Commentaire d'arrêt de la Cour d'appel de Douai, le 1er novembre 2008 (droit)
Publié le 06/07/2012
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Conditions pour retenir l’erreur sur une qualité essentielle : Art. 180 cciv comment l’apprécier ? Par l’élément moral : déterminant du consentement ? Par l’élément matériel : répercussion sur la vie matrimoniale ? Jurisprudence antérieure La jurisprudence avait plutôt tendance à retenir l'appréciation subjective et ainsi a admis la nullité du mariage pour erreur sur les qualités essentielles au sujet d'une erreur : sur la qualité de divorcé (civ. 1er, 2 déc. 1997) sur la qualité de prostituée (TGI Paris, 13 février 2001) sur l'aptitude à avoir des relations sexuelles normales (Paris, 26 mars 1982) sur l'aptitude à procréer (TGI Avranches, 10 juillet 1973) sur la qualité de condamné de droit commun (TGI Paris, 8 février 1971)... Dans ces cas, il s'agissait de qualités considérées comme essentielles par un des époux. Ainsi la nullité du mariage avait été admise. Solution TGI C'est dans cette continuité que le TGI de Lille, le 1er avril 2008, a accepté la nullité du mariage pour erreur sur la virginité de l'épouse. Cette qualité était considérée comme essentielle par M. X.
«
d'arguments pour obtenir l'annulation de leur mariage (I.).
Toutefois, la Cour d'appel refuse d'annuler le mariage en rappelant principalement que la virginité neconstitue pas une qualité essentielle de la personne.
Nous nous concentrerons alors sur l'apport principal de l'arrêt, c'est-à-dire sur le refus de considérer la virginitécomme une qualité essentielle (II.).
I.
La recherche de l'annulation du mariage
Quatre, c'est le nombre d'arguments présentés par les parties devant la Cour d'appel afin d'obtenir l'annulation du mariage.
Or, nous allons voir que parmi cesarguments, deux n'étaient pas légalement justifiés et rendaient la recherche de l'annulation vaine (A.) alors que les deux autres arguments, pourtant rejetés, étaienttout à fait discutables et pouvaient ainsi fonder une demande d'annulation.
A.
La recherche vaine de l'annulation du mariage
Reprise des faits de l'espèce : Suite à la cérémonie du mariage, M.
et Mme souhaite mettre fin leur union.
Ils se présentent devant le TGI de Lille puis devant la CADouai différents arguments tendant à cette fin.
Seule une cause de nullité est susceptible d'annuler le mariage :-qu'est-ce que la nullité ? L'anéantissement rétroactif d'un acte juridique.
Le mariage est un contrat donc il peut être annulé.
-On distingue la nullité absolue (absence de consentement, bigamie, âge, inceste, sexe...) et la nullité relative de l'article 180 (vice de consentement : pas deconsentement libre, erreur sur la personne, erreur sur les qualités essentielles)
L'erreur sur les qualités essentielles est une cause d'annulation du mariage selon l'article 180 alinéa 2 du Code civil.-Avant 1975, c'est le célèbre arrêt Berthon (ch.
réunis, 24 avril 1862) qui a posé le principe : la nullité du mariage ne peut être prononcée que s'il s'agit d'une erreursur la personne au sens strict, c'est à dire sur son identité.-La loi de 1975 a créé l'erreur sur les qualités essentielles.
Comment apprécier cette erreur ?- appréciation objective, in abstracto : la qualité essentielle est celle considérée comme telle par un individu moyen.
C'est donc au regard des mœurs de la société quela qualité essentielle va être appréciée.
- Appréciation subjective, in concret : c'est la qualité considérée comme essentielle par le candidat au mariage et qui a déterminé son consentement qui doit être priseen compte.
Certains arguments sont écartés assez aisément :
D'une part, Mme Y invoque l'article 212 sur l'obligation de respect entre époux : ne permet pas d'annuler un mariage, mais seulement de le dissoudre par la voie dudivorce.
D'autre part, M.
X invoque sur le fondement de 146 du Code civil qu'aucun « vrai consentement réciproque n'ayant été recueilli ainsi qu'en témoigne le fait que lesépoux n'ont pas entretenu de communauté de vie ».
Cet argument n'est pas relevé par la CA.
L'article 146 du Code civil est par contre un bon fondement pourdemander l'annulation du mariage : l'absence de consentement.
M.
X soulève cette nullité absolue : il n'aurait pas donné son consentement véritablement, preuve enest l'absence de communauté de vie.
Toutefois, la Cour d'appel relève à juste titre que cette absence de communauté de vie n'est du qu'à M.
X.
lors de la célébration,il avait tous les deux une véritable envie de mariage.
B.
Une recherche fondée de l'annulation du mariage
Se pose la question de l'acquiescement à l'annulation de Mme Y:
Le mariage est-il un contrat ou une institution ? Dans quelle mesure oscille-t-il entre ces deux statuts ?
Le TGI de Lille déduit de l'acquiescement de l'épouse à la nullité la reconnaissance que l'objet de la nullité avait été reconnu comme déterminant du consentement.Or, le consentement des deux époux à la nullité du mariage ne peut pas permettre cette annulation.
En l'espèce, M.
X avait fait cette demande.Mais la CA Douai a bien répondu en précisant que les causes de nullité du mariage sont d'ordre public et «les parties n'ont pas la libre disposition de leurs droits».Dès lors aucun acte juridique ne peut intervenir et prononcer à lui seul la nullité du mariage.
Refus de considérer le mensonge sur la virginité comme une qualité essentielle
Du fait des débats de société houleux sur la question de la virginité, M.
X a déplacé son argumentation de l'absence de virginité au mensonge sur la vie sentimentaleet sur l'absence de virginité.
La CA répond en deux temps :D'une part, M.
X ne démontre pas le mensonge prétendu : attestation du père et de proches de M.X ;d'autre part, le mensonge ne peut être pris en considération pour annuler le mariage que s'il porte sur une qualité essentielle.
Or, la CA considère que la virginité n'estpas une qualité essentielle.
AppréciationLe déplacement sur le mensonge et non plus sur l'absence de virginité en tant que telle effectué par M.
X a été vain.
La CA a réussi à détourner le problème pourpouvoir statuer sur la virginité en tant que qualité essentielle ou non.
II.
Le refus d'annulation du mariage au motif de l'absence de virginité de l'épouse
Concentrons-nous sur l'un des apports essentiels de l'arrêt.
La Cour d'appel se prononce sur la virginité en tant que qualité essentielle.
Contrairement au tribunal degrande instance, elle refuse donc de considérer la virginité comme une qualité essentielle (A.) ce qui nous amène à poser la question de la portée de l'arrêt.
Face à latourmente médiatique dans laquelle cette décision a été rendue, nous pouvons nous demander si sa portée est certaine (B.).
A.
Le refus de considérer la virginité comme une qualité essentielle
Conditions pour retenir l'erreur sur une qualité essentielle :Art.
180 cciv comment l'apprécier ?Par l'élément moral : déterminant du consentement ?Par l'élément matériel : répercussion sur la vie matrimoniale ?
Jurisprudence antérieure.
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