Voltaire, Zadig, Chapitre VII, « Les disputes et les audiences ». C’est ainsi que Zadig montrait tous les jours la...
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«
Voltaire, Zadig, Chapitre VII, « Les disputes et les audiences ».
C’est ainsi que Zadig montrait tous les jours la subtilité de son génie et la bonté de son
âme.
On l’admirait ; et cependant on l’aimait.
Il passait pour le plus fortuné de tous les
hommes ; tout l’empire était rempli de son nom, toutes les femmes le lorgnaient, tous les
citoyens célébraient sa justice; les savants le regardaient comme leur oracle, les prêtres
même avouaient qu’il en savait plus que le vieux archimage Yébor.
On était bien loin alors
de lui faire des procès sur les griffons; on ne croyait que ce qui lui semblait croyable.
Il y avait une grande querelle dans Babylone, qui durait depuis quinze cents années, et qui
partageait l’empire en deux sectes opiniâtres: l’une prétendait qu’il ne fallait jamais entrer
dans le temple de Mithra que du pied gauche; l’autre avait cette coutume en abomination,
et n’entrait jamais que du pied droit.
On attendait le jour de la fête solennelle du feu sacré
pour savoir quelle secte serait favorisée par Zadig.
L’univers avait les yeux sur ses deux
pieds, et toute la ville était en agitation et en suspens.
Zadig entra dans le temple en
sautant à pieds joints, et il prouva ensuite, par un discours éloquent que le Dieu du ciel et
de la terre, qui n’a acception de personne, ne fait pas plus de cas de la jambe gauche que
de la jambe droite.
L’Envieux et sa femme prétendirent que, dans son discours, il n’y avait pas assez de
figures, qu’il n’avait pas fait assez danser les montagnes et les collines.
« Il est sec et sans
génie, disaient-ils; on ne voit chez lui ni la mer s’enfuir, ni les étoiles tomber, ni le soleil
se fondre comme de la cire; il n’a point le bon style oriental.
» Zadig se contentait d’avoir
le style de la raison.
Tout le monde fut pour lui, non pas parce qu’il était dans le bon
chemin, non pas parce qu’il était raisonnable, non pas parce qu’il était aimable, mais parce
qu’il était premier vizir.
Il termina aussi heureusement le grand procès entre les mages blancs et les mages noirs.
Les blancs soutenaient que c’est une impiété de se tourner, en priant Dieu, vers l’orient
d’hiver; les noirs assuraient que Dieu avait en horreur les prières des hommes qui se
tournaient vers le couchant d’été.
Zadig ordonna qu’on se tournât comme on voudrait.
***
Zadig est un apologue > un conte philosophique.
Par une histoire simple, amusante et
dépaysante, Voltaire fait réfléchir son lecteur sur les qualités d’un bon chef d’état.
I- Le vizir Zadig
A- Un ministre très apprécié
• Zadig : « la subtilité de son génie et la bonté de son âme » > intelligence et bonté réunis.
• Un ministre adoré.
Cf.
« tout l’empire était rempli de son nom, toutes les femmes le
lorgnaient, tous les citoyens célébraient sa justice ».
Justice de Zadig, beauté…+ argent.
Cf.
l’hyperbole « le plus fortuné de tous les hommes ».
• « On l’admirait ; et cependant on l’aimait » > ironie de Voltaire.
Cf.
les connecteurs « et
cependant » > marquent une opposition.
Or, il n’y a pas, a priori, d’opposition entre
« admirait » et « aimait ».
Peut sous-entendre que les chefs que l’on admire en France :
on ne peut les aimer (ce qui est dommage).
• Paradoxe : cf.
l’accumulation de formules négatives (et pourtant sensées, bonnes) « non
pas parce qu’il était dans le bon chemin, non pas parce qu’il était raisonnable, non....
»
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