash Gordon, imaginé en 1934 par Alex Raymond et Edwin Balmer ; Brick Bradford, apparu pour la première fois en 1933 sous la plume de William Ritt et de Clarence Gray) ou des super-héros (Superman, conçu en 1938 par Jerry Siegel et Joe Shuster ; The Phantom, créé en 1936 par Lee Falk et Ray Moore). 3.3 Les premiers albums Avant 1933, la réédition des bandes dessinées précédemment parues dans les journaux se fait sous les formes les plus diverses : de grands recueils quadrangulaires non reliés, des compilations au format allongé, ne présentant qu'une bande par page ; parfois, même, de minuscules livres reliés, avec une image unique par page. Ce n'est qu'en mai 1934 que l'homme d'affaires américain Max Gaines conçoit le premier album moderne, appelé « comic book «. En pliant en deux un supplément dominical de huit pages, puis encore une fois en deux, le lecteur obtient un livret de trente-deux pages, au format pratique (17,5 × 26 cm environ). Il suffit alors d'y ajouter une simple couverture en papier glacé, ornée d'un dessin accrocheur. Les Famous Funnies de Max Gaines, « tout en couleurs «, connaissent un succès considérable. Les premiers Action Comics mettant en scène des super-héros, publiés en 1938, sont édités suivant cette méthode. 3.4 Les super-héros Affiche du film Superman (1948) Créé en 1938 par Jerry Siegel (pour le scénario) et Joe Shuster (pour le dessin), Superman est certainement le super-héros le plus célèbre au monde. Il doit sa notoriété internationale aussi bien à la bande dessinée (BD) qu'à son adaptation au cinéma sous la forme d'une série de 15 épisodes dès 1948 (Superman est alors interprété par l'acteur américain Kirk Alyn). D'autres séries et plusieurs longs-métrages suivront, notamment le Superman de Richard Donner en 1978, avec Christopher Reeve dans le rôle-titre. Swim Ink/Corbis Certains personnages, tels Superman, Batman -- créé en 1939 par Bob Kane et Bill Finger --, The Human Torch (« la Torche humaine «), Captain Marvel ou Wonder Woman, connaissent à l'approche de la Seconde Guerre mondiale une vogue sans précédent. Patriotes invincibles, les super-héros participent à leur manière à la propagande américaine. En 1943, on estime que le public américain lit 25 millions d'albums par mois. En 1950, ce chiffre atteint déjà 50 millions, pour culminer en 1954 à 150 millions d'exemplaires publiés mensuellement. Stan Lee, créateur de Spider-Man Monstre sacré de la bande dessinée américaine, le scénariste Stan Lee (Stanley Lieber de son vrai nom) est à l'origine des super-héros les plus connus au monde, comme les X-men, les Quatre Fantastiques, Daredevil, Hulk, le Surfeur d'argent et l'incontournable Spider-Man (représenté en arrière-plan), créé en 1962 avec le dessinateur Steve Ditko. Le point commun de tous ces superhéros, autrement dit la griffe de Stan Lee, c'est qu'ils se posent tous des questions, se sentent mal dans leur peau et vivent parfois très mal leur double-vie. Ce nouveau style de personnages et d'histoires s'inscrit dans la révolution culturelle (underground) de la bande dessinée américaine qui se développe dans les années 1960. Axel Koester/Sygma/Corbis Les aventures de super-héros perdent toutefois les faveurs du public après la guerre et sont supplantées par d'autres genres : contes cocasses, mettant en scène des animaux (comme le chien Snoopy de Charles Monroe Schulz), adaptations de films ou de classiques littéraires appréciés des adolescents (Conan le Barbare, adapté du roman de Robert E. Howard, par Roy Thomas et Barry Smith), récits situés dans l'Ouest américain (Red Ryder de Fred Harman) ou dans la jungle (Tarzan, repris par le grand dessinateur Burne Hogarth en 1937), faits divers, histoires sentimentales, guerre, espionnage (Johnny Hazard de Frank Robbins ; The Spirit de Will Eisner), horreur, etc. 3.5 Les premières législations L'inquiétude croissante des psychologues, des enseignants et des parents quant à l'influence éventuelle de