Antonin Artaud: "théâtre de la cruauté" dans « Le Théâtre et son double »
Publié le 11/09/2006
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Dans un essai composé en 1933, Antonin Artaud, écrivain dramaturge inventeur du concept du "théâtre de la cruauté" dans « Le Théâtre et son double «, condamne par une phrase provocante «cette idolâtrie des chef-d’oeuvre fixés qui est un des aspects du conformisme bourgeois «. Dans cet essai, il dénonce le fait que les chef-d’' oeuvres considérés comme démodés représente un force rétrograde au développement et a la modernisation de l’art. Il dénonce le conformisme bourgeois issu de l’académisme et pose la question de la définition ambiguë du terme de chef d’oeuvre qui désigne par définition une oeuvre accomplie et représentative en son genre mais également la meilleure oeuvre d’un auteur. On peut alors se demander la définition d’un chef d’oeuvre que se conçoit le dramaturge. On analysera tout d’abord sa critique provocante contre l’académisme puis les raisons de sa volonté de la modernisation de l’art en illustrant son point de vue par des exemples littéraires théâtraux, notamment la pièce de théâtre Phèdre de Jean Racine parmi d’autres. Dans cet essai polémique, le théoricien critique l’établissement de règles issues de l’académisme agissant comme une autorité supérieure définissant le fait qu’une oeuvre puisse être considérée comme un chef-d’oeuvre et pas une autre. Par cela, il condamne le fait que les chefs d’oeuvre du passé subsistent uniquement car elles ont été attribuées le titre de chef-d’oeuvre et non pas par l’admission des lecteurs. Il dénonce l’idolâtrie des chefs d’oeuvres fixés. Sa condamnation du conformisme bourgeois se base sur l’idée que les chefs d’oeuvres reconnus comme tel appartiennent à une littérature d’élite et donc aboutit à la domination culturelle de la bourgeoisie sur le plan artistique et littéraire, ne laissant pas de subjectivité sur l’ambiguïté de la définition d’un chef d’oeuvre, désignant une oeuvre accomplie en son genre. Par cette vision trop traditionnelle de la littérature, Antonin Artaud considère les chefs d’oeuvres du passé comme démodés et freinent et empêchent la modernisation de l’art et la recherche de nouvelles formes plus appropriées à une époque. Les mouvements littéraires résultant indirectement de cet académisme constituent une limite au développement de la littérature, offrant une vision pas assez ouverte d’une oeuvre réussie. L’écrivain introduit une vision moderne de la littérature par son essai provocant. On peut comprendre son obstination pour une modernisation littéraire par le fait qu’un chef d’oeuvre se devrait de pouvoir rester tel peu importe l’époque et donc ne pas se démoder. Cependant, les textes des chefs-d’oeuvre du passé constituent une barrière du langage résultant en une perte de l’intérêt de lecteurs, notamment à cause de l’incompréhension. Le dialogue entre les personnages constitue le centre et l’élément essentiel de l’intrigue d’une pièce et du théâtre en lui-même. Or, les textes de pièces « démodés « appartenant à un registre de langue propre à une certaine époque cause l’incompréhension ou une mauvaise interprétation de l’intrigue de la part de certains lecteurs perdant le fil de l’action. Les émotions du personnage que se doit de susciter l’acteur par le discours et le gestuel ne sont pas assimilées par certains spectateurs du fait de la barrière du temps et du langage. Dans l’exemple de l’oeuvre théâtrale Phèdre de Jean Racine ou Le Cid de Pierre Corneille, de nombreuses tirades des personnages ayant pour but de susciter des émotions fortes auprés des spectateurs tel que la pitié et la crainte constituent des éléments essentiels à la compréhension de l’histoire même. On peut également prendre l’exemple de l’oeuvre comique et de Molière « Le Bourgeois Gentilhomme « constituant également une critique de la société peut perdre de son sens auprès de certains spectateurs ou lecteurs n’étant pas familiers avec le type d’humour et la situation politique et sociale de l’époque. L’intérêt du théâtre résidant dans le lien existant entre le public et l’acteur, ou entre le lecteur et l’auteur n’existe point dans le cas de l’incompréhension de la pièce. Le spectateur ne se reconnaît pas dans les personnages et la situation et peut donc considérer un chef-d’oeuvre du passé comme ennuyeux et inintéressant. Le lecteur ne perçoit donc pas le potentiel complet de la pièce. Cette vision d’une littérature modernisée de la part d’Antonin Artaud se retrouve aujourd’hui dans les réadaptation de certaines oeuvres littéraires et notamment théâtrales en modernisant le texte et les discours des personnages ou en réadaptant la situation à la société moderne. La base de l’histoire même d’une pièce étant compréhensible par toutes les générations, la façon de faire comprendre l’histoire par le spectateur et donc le texte et les dialogues constitue le seul obstacle à la compréhension du public d’aujourd’hui, et éventuellement à un public futur. Antonin Artaud notamment prônait lui-même un théâtre sans texte, inspirée par le théâtre oriental, ce qui permettrait à l’oeuvre de transcender les variations historiques du goût. Cela illustre bien la citation de l’auteur Ernest Hemingway « Un chef-d'oeuvre est un livre dont tout le monde parle et que personne ne lit. «. Il part du principe que la notion de chef d’oeuvre doit être associée à la notion d’universalité. Un chef d’oeuvre devrait être une oeuvre universelle, pouvant être comprise peu importe les générations et n’exigeant pas de connaissances particulièrement profonde sur une situation historique précise. Des metteurs en scène de nos jours tentent donc de renouveler notre vision des oeuvres du passé, soit en modifiant le texte ou bien en changeant le lieu et l’époque durant laquelle se déroule l’histoire. Certains auteurs comme Nathalie Sarraute ou Olivier Py proposent de nouvelles formes d’écriture théâtrales. On peut donc dire que les chefs d’oeuvre du passé demeure des chefs d’oeuvre dans le fond mais pas dans la forme. Par conséquent, on peut dire que l’écrivain apporte une vision perfectionnée de la notion de chef d’oeuvre. Il condamne et rejette l’académisme qui en établissant des règles compose une force rétrograde et empêcherait le développement de l’art. L’auteur pense qu’un chef d’oeuvre est une oeuvre qui transcender la barrière du temps en gardant le même impact au yeux du public peu importe l’époque.
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