C. E. 19 oct. 1962, CANAL, ROIN ET GODOT, Rec. 552
Publié le 01/10/2022
Extrait du document
«
RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR
ORDONN{\NCES DU PRÉSIDENT
DE LA RÉPUBLIQUE
CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES
PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT
C.
E.
19 oct.
1962, CANAL, RO�IN ET GODOT, Rec.
552
(A.
J.
1962.612, chr.
de Laubadère;
Rev.
Adm.
1962.623, note Liet-Veaux;
J.
C.
P.
1963.Il.13068, note Debbasch).
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la justice et le
ministre des armées : - Cons.
que l'art.
2 de la loi du 13 avr.
1962
adoptée par le peuple français par la voie du référendum, autorise le
président de la République « à arrêter, par voie d'ordonnancé ou, selon
le cas, de décrets en Conseil des ministres, toutes mesures législatives
ou réglementaires relatives à l'application des déclarations gouverne
mentales du 19 mars 1962 »; qu'il résulte de ses termes mêmes que ce
texte a eu pour objet, non d'habiliter le président de la République à
exercgr le pouvoir législatif lui-même, mais seulement de l'autoriser à user
exceptionnellement, dans le cadre et les limites qui y sont précisées, de
son pouvoir réglementaire, pour prendre, par ordonnances, des mesures
qui normalement relèvent du domaine de la loi; qu'il suit de là que
l'ordonnance attaquée du Jer juin 1962, qui a été prise en application de
l'art.
2 de la loi du 13 avr.
1962, conserve ïe caractère d'un acte
adTJlinistra(if et est susceptible, comme tel, d'être déférée au Conseil
d'Etat par la voie du recours pour excès de pouvoir;
Sur la recevabilité de l'intervention des sieurs Bonnefous, Lafay,
Plait, Jager et André; - Cons.
que les sieurs Bonm,fous, Lafay, Plait,
Jager et André ont intérêt à l'annulation de l'ordonnance attaquée et
que, par suite, leur intervention est recevable;
Sur les conclusions de la requête tend_ant à l'annulation de l'ordon
nance du 1er juin 1962 instituant une Cour militaire de justice;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
- Cons.
que, si l'art.
2 de la loi du 13 avr.
1962 précité a donné au
président de la ·République de très larges pouvoirs en vue de prendre
toutes mesures législatives en rapport avec les déclarations gouverne
mentales du 19 mars 1962 relatives à l'Algérie et si de telles mesures
pouvaient comporter, notamment, l'institution d'une juridiction spé
ciale chargée de juger les auteurs des délits et des infractions connexes
commis en relation avec les événements d'Algérie, il ressort des termes
mêmes aussi bien que de l'objet de la disposition législative précitée, que
l'organisation et le fonctionnement d'une telle juridiction ne pouvaient
légalement porter atteinte aux droits et garanties essentiel/es de la
défense que dans la "f!lesure où, compte tenu des circonstances de
l'époque, il était indispensable de le faire pour assurer l'application des
déclaràtions gouvernementales du 19 mars 1962;
· Cons.
qu'il ne résulte pas de l'instruction que, eu égard à l'importance
et à la grav.ité des atteintes que l'ordonnance attaquée apporte aux
,principes généraux du droit pénal, en ce qui ·concerne, notamment, la
procédure qui y est prévue et l'exclusion de toute voie de recours, la
création d'une telle juridiction d'exception fût nécessitée par l'application
des déclarations gouvernementales du 19 mars 1962; que les requérants
sont dès lors, fondés à soutenir que ladite ordonnance, qui excède les
limites de la délégation consentie par l'art.
2 de la loi du 13 avr.
1962,
est entachée d'illégalité; qu'il y a lieu, par suite, d'en prononcer
l'annulation; ...
(Annulation).
OBSERVATIONS
I.
- Les principes arrêtés par les «accords» conclus à
Évian et les «déclarations gouvernementales» du 19 mars 1962
qui en publiaient les termes furent adoptés par le peuple
français lors du référendum du 8 avr.
1962.
Le texte soumis au
référendum, devenu la loi du 13 avr.
1962, autorisait, dans son
art.
2, le président de la République à «arrêter par voie
d'ordonnances ou, selon le cas, de décrets en Conseil des'
ministres, toutes mesures législatives ou réglementaires relatives
à l'application des déclarations gouvernementales du 19 mars
1962».
Parmi les mesures prises par le président de la Républi
que en vertu de ,cette disposition figurait notamment une
ordonnance du 1er juin 1962 instituant et organisant une
«·cour militaire de justice », juridiction d'exception remplaçant
le Haut tribunal militaire ' créé par unë décision prise en
application de l'art.
16 de la Constitution et chargée de juger
les auteurs et complices de certaines infractions commises en
relation avec les événements d'Algérie.
Condamné à mort par cette Cour militaire de justice le
17 sept.
1962, le sieur Canal intenta devant le juge administra
tif� en même temps que les sieurs Robin et Godot également
JCondamnés, un recours en annulation contre l'ordonnance du
1er juin 1962; à ce recours se joignirent, alléguant le dépouille
ment du pouvoir législatif, cinq sénateurs dont l'intervention
fut accueillie par le Conseil d'Etat.
Selon certaines informa
tions, l'exécution du �ieur Canal était prévue pour....
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