Sri Lanka (1994-1995): Une nouvelle donne? Les données de la crise politique qui déstabilise Sri Lanka depuis le début des...
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Sri Lanka (1994-1995): Une nouvelle donne?
Les données de la crise politique qui déstabilise Sri Lanka depuis le début des
années quatre-vingt ont été sensiblement modifiées par un sursaut démocratique,
marqué par le succès de l'Alliance populaire aux élections législatives du 16
août 1994, puis par la victoire de son leader Chandrika Kumaratunga aux
élections présidentielles du 9 novembre.
Mais si dans le Sud, à majorité
cingalaise, les conditions d'un règlement négocié du conflit séparatiste
semblaient réunies, il n'en est pas allé de même dans l'Extrême Nord tamoul, où
le processus électoral n'a pu se dérouler.
Enfin, la situation est restée tendue
dans l'Est multicommunautaire.
L'intransigeance de Velupillai Prabhakaran, chef
de guerre des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE, revendiquant, depuis
le début des années quatre-vingt, la séparation du nord et de l'est de l'île à
majorité tamoule), qui contrôle l'essentiel de la péninsule de Jaffna et de son
arrière-pays, a compromis les pourparlers amorcés à partir d'août 1994: la trêve
conclue en janvier 1995, peu avant la visite du pape Jean-Paul II, a été rompue
à l'initiative des LTTE à la mi-avril, en dépit de nombreuses concessions
gouvernementales (levée du blocus et financement de la reconstruction du Nord).
Les victoires électorales de Chandrika Kumaratunga
Contesté par ses rivaux qui l'accusaient de corruption et d'avoir
institutionnalisé le règne de la terreur dans sa lutte contre l'insurrection
menée entre 1988 et 1990 par le Front de libération du peuple (JVP, revendiquant
la défense de la communauté cingalaise contre l'alliance du gouvernement de
Colombo avec l'Inde), le président Ranasinghe Premadasa (élu de justesse en 1988
dans une atmosphère de violence) avait été assassiné le 1er mai 1993,
certainement par les LTTE.
Ces derniers cherchaient, en effet, à déstabiliser le
régime.
Son successeur, Dingiri Banda Wijetunga, s'est révélé incapable de
rassembler les factions du Parti national uni (UNP), usé par dix-sept ans de
pouvoir.
Ce parti a ainsi perdu les élections législatives puis présidentielles,
remportées avec plus de 62% des suffrages par Chandrika Kumaratunga (fille de
Sirimavo Bandaranaïke, chef du gouvernement jusqu'en 1977), qui avait regroupé
autour du Parti de la liberté de Sri Lanka (SLFP) les partisans d'un retour à la
paix et à la démocratie, d'un assainissement des moeurs politiques et d'une
redistribution des fruits de la croissance.
En faisant campagne pour une
solution négociée du conflit séparatiste et pour l'abandon du système
présidentiel, elle a suscité un réveil démocratique porteur d'espoir pour une
société meurtrie par des années de violence quotidienne.
Les élections ont été marquées par une forte participation dans le Sud et le
Centre à majorité cingalaise et chez les minorités musulmane et tamoule qui ont
pu s'exprimer librement dans la province orientale, le Centre et la région
urbaine de Colombo, en dépit de l'appel au boycottage lancé par les LTTE.
La
déroute des candidats défendant des positions "communalistes", chez les
Cingalais comme chez les Tamouls, la faiblesse du score du JVP ont été autant de
signes d'une lassitude idéologique et d'une volonté de mettre fin aux violences.
Lors des présidentielles, Chandrika Kumaratunga a recueilli la majorité des
suffrages au sein de toutes les communautés et dans toutes les régions.
L'assassinat de son principal rival, Gamini Dissanayake (UNP), probablement par
les LTTE, a accentué l'ampleur de cette victoire, due pourtant surtout au
charisme personnel de la candidate, à l'honnêteté qu'on lui prête, à l'action
militante des jeunes Cingalais qui l'ont soutenue, et au ralliement des
représentants des minorités (Muhammad Ashraff, fondateur du Congrès musulman de
Sri Lanka, Lakshman Kadirgamar, membre de l'intelligentsia tamoule de Colombo,
nommé ministre des Affaires étrangères, et Saumyamoorthi Thondaman, leader de
longue date du CWC, syndicat des travailleurs tamouls des plantations).
Les bonnes relations du nouveau pouvoir avec l'Inde ont été renforcées à
l'occasion de la visite officielle de Chandrika Kumaratunga en mars 1995.
Aux
liens anciens entre les familles Nehru (dont faisaient partie Indira et Rajiv
Gandhi) et Bandaranaïke s'est ajoutée la convergence d'intérêts entre Colombo et
New Delhi: le gouvernement sri-lankais n'est pas suspecté comme ses
prédécesseurs de sympathies américaines ou pakistanaises, et la suspension des
négociations avec les LTTE le disculpait de toute compromission avec les
assassins de Rajiv Gandhi.
Ce sont d'ailleurs ces liens qui ont poussé V.
Prabhakaran, dont l'Inde réclame l'extradition, à rompre la trêve en visant la
marine et l'aviation adverses.....
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