ACTE II Scène 2 DOM JUAN
Publié le 01/01/2011
Extrait du document
Dom Juan est une des pièces les plus appréciées du public. Écrite en 1665, d’après une œuvre de Tirso de Molina, c’est une pièce qui est envoûtante et qui, aujourd’hui est devenue un véritable mythe. Cette pièce décrit un personnage infidèle, séducteur, libertin et blasphémateur : Dom Juan. Jeune noble vivant en Sicile, accompagné de son fidèle valet Sganarelle, il accumule les liaisons amoureuses, séduisant les jeunes filles nobles et les servantes avec le même succès. Seule la conquête l'intéresse et les jeunes femmes, aussitôt séduite, sont abandonnées, même après un mariage. La scène soumise à notre étude est la deuxième de l’acte II. Ici, Dom Juan nous montre ses techniques de séducteur face à la pauvre et naïve paysanne Charlotte. Il entreprend un véritable éloge pour tenter de s’emparer de son cœur. Il serait intéressant de voir Comment sur la base d’arguments spécieux, Don Juan met-il en lumière son entreprise de séduction avec Charlotte .
Dans un premier temps nous verrons les caractéristiques du discours du libertin faussaire puis nous axerons nos réflexions sur les proies de son entreprise de manipulation.
I- Le discours d’un faussaire
A) Un simulacre de consultation
Sous ses airs d’incorrigible séducteur , Don Juan reflète aussi une certaine maladresse dans sa pratique pour séduire les femmes . Afin de flatter la paysanne de ses atouts physiques , Don Juan tend à examiner cette dernière de manière fort bouffonne . En effet , la référence à des « dents […] amoureuses « tranche avec le lexique des parties du corps féminin valorisées . L’usage de l’impératif à répétition telle que « haussez « « ouvrez « « tournez vous « ainsi que la répétition de l’interjection « ah « démontre que Don Juan s’adonne à une véritable consultation de la paysanne , facilement assimilable à l’examen de santé d’un cheval . De plus Don Juan inspecte les mains salies de la paysanne qu’il trouve paradoxalement « les plus belles du monde « . L’inspection du libertin est source de comique dans la mesure où elle est impropre à toute stratégie de séduction . Ce personnage bien qu’incontestablement hautain prouve sa maladresse dans son entreprise amoureuse .
B) Un éloge hypocrite
En grand séducteur , Don Juan met toute son éloquence au service d’un discours excessivement élogieux de Charlotte . En effet , dès le début de l’extrait , la paysanne est intensément flattée par de nombreux adjectifs qualificatifs mélioratifs tels que « belle « ( L177) « jolie « mignon « « beau « . Ces qualificatifs d’ordre physique mettent en évidence le caractère superficiel du libertin . De plus , les superlatifs « les plus belles du mondes (L202 ) associés à l’anaphore de l’adverbe « que « (L182 ) traduisent le caractère mensonger de l’éloge faite de Charlotte . En outre , Don Juan s’adonne à la justification de sa présence auprès de cette dernière « pour empêcher ce mariage « . Le libertin parvient , tout en s’auto idéalisant et en valorisant la paysanne , à s’en rapprocher , cependant cet éloge semble parfaitement encré dans le dessin stratégique de séducteur qui collectionne les conquêtes , véritable propriétaire de la gente féminine .
C) L’égocentrisme d’un personnage gentilhomme
Dans le cadre de sa tentative de séduction , Don Juan se présente à Charlotte comme un homme incarnant la perfection induite de son rang . En effet , Don Juan s’oppose indéniablement au mariage de Charlotte avec Piarrot en invoquant quelques justifications vaniteuses . On relève un champ lexical de la vaillance et de l’héroïsme tel que « mérite « empêcher « justice « . De ce fait , le libertin remet en cause toute une classe sociale pas la suffisance de ses propos . Selon l’esthète , une femme de beauté est l’apanage de la noblesse . Don Juan , gardien des cœurs , emploie un futur simple ainsi qu’un conditionnel à valeur d’hypothèse (L118) afin d’établir des projections dans l’avenir avec Charlotte . Sa vanité le contraint donc à « arracher de ce misérable lieu « l’honnête et naïve paysanne en lui faisant miroiter le rêve d’une promotion sociale .
II-Les proies de la stratégie de séduction humoristique
A) La rencontre entre deux classes sociales antagonistes
Le discours de Don Juan est articulé par de nombreuses exclamation comme le prouve (L180) l’apposition de phrases courte traduisant l’exaltation du personnage . Une tonalité vive et entrainante est donnée à la rencontre de ces deux personnages . De plus , on note un emploi récurrent du vouvoiement ( L 180 ) « n’ayez « ouvrez « vous « Cependant , on constate une hiérarchie sociale entre les deux personnages . En effet , La particule « Don « Juan fait du personnage un noble alors que le personnage féminin est seulement appelée par son prénom « Charlotte « . De plus , cette dernière emploie des interjections typiques à son rang de paysanne comme « Fi « ( L 200) . On relève une répétition du nom commun « Monsieur « en début de réplique de la paysanne afin de nommer Don Juan . En outre , le libertin fait référence à certaines connaissances digne de son rang telles que « la justice « (L216) « la fortune « ( L214 ) et un argument d’autorité « Dieu « (L190 ) L’intérêt obnubilé de Don Juan pour une femme de rang inférieur est source de ridicule puisque ceci est contraire aux mœurs du XVIème siècle , où l’homogénéité sociale était primordiale
B) Charlotte , une paysanne naïve et malléable
D’un rang social largement inférieur , Charlotte témoigne un profond respect pour Dom Juan. Lorsque le héros lui demande « vous n’êtes pas mariée, sans doute ? «, elle répond avec une sorte de naïveté « mais je dois bientôt l’être avec Piarrot, le fils de la voisine Simonette «. Le « mais «, articulateur logique d’opposition montre qu’elle résiste un minimum, se méfiant peut être du noble, tout en restant accessible. En outre , la paysanne démontre une servitude à l’égard du héros.
