C.E. 6 févr. 1903, TERRIER, Rec. 94, concl. Romieu t (S. 1903.3.25, concl. Romieu, note Hauriou; D. 1904.3.65, concl. Romieu)
Publié le 20/09/2022
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«
COMPÉTENCE
DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE
PRINCIPES GÉNÉRAUX
C.E.
6 févr.
1903, TERRIER, Rec.
94, concl.
Romieu
t
(S.
1903.3.25, concl.
Romieu, note Hauriou;
D.
1904.3.65, concl.
Romieu)
'
_Sur la compétence : - Cons.
que le sieur Terrier défère au Conseil
d'Etat une note rédigée en chambre du conseil par laquelle le secrétai
re-greffier lui fait connaître que la requête adressée par lui au conseil
de préfecture du département de Saône-et-Loire à l'effet d'obtenir du
département le paiement d'un certain nombre de primes allou_ées pour
la destruction des animaux nuisibles aurait été soumise à ce conseil qui
se serait déclaré iI?-compétent;
Cons.
que la note dont s'agit ne constitue P,as une décision de jt!stice
et ne peut à i::e titre être déférée au Conseil d'Etat;
Mais cpns.
que, dans son pourvoi, le 'req�érant a pris, en vue de
l'incompétense du conseil de préfecture,.
des conclusions directes devant
le Conseil d'Etat pour être statué sur le bien-fondé de sa réclamation;
Cons.
qu�tant donné les termes dans lesquels a été prise la délibéra
tion du conseil général allouant des primes pour la destruction des
animaux nuisibles et a été voté le crédit inscrit à cet effet au budget
départemental de l'exercice 1900, le sieur Terrier peut être fondé à
réclamer l'allocation d'une somme à ce titre; que du refus du préfet
d'admettre la réclamation _dont il l'a saisi il est né un litige doni il
appartient au Conseil d'Etat de connaître et dont ce Conseil est
valablement saisi par les conclusions subsidiaires de requérant;
Au fond : - Cons.
que l'état de l'instruction ne permet pas
d'apprécier dès à présent le bien-fondé de la· réclamation du sieur
Terrier et qu'il y a lieu, dès lors, de le renvoyer devant le préfet pour
être procédé à la liquidation de la somme à laquelle il pèut avoir
droit; ...
(Sieur Terrier renvoyé devant le préfet pour être procédé à la
liquidation de la somme à laquelle il peut avoir droit).
OBSERVATIONS
Un conseil général avait _pris une délibération aux termes de
laquelle une prime serait allouée à tout individu qui justifierait
avoir détruit une vipère; Je sieur Terrier s'étant vu refuser le
paiement de la prime par le préfet, motif pris , de cè"· que le
crédit prévu était épuisé, demanda au Conseil d'Etat de censu
rer la violation par le département du contrat qu'il avait conclu
avec les chasseurs de vipères.
Le Conseil d'Etat se reconnut
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LES GRANDS ARRfiTS ADMINISTRATIFS
compétent, car « du refus du préfet d'admettre la réclamation
dont il l'a saisi, il est né entre les parties un litige dont il
appartient au Conseil d'État de connaître».
Par cette phrase
laconique, la Haute assemblée a pris l'une des décisions les
plus importantes du droit administratif : pour l'éclairer il faut
se reporter aux célèbres conclusions prononcées par le commissaire du gouvernement Romieu dans cette affaire.
Cet arrêt parachève l'unigcation du contentjeux des collectivités locales avec celui de l'Etat.
Le Conseil d'Etat avait déjà eu
l'occasion de statuer sur des litiges nés entre des collectivités
locales et des particuliers.
Ainsi l'arrêt Cadot * du 13 déc.
1889
tranchait un conflit entre la ville de Marseille et l'un de 'ses
agents.
De même les travaux publics communaux relevaient de
la compétence des conseils de préfecture.
Mais l'idée était
généralement admise que les contrats passés par les collectivités
1 locales étaient, en quelque sorte par nature, des contrats de
\1f droit privé, dont le contentieux devait être examiné par les
U tribunaux judiciaires.
D'une façon plus générale, le critère de
1 compétence tiré de la distinction entre les actes d'autorité et de
Ugestion, abandonné dès 1873 pour l'État par l'arrêt Blanco*,
V avait été maintenu pour les départements et les communes.
Le
commissaire du gouvernement Romieu démontra dans ses
conclusions que cette différence de traitement devait être
abandonnée : « qu'il s'agisse des intérêts nationaux ou des
intérêts locaux, du moment où l'on .est en présence de besoins
collectifs auxquels les personnes publjques sont tenues de
pourvoir, la gestion de ces intérêts ne saurait être considérée
comme gouvernée nécessairement par les principes -du droit
civil ».
Ainsi, par l'arrêt Terrier, le contentieux contractuel des
collectivités locales fut-il incorporé défip.itivement au contentieux administratif (cf.
également l'arrêt Thérond* du 4 mars
1910).
Quelques années plus tard, le Tribunal des ç'onflits
devait confirmer le système adopté par le Conseil d'Etat, en
• l'étendant au contentieux de la responsabilité (29 fév.
1908,
Feutry *).
Après l'arrêt Blanco, l'arrêt Terrier marque ainsi une
étape décisive dans le développement de la compétence de la
juridiction administrative.
L'importance et la célébrité de cet arrêt ne viennent pas
seulement de.
son contenu propre, mais aussi des conclusions
dans lesquelles le commissaire du gouvernement Romieu a
systématisé, en des termes qui restent encore en grande p~rtie
valables aujourd'hui, les principes qui régissent, pour l'Etat
comme pour les collectivités locales, la délimitation des compétences administrative et judiciaire.
Sans doute n'est-ce pas lui
qui a « inventé » la distinction entre la gestion publique et....
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