Peut-on ne pa& &avoir ce que L'on fait? Premier exemple de dissertation Le rapport entre savoir et faire nous impose,...
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Peut-on ne pa& &avoir ce que L'on fait?
Premier exemple de dissertation
Le rapport entre savoir et faire nous impose, semble-t-il, _l'idée d'un savoir-faire:
pour faire, il faut savoir.
Impossible de penser l'action sans supposer un but, une
volonté, bref un savoir qui l'oriente.
Pourtant, combien de fois nous arrive-t-il de
constater : «je n'ai pas voulu cela» ou de regretter des actions.
Nous pensons
alors: je ne savais pas ce que je faisais.
Serait-il alors possible, voire légitime, de
ne pas savoir ce que nous faisons? Le problème ici est celui du rapport entre
savoir et faire : comment le savoir peut-il manquer là où il doit être au contraire
le plus appliqué, dans l'action, dans l'agir? Serait-ce parce que l'action déborde
notre savoir?
Ainsi, pourquoi penser l'action comme forcément consciente? Qu'est-ce qui
pourrait la rendre inconsciente et jusqu'à quel point?
Le mot grec sophia a donné dans notre langue deux mots: savoir et sagesse.
Cela
nous indique déj� •Un- rapport quasiment incontournable entre la théorie et la
pratique: le savoir s'accompagne de sagesse.
Ou encore, pour faire, il faut savoir
quoi faire: aucune action n'est envisageable sans projet.
l...'.action est une mise en
forme, ou en acte, de ce qui au départ est« en puissance» (Aristote).
Ainsi le but est toujours celui de bien faire, et ceci quoi que j'entreprenne : que
j'écrive ou cherche à faire le bien, c· est toujours un bien faire que je vise.
Ce«bien»
est à comprendre comme réussite, efficacité et toute action devient technique: je
procède en vue de réussir ce que je fais.
Ce procédé ne peut venir que du savoir.
Voir correctement les choses, les connaître, faire en sorte que mon esprit se les
représente telles qu'elles sont.
Ainsi, si je fais une maison, il me faut saiœir ce
qu'est une maison.
Cela vaut pour nos actions les plus dignes.
Pour me faire homme, il me faut savoir
ce que je suii;.
La philosophie est censée m'aider dans cette démarche: elle aussi
est bien la recherche d'un savoir sur l'homme en vue d'une action ou d'une
vie authentiquement humaines.
Pour bien faire, mon savoir doit s'étendre à
moi-même: « connais-toi toi-même» nous demande Socrate.
Si toute action suppose ainsi un sayoir qui la guide, ce savoir est-il pour autant
toujours possible?
Il semble que l'homme ne sache pas toujours, et que parfois le faire doive se
passer de savoir: Ainsi pour savoir, il faut du temps, le temps du retour sur soi,
le temps d'une réflexion.
Or certaines actions s'inscrivent dans un contexte
d'immédiateté empêchant toute médiation.
Il me faut agir dans l'instant même,
comme l'indique le mot réaction : la réaction est une réponse à donner à une
action et se passe de tout projet, donc de tout savoir.
En réagissant, je me risque
à ne pas savoir ce qu� je fais et la plupart des réactions sont ainsi mauvaises.
Si
elles sont bonnes, on les attribue davantage à une intuition ou au hasard qu'à un
véritable savoir.
L:accîdent est par définition une action entreprise sans savoir.
L'.enfant est aussi celui qui ne sait pas.
Il lui faut pourtant agir et ses actions sont
donc aussi des accidents.
Mais il existe aussi des semblants de savoir; le préjugé et ropinion nous habitent
et nous font agir sans que nous sachions vraiment ce que nous faisons.
Notre
éducation nous pousse ainsi à fairé en fonction des autres ou pour les autres, sans
que ce que nous faisons nous exprime vraiment.
Nous ne savons pas exactement
ce que nous entreprenons parce qtie nous ne sommes pas nous-mêmes.
Mais il nous arrive plus encore ; de ne pas vouloir savoir.
L:inconscience devient
ce que Freud appelle inconscient psychique u dynamique.
Certaines facettes de
nous-mêmes sont déshonorantes, immorales, condamnées par la société, et
nous les refoulons au plus profond de nous-mêmes.
