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Arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 6 avril 2007 (commentaire)

Publié le 14/07/2012

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Le Conseil d’Etat reprend d’ailleurs ce critère lorsqu’il affirme que « lorsqu’une personne privée exerce, sous sa responsabilité et sans qu’une personne publique en détermine le contenu, une activité dont elle a pris l’initiative, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d’une personne publique de la dévolution d’une mission de service public ; que son activité peut cependant se voir reconnaître un caractère de service public, alors même qu’elle n’a fait l’objet d’aucun contrat de délégation de service public procédant à sa dévolution, si une personne publique, en raison de l’intérêt général qui s’y attache et de l’importance qu’elle revêt à ses yeux, exerce un droit de regard sur son organisation et, le cas échéant, lui accorde, dès lors qu’aucune règle ni aucun principe n’y font obstacle, des financements «, et il va même plus loin en précisant que cela peut donner lieu à des subventions. Pour un exemple : TA Nice, 24 février 2006, M. Jean François Knecht c/ Commune de Nice.

« Ainsi, il commence par la classique exception textuelle : « sauf si un texte en dispose autrement, elles doivent en principe conclure avec un opérateur (…) un contratde délégation de service public ou (…) un marché public de service ».

En l'espèce, au vu des circonstances, aucun texte ne prévoit une telle dérogation. Le Conseil d'Etat poursuit en précisant que l'habilitation contractuelle à gérer un service public peut aussi être écartée « si eu égard à la nature de l'activité en cause etaux conditions particulières dans lesquelles il l'exerce, le tiers auquel elles s'adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel ».Pourtant, dans cette affaire, ce n'est pas sur la base de ces trois critères que le Conseil d'État placera hors champ de la concurrence la gestion du service publicculturel dont il est question.

Il fera en effet l'économie de cette analyse en appliquant une voie d'exception que l'on peut qualifiée d'originale. B.

La gestion directe d'un service public, possibilité retenue pour l'administration d'une association culturelle 1.

Consécration d'un mode inédit en droit français de gestion directe du service public : la création d'un organisme « ad hoc » par les personnes publiques: Selon le Conseil d'Etat, lorsque les collectivités publiques sont juridiquement responsables d'un service public, elles peuvent l'administrer de trois façons différentes : - « le gérer en simple régie », c'est-à-dire une gestion par les propres services des personnes publiques.- « le gérer par une régie à laquelle les personnes publiques ont accordé une autonomie financière, voire une personnalité juridique propre ».- le gérer par un organisme créé par les personnes publiques et assimilé aux services de ces mêmes personnes publiques.

C'est le cas dans cette affaire : l'Etat, larégion Provence-Alpes-Côte d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône et la commune d'Aix-en-Provence sont en effet les concepteurs de l'association pour lefestival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence. Cette association, créée dans une intention culturelle, peut donc être considérée comme l'émanation même de l'administration, comme un démembrement despouvoirs publics.

C'est pourquoi on peut qualifier cette association d'organisme « ad hoc » dédié à un but précis : la programmation et l'organisation du festival d'artlyrique et de l'académie européenne de musique.

Cet organisme est en l'espèce une association qui se trouve si proche de l'autorité publique qu'elle ne saurait êtreconsidérée comme un véritable tiers et donc faire l'objet d'un contrat de délégation de service public.

Une situation permettant donc d'échapper à l'obligation depublicité et de mise en concurrence posée par la « loi Sapin » du 29 décembre 1993 et repris aux articles 1411-1 et suivants du code général des collectivitésterritoriales.

Il est même possible de parler de « délégation inter-organique » car l'entité créée « ad hoc » ne semble pas quitter la sphère administrative.

Ce systèmepermet d'éviter, là où les gestionnaires d'un service public ne disposent pas d'un monopole, une concurrence anarchique et nuisible à l'intérêt général. En outre, le Conseil d'Etat précise « qu'un tel organisme peut notamment être mis en place lorsque plusieurs collectivités publiques décident de créer et de gérerensemble un service public », comme c'est le cas en l'espèce. La notion de création de service public par les collectivités publiques (« si elles créent à cette fin un organisme ») revient par conséquent à rechercher si cescollectivités publiques sont bien à l'origine du besoin.

