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Acquérir de la culture nous aide-t-il à nous débarrasser de nos préjugés ?

Publié le 05/12/2010

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culture

Les préjugés sont, par définition, des idées reçues et irréfléchies. Ils trouvent leurs origines dans notre enfance, où nous avons accepté un certain nombre de pensées que nous tenions pour vraies mais qui n’ont jamais été réellement vérifiées, qui n’ont pas été soumises à examen. En d’autres termes il s’agit de juger sans savoir, de ne pas réellement penser. La culture, quant à elle, regroupe, au sens général, tout ce qui n’est pas naturel pour l’Homme, tout ce qui est acquis par l’éducation donc par le savoir. A priori, la culture mettrait fin aux préjugés puisqu’elle nous permet de penser et de réfléchir. Cependant on peut émettre une objection à cette hypothèse, puisqu’il existe différentes formes de culture ; la culture commune à un groupe de personnes, mais aussi la culture « personnelle « que nous accumulons au cours de notre vie. Dans quelles mesures la culture nous permet-elle alors de nous dégager de nos préjugés ? Nous étudierons donc successivement chaque forme de culture pour déterminer son impact sur les êtres humains et leurs préjugés.    La culture dite « commune « peut se définir par l’ensemble des caractéristiques propres à un groupe humain. Il s’agit donc des mœurs, des traditions, du langage, de la manière de vivre et de se comporter d’une société donnée. Tous ces principes nous sont inculqués dès notre petite enfance. Nous vivons dans notre culture, nous y sommes habitués. En ce sens, la culture ne nous aide pas du tout à nous défaire de nos préjugés, puisque nous sommes soumis à l’ethnocentrisme. Cette théorie a été déterminée par Levis Strauss au début du XXe siècle. Les hommes de toutes les cultures sont plus ou moins ethnocentristes ; ils jugent les autres cultures par rapport à la leur, sans prendre le moindre recul et sans essayer de comprendre d’autres civilisations. Montaigne, au XVIe siècle, avait déjà dénoncé les préjugés que les européens avaient sur les Amérindiens. Ils les jugeaient barbares et sauvages, notamment pour leur anthropophagie. Cependant, Montaigne, en étudiant cette civilisation sans arrière-pensées, a démontré que cet acte cannibale était pour eux un véritable rituel. Il ne s’agissait pas de se nourrir, mais de se venger de leurs ennemis. Ils utilisaient des armes nobles, avaient une attitude acharnée et extrême au combat, et n’éprouvaient aucun sentiment de peur pour capturer leurs ennemis. Et même une fois capturés, ils respectaient leurs prisonniers jusqu’à leurs morts. Les européens qualifiaient ces actes de barbarie, alors qu’eux même étaient beaucoup plus cruels avec leurs propres voisins durant les guerres de religion. Ils se déchiraient au sein d’un même collectif, tuaient des femmes, des enfants. Ces effusions de sang étaient donc bien moins nobles et bien plus sauvages que le cannibalisme des Indiens. L’ethnocentrisme des européens les a donc empêchés de voir leurs erreurs, leurs contradictions, et de se rendre compte de leur propre barbarie. Cela peut facilement se retrouver au quotidien, et même à une époque évoluée comme la notre. Chaque état, chaque religion, chaque croyance est persuadée qu’elle est meilleure qu’une autre. Et cela se traduit le plus souvent par des conflits armés comme le conflit israélo-palestinien qui fait de plus en plus de morts chaque jour.  Notre culture commune nous apporte donc bon nombre de préjugés, et il est particulièrement difficile de se détacher de ses habitudes culturelles. Cependant, comme Levi Strauss et Montaigne l’ont fait avant nous, il est possible de prendre des distances vis-à-vis de cette culture commune, et de s’intéresser aux autres cultures sans préjugés méprisants. Il s’agit de ce que l’on appelle le relativisme culturel, c'est-à-dire le fait de considérer l’ethnocentrisme comme une illusion. Nous pouvons donc réfléchir par nous même, remettre en question notre propre culture et ne pas se fier aux préjugés. Or, un esprit critique est le plus souvent acquis grâce à une culture personnelle, un enseignement acquis au cours du temps. On peut alors se demander si une culture personnelle met définitivement fin aux préjugés, et c’est ce que nous étudierons dans notre deuxième partie.    