Commentaire Arrêt Cass. com 26 Janvier 2010 (droit)
Publié le 24/08/2012
Extrait du document
D’après le professeur Eric Savaux l’abus « ne peut résulter de l'absence de motif légitime, ni même de l'absence totale de motifs « ; Brieux Fages quant a lui écrit que « ... les cas d'abus, dans le contrat, se ramassent à la pelle... Il en existe certes de diverses sortes, mais souvent les motifs se retrouvent au centre de l'appréciation des juges «; Le professeur Muriel Fabres-Magnan décrit la jurisprudence au sujet de l’abus comme « encore éparse et incertaine « d’aucuns diront qu’elle, « fluctuante «, et d’autres « hésitante «... Quant à la doctrine, sa lecture du droit positif n'est pas uniforme : certains sont favorables à l'idée que « commet un abus le cocontractant qui invoque des motifs fallacieux «, tandis que d'autres professent, en sens contraire, mais avec la même netteté, que si le fournisseur « donne des motifs qui se révèlent finalement non sérieux, il n'engage même pas sa responsabilité à l'égard du distributeur «. En jurisprudence, l'abus dans l'exercice du droit de rompre est caractérisé lorsque le comportement de l'auteur de la rupture est affecté par l'incohérence qui l'anime. Dans l’arrêt qui nous intéresse la cour de cassation répète fort classiquement que l'exercice du droit de rupture unilatérale peut, en cas d'abus, justifier la mise en jeu de la responsabilité du contractant qui le met en œuvre
«
plus délicat de se prononcer avec certitude sur l'état de la jurisprudence.
D'ailleurs, si on scrute avec attention la motivation l’arret commenté, il est permis de penserque la Cour de cassation ne condamne pas le principe d'un tel contrôle.
Ainsi, dans l'arrêt de la chambre commerciale, on relèvera que celle-ci décide que la courd'appel a légalement justifié sa décision parce que le demandeur au pourvoi n'apportait pas la preuve que la décision de rompre procédait, de la part de son auteur,« d'un motif illégitime ou d'une volonté de nuire ».
A contrario, on peut donc considérer que si la preuve de l'illégitimité des motifs avait été rapportée, laresponsabilité de la banque pour rupture abusive aurait pu être retenue.
Ainsi, on le constate, la question du contrôle judiciaire de la légitimité des motifs demeure donc entourée d'un certain flou, mais il ne paraît pas déraisonnable deconsidérer qu'en droit positif les motifs fallacieux spontanément avancés pour justifier la rupture d'un contrat d'intérêt commun pourraient caractériser une ruptureabusive.
Reste la question de savoir la manière dont est encadrée cette faculté de résiliation.
II.
Une faculté de résiliation unilatérale encadrée
Cette faculté de résiliation unilatérale déjà limitée par le contrôle judiciaire semble, comprend deux notions.
En effet, l’abus de droit de rompre (A) et le respect d’undélai de préavis (B) sont autant de notions qui encadre cette faculté
A.
La notion d'abus de droit de rompre
D’après le professeur Eric Savaux l’abus « ne peut résulter de l'absence de motif légitime, ni même de l'absence totale de motifs » ; Brieux Fages quant a lui écrit que« ...
les cas d'abus, dans le contrat, se ramassent à la pelle...
Il en existe certes de diverses sortes, mais souvent les motifs se retrouvent au centre de l'appréciation desjuges »; Le professeur Muriel Fabres-Magnan décrit la jurisprudence au sujet de l’abus comme « encore éparse et incertaine » d’aucuns diront qu’elle, « fluctuante »,et d’autres « hésitante »...Quant à la doctrine, sa lecture du droit positif n'est pas uniforme : certains sont favorables à l'idée que « commet un abus le cocontractant qui invoque des motifsfallacieux », tandis que d'autres professent, en sens contraire, mais avec la même netteté, que si le fournisseur « donne des motifs qui se révèlent finalement nonsérieux, il n'engage même pas sa responsabilité à l'égard du distributeur ».En jurisprudence, l'abus dans l'exercice du droit de rompre est caractérisé lorsque le comportement de l'auteur de la rupture est affecté par l'incohérence qui l'anime.Dans l’arrêt qui nous intéresse la cour de cassation répète fort classiquement que l'exercice du droit de rupture unilatérale peut, en cas d'abus, justifier la mise en jeude la responsabilité du contractant qui le met en œuvre
La rupture doit être intempestive mais surtout abusive, qui dit abusive dit notamment brutale.
