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LA DECLARATION DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN Eléments historiographiques et pistes de réflexion.

Publié le 27/02/2023

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« LA DECLARATION DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN Eléments historiographiques et pistes de réflexion. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) est ce qu’il est convenu d’appeler un document patrimonial.

Il se distingue d’un autre document par sa place dans la mémoire collective.

En cela, il est sans aucun doute un repère aux finalités à la fois historiques et civiques tant au collège (programme de 4ème) qu’au lycée (programme de 2nde).

Son sens interroge encore.

Parfois surinterprétée, la DDHC est souvent investie de nos représentations contemporaines et étudiée de manière téléologique. Or la DDHC est un produit de son temps.

A bien des égards, elle est même l’image projetée de la Révolution française, fondatrice d’un « nouveau monde ».

Mais elle n’est pas, à l’été 1789, une création ex nihilo.

Ses inspirations sont nombreuses.

De plus, une déclaration est un acte solennel.

Il permet de déclarer, c’est-à-dire de « faire connaître ».

En cela, la DDHC est donc constitutive et normative d’un « Etat de droit » en France au même titre que la Bill of Rights de 1689 en Angleterre ou la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis de 1776. Pour autant, la DDHC évolue dans le temps sur le fond.

Ainsi les textes de 1793 et 1795 en modifient les principes.

Par exemple, la notion de « droit naturel » disparaît en 1795 pour être remplacée par celle des « droits de l’homme en société ».

Certains articles ont aussi vu leur sens modifié selon les circonstances politiques.

Ainsi le préambule de la DDHC tend à restreindre le destinataire des droits aux seuls membres du corps social (« Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale »), excluant de facto les esclaves et les femmes des droits politiques et, en particulier, du droit de vote.

Or l’article premier commence par dire que les hommes, c’està-dire tous les hommes, naissent et demeurent libres et égaux en droits.

On voit donc apparaître une tension voire une contradiction liée à l’indétermination du concept d’homme, destinataire des droits de l’homme.

On peut aussi mettre en évidence une tension entre la Liberté et l’Egalité : ses rédacteurs sont à la fois des hommes des Lumière, avec l’affirmation de valeurs universelles, mais également les héritiers de l’Ancien régime où les mots n’avaient pas le même sens.

Les libertés sont alors, en réalité, les statuts particuliers ou dérogatoires aux principes imposés par la monarchie centralisatrice. → Comment redonner du sens à un texte utilisé, connu, reconnu voire parfois instrumentalisé ? → En quoi ce texte est-il à la fois une rupture et une continuité ? Pour répondre à ces problématiques connues, nous proposons ci-dessous une démarche liant le programme d’histoire et à l’EMC.

Son objectif est à la fois simple et complexe : (dé)montrer que la DDHC n’est pas un point de départ, ni un aboutissement mais une étape dans un processus plus long, celui de la modernité. Toutefois il ne s’agit pas d’une séquence pédagogique au regard de la mise en place des nouveaux programmes.

Il s’agit de donner aux collègues des informations synthétiques afin de nourrir leur réflexion sur cet objet historique ici « revisité ». Etape préliminaire.

Le texte de la DDHC. Dans cette première étape, les élèves travaillent en amont le texte par un questionnement, une activité. L’objectif est ici de remobiliser les grands principes déjà étudiés au collège de la DDHC.

De nombreux sites académiques ou manuels proposent d’ailleurs des productions en ce sens. Deuxième étape.

Aux origines de la DDHC. • La formulation des droits (travail sur le vocabulaire). Les historiens, les philosophes, les juristes considèrent que la Révolution française fut la première révolution du droit naturel.

On peut le définir « simplement » comme un postulat, celui selon lequel l’homme est fait pour vivre libre.

Il fait de l’homme le propriétaire de biens matériels mais aussi de son corps et de son esprit.

Le philosophe anglais John Locke (1632-1704) en est sans aucun doute le théoricien politique.

Pour lui, le droit naturel est donc premier : tous les droits et les pouvoirs en découlent.

Il insiste notamment sur la souveraineté populaire, un droit naturel de tout peuple.

Cela signifie que l’autorité suprême réside exclusivement dans le peuple qui décide de s’associer volontairement (contrat social).

Son objectif est alors de réaliser les droits naturels de l’homme par la citoyenneté et par l’exercice des droits du citoyen.

La théorie lockienne nourrit notamment les « Lumières » en France et les rédacteurs des articles de L’Encyclopédie. Annexe 1.