En effet, si c'est un opérateur privé qui se trouve être à la source du besoin, et sans détermination du contenudes prestations par les pouvoirs publics, il n'y aura pas de service public confié : « lorsqu'une personne privée exerce, sous sa responsabilité et sans qu'une personnepublique en détermine le contenu, une activité dont elle a pris l'initiative, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d'une personnepublique de la dévolution d'une mission de service public ». Ce raisonnement se situe dans le prolongement de la jurisprudence : CAA de Marseille du 20 juillet 1999, préfet du Var c/ Commune de Toulon : «le comité àl'initiative duquel a été décidée la “Fête de la liberté du livre et de la francophonie 1997” était le seul organisateur de cette manifestation ; que, par suite, enorganisant cette fête, ledit comité n'a pas agi en qualité de prestataire de service de la commune».

En consacrant ce nouveau mode de gestion (création d'un organisme dédié à une mission de service public et assimilé aux personnes publiques), l'arrêt Communed'Aix-en-Provence constitue un véritable arrêt de principe. 2.

La constitution d'une association « ad hoc », une alternative soumise à deux conditions Le Conseil d'Etat pose deux critères faisant de l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence, unservice public culturel assimilé aux services des collectivités publiques : - « un objet statutaire exclusif de gestion du service public, sous réserve d'une diversification purement accessoire ».

D'après la dénomination même de l'association,il est clair que sa compétence est d'assurer le seul service public de la programmation et de l'organisation d'une manifestation culturelle : le festival international d'artlyrique, sans que ne se pose la question d'une diversification de ses activités. - « un contrôle des collectivités publiques comparable à celui qu'elles exercent sur leurs propres services, leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strictrespect de son objet statutaire ».

Cette condition est remplie, d'une part au regard de la composition statutaire de l'association, qui est dirigée en majorité par lescollectivités publiques (avec trois représentants de l'Etat, quatre des collectivités territoriales, etc.), d'autre part par son financement, assuré par des subventionsémanant des collectivités publiques, auxquelles s'ajoute différentes aides de la commune (mise à disposition de locaux et garanties d'emprunt). L'arrêt Commune d'Aix-en-Provence reprend en réalité les critères déjà posés par la jurisprudence communautaire (CJCE, 18 novembre 1999, arrêt Teckal), laquelleadmet une exception à l'exigence de publicité et de mise en concurrence « dans l'hypothèse où, à la fois, la collectivité territoriale exerce sur la personne en cause uncontrôle analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services et où cette personne réalise l'essentiel de son activité avec la ou les collectivités qui la détiennent ». Il résulte de ce qui précède qu'en considérant qu'une association ne pouvait gérer un service public et bénéficier à ce titre d'une subvention qu'à la condition d'avoirconclu au préalable un contrat de délégation de service public, la Cour administrative d'appel de Marseille a entaché son arrêt d'une erreur de droit.

Cela a eu pourconséquence l'annulation, en deuxième instance, des délibérations allouant à l'association des subventions publiques d'un montant non négligeable. II.

La reconnaissance de l'association en tant qu'organisme dédié à une mission de service public administratif, condition nécessaire au libre versement desubventions Le Conseil d'Etat va reconnaître à l'association, grâce à la réunion de critères matériels, le statut de service public à caractère administratif (A), permettant leversement, non soumis aux restrictions de l'article L.

2224-2 du code général des collectivités territoriales, de subventions publiques (B). A.

L'affirmation de critères matériels indispensables à la qualification de service public administratif L'arrêt Union Syndicale des industries aéronautiques du 16 novembre 1956 définit les critères qui permettent de distinguer un service public administratif et unservice public à caractère industriel et commercial.

Il s'agit de l'objet, des modalités d'organisation (1) et du mode de financement du service (2). 1.

Des critères objectifs : un objet statutaire et des modalités de fonctionnement propres aux services publics administratifs La distinction entre service public à caractère administratif et service public à caractère industriel et commercial est très importante car des conséquences différentes. »

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