La culture personnelle est l’ensemble des connaissances qu’un individu accumule au cours de sa vie. Elle englobe l’enseignement, les lectures, les voyages, les rencontres avec les autres. Au premier abord, on pourrait penser que cette forme de culture pourrait mettre un terme à toutes formes de préjugés. L’enseignement moderne, par exemple, est composé d’histoire, de géographie, d’éducation civique et de philosophie, de sorte que chacun puisse être plus tolérant. La philosophie nous permet par exemple, de mieux réfléchir, de juger en essayant d’aller au-delà des idées reçues. L’histoire et la géographie nous permettent de connaître les origines de certaines cultures, de certains peuples, de savoir les guerres qu’ils ont menés, les différent partis politiques qui les ont gouvernés. C’est en effet en ayant une plus grande connaissance des autres que l’on acquière une meilleure ouverture d’esprit. En ce sens, les voyages peuvent également se révéler très instructifs. Les humanistes faisaient déjà leur éloge au XVIe siècle, tant ils permettaient de remarquable progrès en matière de raison et d’objectivité. A la rencontre d’une civilisation, on apprend encore bien plus que dans les livres d’histoire. On peut aller bien au-delà des artifices, et apprécier la culture en elle-même. On peut voir que ces peuples lointains sont constitués d’hommes. Ils sont semblables à nous par leur qualité d’homme : ils naissent, vivent, se nourrissent, se reproduisent, meurent. Et pourtant ils sont différents par leur histoire, leur culture, leurs rites et leurs traditions. Ils nous permettent donc de relativiser ce qui pour nous est une évidence, de prendre du recul par rapport à nos valeurs, aux conventions que nous considérons comme naturelles et nécessaires. De même le fait de cultiver un réseau social, d’avoir des amis, des proches ayant différentes opinions, différentes origines et différentes façons de penser, peut réduire considérablement les préjugés de notre époque. Il faut s’intéresser aux autres, ne pas forcément comparer différentes façons de faire, mais simplement observer et apprécier cet échange de culture. Par cela, on pourrait dire que la culture aide à abolir les préjugés.  Cependant, l’histoire nous a montré que cette affirmation peut parfois s’avérer totalement fausse. En France, chaque personne a une culture commune et une culture personnelle plus ou moins importante. Néanmoins, de nombreuses personnes, issues de toutes sortes de classes sociales, diffusent des propos racistes. De même, les guerres de religion déjà évoquées précédemment, ont été menées par le clergé, constitué des membres de la société ayant le plus grand accès à l’éducation. Ils s’avaient lire, écrire, penser, mais ce sont laissés influencés par des idées reçues, conduisant ainsi une véritable tuerie. Hitler est également un exemple caractéristique. Cet homme très instruit, ayant pour projet d’intégrer l’école des beaux arts, a mené le plus grand génocide au monde, à partir d’un énorme préjugé. Il pensait qu’il était nécessaire d’éliminer les handicapés, les juifs, les homosexuels, les tsiganes, parce qu’ils étaient, selon lui, inutiles à la société. Il semblerait donc que malgré une culture personnelle très importante, il dépend à chacun de se laisser influencer pas tel ou tel préjugé. Parfois, un grand nombre de connaissances ne suffisent pas à aller outre les idées reçues de certains membres de la société. On pourrait même penser que cela dépend du type de connaissance, car il y a des procédures d’examen, qui, tout en produisant un savoir, faussent la vérité de ce qui est étudié. Ainsi, les études de nombreux anthropologues sur les Indiens ont confirmé les préjugés colonialistes.    Depuis notre enfance, nous baignons dans une civilisation qui nous est propre, avec son histoire, ses principes, ses mœurs, ses traditions ; sa culture commune à un groupe d’individu. Et dès que nous perdons nos repères, nous avons tendance à qualifier tout ce que nous ne comprenons et tout ce que nous ne connaissons pas de barbare ou sauvage. Levi Strauss a dit que « le barbare est celui qui croit à la barbarie des autres «. Est-ce donc par la connaissance que l’on peut abolir les préjugés ? Nous avons vu qu’il est très complexe de répondre clairement à cette question. Notre culture commune nous enferme dans un moule, et nous plonge dans des réflexions ethnocentristes empreintes d’idées reçues. Mais une culture personnelle peut nous permettre de prendre du recul vis-à-vis de certains préjugés. Les voyages, les rencontres, le contact avec les autres nous donne plus de sympathie, plus de décentrement par rapport à ce que l’on connait. Néanmoins certaines formes de connaissances peuvent également faire circuler bon nombre de préjugés. Ainsi il revient à chaque être humain de faire la part des choses, et de juger convenablement, en tachant d’être le plus neutre possible, peu importe là d’où l’on vient.

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