la bande dessinée sur la délinquance juvénile, en particulier lorsqu'elle verse dans la violence et dans l'horreur, amène le Sénat américain à se pencher sur la question en 1954. Anticipant la législation, les éditeurs fondent leur propre code et leur propre autorité de contrôle afin de veiller à l'application d'une déontologie dans ce domaine : le contenu des bandes dessinées est désormais dûment vérifié. Au Royaume-Uni, des craintes de même nature entraînent le vote d'une loi au Parlement en 1955, visant à condamner toute personne responsable de l'impression, de la publication ou de la vente de bandes dessinées trop violentes. Contraints par leur Comics Code et concurrencés par la télévision, les éditeurs rencontrent des difficultés qui les amènent, dans les années 1960, à remettre au goût du jour les aventures de super-héros. Chez Marvel Comics, le scénariste Stan Lee et les dessinateurs Jack Kirby et Steve Ditko inventent un univers hétéroclite, habité de héros au destin tragique, comme The Fantastic Four (« les Quatre Fantastiques « : Mister Fantastic, la Chose, l'Invisible et la Torche humaine) et Spider-Man (ou Spidey, alias l'Homme-araignée), et dont les pouvoirs exceptionnels n'attirent que des mésaventures à leurs détenteurs. 3.6 La reconnaissance d'un mode d'expression L'adaptation au cinéma ou à la télévision des aventures des personnages les plus célèbres de la bande dessinée américaine permet à un public nouveau de mieux connaître cette forme d'expression ; Hollywood y découvre un véritable filon pour ses productions à grand spectacle et ne tarde pas à produire quantité de films au succès parfois considérable : Superman (1978) de Richard Donner, Batman (1989) de Tim Burton, Dick Tracy (1990) de Warren Beatty, Judge Dredd (1995) de Danny Cannon, le Fantôme du Bengale (1996) de Simon Wincer, les X-Men (2000) de Bryan Singer, Spider-Man (2002) de Sam Raimi, The Hulk (2003) de Ang Lee, etc. Les années 1960 voient également l'émergence d'une multitude de « fans « de bandes dessinées, collectionneurs organisés qui montent des manifestations, publient des fanzines et établissent chaque année un argus destiné à surveiller la spirale des prix atteints par certaines éditions rares. On leur doit également l'apparition de librairies spécialisées, qui vendent aujourd'hui l'essentiel de la production du genre aux États-Unis. 3.7 L'âge adulte Robert Crumb Chef de file de la bande dessinée américaine underground, Robert Crumb est à l'honneur au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 1999, où il se voit décerner le Grand Prix pour l'ensemble de son oeuvre et sa contribution à l'évolution du 9e art. Roger Ressmeyer/Corbis La contre-culture de l'Amérique des années 1960 donne le jour à un style underground, destiné exclusivement aux adultes. Ce mouvement anticonformiste libère la bande dessinée d'un certain nombre de tabous (notamment sexuels) et lui ouvre de nouveaux champs d'expression. L'underground apporte en effet à la bande dessinée son psychédélisme et sa vision particulière du monde. Il favorise également les récits à la première personne de Justin Green, de Robert Crumb (créateur du célèbre Fritz the Cat, félin désinvolte à la sexualité débordante) ou d'Harvey Pekar. Dans Maus (1972, publié en album à partir de 1986), Art Spiegelman relate de façon poignante comment son père a survécu à l'Holocauste ; cette oeuvre est un exemple de « roman graphique «, genre aux ambitions élevées réservé à un public plus restreint. 