TEXTE Dégagez l'intérêt philosophique du texte suivant, à partir de son étude ordonnée: «Justice-Force» «Il est juste que ce qui...
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«
TEXTE
Dégagez l'intérêt philosophique du texte suivant, à partir de
son étude ordonnée:
«Justice-Force»
«Il est juste que ce qui est juste soit suivi ; il est né·cessaire
que ce qui est fort soit suivi.
La ·.justice sans la force est
impuissante : la force sans ·la justice est tyrannique.
La
justice sans force est contredite,:parce qu'il y a toujours
des méchants ; la force sans la; jffstice est accusée: 1 rtaut
donc mettre ensemble la justice et la force et pour celà faire
en sorte que ce qui est juste soit fort, ou que:ce qui est fort
soit juste.
La justice est sujette à dispute, la force est très reconnais
sable et sans dispute.
Ainsi on n'a pu donner la forçe il·la
justice, parce que la force a contredit la justice et a dit
qu'elle était injuste, et a dit que c:;!était elle qui était juste,
Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a
fait que ce qui est fort fQt juste;..;:.,
Ne pouvant faire qu'il soit forée d'obéir à la justice, on a·
fait qu'il soit juste d'obéir à la force ; ne pouvant fortifier
la justice, on a justifié la force; afin que le juste et le fort
fussent ensemble, et que la paix fût, qui est le souverain
bien;»
PASCAL, Pensées (298°299}.
Approche du texte
A.
Le thème:
Il s'agit du problème des rapports entre la justice et la force.
B.
Question implicite à laquelle le texte répond:
La justice idéale respectant la dignité de l'homme peut-elle
s'incarner dans les individus et les institutions ?
C.
Réponse à la question :
a) Idée générale :
La justice régnant dans l'humanité n'est qu'une force que
l'on considère comme légitime.
b) Structure logique du texte :
«Il est juste•..
ce qui est fort soit juste» : démonstration du
besoin réciproque de la justice et de la force.
«La justice est sujette à dispute...
ce qui e_st fort soit juste» :
la justice authentique ne peut pénétrer dans les institutions.
«Ne pouvant faire...
souverain bien» : la paix"même impar
faite doit être protégée.
Analyse du texte
A.
Explication commentée : ·
a) «Il est juste que ce qui est juste soit suivi, il est nécessaire
que ce qui est fort soit suivi» : Pascal oppose ici une
évidence de droit à une évidence de fait.
Le premier
membre de phrase fait allusion à la justice idéale, l'auteur
avance l'exigence d'une conscience droite posant comme
devoir la réalisation de ce qui est juste, sà démonstration
souligne,.qu'en réalité cette justice idéale n'est pas «suivie» ..
Le second membre de phrase est alors une constatation
de fait : la force présente une contrainte telle qu'il est
impossible à l'individu de s'y dérober : céder à la force est
donc un acte de nécessité.
«La justice sans la force est impuissante, la force sans la
justice est tyrannique» : Si le sujet du droit est sans force
et s'il a affaire à des «méchants», le pouvoir moral lié à la
justice n'est pas reconnu car il suppose de la part q'autrui
une volonté ·bonne, sf cette volonté n'existe pas, le· pouvoir
moral lié à la justice n'est que faiblesse.
D'autre part, si la
force pure, séparée de la justice s'installe, ori .aboutit à la
tyrannie, gouvernement despotique, irijuste, souvent cruel ;
c'est ainsi que la force pure, «la force sans la justice est
accusée», ce qui atteste une secrète insuffisance de la force
la force pure peut toujours en effet être renversée par
une force plus grande, cela expliqùe que par instinct, mais
aussi quelquefois par préméditation, le plus fort veut
paraître avoir le droit· de son côté.
En ce sens, Rousseau
affirmait : «Le plus fort n'est jamais assez fort s'il ne
transforme sa force en droit et l'obéissance en devoir.»
Autrement dit, la force ne peut durer si elle ne se transforme pas en situation juridique et morale.
Justice et force
s'appellent donc mutuellement : «Il faut faire en sorte que
ce qui est juste soit fort ou que ce qui est fort soit juste» ;
dans le premier cas il s'agit de la justice idéale, dans le
second cas, d'un simulacre.de justice destiné à faire accepter
la force, c'est alors une justice conventionnelle, une justice
extérieure qui a cependant pour Pascal le mérite de faire
régner l'ordre dans·la société.
b} Dans ~ne perspective pessimist~, l'auteur pense qu'on ne
pourfa jamais faire pénétrer la justice authentique dans les
institutions car «la justice est sujette à dispute, la force est
très reconnaissable et sans dispute» ; les hommes se
trouvent en effet rarement d'accord sur ce qui est idéalement juste, sans doute cela tient--il de la faiblesse et des
limites de la raison humaine, raison qui selon Pascal n'est
pas, assez puissante pour donner la force à la justice.
Par
contre, la force, fait empirique, se reconnaît sans équivoque
possible, les triomphes ou les victoires en témoignent.
Ainsi,
n'ayant pu donner la force à la justice, «on a fait que ce qui
est fort fût juste».
Cette affirmation n'est pas sans rappeler
certains_ textes de Platon, en particulier, lè discours de
Calliclès dans Le Gorgias identifiant la force à la véritable
justice.
Selon Pascal, lès hommes n'ayant réussi à imposer
une justice authentique dans les institutions, on n'a pu faire
autrem~nt que de donner l'estampille de la légitimité ou de
la justice à la force.
Rousseau a en partie reconnu la valeur
de la pensée de Pascal, bien que, plus optimiste, il pensait
possible comme l'atteste Le Contrat social, de modifier
la justice régnante.
Marx de son côté voyait bien dans les
rapports de justice, dès rapports de force.
Dans ces différentes thèses, la justke apparaît comme le
résultat de l'effort par lequel un privilège tend à se légitimer....
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