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absolu, et la dame, repoussée et abandonnée de tous, s'écrie avec Hécube : Modo maxima rerum, Tot generis natisque potens,.

Publié le 22/10/2012

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absolu, et la dame, repoussée et abandonnée de tous, s'écrie avec Hécube : Modo maxima rerum, Tot generis natisque potens,... Nunc trahor exul, inops. (Ovide, Métam.) Sa domination fut d'abord despotique, sous le règne des dogmatiques. Mais, comme ses lois portaient encore les traces de l'ancienne barbarie, des guerres intestines la firent tomber peu à peu en pleine anarchie, et les sceptiques, espèces de nomades qui ont en horreur tout établissement fixe sur le sol 1, rompaient de temps en temps le lien social. Mais, comme par bonheur ils étaient peu nombreux, ils ne pouvaient empêcher les dogmatiques de chercher à reconstruire à nouveau l'édifice, sans avoir d'ailleurs de plan sur lequel ils fussent d'accord entre eux. A une époque plus récente, une certaine physiologie de l'entendement humain (doctrine de l'illustre Locke) sembla un instant devoir mettre un terme à toutes ces querelles et prononcer définitivement sur la légitimité de toutes ces prétentions. Mais, quoique cette prétendue reine eût une naissance vulgaire, étant sortie de l'expérience commune, et que cette extraction dût rendre ses exigences justement suspectes, il arriva cependant, grâce à cette généalogie, fausse en réalité, qu'on lui avait fabriquée, qu'elle continua à affirmer ses prétentions. Tout retomba ainsi dans le vieux dogmatisme vermoulu 2, et, par suite, dans le mépris auquel on avait voulu soustraire la science. Aujourd'hui que toutes les voies (à ce que l'on croit) ont été tentées en vain, il règne dans les sciences le dégoût et un parfait indifférentisme : doctrine mère du chaos et de la nuit, mais dans laquelle est aussi le principe, ou du moins le prélude d'une transformation prochaine et d'une rénovation de ces sciences où un zèle mal entendu avait mis l'obscurité, la confusion, la stérilité. Il est bien vain, en effet, de vouloir affecter de l'indifférence pour des recherches dont l'objet ne saurait être indifférent à la I. Par tempérament, Kant s'oppose au scepticisme. 2. Dogmatique de tempérament, Kant a compris, en partie grâce â Hume (cf. texte 1), que le rationalisme dogmatique doit être repensé. Sa philosophie sera un rationalisme critique. nature humaine. Aussi ces prétendus indifférentistes, quelque soin qu'ils prennent de se rendre méconnaissables en substituant un langage populaire à celui de l'école, ne manquent-ils pas, dès qu'ils pensent un peu, de retomber dans ces mêmes assertions métaphysiques pour lesquelles ils affichaient tant de mépris. Cependant, cette indifférence qui s'élève au sein de toutes les sciences, au moment même de leur épanouissement, et qui atteint justement celles dont la connaissance aurait le plus de prix à nos yeux, si nous pouvions la posséder, cette indifférence est digne d'attentions et de réflexions. Elle n'est pas évidemment l'effet de la légèreté, mais bien de la maturité de jugement (I) d'un siècle qui n'entend plus se laisser amuser par une apparence de savoir; elle est une mise en demeure adressée à la raison de reprendre à nouveau la plus difficile de toutes ses tâches, celle de la connaissance de soi-même, et d'instituer un tribunal qui, en assurant ses légitimes prétentions, repousse aussi toutes celles de ses exigences qui sont sans fondement, non par une décision arbitraire, mais au nom de ses lois éternelles et immuables 1. Ce tribunal, c'est la Critique de la raison pure elle-même. Je n'entends point par là une critique des livres et des systèmes, mais celle du pouvoir de la raison en général, considérée par rapport à toutes les connaissances auxquelles elle peut s'élever indépendamment de toute expérience; par conséquent la solution de la question de la possibilité ou de l'impossibilité d'une métaphysique en général, et la détermination de ses sources, de son étendue et de ses limites, tout cela suivant des principes. Cette voie, la seule qui ait été laissée de côté, est justement celle où je suis entré, et je me flatte d'y avoir trouvé la réfutation de toutes les erreurs qui avaient jusqu'ici divisé la raison avec elle-même dès qu'elle sort de l'expérience. Je n'ai point éludé ses questions en m'excusant sur l'impuissance de la raison humaine; je les ai au contraire parfaitement spécifiées d'après certains principes, et, après avoir découvert le point précis du malentendu de la raison avec elle-même, je les ai résolues à son entière satisfaction. A la vérité, cette solution n'est pas telle que pouvait le souhaiter l'extravagante curiosité des dogmatiques : car cette curiosité ne saurait être satisfaite qu'au moyen d'un art magique auquel je n'entends rien. Aussi bien n'est-ce pas à cela 1. La raison, ici, est à la fois juge et partie. D'où la difficulté de la tâche. que tend la destination naturelle de la raison; et le devoir de la philosophie était de dissiper l'illusion résultant du malentendu dont je viens de parler, dût-elle anéantir du même coup les plus accréditées et les plus aimées des chimères. NOTE DE KANT (1) On entend çà et là se plaindre de la pauvreté de la pensée dans notre siècle et de la dédacence de toute science solide. Mais je ne vois pas que les sciences dont les fondements sont bien établis, comme les mathématiques, la physique, etc., méritent le moins du monde ce reproche; il me semble, au contraire, qu'elles soutiennent fort bien leur vieille réputation de solidité, et qu'elles l'ont même surpassée dans ces derniers temps. Or, le même esprit montrerait la même efficacité dans les autres genres de connaissances, si l'on s'était appliqué d'abord à en rectifier les principes. Tant qu'on ne l'aura pas fait, l'indifférence, le doute, et finalement une sévère critique sont plutôt preuves de profondeur de pensée. Notre siècle est le vrai siècle de la critique : rien ne doit y échapper. En vain la religion à cause de sa sainteté, et la législation à cause de sa majesté, prétendent-elles s'y soustraire. Elles excitent par là contre elles de justes soupçons, et perdent tout droit à cette sincère estime que la raison n'accorde qu'à ce qui a pu soutenir son libre et public examen 1. (Critique de la raison pure, p. 9-12.) B. La voie sûre de la science et l'échec de la métaphysique. Que dans certains domaines la raison soit capable de parvenir, par ses propres forces, à des connaissances authentiques, c'est ce que prouve l'exemple de la logique, d'une part, celui des mathématiques et de la physique pure, d'autre part. 1. C'est avec des textes semblables que l'on comprend bien comment Kant appartient au « siècle des lumières «.