4 LA BANDE DESSINÉE FRANCO-BELGE 4.1 Les pionniers On considère souvent que la Famille Fenouillard est la première bande dessinée française. OEuvre de Georges Colomb (alias Christophe), sous-directeur du laboratoire de botanique de Paris, cette histoire paraît en feuilleton dans l'hebdomadaire pour enfants le Petit Français illustré à partir de 1889. Christophe est également l'auteur du Sapeur Camember (1890), du Savant Cosinus (1893) et des Malices de Plick et Plock (1893). La Famille Fenouillard est dépourvue de bulles (ou « phylactères «), comme toutes les premières bandes dessinées françaises, avec une exception notable cependant, celle des célèbres Pieds Nickelés, créés en 1908 par Louis Forton dans le journal l'Épatant. Bien que moins répandue en Europe, la publication de bandes dessinées en feuilletons dans les suppléments pour enfants de quotidiens ou dans des revues spécialisées est pourtant à l'origine de personnages comme Bécassine, bonne bretonne un peu nigaude, créée en 1905 par Jacqueline Rivière (scénario) et Émile-Joseph Porphyre Pinchon (dessin) pour la Semaine de Suzette, et dont les aventures seront publiées à partir de 1913 en albums (sous la plume de Maurice Languereau, alias Caumery). Dans les années 1920, Bibi Fricotin (imaginé en 1924 par Louis Forton), Zig et Puce (oeuvre d'Alain Saint-Ogan apparue dans le Dimanche illustré en 1925) et les traductions de Winnie Winckle (Bicot, 1920) ou de Bringing up Father (la Famille Illico, 1924) connaissent les faveurs d'un jeune public de plus en plus exigeant. 4.2 Les premières grandes réalisations Hergé Père du célèbre personnage de Tintin, Hergé est considéré comme le plus grand créateur de la bande dessinée franco-belge.Sur cette photo, prise dans sa maison le 18 septembre 1975, Hergé achève son 23e album de la série, Tintin et les Picaros. Jacques Pavlovsk/Corbis En Belgique, c'est dans le Petit Vingtième, le supplément du quotidien le Vingtième Siècle destiné aux jeunes, que naît en 1929 sous la plume d'Hergé le personnage phare de la bande dessinée européenne : le reporter Tintin, accompagné de son inséparable chien Milou. Toutefois, malgré quelques réussites marquantes, le développement de la bande dessinée franco-belge au début du siècle n'a encore rien de comparable avec celui que connaît à la même époque la bande dessinée américaine. Dans l'entre-deux-guerres, sous l'influence du Journal de Mickey, créé en France en 1934 et qui connaît un immense succès, plusieurs magazines voient le jour, comme Hurrah ! (1935), Junior (1936) ou le Journal de Toto (1937). En 1938, l'éditeur belge Dupuis lance l'hebdomadaire Spirou, qui met notamment en scène le héros éponyme imaginé par Rob-Vel et Davine. À la même époque, en Italie, en Allemagne ou en Espagne, les créations nationales originales sont, comme en France, minoritaires par rapport aux créations américaines. En Grande-Bretagne, cependant, les années 1930 voient la naissance de plusieurs périodiques, comme The Midget (1931), Sunshine (1938) ou Bouner (1939). 4.3 L'âge d'or Jean Graton, créateur de la série Michel Vaillant Créateur du plus célèbre pilote automobile de la bande dessinée (Michel Vaillant), Jean Graton s'impose à la fin des années 1950 comme l'une des figures de proue de la bande dessinée réaliste franco-belge.Sur cette photo, prise en 1994, Jean Graton pose avec sa collection d'albums de Michel Vaillant. Prat Thierry/SYGMA/Corbis C'est au tournant des années 1940 et 1950 que se développe une véritable école de la bande dessinée franco-belge. Plusieurs magazines pour enfants font leur apparition après la guerre : le Coq Hardi, fondé en 1945 par Marijac, Fripounet et Marisette, le journal Vaillant (où apparaît, après avoir paru pendant sept ans dans le journal l'Humanité, Pif le Chien), Wrill ou encore Héroïc-Albums. Mais l'initiative la plus marquante vient encore une fois de Hergé. Après avoir écrit plusieurs albums des aventures de Tintin, il fonde en 1946 le journal Tintin, auquel collaborent des auteurs comme Edgar P. Jacobs (créateur de Blake et Mortimer en 1946), Jacques Martin (créateur d'Alix en 1948), ainsi que Greg (créateur d'Achille Talon en 1963), Bob de Moor, Raymond Macherot (Chlorophylle et Minimum), Jean Graton (Michel Vaillant), Tibet et André-Paul Duchâteau (Ric Hochet), Jean Roba (Boule et Bill), etc. Morris, créateur de Lucky Luke Créateur de la série Lucky Luke, le