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Commentaire de l'arrêt du Conseil d'Etat, « M. Papon » du 12 avril 2002. Droit administratif

Publié le 31/08/2012

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Or, cette caractérisation révèle toute l'ampleur et l'importance de cet arrêt car c'est la première fois que le Conseil d'Etat met fin à cette fiction juridique puisqu'il reconnaît la responsabilité de l'Etat français à raison des fautes commises durant l'occupation. Ainsi, l'arrêt Papon met un terme à la jurisprudence fluctuante du Conseil d'Etat concernant l'irresponsabilité de l'Etat pour les faits commis sous le gouvernement de Vichy. En effet, il avait d'abord reconnu la possibilité de mettre en cause la responsabilité de l'Etat français à raison d'actes commis par des fonctionnaires du gouvernement de Vichy dans l'arrêt « Toprower « du 30 janvier 1948. Cependant, quatre ans plus tard, le juge administratif considérait que ces fautes engageaient la responsabilité du gouvernement de Vichy et non celle de l'Etat républicain. Cette déclaration peut d'ailleurs être trouvée dans les arrêts « Epoux Giraud « du 4 janvier 1952 et « Delle Remise « dans lesquels le Conseil d'Etat considérait que la responsabilité de l'Etat ne pouvait pas être caractérisée pour des actes commis en application de textes considérés comme « nuls et de nul effet « par l'ordonnance du 9 août 1944. Cette jurisprudence a d'ailleurs été critiquée par M. Waline qui considérait cette jurisprudence comme étant « amnistiante «. Cette solution faisait abstraction du fait que le Gouvernement légal, c'est-à-dire celui reconnu par la plupart des Etats étrangers, était le Gouvernement de Vichy. Désormais, l'ordonnance du 9 août 1944 est interprétée comme signifiant le caractère fautif des actes en cause. En se plaçant dans une hypothèse de cumul de fautes, le Conseil d'Etat reprend deux anciennes décisions : les arrêts « Anguet « de 1911 et « Lemonnier « de 1918. Ces derniers permettent à la victime d'exercer un recours devant le juge administratif à l'encontre du service et du patrimoine de l'administration responsable. Le choix du cumul de fautes consacré dans  l'arrêt « M. Papon « du 12 avril 2002, va amener le juge administratif à établir un partage de l'indemnité due entre l'administration et l'agent responsable.

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« Dans l'arrêt « M.

Papon » du 12 avril 2002, le Conseil d'Etat a retenu le dernier type de faute qui vient d'être énoncé puisqu'il s'agit d'une faute quia entraîné desconséquences d'une extrême gravité et qui révèle un comportement inexcusable.

En effet, le comportement de M.

Papon est caractérisé par un comportement non paspassif mais bien actif à la politique de déportation du gouvernement de Vichy.

Son comportement dépassait ce qui était exigé par l'occupant, c'est-à-dire l'Allemagnenazie.

Le Conseil d'Etat constate que M Papon a accepté que le service des questions juives soit placé sous son autorité directe. Or, ce rattachement ne découlait pas de la nature de ses fonctions.

En effet, M.

Papon s'est attaché « personnellement à donner l'ampleur la plus grande possible auxquatre convois qui ont été retenus à sa charge par la Cour d'assises de la Gironde sur les onze qui sont partis de ce département entre juillet 1942 et juin 1944, enfaisant notamment en sorte que les enfants placés dans des familles d'accueil à la suite de la déportation de leurs parents ne puissent être exclus ».

En outre, M.

Papona veillé « de sa propre initiative et en devançant les instructions venue de ses supérieurs à mettre en œuvre le maximum d'efficacité et de rapidité les opérationsnécessaires à la recherche, à l'arrestation et à l'internement des personnes en cause ».

Par conséquent, le comportement de M.

