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Pourquoi écrivez-vous ? A cette question, l'écrivain honnête pourrait d'abord répondre que c'est pour lui un besoin, et le but...

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« Pourquoi écrivez-vous ? A cette question, l'écrivain honnête pourrait d'abord répondre que c'est pour lui un besoin, et le but même de sa vie, sa raison d'être, puisqu'il a choisi ce métier; il pourrait d'ailleurs ajouter, le temps des mécènes étant passé, que c'est aussi sa profession et son gagne-pain.

Mais bien vite, on en viendrait à désirer de savoir si l'écrivain veut divertir ou instruire, et l'erreur fondamentale de notre temps est peutêtre justement de vouloir dresser l'une contre l'autre l'œuvre de divertissement et l'œuvre de réflexion, en un mot celle qui n'est au service d'aucune doctrine, et celle qui se veut « engagée ». En effet, l'artiste peut vivre dans son temps, ne rien en ignorer ni en renier, sans pour autant se contenter de demeurer attaché à un fait historique ou à une doctrine nettement définie.

En écrivant ses Amours, Ronsard est de son temps, mieux sans doute qu'en écrivant laborieusement ses Discours.

Avant d'être le champion d'affaires et de causes célèbres, Voltaire écrit des satires, des poésies de salon et des contes libertins, fort charmants et propres à nous faire revivre une époque ; l'auteur des Contemplations nous parle de nous quand il parle de lui, et l'œuvre lyrique de Hugo ne nous fait pas oublier que les Châtiments ou l'Histoire d'un Crime comptent parmi les œuvres les plus engagées qui soient.

Et ce qui fait la valeur, la profondeur, la beauté émouvante de l'œuvre d'Éluard, c'est l'union étroite d'un thème d'amour et du thème actuel ; Éluard, poète engagé, reste un des plus grands poètes d'amour, tout comme Apollinaire, et c'est ce qui explique à nos yeux leur « présence ».

Il n'y a donc aucun motif de n'afficher que mépris pour la littérature qui n'est pas spécifiquement témoignage d'un événement mis au service d'une idée.

Il n'est pas moins faux ni dangereux, en les dissociant, de vouloir les opposer de façon irréductible. Ce serait d'autant plus périlleux que ramener la littérature à un art d'engagement serait nier les besoins du public.

Que, dans les quartiers les plus populaires de la périphérie de Paris, les « théâtres de la culture » donnent des œuvres qui illustrent les grands problèmes actuels et cherchent à faire réfléchir, c'est fort bien, et c'est un besoin pour le peuple, de plus en plus concerné.

Mais qu'ils se limitent à ce rôle serait une grande erreur et on l'a en général assez bien compris, depuis Jean.... »

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