dessinateur-scénariste belge Morris (de son vrai nom Maurice De Bévère) est l'un des rares auteurs à avoir consacré son oeuvre à un seul héros. En 1992, il a reçu le Prix spécial 20e anniversaire au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême pour sa remarquable contribution au 9e art. Thierry Tronnel/Sygma/Corbis En 1959, René Goscinny, autre figure majeure de la bande dessinée francophone d'après-guerre, fonde avec Albert Uderzo et Jean-Michel Charlier le journal Pilote, qui ouvre notamment ses pages aux productions de Tabary (Iznogoud), de Cabu (le Grand Duduche) et de Jean Giraud, alias Moebius (Blueberry). Mais, c'est le héros du journal, Astérix le Gaulois, qui deviendra le personnage le plus célèbre de la bande dessinée française. Peyo, créateur des Schtroumpfs Auteur de l'une des séries les plus connues de l'histoire de la bande dessinée, les Schtroumpfs, le dessinateur et scénariste belge Peyo (pseudonyme de Pierre Culliford) est incontestablement l'un des maîtres du 9e art. Eric Preau/Sygma/Corbis Grâce à son succès, le journal Spirou permet à un bon nombre de créateurs de développer leurs talents. C'est le cas de Jijé, tête de file de toute l'équipe et inventeur du personnage de Fantasio ; de Morris, créateur de Lucky Luke ; de Franquin, avec Gaston Lagaffe et le Marsupilami ; de Peyo avec les Schtroumpfs, ou encore de Tillieux (Tif et Tondu avec Will, d'après Fernand Dineur). Spirou, Tintin puis Pilote accueillent et encouragent presque tous les créateurs de bandes dessinées jusqu'aux années 1980. Avec une ou deux décennies de décalage, la production de bande dessinée franco-belge donne lieu au même phénomène commercial qu'aux États-Unis, créant des marchés dérivés assez importants et atteignant, pour certaines séries d'albums ou pour certaines publications, des chiffres de vente astronomiques (plus de 250 millions d'albums d'Astérix ont ainsi été vendus à travers le monde). 4.4 L'âge adulte Guido Crepax L'auteur de bandes dessinées italien Guido Crepax (photographié ici dans son studio) est surtout connu en France pour le personnage de Valentina, héroïne moderne, troublante et désinhibée. Ses aventures, d'essence érotique, obéissent à un schéma narratif qui les élèvent aux dimensions du rêve et du fantasme. Paolo della Corte/Effigie La bande dessinée connaît en Europe une reconnaissance officielle à partir des années 1960, avec la mise en place d'un club de bandes dessinées en France en 1962, d'un Salon de la bande dessinée en Italie en 1965, avec la création du Salon international de la bande dessinée d'Angoulême et le développement d'une activité d'étude et de recherche sur ce neuvième art. Jean-Claude Mézières Grand Prix du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 1984, Jean-Claude Mézières doit principalement sa renommée internationale au succès de sa série culte de sciencefiction Valérian (scénario de Pierre Christin). Créée en 1967, cette série, pionnière du genre, met en scène l'un des couples les plus célèbres de la bande dessinée de science-fiction française : Valérian et Laureline. Amet Jean Pierre/SYGMA/Corbis Parallèllement, la bande dessinée pour adultes se développe avec Barbarella de Jean-Claude Forest (1962) et Valentina de Guido Crepax (1965). Les années 1970 voient apparaître de nouveaux créateurs en ce domaine : Philippe Druillet, avec Lone Sloane, apparu en 1966 et publié dans Pilote à partir de 1970 ; Tardi, créateur d'Adèle Blanc-Sec et adaptateur de romans comme la série des Nestor Burma, d'après Léo Malet ; Enki Bilal (la Croisière des oubliés, 1975 ; le Vaisseau de pierre, 1976 ; la Ville qui n'existait pas, 1977 ; les Phalanges de l'ordre noir, 1979 ; la Femme piège, 1986 ; le Sarcophage, 2000), Pétillon (créateur du détective burlesque Jack Palmer) ou Gérard Lauzier (auteur des Tranches de vie). Georges Wolinski Humoriste et dessinateur de talent, Georges Wolinski est l'un des artistes les plus emblématiques de sa génération. Travaillant