Article de presse: Sommet de Tokyo, du G5 au G7
Publié le 22/02/2012
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4-6 mai 1986 - Les sept principaux pays industrialisés, satisfaits des résultats de la politique concertée de baisse du dollar conduite depuis le 22 septembre 1985, ont décidé de renforcer leur coopération économique et monétaire. C'est là assurément, s'agissant de la partie économique des conversations, le point fort, et même le seul point fort, du sommet économique qui vient de s'achever à Tokyo.
Le principal objectif des Sept demeure la réduction de l'instabilité monétaire. Pour l'atteindre, ils viennent de se donner des moyens accrus.
Quel chemin parcouru depuis que, au sommet de Versailles, en 1982, les Français ont fait admettre du bout des lèvres à un partenaire américain ultra-sceptique la nécessité d'une action collective des pays industrialisés pour stabiliser les taux de change et ramener les taux d'intérêt à un niveau qui ne handicape plus la croissance de l'activité économique ! C'est dans le communiqué publié à Versailles que le groupe des Cinq s'est vu confier pour la première fois une fonction de surveillance du marché, et par là même un statut semi-officiel. Le G5 a accédé à la notoriété avec l'accord conclu en septembre 1985 à New-York à l'hôtel Plaza, accord qui consacrait le changement radical de l'attitude américaine et inaugurait une période d'intervention concertée sur les marchés, afin de faire baisser le dollar.
Examen continu
Le nouveau dispositif-dont il est évidemment impossible de prédire s'il se traduira dans la réalité par une concertation plus resserrée-a pour objet l'amélioration de la surveillance des économies occidentales. La principale innovation consiste en un examen continu de l'évolution de la conjoncture par rapport aux prévisions concernant un certain nombre d'indicateurs économiques : le taux de croissance du PNB, le taux d'inflation, le chômage, le déficit budgétaire, la balance commerciale et celle des paiements courants, la réduction de l'accroissement de la masse monétaire, les réserves de change. La surveillance multilatérale ainsi organisée devrait permettre de vérifier, d'une part, si les taux de change reflètent correctement la situation économique... des différents pays, d'autre part, si les différents indicateurs évoluent conformément aux prévisions.
Que se passera-t-il si des anomalies sont constatées ? Le dispositif se veut non contraignant et exempt de tout automatisme. Cependant, les Sept prévoient que des mesures de correction seront adoptées chaque fois que l'on constatera des écarts importants par rapport aux objectifs souhaités. On verra à l'épreuve l'usage qui en sera fait, mais on trouve là, au moins en théorie, l'amorce d'une discipline collective dans la conduite des politiques économiques occidentales.
Comment cette surveillance renforcée sera-t-elle assurée ? Un nouveau groupe de travail à sept, rassemblant les ministres des finances des pays participant au sommet et incluant donc l'Italie et le Canada, a été institué. L'idée est qu'il se réunisse deux fois par an, au printemps avant le sommet et à l'automne, par exemple en marge de l'assemblée du Fonds monétaire international, pour procéder à des consultations sur la situation économique et monétaire. Pour expliquer leur refus de voir la Commission participer à cette nouvelle instance, les Etats-Unis ont fait valoir qu'elle n'avait pas de compétences monétaires et surtout que, si elle y était présente, le rapport de forces dans le nouveau groupe deviendrait anormalement favorable aux Européens ( cinq contre trois au lieu de quatre contre trois).
Le groupe à sept complète le groupe à cinq, mais ne s'y substitue pas.
James Baker avait précisé que, dans son esprit, la création du G7 ne signifiait évidemment pas la disparition du G5, auquel tous les participants sont très attachés. Le G5 demeure chargé d'une " surveillance spéciale ". C'est à lui que reviendra la gestion du nouveau dispositif, qu'un haut fonctionnaire français définissait comme une amorce, certes encore très timide, d'un SME ( système monétaire européen) qui s'appliquerait à l'ensemble des pays industrialisés.
Il reste à voir si les orientations qui viennent d'être prises modifieront, et dans quels sens, le fonctionnement du " G5 ". Il a été entendu que les Italiens et les Canadiens seraient associés à ses travaux chaque fois que seraient examinées des décisions ayant trait à la gestion et à l'amélioration du système monétaire international.
Certains se demandent si un tel élargissement ne va pas nuire à la confidentialité indispensable des travaux de ce groupe et évoquent déjà comme une éventualité redoutable l'apparition, bien sûr informelle, d'un sous-groupe où, seuls, les Etats-Unis, le Japon et la RFA tireraient les ficelles...
PHILIPPE LEMAITRE
Le Monde du 7 mai 1986
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