Analyse Denis de Rougemont, Mission de la Suisse dans l'idée européenne
Publié le 12/01/2011
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Mission de la Suisse dans l’idée européenne, par D. de Rougemont (1964)
Il s’agit d’extraits d’une étude réalisée par Denis de Rougemont, en 1964, à Berne. (L’idée européenne en Suisse, dans l’Annuaire de la Nouvelle Société Helvétique, pp. 185-187). C’est donc après la participation de la Suisse à la création de l’AELE, qui avait pour but d’éliminer les discriminations douanières et commerciales de la CEE, que D. de Rougemont (Ecrivain suisse engagé en faveur de la construction européenne) exprime ses idées et ses constatations au peuple suisse. À ce moment là, c’est ~20 ans après la Second Guerre Mondiale, l’Europe est en pleine reconstruction. La Suisse ne fait donc pas partie de l’Union Européenne (comme aujourd’hui) et ne veut pas s’y lier, car elle veut garder sa neutralité, son « facteur culturel », son fédéralisme en l’occurrence, ses valeurs pour ainsi dire. Nous verrons ceci plus en détail par la suite. (« Ne veut pas s’y lier » est un peut fort, mais dans ce cas, les valeurs suisses importent plus que l’Europe dans la majorité suisse). Mais la Suisse doit avoir des liens avec l’Europe. Par exemple le commerce, etc. Ainsi qu’une idée commune à toutes les utopies : une Europe sans guerres. Alors que doit-elle faire !? Comment la Suisse pourrait-elle adhérer à une Europe, sans perdre son fédéralisme ? Où en est la Suisse par rapport à l’Europe, alors que l’Europe commence à devenir une identité mais prenant une autre route que celle de la Suisse ? Est-il possible d’avoir une Europe de type fédéraliste ?
Nous pouvons diviser ces extraits en cinq parties. D. de Rougemont aborde en premiers lieux son utopie, et rejette les idées majoritaires du moment (l. 1-7). Puis en deuxième partie (l. 8-17) il parle des problèmes que pourrait poser la Suisse si elle veut séparer son salut de celui de l’ensemble de l’Europe, ainsi que de ce que pourrait apporter la Suisse. Ensuite (l. 18-29) il explique le moyen d’avoir une Europe qui convienne à la Suisse et au reste de l’ensemble également (et discute également de la neutralité). Puis (l. 30-34) il explique « le pourquoi » de l’adhération de la Suisse à l’Europe du côté des intérêts européens. Enfin (l. 35-36) il conclut avec une citation exprimant l’importance de la Suisse.
La première partie expose donc l’idée d’avoir une Europe fédéraliste. Denis ne veut pas, ne pas adhérer à l’Europe simplement car la Suisse doit rester neutre. Ni renoncer à la neutralité. La neutralité est une valeur Suisse et elle ne doit pas être écartée, ce n’est pas simplement un principe. Ces valeurs sont ce qui fait de la Suisse, la Suisse. Mais cette neutralité ne doit pas empêcher la Suisse d’être dans la communauté européenne. Le fédéralisme serait la solution : Cette idée de subsidiarité, qui fait également la Suisse être la Suisse. Nous verrons plus précisément ce principe de fédéralisme par la suite. En première partie il parle également d’un but commun à toutes les autres utopies : d’avoir une Europe sans guerre, qui est le but donc des organisations entre nations : La Paix ! Mais donc pour ce faire, il faut que la Suisse soit européenne. L’idée d’Europe fédéraliste ne leur sera jamais offerte dit-il. Car l’Europe est déjà en train de se « profiler », et ne va pas changer le chemin qu’elle a empreinté. Il en conclut donc qu’il faut l’exiger. En deuxième partie arrivent les problèmes de cette idée : La Suisse veut une Europe fédéraliste mais ça, c’est ce que veut la Suisse. Et l’Europe est un ensemble et il est irréaliste de croire que toute une Europe irait changer pour la Suisse. Car changer toute une Europe déjà profilée serait en faite dire que tout le travail accomplit n’a servit a rien, comme toutes les anciennes organisations qui n’ont pas marché. Et la nouvelle union Européenne ne veut pas que celle-ci échoue bien entendu. Il explique ensuite que la Suisse ne doit pas simplement penser à ce qu’elle doit garder d’elle si elle rentre de l’Union Européenne mais surtout à ce qu’elle pourrait apporter