La rupture est, elle-même, protéiforme et permet d’englober un certainnombre de cas.
Constitue ainsi une rupture de la relation commerciale la modification unilatérale et substantielle des conditions d’un contrat, la chute brutale duchiffre d’affaires réalisé par un fournisseur… .
Dans ces différentes hypothèses et ce que soit une rupture partielle ou totale, il est préférable a la partie qui rompt sonengagement contractuel d’écrire à son partenaire commercial une lettre recommandée avec accusé de réception aux termes de laquelle sa volonté de mettre un termeaux relations commerciales doit être explicite et non équivoque…et lui laisser une durée minimale de préavis.
Cour da cassation dans son arrêt du 5 Octobre 1993 énonce que « la résiliation d’un CDI peut même si le préavis est respecté avoir un caractère abusif.
» On voitdonc que la notion « d’abus » est étroitement liée avec le délai de préavis mais aussi avec les motifs légitimes.
Ainsi, il n’y a pas de rupture brutale tant qu’un préavissuffisant est respecté, reste a savoir ce qu’est un préavis suffisant.
B- L'obligation de respect d'un préavis
Un délai de préavis est une courte période de sécurité, durant laquelle la partie qui n’a pas l’initiative de la rupture peut s’adresse au marché afin de trouver unnouveau contractant.C’est ce mécanisme du droit des obligations que le législateur a décidé d’étendre, non plus seulement aux contrats, mais de façon plus générale « aux relationscommerciales établies » par le biais de l’article L.442-6-I-5°du Code de Commerce.
Cet article dispose que « le fait… de rompre brutalement, même partiellement,une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale...» engage la responsabilité de son auteur et l’oblige àréparation.
En sommes celui qui veut mettre fin à des relations commerciales suivies doit en aviser son partenaire en respectant un préavis d’autant plus long que larelation aura duré plusieurs années.
La notion de délai de préavis raisonnable est difficile a définir, en effet, selon la jurisprudence récente du Tribunal de commerce de Paris, l’on ne peut qu’êtreperplexe : pour 30 ans de relations commerciales, un délai de préavis de 8 mois est jugé suffisant1, pour 18 ans, un délai de 23 semaines, pour 16 ans, un délai de 12mois, pour 10 ans, un délai de 6 mois, pour 3 ans, un délai de 6 mois… Certains ne manqueront pas de stigmatiser la justice consulaire et de s’en aller consulter lajurisprudence de la Cour d’appel de Paris dans l’espoir d’y trouver une ligne rouge, ou à tout le moins, un peu plus de cohérence, mais tel n’est pas le cas.
Enl’espèce, le délai de préavis est de 90 jours, en revanche il nous manque l’élément de la durée des relations commerciales, notons que ce point n’a pas été prit pourargument par la société Riviera ? On peut donc estimer que le délai fixé dans le contrat par les parties était suffisamment raisonnable.
Notons que la durée des préavis varie en fonction des matières et qu’elle n'a pas encore été établie par le législateur.
Aujourd'hui, on peut uniquement s'appuyer sur lajurisprudence pour l'estimer.
Ce qui est en tout cas certain et essentiel à comprendre, c'est que la durée fixée dans un contrat commercial par les parties contractantesn'est pas une garantie suffisante.
Il n'est en effet pas rare que le juge prenne une décision contraire à ce qui est écrit dans un contrat.
Le juge se base sur le critèreéconomique.
Cela se passe vraiment au cas par cas, en fonction du degré de dépendance du partenaire économique, de la rareté de la demande ou de l'offre dans lesecteur.
Plus la dépendance est forte, plus la durée du préavis devra être longue ou une solution alternative trouvée.
En somme, il est extrêmement difficile d’établir ce qu’est un délai raisonnable et suffisant a part dire que c’est un délai qui n’est pas abusif mais cela ne fait queretourner la question sans y répondre, nous ne pouvons que retenir le panorama de jurisprudence et souligner le caractère aléatoire des durées de préavis retenues parles juridictions ! A quand une jurisprudence qui nous définirai le délai de préavis raisonnable ?.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Commentaire d'arrêt Cass. com. 7 avril 2010 (droit)
- Commentaire d'arrêt : Cass. Com., 22 juin 1999 -Droit
- Commentaire d'arrêt : Cour de cassation, 1ère Civ., 20 janvier 2010. Droit
- Commentaire d'arrêt Cass com 20 février 2007. Droit
- Réparation du préjudice moral: Commentaire d'arrêt Cass, 1ere civ, 16 janvier 1962 (droit)