aussi bien pour des magazines de bande dessinée (Hara Kiri, Charlie Mensuel, etc.) que pour la presse généraliste (l'Humanité, Libération, le Nouvel Observateur, etc.), Wolinski publie parallèlement des dizaines d'albums dans lesquels il donne libre cours à son humour satirique -- son sujet de prédilection étant le sexe.Il est à l'honneur en 2005 au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême, où il se voit décerner le Grand Prix (récompense suprême du festival) pour l'ensemble de son oeuvre et sa contribution à l'évolution du 9e art. FOUGERE ERIC/SYGMA/Corbis Comme aux États-Unis, la culture underground trouve en Europe, et en France en particulier, un moyen d'expression adapté, dans des magazines comme Hara-Kiri (1960), Charlie Mensuel (1969) et Charlie Hebdo (1970), qui font une large place à des créateurs anticonformistes, à la satire politique et sociale et aux nouveautés. De nombreux auteurs y ont fait leurs débuts, notamment Reiser, Wolinski, Gébé, Fred et Cabu. Philippe Vuillemin Grand Prix du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 1996, Philippe Vuillemin s'est rendu célèbre par ses « sales blagues « parues dans l'Écho des Savanes. Digne héritier de Jean-Marc Reiser, Vuillemin s'attache à dynamiter, avec une ironie féroce, toutes les formes de conformismes sociaux. ROBERT ERIC/Sygma/Corbis Au milieu des années 1970, le groupe Bazooka (Olivia Clavel, Loulou Picasso, Bernard Vidal, Moulieg, etc.), invente le concept de « dictature graphique « et permet un certain renouvellement des techniques utilisées par les auteurs de bandes dessinées (collage, « cut-up «, etc.). Les publications du groupe (Bien dégagé sur les oreilles ; Activité sexuelle : normale !) déclenchent souvent des réactions virulentes, mais contribuent à la reconnaissance de l'« esthétique BD « dans d'autres domaines de la création : la publicité et le cinéma (Patrice Leconte, Marc Caro, Gérard Lauzier et Enki Bilal sont passés à la réalisation, Moebius a participé aux décors de nombreux films, notamment Tron, Alien et le Cinquième Élément), la musique pop (l'Affaire Louis Trio, Dennis Twist) mais aussi les arts plastiques, grâce à l'explosion de la figuration libre (Robert Combas, François Boisrond, les frères Di Rosa) à l'orée des années 1980. 4.5 Revues et bande dessinée d'auteur Claire Bretécher Dans la série des Frustrés, parus dans l'hebdomadaire le Nouvel Observateur à partir de 1973, l'auteur de bandes dessinées Claire Bretécher croque avec humour et causticité les travers d'une société française, notamment bourgeoise, pétrie de rigidités inavouées, d'hypocrisie et de contradictions : les espoirs nés du vent de liberté soufflé par les événements de 1968 se transforment en effet dans les années 1970 en désillusions, voire en aigreur de ne pouvoir assumer un mode de vie véritablement « libéré «. Les cinq volumes des Frustrés paraissent en albums entre 1974 et 1980. Claire Bretécher a également mis en scène les aventures de l'adolescente rebelle Agrippine entre 1988 et 2004.Claire Bretécher est ici photographiée en 1979 dans son atelier, à Paris. Li Erben/Kipa/Corbis Dans les années 1970, quatre revues importantes font leur apparition en France. L'Écho des Savanes voit le jour en 1972, à l'initiative de Claire Bretécher (les Frustrés), de Marcel Gotlib (Rubrique-à-Brac, Gai-Luron, les Dingodossiers avec Goscinny) et de Nikita Mandryka (le Concombre masqué), et affiche dès ses premiers numéros un humour volontairement provocateur. Dix ans plus tard, Liberatore (Ranxerox), Milo Manara (le Déclic), Martin Veyron (Bernard Lermite) ou Philippe Vuillemin (les Sales Blagues) contribuent au succès du journal, qui se partage désormais entre sujets de société et érotisme souvent racoleur. Frank Margerin Couronné au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 1992, Frank Margerin est l'un des auteurs phares de la bande dessinée humoristique française. S'il doit sa renommée