à un ensemble Européen. Le but ne doit pas être d’attendre des avantages en entrant dans l’union européenne mais d’apporter des « bénéfices » à l’Europe. En troisième partie Denis de Rougemont affirme que même si dans son utopie une Europe fédéraliste serait l’Europe parfaite pour la Suisse, la Suisse ne doit pas l’opposer aux autres idées mais la proposer ! Il ne faut pas défendre sa position, mais, à partir d’une idée et en accord avec les autres, en créer une nouvelle qui ferait avancer les choses. Une idée qui conviendrait à tout le monde. Il dit également : « pourquoi parler toujours de neutralité, vertu qui ennuie et pratique négative, quand nous avons à proposer une expérience passionnante, remarquablement positive et tellement opportune à l’échelle mondiale ». Et bien pourquoi pas !? Pourquoi ne pas suivre une idée d’une Europe fédéraliste et oublier cette idée de neutralité qui gêne ? Le fédéralisme : L’individu, puis la famille, puis la municipalité, puis l’Etat, puis le gouvernement fédéral. C’est le principe fondamental du fédéralisme qui fait que la Suisse soit si particulière : L’absence de volonté de dominer les autres (pas d’hégémonie), la sauvegarde des minorités, la tolérance. Une Europe fédéraliste serait donc la solution mais D. de Rougemont le dit et en est conscient : « L’histoire n’est pas faite par des gens qui défendent leur position, mais bien par ceux qui créent des positions nouvelles » comme dit déjà précédemment. Donc la solution serait une Europe semi-fédéraliste. Une idée fédéraliste mais qui serait modifiée, discutée, afin d’obtenir une idée convenable pour tous. Et en quatrième partie, il exprime qu’avec la grande évolution vers des marchés de plus en plus grands et vers de plus en plus grandes unions, il y aura beaucoup plus d’échanges par exemple et il faut donc absolument que la Suisse commence à construire quelque chose ! Cela fait trop longtemps que la Suisse est neutre et seule. Et il dit également que la Suisse à des choses à apporter à l’Europe. Le facteur culturel, l’identité culturelle est très importante. Nous pouvons même l’exprimée en physique : E = mc2 (E = Energie d’un projet, force / m = masse (Europe) / et le c = facteur culturel). Cette petite anecdote exprime simplement l’importance de la culture dans un projet dans une union entre nations, exprime le fait que chaque nation a quelque chose à apporter à une union. Et cela rejoint donc l’idée fédéraliste. Pour finir Rougemont dit : « Je veux croire avec Victor Hugo » et cite l’une de ses citations : « La Suisse dans l’histoire aura le dernier mot ». Exprimant ainsi l’importance de la Suisse, de ses idées, de sa culture. Mais à condition qu’elle l’exprime, qu’elle le montre, le fasse savoir dit-il. Expliquant au peuple suisse le chemin qu’il faut suivre.
En conclusion, on peut dire pour répondre à notre problématique que cette étude montre les complications pour créer une organisation européenne qui fonctionne, qui règle les échanges entre les pays avec une culture partagée et tolérée et donc une Europe unie, sans guerres et avec la Suisse dans celle-ci. La Suisse a des choses à apporter, son fédéralisme doit être pris en compte même s’il ne l’est pas complètement. Mais du moins une partie de l’idée fédéraliste dans un Europe ne serait que bénéfique pour l’Europe et conviendrait bien-entendu à la Suisse. Donc avoir une Europe semi-fédéraliste serait sûrement la réponse, et la Suisse devrait laisser de la place à l’Europe en mettant sa neutralité ne serait-ce que légèrement de côté. On remarquera quand même qu’aujourd’hui, en 2010, la Suisse ne fait toujours pas partie de l’Union Européenne et continue de réfléchir à la solution de l’adhération à l’Europe. Mais cette solution parait encore lointaine car cette idée de fédéralisme européen (avec la neutralité) reste au cœur de la difficulté à entrer dans l’Union Européenne. Où en est donc la Suisse aujourd’hui par rapport à l’Union Européenne? Elle est en train d’essayer d’y entrer sans perdre son salut, son patriotisme, sas valeurs, son fédéralisme. Ce qui est compliqué.
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