« ...les laver avec du son «, le son étant le déchet de la mouture du blé, cette pratique paysanne n’est sans doute pas utilisé par le libertin, et sans doute Molière accentue t-il la naïveté de la femme.
Paysanne, Charlotte apparait ainsi comme une femme faible, naïve, peu instruite et facilement malléable qui malgré une hésitation (L188) « c’est pour vous railler de moi « tombe malencontreusement dans le piège séducteur de Dom Juan .
C) Sganarelle comme témoin malgré lui
Sganarelle assiste à la scène de séduction sans intervenir . Il est véritablement spectateur de la mise en scène comme le prouvent les interpellations de Don Juan restées sans réponse ( L181) « Sganarelle qu’en dis tu « (L199) « Sganarelle , regarde un peu ses mains ! « Conscient de la fausseté et de l’entreprise manipulatrice de son maitre , Sganarelle opte pour une passivité qui éveille le soupçon du spectateur. Ainsi , ce dernier assiste bien à l’échec de la complicité du maitre et du valet qui semblent défendre une conception bien différente de l’amour.
Cette scène est une caricature bouffonne de la séduction. Elle a un rôle exemplaire en nous montrant, une fois pour toutes, le séducteur à l’œuvre. Don Juan met en pratique les principes qu’il a exposés à
l’ Acte I scène 2 en abusant avec cruauté d’une âme faible, mais il sait mettre certains rieurs de son côté. Le lecteur a ici le sentiment que la femme est un objet évalué par un collectionneur qui se réfère de temps à autre à « Sganarelle « ! Mais très vite l’on se rend compte que cette scène est paradoxale : en effet, elle tourne souvent vers le registre comique et s’inscrit véritablement dans la comédie du XVIIème siècle.
«
(*) Référence aux règles de bienséance, etc.…
Mais Zola ne renie pas la tragédie classique, il prétend simplement qu'elle correspondait aux besoins et a la réalitéd'une autre époque.
Il propose d'en conserver la structure au besoin mais d'en transformer et la forme et les enjeux.
« Le cadre tragique ainsi entendu est excellent : un fait se déroulant dans sa réalité et soulevant chez lespersonnages des passions et des sentiments, dont l'analyse exacte serait le seul intérêt de la pièce.
Et cela dans lemilieu contemporain, avec le peuple qui nous entoure ».
« Qu'on ne nie pas cette poésie vraie de l'humanité ; elle a été dégagée dans le roman, elle peut l'être au théâtre ;il n'y a là qu'une adaptation à trouver ».
« Prenez donc le milieu contemporain, et tâchez d'y faire vivre des hommes : vous écrirez de belles œuvres ».
Malheureusement, les quelques pièces écrites pour le théâtre ou les adaptations de ses romans par soncollaborateur William Busnach ne connaitrons pas le succès espéré, les représentations seront même sifflées ethuées.
Sans doutes que le public n'est pas encore prêt à un changement si brutal mais il semblerait que les piètresadaptations de Busnach soient pour partie responsable de ces insuccès.
En 1887, André Antoine (1858-1943) fonde à Paris le Théâtre-Libre.
Sous l'influence et avec le soutien de Zola, ilinvente un art nouveau où la " partie matérielle " de la représentation (l'ancienne " régie ") se combine avec la "partie immatérielle ", c'est-à-dire l'interprétation du texte.
Antoine ouvre ainsi l'ère de la mise en scène moderne.
Le projet, presque politique de Zola, sera donc de libérer le théâtre dans le but d'en faire un laboratoired'observation de la société pour en connaître les mécanismes et ainsi l'influencer pour la conduire vers le progrès.Mais c'est Antoine qui portera les idées du « Maître » sur la scène*
*Le décor deviendras ce qu'étaient les descriptions au roman, on jouera de dos s'il le faut, etc.,…
P.S.
: On a réfuté a Zola que lui-même était en contradiction avec ses prescrits de rigueurs, puisqu'il s'arrangeaitavec « la réalité » observée pour répondre aux besoins du roman et de sa « beauté littéraire »..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Lecture linéaire : Molière, Dom Juan acte III, scène 1
- Molière Acte 5 Scène 4,5,6 Dom Juan
- Scène 4 de l'acte II de « Dom juan »
- Commentaire Littéraire: tirade de la scène 2 de l’acte V, Dom Juan
- Dom Juan de Molière: Acte 1 scène 2 (commentaire)