« 9 La métaphysique et le tribunal de la Critique nature humâine.

Aussi ces prétendus indifférentistes, quelque soin qu'ils prennent de se rendre méconnaissables en substituant un langage populaire à celui de l'école, ne manquent-ils pas, dès qu'ils pensent un peu, de retomber dans ces mêmes assertions métaphysiques pour lesquelles ils affichaient tant de mépris.

Cependant, cette indifférence qui s'élève au sein de toutes les sciences, au moment même de leur épanouissement, et qui atteint justement celles dont la connaissance aurait le plus de prix à nos yeux, si nous pouvions la posséder, cette indifférence est digne d'attentions et de réflexions.

Elle n'est pas évidemment 1 'effet de la légèreté, mais bien de la maturité de jugement (1) d'un siècle qui n'entend plus se laisser amuser par une apparence de savoir; elle est une mise en demeure adressée à la raison de reprendre à nouveau la plus difficile de toutes ses tâches, celle de la connaissance de soi-même, et d'instituer un tribunal qui, en assurant ses légitimes prétentions, repousse aussi toutes celles de ses exigences qui sont sans fondement, non par une décision arbitraire, mais au nom de ses lois éternelles et immua­ bles 1 .

Ce tribunal, c'est la Critique de la raison pure elle-même.

Je n'entends point par là une critique des livres et des sys­ tèmes, mais celle du pouvoir de la raison en général, considérée par rapport à toutes les connaissances auxquelles elle peut s'élever indépendamment de toute expérience; par conséquent la solution de la question de la possibilité ou de 1 'impossibilité d'une métaphysique en général, et la détermination de ses sources, de son étendue et de ses limites, tout cela suivant des principes.

Cette voie, la seule qui ait été laissée de côté, est justement celle où je suis entré, et je me flatte d'y avoir trouvé la réfuta­ tion de toutes les erreurs qui avaient jusqu'ici divisé la raison avec elle-même dès qu'elle sort de l'expérience.

Je n'ai point éludé ses questions en m'excusant sur l'impuissance de la raison humaine; je les ai au contraire parfaitement spécifiées d'après certains principes, et, après avoir découvert le point précis du malentendu de la raison avec elle-même, je les ai résolues à son entière satisfaction.

A la vérité, cette solution n'est pas telle que pouvait le souhaiter l'extravagante curiosité des dogmatiques : car cette curiosité ne saurait être satisfaite qu'au moyen d'un art magique auquel je n'entends rien.

Aussi bien n'est-ce pas à cela 1.

La raison, ici, est à la fois juge et partie.

D'où la difficulté de la tàche.. »

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