SUJE_T En 1735, Voltaire écrivait à M. Desforges-Maillard (un avocat de province qui lui avait envoyé des « vers trop...
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«
SUJE_T
En 1735, Voltaire écrivait à M.
Desforges-Maillard
(un avocat de province qui lui avait envoyé des « vers
trop faciles ») : « Je n'estime la poésie qu'autant qu'èlle
est l'ornement de la raison.
»
Vous expliquerez et vous discuterez ce jugement.
(Ce sujet a été plusieurs fois proposé au Baccalauréat.)
REMARQUES POUR UN PLAN
,1.
Voltaire se rallie à une conception formelle et ornementale : en
d'autres termes, pour lui la poésie n'a pas de domaine spécial.
Tout ce qui relève deJa raison (il faut entendre ici le mot au sens
classique : ce qui est conforme à la vraisemblance, et surtout à
un certain modèle universellement valable) peut faire partie de
la poésie ou· plu_tôt est susceptible d'ornementation poétique.
' On aurait tort de croire que Voltaire prêche exclusivement pour
la poésie didactique et rationnelle à la manière de l'Hermès d'André
Chénier.
.
2.
Cettè position· s'explique 'par le elfmat�de l'époqùe · ep,_ matière · '
1
poétiq;u_c, : déjà la querelle d�s Anciens et.
des Moder�es ·avait
dé.\)ouché sur une querelle de la poésie.
Houdart de la �otte·.( Odes
a9ec�un discours sur la poésie en général, 1709.
Discours sur la
'- tragédie, 1730) semble s'opposer à Valtaire, mais en réalité ils
sont à peu p_rès d'àccord : tous les deux considèrent que la poésie
n'est què.dans la·forme; seulement; en face de Houdart, qui veut
la proscriré,,-Voltaire pense que ce n'est pas un ornement à dédaigner.
/ Houdart, représentant le point de vue le plus- avancé 0 des
Modernes, estime que fo.
vers-.
tyrannise le bon sens et doit être
l supprimé : lui-même donne l'exe�ple ,et essaie l'ode ep.
'pro!e.'
Il pense'.
que1 s'il y a un domaine propre à la poésie, il·'n'a ri_en ,
à voir avec la versification et il définit ce domaine : « la hardiesse·
des ,penséès,· la vérité des·-images et l'énergie de.
l'expression_»;
toutes valeurs, pense-t-il, qui s'accommodent de la prose.
Il mécon• : 1natt la puissance affective de la poésie et l'incantation rythmique: .
,
.« Je fais, déclare-t-il, quelque honte à des hommes raisonnables
d'estiJI1er plus un bruit mesuré que les idées qui les éclairent et les.
idées qui les toucpent.
» En somme, il met la poésie dans le fond
et ce fond est pour lui rationnel et oratoire: cette confusion avec élo-·
quence domine tout le débat et durera jusqu'au romantisme inclus.
Voltaire, au ·contraire, _qµi lui a répondu, lui signale le mérite
.
du _,;ei:s et de « ·l'hârmonie chantante qui' naît d·e cette mesure
difficile .».
Mais _il croit, comme son adversaire, que le fond_ doit
· être,identique à celui de la prose et que la.
poésie« n'est que l'orne· ,ment de la raison ».
Seulement, lui, Yoltaire, attache de l'impor
tance à cet ornement, alors que H:oudart est persuadé qu'on
, peut s'en passer.
r
'..
3,' Cette conception est célle de toÙt le xvme siècle.
On dira alors :
« beau comme de la prose ».
On verra ._dans la poésie un exercice
difficile.
Si, dès le début du si�cle, l'abbé Du Bos essaiait de réha- ·
· biliter la valeur du sentiment (mais hors de la rime et de la versi
' fü:ation), il faut attendre Ché·nier pour que soit rappelé le pouvoir.
spécifique du vers.
L'apport ·du romantisme, ce sera la réconciliation de trois éléments que le xvme sièclè n'arrivait pas à bien
associer :....
»
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