Turquie (1996-1997): L'échec du gouvernement islamiste Les élections législatives anticipées du 24 décembre 1995 avaient fait du Refah (Parti de...
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Turquie (1996-1997): L'échec du gouvernement islamiste
Les élections législatives anticipées du 24 décembre 1995 avaient fait du Refah
(Parti de la prospérité, islamiste) la première force politique du pays (21 %),
suivi de près par le Parti de la mère patrie (ANAP, centre droit, 19,7 %) et le
Parti de la juste voie (DYP, centre droit, 19,6 %).
En raison de la loi
électorale, les partis ayant recueilli moins de 10 % des voix n'avaient pas
obtenu de représentation (Parti démocratique du peuple - HADEP, pro-kurde; Parti
nationaliste du mouvement, MHP, extrême droite).
Au début de 1996, les partis du centre ont tenté de former une coalition
excluant les islamistes, mais il a fallu attendre le 5 mars pour qu'un
gouvernement ANAP-DYP dirigé par Mesut Yilmaz (ANAP) obtienne un vote de
confiance; celui-ci a été invalidé par la Cour constitutionnelle le 15 mai, à la
requête du Refah.
Le 2 juin, lors d'élections partielles, le parti islamiste a
obtenu 33,5 % des voix.
Le 5 juin, M.
Yilmaz démissionnait, et le 27, l'ancien
Premier ministre Tansu Çiller (DYP), accusé d'implication dans de graves
affaires de corruption, acceptait de participer, comme vice-Premier ministre et
ministre des Affaires étrangères, à un gouvernement dirigé par le dirigeant
islamiste Necmettin Erbakan, du Refah.
Le 8 juillet, la coalition Refah-DYP
obtenait la confiance du Parlement.
Pour la première fois dans son existence, la
République de Turquie passait aux mains d'un pouvoir à tendance religieuse.
Une gestion de centre droit
Le Premier ministre N.
Erbakan a multiplié les signes d'une réorientation du
pays vers le monde musulman; les municipalités à direction islamiste (comme
Istanbul et Ankara) ont senti leur position renforcée et ont adopté des mesures
contestées par les laïcs.
En réalité, ce gouvernement a agi comme une force de
centre droit.
D'ailleurs, à partir de février 1997, la vie politique a été
suspendue aux décisions de la réunion mensuelle du Conseil national de sécurité
(MGK), organe par lequel l'armée exerce un contrôle permanent sur l'État.
Les
militaires ont cherché à imposer des mesures visant à maintenir la laïcité
héritée de la révolution kémaliste des années vingt, notamment dans le domaine
éducatif.
En avril 1997, la coalition, sévèrement critiquée par les
organisations patronales, ne bénéficiait plus d'aucun soutien des composantes
laïques de la société civile.
A partir de mai 1997, en raison de la défection de députés du DYP, la coalition
n'avait plus la majorité absolue et a dû s'allier à un petit parti d'extrême
droite, le Parti de la grande union (BBP), tandis que la Cour suprême lançait
une procédure visant à l'interdiction du Refah en raison de ses manquements au
principe de la laïcité.
Finalement, la pression constante du MGK a contraint N.
Erbakan à démissionner, le 18 juin 1997; le 20 juin, le président Süleyman
Demirel demandait à M.
Yilmaz de former un nouveau gouvernement.
Une coalition
comprenant l'ANAP, le DSP (Parti de la gauche démocratique, dirigé par Bülent
Ecevit) et le DTP (Parti démocratique de Turquie, dirigé par Hüsamettin
Cindoruk) obtenait, le 12 juillet 1997, le vote de confiance du Parlement.
Le conflit opposant, dans le Sud-Est, l'armée aux insurgés du Parti des
travailleurs du Kurdistan (PKK), séparatiste (plus de 20 000 victimes entre 1984
et 1996) a engendré une émigration massive qui a aggravé les disparités
régionales, et fait doubler ou tripler la population des villes de l'Est et
gonfler celle des métropoles de l'Ouest, dont 40 % vit en habitat précaire.
En
1996, les combats se sont un peu atténués, mais plus de 3 200 personnes (dont
une centaine de civils) ont encore trouvé la mort (contre 4 400 en 1995).
Le PKK
a cherché à compenser son affaiblissement militaire par une activité
diplomatique en direction de l'Europe, et, pour la première fois dans l'histoire
du conflit, par des attentats-suicides à Tunceli, Adana et Sivas.
Au début de
1996, l'opinion s'est fortement inquiétée de l'extension géographique des
combats vers le centre du pays (région de Sivas).
Les offensives de l'armée
turque contre les camps du PKK situés au nord de l'Irak sont devenues courantes.
Le 14 mai 1997, un contingent turc estimé à 50 000 hommes, appuyé par les
blindés et l'aviation, pénétrait une nouvelle fois au nord de l'Irak.
Un mois
plus tard, cette opération, plus massive encore que celle de mars-avril 1995,
avait déjà provoqué la mort de 2 500 Kurdes selon les sources officielles.
Fin
juin, selon ces mêmes sources, la plus grande partie des troupes avait été
retirée.
En raison notamment de cette guerre (début 1997, le conflit coûtait à l'État,
selon les estimations, 4 millions de dollars par jour), le taux d'inflation n'a
pas baissé en 1996 (79,8 %), mais la croissance a été soutenue 6,4 %).
Cependant, la balance commerciale s'est détériorée et la dette extérieure est
demeurée l'une des plus fortes du monde (75 milliards de dollars en juin 1996).
L'union douanière avec l'Union européenne, qui a pris effet le 1er janvier 1996,
a touché le marché turc par l'abaissement des coûts des....
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