Matérialisme historique et économie politique marxiste 1. Le matérialisme historique • Smith, J.-B. Say, Ricardo. Les économistes classiques* se donnaient...
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«
Matérialisme historique et
économie politique marxiste
1.
Le matérialisme historique
• Smith, J.-B.
Say,
Ricardo.
Les économistes classiques* se donnaient comme objet d'étude la
production, la distribution et la consommation des richesses.
Ils uti
lisaient des catégories 0 comme «population», «travail», «propriété».
Mais ces catégories élaborées pourtant à partir du réel, du concret, ne
sont que des abstractions
« Il semble que ce soit la bonne méthode de commencer par le réel
et le concret, qui constituent la condition préalable effective, donc en
économie politique, par exemple la population qui est la base et le
sujet de l'acte social de production tout entier.
Cependant, à y
regarder de plus près, on s'aperçoit que c'est là une erreur.
La
population est une abstraction si l'on néglige par exemple les classes
dont elle se compose.
Ces classes sont à leur tour un mot creux si l'on
ignore les éléments sur lesquels elles reposent, par exemple le travail
salarié, le capital, etc.
Ceux-ci supposent l'échange, la- division du
travail, le prix, etc.
(...) Le concret est concret parce qu'il est la synthèse de multiples
déterminations, donc unité de la diversité.
C'est pourquoi il apparaît
dans la pensée comme procès de synthèse, comme résultat, non
comme point de départ, bien qu'il soit le véritable point de départ et
par suite également le point de départ de la vue immédiate et de la
représentation.»
Marx*, Introduction à la critique de l'économie politique (p.
164)
Ma,x I K.1
•
(1B18-1883).
L'autre erreur des économistes classiques, c'est de présenter ces
catégories comme universelles, alors qu'elles ont été construites à
partir de la société capitaliste qui repose sur un mode de production
parmi d'autres, déterminé historiquement.
L'économie politique vé'.ri
tablement scientifique devra donc étudier des catégories abstraites et
générales et des catégories spécifiques parce que historiques : la
propriété privée, par exemple n'existe que dans certaines sociétés, à
certaines époques.
« L'analyse scientifique du mode de production capitaliste prouve
qu'il est un mode de production d'une espèce particulière, déterminée
historiquement d'une manière spécifique ; qu'il suppose, comme tout
.autre mode de production défini, un niveau donné de la productivité
sociale et de ses formes de développement, qui forment sa condition
historique ; condition qui est elle-même le· résultat et le produit
historique d'un processus antérieur, sur lequel s'élève comme sur son
fondement donné le nouveau mode de production : que les rapports
de production correspondant à ce mode de production spécifique,
historiquement déterminé - rapports que contractent les hommes
dans leur processus de vie en société - ont un caractère spécifique,
historique et transitoire ; et qu'enfin les rapports de distribution sont
par essence identiques à ces rapports de production, sont le pendant
de ces rapports, de sorte que les uns et les autres ont le même
caractère historique transitoire.»
Marx, Le capital (section 2, livre 3)
Marx pose que la satisfaction des besoins et les rapports sociaux qu'elle
détermine n'est pas l'une des activités de l'homme parmi d'autres, mais
est« la condition fondamentale de toute histoire».
L'économie politique
qui étudie l'ensemble des rapports de production est donc le principe 0
de toute étude de l'homme.
« Pour vivre, il faut avant tout boire, manger, se loger, s'habiller et
quelques autres choses encore.
Le premier fait historique est donc la
production des moyens permettant de satisfaire ces besoins, la
production de la vie matérielle elle-même, et c'est même là un fait
historique, une condition fondamentale de toute histoire que l'on doit,
aujourd'hui encore comme il y a des milliers d'années remplir jollr
par jour, heure par heure, simplement pour maintenir les hommes en
vie.»
Marx, Idéologie allemande (p.
28)
Cette affirmation constitue ce qu'on appelle depuis Lénine le matéria
: tous les phénomènes politiques, juridiques, sociaux,
intellectuels qui constituent les superstructures sont déterminés en
dernière instance par l'infrastructure économique.
lisme historique
« Dans la production sociale de leur existence, les hommes entrent
en des rapports déterminés, nécessaires0 , indépendants de leur vo
lonté, rapports de production qui correspondent à un degré de
développement déterminé de leurs forces productives matérielles.