Papon ne peut pas s'expliqueruniquement par la pression exercée par l'occupant allemand bien que l'intéressé prétende avoir obéit, sous la contrainte des autorités allemandes qui occupaient laFrance, aux ordres de sa supériorité hiérarchique.

C'est pourquoi, le comportement de l'intéressé revêt un caractère d'une exceptionnelle gravité.

Le jugeadministratif, en jugeant le comportement de M.

Papon répréhensible, lui reproche implicitement d'avoir obéit à des ordres manifestement illégaux. Il s'agit donc, en l'espèce d'une faute personnelle de M Papon et le fait que les actes qu'il a commis se situent dans le cadre du service n'a pas d'influence sur leurqualification.

L'arrêt « M.

Papon » a donc une importance considérable et celle-ci est renforcée par le fait que la reconnaissance d'une faute de service de l'Etatconstitue un intérêt majeur puisqu'il rompt avec la fiction juridique de l'irresponsabilité de l'Etat pour les actes commis sous le gouvernement de Vichy. B/ L'existence d'une faute de service Il convient, tout d'abord, de préciser la notion de faute de service (1-), pour s'attacher après à relever la faute de service de l'Etat qui est caractérisée dans l'arrêt « M.Papon » qui est étudié (2-). 1- Analyse de la notion de faute de service Il s'agit d'une faute commise dans le cadre du service et qui n'est pas détachable compte tenu de ses caractéristiques.

La faute de service « révèle un administrateurplus ou moins sujet à erreur ».

Au terme des analyse de Laferrière, la faute de service peut se définir de la façon suivante : « Si l'acte dommageable est impersonnel,s'il révèle un administrateur […] plus ou moins sujet à erreur, et non l'homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences, l'acte reste administratif et ne peutêtre déféré aux tribunaux ». Il est possible qu'un dommage causé à un tiers résulte à la fois d'une faute personnelle de l'agent et d'une faute de service de l'administration.

Il s'agit du problème ducumul des fautes.

Or, dans l'arrêt « M.

Papon », le Conseil d'Etat reconnaît, non seulement, une faute personnelle de l'agent, mais également une faute de service qui,en conséquence, engage la responsabilité de l'Etat.

La distinction qui est opérée entre la faute personnelle et la faute de service se trouve dans l'arrêt « Pelletier » du30 juillet 1873.

En effet, avant cet arrêt, le système de la garantie des fonctionnaires s'appliquait.

Conformément à l'article 75 de la Constitution de l'an VIII, il étaitnécessaire d'avoir l'autorisation du Conseil d'Etat pour pouvoir mettre en jeu, devant les tribunaux judiciaires, la responsabilité dans agents publics.

Ce système a prisfin avec le décret- loi de 1870.

Néanmoins, les actes administratifs restent de la compétence du juge administratif, le fonctionnaire est irresponsable vis-à-vis de cesactes.

En effet, avec l'arrêt « Pelletier », les tribunaux judiciaires ne peuvent connaître que des actes privés des agents.

La distinction qui est faite entre la fautepersonnelle et la faute de service répond au souci de ne pas faire supporter à l'agent public les conséquences d'actes qui se sont produits dans le cadre de leursfonctions au service de l'Etat.

En outre, il convient aussi de relever le fait que l'administration est certainement plus solvable que le fonctionnaire. 2- La caractérisation de la faute de service de l'Etat français Dans l'arrêt « M.

Papon », le Conseil d'Etat caractérise une faute de service qui est imputable à l'Etat républicain.

En effet, le juge administratif relève différentséléments mettant en avant que les faits que se sont produits relevaient d'une volonté de l'administration et non d'une quelconque pression de l'occupant allemand.

Ils'agit, tout d'abord, de la mise en place du camp d'internement de Mérignac ainsi que du pouvoir qui, dès octobre 1940, a été donné au préfet, d'y interner lesressortissants étrangers juifs.

Puis, le Conseil d'Etat relève un deuxième élément qui est l'existence d'un service des questions juives au sein de la préfecture.