Le problème est que cet
inconscient refoulé tente toujours, et dès que roccasion se présente, de resurgir
à notre insu.
Il se sert de ce que nous faisons pour se manifester.
Ainsi on parle
d'actes manqués : nous ne savons pas ce que nous faisons parce que nous ne
voulons pas le savoir.
Je ne comprends pas, par exemple, le sens de tel ou tel
lapsus, ou de tel ou tel oubli et je les attribue au hasard.
Il est donc possible de ne pas savoir ce que nous faisons, soit parce que nous
ignorons, ou croyons savoir, soit parce que nous ne voulons pas savoir.
Mais ces
actes inconscients sont-ils fatals? L:inconscience et l'inconscient sont-ils sans
remèdes?
Le problème qui se pose est ainsi celui de la légitimité de nos actions incons
cientes : jusqu'où a-t-on le droit d'être inconscient? Comment s'efforcer d'être au
maximum conscient?
Il semble possîble d'excuser une action inconsciente lorsqu'il lui est impossible
de devenir consciente.
Si, selon Hegel, seuls le fou et rentant sont excusés, c·est
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parce qu'il �e leur est pas donné, justement, d'être conscients : chez l'un, la raison
esl perdue, et donc le savoir qui raccompagne; chez rautre, la raison n'est pas
encore née.
De même, l'idée d'un savoir total et absolu pouvant donner lieu à une
action parfaite semble exclue, au nom de la philosophie qui sinon perdrait son
sens et sa vocation : il est impossible d'aimer le savoir en vue de savoir ce que r on
fait, si ron possède déjà ou si ron croit posséder la totalité du savoir.
Mais il nous
est donné de nous acheminer le plus possible vers une action sinon parfaite, du
moins admirable ou exemplaire pour le savoir qu'elle met en œuvre.
Ainsi nous nous devons du même coup d'éliminer en nous les faux savoirs qui
nous feraient entreprendre des actions regrettables : y réfléchir à deux fois est
toujours possible dès que ron dispose du temps suffisant, et il est même possible
de le prendre ou de l'allonger s'il s'avère trop court.
C'est le propre de l'homme
que d'avoir à sa disposition une conscience pour«se contempler, se représenter
à Lui-même, se penser» (Hegel), et donc se voir agir avant même d'agir.
Car La
conscience est surtout«projet» ou «intentionnalité», ce qui rend possible une
visée bien centrée de L'action à entreprendre.
Dans cette réflexion ou retour sur
soi, c'est bien Le préjugé que j'abandonne.
Je me concentre sur moi-même ainsi
que sur mon vouloir, pour mieux viser ce que je veux; et en même temps, je
Limite au maximum Le risque de me voir plus tard regretter mon action et de dire :
«je n'ai pas voulu cela».
Car non seulement je me serais assuré que c'est moi qui
ai voulu et pas un autre, que j'ai bien voulu et non pas simplement désiré ou été
passif, enfin que c'est bien cela que j'ai voulu et pas autre chose.
Ce retour sur soi échappe-t-il au névrosé victime de son inconscient? est ce
que montre Freud.
Le névrosé est en quelque sorte excusé : son refus de savoir
est inconscient ! IL ne sait pas qu'il ne veut pas savoir ! l'.incompréhension qu'il
montre à L'égard de ses rêves ou de ses actes manqués est donc selon Freud
sincère et toute introspection serait condamnée à L'échec.
Mais comme Le note
Sartre : «comment La censure distinguerait-elle Les impulsions à refouler sans
avoir conscience de Les discerner?» IL 'Être et le Néant) ; ou encore : «je dois
savoir très précisément cette vérité pour me La cacher plus soigneusement».
Même La maladie ne serait ainsi qu'une mauvaise foi dans Laquelle je ne refuse
pas seulement certains aspects ponctuels de moi-même, mais dans Laquelle je
me refuse tout entier.
Mais pour me refuser ainsi, il faudrait que je me connaisse f
IL devient donc possible pour Le névrosé de savoir ce qu'il ne veut pas savoir et de
comprendre Le sens caché de ses actes : ils sont ceux de celui qu'il ne veut pas
connaître, mais qu'il connaît quand même.
La coquette....
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