L'ensemble de ces rapports de production constitue la structure
économique de la société, la base concrète sur laquelle s'élève une
superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des
formes de conscience sociales déterminées.
Le mode de production de
la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et
intellectuel en général.»
Marx, Critique de l'économie politique (préface)
En affirmant ainsi que les phénomènes intellectuels (idées d'une
société, philosophie, religion), les événements politiques ou sociaux
sont déterminés par les rapports de production, la théorie marxiste
s'oppose totalement à tous les systèmes idéalistes pour lesquels la
réalité première est la pensée.
Le matérialisme historique ne nie pas
l'existence de la pensée, il affirme seulement que la réalité première est
constituée par les données économiques.
C'est un matérialisme dans la
mesure où la réalité première est la matière, un matérialisme histo
rique parce que tout mode de production est historiquement déter
miné.
« La question du rapport de la pensée à l'être, de l'esprit à la
nature, question suprême de toute philosophie, a, tout comme chaque
•
Engels
11820-18es1.
• Voir P- 81.
(F.)
religion, ses racines dans les conceptions bornées et ignorantes de
l'état de sauvagerie.(...)
Selon qu'ils répondaient de telle ou telle façon à cette question, les
philosophes se divisaient en deux grands camps.
Ceux qui affirmaient
le caractère primordial de l'esprit par rapport à la nature, et qui
admettaient par conséquent, en dernière instance, une création du
monde de quelque espèce que ce fût (...), ceux-là formaient le camp
de l'idéalisme.
Les autres, qui considéraient la nature comme
l'élément primordial, appartenaient aux différentes écoles du matéria
lisme.
>>
Engels * , Ludwig Feuerbach (p.
25)
La méthode utilisée par Marx est la dialectique hégélienne* « dépouil
lée de ses enveloppes idéalistes» parce que seule, elle permet de com
prendre les contradictions nées des abstractions de l'économie classi
que : par exemple le fait que consommation et production soient indis
sociables bien qu'opposées en apparence.
« Double caractère de la consommation, subjectif et objectif :
d'une part, l'individu qui développe ses facultés en produisant les
dépense également, les consomme dans l'acte de la production, tout
comme la procréation naturelle est consommation des forces vitales.
Deuxièmement : consommation des moyens de production que l'on
emploie, qui s'usent, et qui se dissolvent en partie (comme par
exemple lors de la combustion) dans les éléments de l'univers.
De
même pour la matière première, qui ne conserve pas sa forme et sa
constitution naturelles, mais qui se trouve consommée.
L'acte de
production est donc lui-même dans tous ses moments uq acte de
êonsommation également.
»
Marx, Introduction à la critique de l'économie politique(p.
155)
« Ce qui distinguait le mode de pensée de Hegel de celui de tous
les autres philosophes, c'était l'énorme sens historique qui en
constituait la base.(...) Il fut le premier à essayer de montrer qu'il y a
dans l'histoire un développement, une cohérence interne(...).
Marx était le seul qui ait pu prendre à tâche de décortiquer le
noyau de la logique hégélienne, où sont renfermées les découvertes
effectives de Hegel en ce domaine, et de reconstruire, dépouillée de
ses enveloppes idéalistes, la méthode dialectique dans la forme simple
où elle est la seule forme juste du développement de la pensée.
»
Engels, 2• article sur la Contribution
à la critique de l'économie politique
2.
Travail, échange
Les hommes, comme les animaux doivent, pour vivre, satisfaire leurs
besoins.
Ce qui distingue de prime abord l'homme de l'animal, c'est
qu'il crée des moyens (outils, techniques) permettant de satisfaire ses
besoins et qu'il transforme la nature par son travail.
En transformant la
nature, il se transforme lui-même.
C'est à cette relation dialectique
entre l'homme et la nature que Marx donne le nom de praxis.
Marx analyse le procès de travail en trois éléments
* Procès = proces
sus.
« Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l'homme
et la nature.
L'homme y joue lui-même vis-à-vis de la nature le rôle
d'une puissance naturelle.
Les forces dont son corps est doué, bras et
jambes, tête et mains, il les met en mouvement afin de s'assimiler des
matières en leur donnant une forme utile à sa vie.
En même temps
qu'il agit par ce mouvement sur la nature extérieure et la modifie, il
modifie sa propre nature et développe les facultés qui y sommeillent.
(...)
Voici les éléments simples dans lesquels le procès* de travail se
décompose:
1.
activité personnelle de l'homme, ou travail proprement dit ;
2.
objet sur lequel le travail agit ;
3.
moyen par lequel il agit.
»
Marx, Le capital (section 3, chap.
7)
Il aboutit à la distinction :
- moyens de production
travail productif
matières premières
{ outils, machines
activité de l'homme
L'emploi et la création de moyens de travail (...) caractérisent
éminemment le travail humain.
Aussi Franklin donne-t-il cette
définition de l'homme : l'homme est un animal fabricateur d'outils (a
toolmaking animal).
Les débris des anciens moyens de travail ont
pour l'étude des formes économiques des sociétés disparues, la même
importance que la structure des os fossiles pour la connaissance de
l'organisation des races éteintes.
Ce qui distingue une époque
économique d'une autre, c'est moins ce que l'on fabrique, que la
manière de fabriquer, les moyens de travail par lesquels on fabrique.
(...)
Dans le procès de travail l'activité de l'homme effectue donc à
l'aide des moyens de travail une modification voulue de son objet.
Le
procès s'éteint dans le produit, c'est-à-dire dans une valeur d'usage,
une matière naturelle assimilée aux besoins humains par un change
ment de forme.
(...)
Si l'on considère l'ensemble de ce mouvement au point de vue de
son résultat, du produit, alors tous les deux, moyen et objet de
travail, se présentent comme moY.ens de production, et le travail
lui-même comme travail productif.
»
Marx, Le capital (section 3, chap.
7)
(<
Tout travail produit une valeur d'usage: un objet utile à la vie.
Avec la
division du travail apparaît nécessairement la valeur d'échange: celui
qui produit du blé peut échanger ce blé contre une autre valeur d'usage,
du drap, par exemple.
« L'utilité d'une chose fait de cette chose une valeur d'usage.
Mais
cette utilité n'a rien de vague et d'indécis.
Déterminée par les
propriétés du corps de la marchandise, elle n'existe point sans lui.
Ce
corps lui-même, tel que fer, froment, diamant, etc., est conséquem
ment une valeur d'usage, et ce n'est pas le plus ou moins de travail
qu'il faut à l'homme pour s'approprier les qualités utiles qui lui donne
ce caractère.
(...)
La valeur d'échange apparaît d'abord comme le rapport quantita
tif, comme la proportion dans laquelle des valeurs d'usage d'espèces
différentes s'échangent l'une contre l'autre, rapport qui change
constamment avec le temps et le lieu.»
Marx, Le capital (section 1, chap.
1)
La valeur d'échange d'un objet ne réside pas dans son utilité: l'air que
l'on respire est très utile (et même indispensable) et pourtant n'a (du
moins pour le moment) aucune valeur d'échange.
Si l'on peut échanger
deux objets, c'est qu'ils ont quelque chose de commun: ils sont le
produit du travail : la valeur d'échange d'une marchandise est donc
déterminée par le temps de travail nécessaire pour la produire :
« Le quelque chose de commun qui se montre dans le rapport
d'échange ou dans la valeur d'échange des marchandises est leur
valeur ; et une valeur d'usage ou un article quelconque, n'a une
valeur qu'autant que du travail humain est matérialisé en lui.
Comment mesurer maintenant la grandeur de sa valeur ? Par le
quantum de la substance « créatrice de valeur» contenue en lui, du
travail.
La quantité de travail elle-même a pour mesure sa durée dans
le temps, et le temps de travail possède de nouveau sa mesure dans
des parties du temps telles que l'heure, le jour,....
»
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