Ledernier élément est relatif à l'ordre qui a été donné aux forces de police de participer aux opérations d'arrestation et d'internement, et aux responsables administratifsd'aider à l'organisation des convois vers Drancy.

Le Conseil d'Etat considère que ces actes ont permis et facilité, indépendamment de l'action de Maurice Papon, lesopérations qui ont été le prélude à la déportation.

Ainsi, ces différents éléments mettent en avant la caractérisation d'une faute de service de l'Etat républicain françaiset ils traduisent une certaine volonté de l'administration dans la mise en œuvre de cette mission. Or, cette caractérisation révèle toute l'ampleur et l'importance de cet arrêt car c'est la première fois que le Conseil d'Etat met fin à cette fiction juridique puisqu'ilreconnaît la responsabilité de l'Etat français à raison des fautes commises durant l'occupation.

Ainsi, l'arrêt Papon met un terme à la jurisprudence fluctuante duConseil d'Etat concernant l'irresponsabilité de l'État pour les faits commis sous le gouvernement de Vichy.

En effet, il avait d'abord reconnu la possibilité de mettre encause la responsabilité de l'Etat français à raison d'actes commis par des fonctionnaires du gouvernement de Vichy dans l'arrêt « Toprower » du 30 janvier 1948.Cependant, quatre ans plus tard, le juge administratif considérait que ces fautes engageaient la responsabilité du gouvernement de Vichy et non celle de l'Etatrépublicain.

Cette déclaration peut d'ailleurs être trouvée dans les arrêts « Epoux Giraud » du 4 janvier 1952 et « Delle Remise » dans lesquels le Conseil d'Etatconsidérait que la responsabilité de l'Etat ne pouvait pas être caractérisée pour des actes commis en application de textes considérés comme « nuls et de nul effet »par l'ordonnance du 9 août 1944.

Cette jurisprudence a d'ailleurs été critiquée par M.

Waline qui considérait cette jurisprudence comme étant « amnistiante ».

Cettesolution faisait abstraction du fait que le Gouvernement légal, c'est-à-dire celui reconnu par la plupart des Etats étrangers, était le Gouvernement de Vichy.Désormais, l'ordonnance du 9 août 1944 est interprétée comme signifiant le caractère fautif des actes en cause.

En se plaçant dans une hypothèse de cumul de fautes,le Conseil d'Etat reprend deux anciennes décisions : les arrêts « Anguet » de 1911 et « Lemonnier » de 1918.

Ces derniers permettent à la victime d'exercer un recoursdevant le juge administratif à l'encontre du service et du patrimoine de l'administration responsable.

Le choix du cumul de fautes consacré dans l'arrêt « M.

Papon »du 12 avril 2002, va amener le juge administratif à établir un partage de l'indemnité due entre l'administration et l'agent responsable. Ainsi, nous constatons qu'une faute de service a joint ses effets à ceux de la faute personnelle commise par M.

Papon.

Par conséquent, l'Etat devra, contrairement à ceque soutient le ministre de l'Intérieur, prendre en charge une partie des condamnations prononcées.

Il convient donc, à présent, de déterminer les modalités du partagede la charge. II- Un cumul de fautes conduisant au partage de responsabilité Le Conseil d'Etat a caractérisé un cumul des fautes, d'où l'engagement de la responsabilité de l'agent pour sa faute personnelle, ainsi que celle de l'Etat pour sa fautede service.

En effet, l'Etat est tenu à une obligation in solidum au profit de l'agent (A/).Cette jurisprudence est néanmoins délicate d'un point de vue politique et aussi historique, mais elle se justifie de par les circonstances dramatiques qui ont conduit àrendre responsables non seulement l'agent mais aussi l'Etat (B/). A/ L'obligation imputée à l'Etat 1- Les moyens d'action de M.

Papon à l'encontre de l'administration. »

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