Dissertation en droit administratif : La supériorité du droit international et communautaire sur la loi.
Publié le 25/08/2012
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Ainsi, dans l’arrêt Fédération française des sociétés de protection de la nature rendu le 7 décembre 1984, le Conseil d’Etat affirme la possibilité pour le juge administratif d’annuler un acte réglementaire s’il est en contradiction avec les mesures prévues par la directive. Allant plus loin, l’arrêt Cie Alitalia (CE Ass. 3 février 1989) décide qu’il est illégale pour les autorités administratives de laisser subsister des dispositions réglementaires incompatibles avec les objectives d’une directive. Enfin, frappant plus fort, l’arrêt SA Rothmans International France et SA Philip Morris France (CE Ass. 28 février 1992) reconnaît la supériorité des directives sur les lois mêmes plus récentes. En effet, dans cet arrêt le Conseil d’Etat accepte d’écarter l’application d’une disposition législative incompatible avec une directive antérieure, une fois dépassé le délai de transposition. Par conséquent, la responsabilité de l’Etat peut être engagée quand un acte réglementaire est pris sur le fondement de cette loi inapplicable du fait de son incompatibilité avec les objectifs d’une directive. Le fondement de cette décision est le même que celui consacrant la supériorité du droit communautaire originaire sur la loi : l’article 55 de la Constitution puisque, selon Martine Laroque qui concluait sur cette affaire, « dès lors que l’autorité juridique des engagements internationaux résulte de l’article 55 de la Constitution, […] il n’y a pas lieu de faire une distinction entre le traité lui-même et la norme internationale qui en est dérivée «. Par cet arrêt, la suprématie du droit communautaire dérivé est ainsi pleinement affirmée.
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A.
Affirmation de la supériorité du droit international et communautaire sur la loi par la reconnaissance du contrôle de conventionalité induisant un rapporthiérarchique entre les deux
Le Conseil constitutionnel ayant donné en aval la possibilité aux juridictions « ordinaires » d'effectuer un contrôle de conventionalité des lois par voie d'exceptions,celles-ci s'empressèrent de l'utiliser.La Cour de cassation avec l'arrêt Société des Cafés Jacques Vabre rendu en chambre mixte le 24 mai 1975, fut la première à se reconnaître le droit de vérifier si la loiétait incompatible avec le droit international.
En l'espèce, elle donna le droit au juge judiciaire de faire prévaloir le Traité de Rome sur des articles législatifs du codedes douanes pourtant postérieurs.
Par cet arrêt la haute cour reconnaît ainsi la prévalence de l'ordre juridique communautaire sur les lois nationales, mêmepostérieures.Le juge constitutionnel reprenant sa propre décision ne tarda pas à se reconnaître le pouvoir d'effectuer un contrôle de conventionalité dans le cas de son interventionen tant que juge électoral et non comme juge de constitutionnalité.
Il rendit ainsi la décision n° 88-1082/1117 du 21 octobre 1988 « Élections législatives dans la 5ecirconscription du Val d'Oise » dans laquelle il vérifia si des dispositions législatives du Code électoral étaient compatibles avec la Convention européenne des droitsde l'Homme bien que la loi fusse postérieure au traité.Cette évolution générale permis au Conseil d'Etat qui campait alors encore sur les positions de l'arrêt Semoules de France de 1968 de repenser sa jurisprudence pourne plus être la seule juridiction à refuser la possibilité du contrôle de conventionalité.Il rendit donc en assemblée le 20 octobre 1989 l'arrêt Nicolo dans lequel il s'interrogea sur la compatibilité de la loi électorale de 7 juillet 1977 avec l'article 227.1 duTraité de Rome.Par cet arrêt et en se fondant exclusivement sur l'article 55 de la Constitution, le Conseil d'Etat fait prévaloir le traité sur la loi qui cesse d'être incontestable si, à ladate où le juge statue, il y a incompatibilité avec le traité.
Il existe donc un rapport hiérarchique entre la loi et le traité puisque le droit international et communautaireest applicable de préférence à la loi en cas de conflit.
La loi étant une norme inférieure, il y a donc bien une suprématie du droit international sur la loi.Avec la jurisprudence Nicolo, le juge administratif affirme également la vérification de la compatibilité de la loi avec l'ensemble des normes communautaires et dudroit international à l'exception des normes non-écrites, comme la coutume ou les principes généraux du droit international.
B.
Reconnaissance de la suprématie du droit communautaire dérivé par le pouvoir conféré aux directives
L'attitude du juge administratif face au droit communautaire dérivé, c'est à dire les règles établies par les institutions communautaires en application des traités,comme son attitude face au contrôle de conventionalité, a beaucoup évolué.
Le Conseil d'Etat dans sa jurisprudence initiale refusait de reconnaître le moindre effeteux directives.
L'arrêt Cohn-Bendit rendu en assemblée le 22 décembre 1978 en est une belle illustration.
Dans cet arrêt, la haute cour administrative affirme qu'unedirective ne peut être invoqué par un requérant lors d'un recours contre un acte individuel.
Les directives, nécessitant une transposition dans l'ordre interne, ne sontpas directement applicables, ni donc directement invocables par un ressortissant.
Au fil des années, le juge administratif a conféré une portée plus large auxdirectives, sans toutefois abandonner la jurisprudence Cohn-Bendit.
Le Conseil d'Etat, sans confier de pouvoir direct aux directives, a adopté une politique visant àpréparer le « terrain juridique » de leur application, afin s'assurer qu'elles aient, une fois appliquées, du sens et une harmonie dans l'ordre juridique interne français.Ainsi, dans l'arrêt Fédération française des sociétés de protection de la nature rendu le 7 décembre 1984, le Conseil d'Etat affirme la possibilité pour le jugeadministratif d'annuler un acte réglementaire s'il est en contradiction avec les mesures prévues par la directive.
Allant plus loin, l'arrêt Cie Alitalia (CE Ass.
3 février1989) décide qu'il est illégale pour les autorités administratives de laisser subsister des dispositions réglementaires incompatibles avec les objectives d'une directive.Enfin, frappant plus fort, l'arrêt SA Rothmans International France et SA Philip Morris France (CE Ass.
28 février 1992) reconnaît la supériorité des directives surles lois mêmes plus récentes.
En effet, dans cet arrêt le Conseil d'Etat accepte d'écarter l'application d'une disposition législative incompatible avec une directiveantérieure, une fois dépassé le délai de transposition.
Par conséquent, la responsabilité de l'Etat peut être engagée quand un acte réglementaire est pris sur lefondement de cette loi inapplicable du fait de son incompatibilité avec les objectifs d'une directive.
Le fondement de cette décision est le même que celui consacrant lasupériorité du droit communautaire originaire sur la loi : l'article 55 de la Constitution puisque, selon Martine Laroque qui concluait sur cette affaire, « dès lors quel'autorité juridique des engagements internationaux résulte de l'article 55 de la Constitution, […] il n'y a pas lieu de faire une distinction entre le traité lui-même et lanorme internationale qui en est dérivée ».
Par cet arrêt, la suprématie du droit communautaire dérivé est ainsi pleinement affirmée.
III.
Conclusion
Pour conclure, il existe donc à l'heure actuelle, après une évolution difficile des mentalités des juridictions, une suprématie incontestable du droit international etcommunautaire sur la loi.Il serait néanmoins intéressant d'envisager cette suprématie sous un angle autre que celui du rapport hiérarchique : un angle plus influencé par un rapportd'harmonisation des normes internationales et internes..
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