au succès de son personnage fétiche Lucien, Margerin est à l'origine de nombreux autres personnages, notamment Manu, qui a fait l'objet d'un dessin animé diffusé à la télévision à partir de 1990 avant d'être adapté en bandes dessinées. AMET JEAN PIERRE/SYGMA/Corbis En 1974, Marcel Gotlib fonde la revue Fluide Glacial, où paraissent des séries à succès comme les Bidochon et Kador (Christian Binet), Carmen Cru (Jean-Marc Lelong) ou Superdupont (Lob et Gotlib) ; l'humour « glacé et sophistiqué « d'Edika (l'Affaire Clarky), celui de Tronchet (Raymond Calbuth) et de Goossens (Le romantisme est absolu) peuvent s'y exprimer en toute liberté. François Schuiten Grand Prix du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 2002, François Schuiten est l'un des plus grands auteurs contemporains.Avec son ami Benoît Peeters (scénariste et romancier), il crée en 1982 l'une des séries les plus originales du 9e art : les Cités obscures. Dans cette série, Schuiten (qui est issu d'une famille d'architectes) rend hommage aux grands architectes du début du xx e siècle et plonge le lecteur dans des mondes imaginaires où la science fait loi.Parallèlement à son travail de dessinateur et scénariste de BD, Schuiten s'est vu proposer le réaménagement des stations de métro Porte-de-Hal à Bruxelles et Arts-et-Métiers à Paris en 1993-1994. Le Segretain PASCAL/ SYGMA/Corbis Métal hurlant est lancé en 1975 par un quatuor composé de Jean Giraud, de Philippe Druillet, de Jean-Pierre Dionnet et de Bernard Farkas. Le journal se spécialise dès ses débuts dans le registre de la science-fiction. Tardi, Pétillon, Moebius ( les Aventures de John Difool, avec Jodorowsky), F'Murr (le Génie des alpages), Bilal et d'autres créateurs de renom y collaborent, mais le journal ouvre également ses pages à de jeunes créateurs, comme Jacques de Loustal (la Note bleue, les Frères Adamov) ou Frank Margerin (Radio Lucien). Florence Cestac Grand Prix du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 2000, Florence Cestac est notamment célèbre pour sa série les Déblok qui met en scène une joyeuse famille dont les aventures sont directement inspirées de la vie quotidienne (crise d'adolescence, rêves évanouis, etc.). Digne héritière du style « gros nez «, elle compte parmi les rares femmes auteurs de bandes dessinées. Philippe Lesage/ELIPSA/SYGMA/Corbis Enfin, le journal (À suivre) est créé en 1978 par les Éditions Casterman qui veulent se doter d'un secteur pour adultes. À son sommaire figurent des auteurs déjà consacrés comme Hugo Pratt (Corto Maltese), Jean-Claude Forest (le Roman de Renart) ou Jacques Tardi, ainsi que d'autres alors moins connus : François Schuiten (la série des Cités obscures et la Fièvre d'Urbicande, avec Benoît Peeters), Boucq (la Pédagogie du trottoir, Point de fuite pour les braves), François Bourgeon (les Passagers du vent, les Compagnons du crépuscule), Didier Comès (Silence), etc. Edika et Daniel Goossens Fidèles collaborateurs du magazine Fluide Glacial depuis la fin des années 1970, les dessinateurs-scénaristes français Édouard Karali, dit Edika (à gauche), et Daniel Goossens (à droite) partagent la même passion pour l'humour et en particulier pour l'absurde. Tous deux publient la majeure partie de leur oeuvre sous forme d'albums aux éditions Audie/Fluide Glacial. En 1997, Daniel Goossens a obtenu le Grand Prix de la ville d'Angoulême, lors de la 24e édition du Festival international de bande dessinée d'Angoulême. Jean Pierre Amet/Sygma/Corbis Cependant, ces périodiques, ainsi que leurs prédécesseurs, subissent une désaffection au cours des années 1980, et la plupart d'entre eux (à l'exception notable de Fluide Glacial) disparaissent entre 1988 et 1997. Certaines maisons d'édition (Futuropolis notamment, créée en 1974 par le graphiste Étienne Robial) cessent leurs activités, alors que des structures plus petites, comme L'Association, permettent à de nouveaux artistes (Jean-Christophe Menu, Lewis