Les droits de l’Homme selon John Locke. Annexe 2.

De extraits de L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonnée des sciences, des arts et des métiers. Quoi qu’il en soit, ces principes fondateurs de la DDHC ne sont pas sans passé.

Des références historiques permettent de faire des liens avec le programme de seconde.

Les références humanistes (Hugo Grotius, auteur en 1625 du traité Le droit de la guerre et de la paix où est affirmée la notion d’Etat de droit ; Jean Pic de la Mirandole pour qui l’homme a le privilège « d'être seulement ce qu'il devient et de devenir ce qu'il se fait ») peuvent être complétées par des références antiques tant grecques (la démocratie athénienne, Périclès) que romaines (la Res Publica et l’universalité de la citoyenneté). • Des précédents inspirants. Des textes étrangers à la France ont été rédigés et servent d’exemples aux révolutionnaires français dans la rédaction de DDHC.

On peut penser tout d’abord au modèle anglais issu de la Glorious Revolution de 1688-1689 qui démontre que la monarchie (parlementaire) et le respect des droits de l’Homme sont conciliables (Habeas Corpus de 1679 et Bill of Rights de 1689).

Quant à la Révolution américaine, avec sa Déclaration d’Indépendance de 1776, elle montre qu’une application du droit naturel est possible : le gouvernement américain tient son pouvoir de son peuple qui peut donc se révolter si ses libertés sont mises en cause. Annexe 3.

Extrait de l’English Bill of Rights de 1689. Annexe 4.

Préambule de la Déclaration d’Indépendance américaine de 1776. • Les circonstances de son élaboration (chronologie simplifiée). Entre le début « officiel » de la Révolution française, le 5 mai 1789 avec l’ouverture des Etats généraux à Versailles, et l’adoption par les députés de l’Assemblée nationale du 17ème et dernier article de la DDHC, le 26 août 1789, il s’écoule moins de quatre mois.

Une rapide et connue chronologie des événements permet de mettre en perspective sa rédaction liée à la fin de la monarchie centralisatrice. Le 17 juin 1789, devant le refus du roi d’un vote par tête et sa volonté de limiter les débats aux seules questions financières, les députés du tiers-état, rejoints par des membres du clergé et de la noblesse, se présentent comme les représentants de la Nation : de facto, il s’agit d’un transfert de la souveraineté du Roi vers les représentants de la Nation. Le 20 juin, avec le Serment du Jeu de Paume, ces députés jurent de ne pas se séparer « jusqu’à ce que la Constitution du royaume soit établie et affermie sur des fondements solides ».

Une semaine plus tard, le roi est contraint de céder : les trois ordres à se réunissent au sein d’une assemblée unique qui devient l’assemblée constituante le 9 juillet. Une déclaration des droits de l’homme se doit d’être aussi une déclaration des droits du citoyen.

Cet ajout n’est pas anodin : il fonde en partie les tensions voire les contradictions évoquées précédemment.

Dès lors, la DDHC est plus que jamais un préalable à l’élaboration de la Constitution.

Les articles sont rédigés, discutés et adoptés successivement par les députés entre le 20 et le 26 août.

La DDHC reste inachevée, les députés ayant suspendu l’examen des droits après l’article 17 pour se consacrer à la rédaction de la Constitution. Troisième étape.

La DDHC, un élément discuté mais fondateur du modèle républicain français. • Une DDHC qui « évolue » au gré des circonstances politiques révolutionnaires. Ces évolutions sont à mettre en lien avec les débats nombreux en particulier sur la notion de droits naturels qui peuvent être en contradiction avec les choix politiques adoptés.

On peut en aborder ici trois particulièrement saillants et débattus : - L’exclusion du vote d'une partie de la population qui rejette toute idée de souveraineté populaire et la remplace par l'idée d'une souveraineté nationale limitée (avec le suffrage censitaire et indirect).

Dès - - l’automne 1789, se pose ainsi en particulier la question de la mise à l'écart des plus pauvres.

En d’autres termes, le vote n’est pas vu comme un droit mais comme une fonction que seuls exercent les « plus capables » (suffrage capacitaire).

Mais la Révolution est d'abord bourgeoise : le droit de propriété est donc un droit naturel.

Il devient constitutif des droits politiques, la propriété apparaissant comme un critère de civisme et peut-être de capacité.

Robespierre s'élève alors contre « l'aristocratie des riches ».

De même, ce qui se passe aux colonies est aussi intéressant : les esclaves acquièrent temporairement la liberté.... »

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