Trondheim, Killofer) de s'adresser à un public choisi et exigeant. Zep, créateur de Titeuf Couronné par le Grand Prix de la ville d'Angoulême en 2004, lors de la 31e édition du prestigieux festival international de bande dessinée, Philippe Chappuis, dit Zep, doit principalement sa renommée internationale au succès de sa série Titeuf. Créée en 1992, cette série aborde des thèmes aussi variés que la sexualité, l'amitié, l'autorité parentale, la mode, le chômage ou encore le sida, à travers la vie quotidienne d'un garçon de 8 ans, reconnaissable entre tous par sa longue mèche blonde rebelle. Alexandre Isard for Elle/Corbis Au milieu des années 1980, les mangas venus du Japon font leur apparition et se développent rapidement grâce à la prolifération de dessins animés nippons sur les chaînes de télévision. Aujourd'hui, en France tout du moins, la bande dessinée est surtout un phénomène d'édition. 5 L'AVENIR DE LA BANDE DESSINÉE Véritable phénomène de société, la bande dessinée s'est aujourd'hui totalement institutionnalisée. Désormais enseignée à l'université, elle fait l'objet de salons, de festivals -- notamment le Festival international de la bande dessinée d'Angoulême -- et de rencontres internationales multiples. Sur le modèle de l'OuLiPo, un Ouvroir de Bande dessinée Potentielle (OuBaPo) a vu le jour, à l'initiative de certains membres de l'Association. Séries célèbres de mangas Depuis les années 1990, les mangas connaissent un engouement exponentiel de la part du public français. Les éditeurs de bande dessinée, en particulier l'éditeur Glénat (pionnier de la publication de mangas en France), proposent des catalogues aussi riches et variés que les thèmes abordés par les mangas. Parmi les séries les plus connues, on peut citer Dragon Ball, Akira, Ranma ½, Dr Slump ou encore Gunnm. Bernard Annebicque/Sygma/Corbis Marché économique considérable, à cheval sur les secteurs de la presse et de l'édition, la bande dessinée s'est forgé, au cours du XXe siècle, une histoire, une légitimité et une vitalité qui lui assurent un avenir prometteur. En 2004, la production de bandes dessinées a augmenté pour la neuvième année consécutive, atteignant le chiffre record de 3 070 titres (dans l'espace francophone). Cette vitalité est également visible au niveau des tirages de certains titres : environ 2 millions d'exemplaires pour le onzième tome de la série Titeuf (Nadia se marie), 650 000 exemplaires de Lucky Luke (la Belle Province), 530 000 exemplaires de Largo Winch (le Prix de l'argent), 450 000 exemplaires de XIII (Opération Montécristo), 280 000 exemplaires de Thorgal (Kriss de Valnor), etc. Marjane Satrapi Née en Iran, Marjane Satrapi est formée aux arts décoratifs et fait ses premières armes de dessinatrice en France. Dans Persépolis, elle évoque son parcours personnel et livre parallèlement une vision subjective et sans concession de l'histoire contemporaine de son pays natal. Les quatre tomes du cycle paraissent entre 2000 et 2003, et connaissent un important succès public ; de même, l'adaptation cinématographique de Persépolis (2007) est célébrée par la critique (prix du Jury au festival de Cannes).Marjane Satrapi est ici photographiée aux côtés de Vincent Paronnaud (co-réalisateur et co-scénariste du film Persépolis) lors de la remise des prix du festival de Cannes en mai 2007. Reuters/Jean-Paul Pelissier /Landov Par ailleurs, alors que les super-héros américains (Superman, Batman, Spider-Man, etc.) et les héros franco-belges (Astérix, Blueberry, Michel Vaillant, etc.) de bande dessinée sont adaptés au cinéma les uns après les autres, certains cinéastes s'essaient au 9e art (pour le scénario), comme Robert Guédiguian (À l'attaque !, un Conte de l'estaque, 2004), Georges Lautner (Baraka, 2004), Claude Lelouch (Toute une vie, 2004) ou Jean-Jacques Beinex (l'Affaire du siècle, 2004). Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. 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