Maroc (1991-1992) Le temps de tous les dangers? Mis à mal par la guerre du Golfe, par des révélations sur...
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Maroc (1991-1992)
Le temps de tous les dangers?
Mis à mal par la guerre du Golfe, par des révélations sur le "jardin secret" du
roi Hassan II en matière de droits de l'homme, par une décennie d'ajustement
structurel au coût social considérable, le Maroc est entré dans une période de
tous les dangers.
Au moment où se desserrait, grâce ou à défaut d'un référendum
sous les auspices des Nations unies qui devait se faire attendre, le carcan de
la "cause nationale sacrée" qu'a été depuis la Marche verte en 1975 la
"récupération des terres marocaines" du Sahara occidental, le champ politique
s'est rouvert à la contestation, aux réformes, mais aussi à la violence.
Cette
nouvelle donne débouchera-t-elle sur une remise en cause radicale, républicaine
ou islamiste, de la monarchie ou, a contrario, sur un nouveau repli autoritaire?
En décembre 1990, les sanglantes émeutes de Fès, réprimées au prix de dizaines
de morts et de centaines de blessés, s'étaient inscrites dans cette logique du
verrouillage.
Cependant, dès janvier 1991, avec la guerre du Golfe, le régime
avait été forcé à l'ouverture: sous la pression populaire, le gouvernement
s'était associé, à l'appel des syndicats d'opposition, à une grève générale de
solidarité avec l'Irak.
Mais la récupération, par un régime qui, par ailleurs,
avait envoyé un contingent militaire au côté des forces coalisées contre l'Irak,
échoua.
Le 3 février, dans les rues de Rabat, des centaines de milliers de
manifestants défilaient pacifiquement, sous couvert de solidarité arabe.
Parmi
eux, un cortège de plus de 10 000 hommes en blanc, des islamistes brandissant le
Coran.
Leur défi s'adressait non seulement au monarque, mais aussi au
"Commandeur des croyants" (titre officiel du roi).
L'"année des droits de l'homme"
Parallèlement, dans plusieurs pays occidentaux et, notamment, en France, où les
faits révélés par la publication de l'ouvrage de Gilles Perrault Notre ami le
roi avaient provoqué l'indignation, Hassan II était interpellé au sujet des
droits de l'homme.
"L'année du Maroc", une vaste opération culturelle de
promotion du royaume chérifien en France, allait être décommandée par le
souverain qui, obligé d'apurer ses comptes humanitaires, devait déclarer 1991
"année des droits de l'homme"...
En l'espace de dix mois, les "affaires" les plus connues allaient être
"réglées", pour lever une hypothèque pesant trop lourdement sur l'image
extérieure du royaume.
Cette décision conforta la "rente diplomatique" d'un pays
qui, en termes géographiques autant que géopolitiques, est le plus occidental du
Maghreb.
Le 3 mars 1991, à l'occasion de la fête du Trône, la "famille Oufkir"
était libérée, et 2 268 autres prisonniers graciés.
Après dix-neuf années de
détention au secret, pendant longtemps dans des conditions effroyables, l'épouse
et les cinq enfants du général Mohamed Oufkir, l'homme fort du régime qui, en
1972, avait ordonné l'attaque manquée contre le Boeing royal, ont payé, au-delà
du "suicide" officiel de leur mari et père, pour sa tentative régicide.
Quant
aux prisonniers sahraouis, dont plusieurs centaines ont été graciés le 12 juin
et le 16 août 1991, ils ont purgé - souvent par une "disparition" définitive la remise en question des frontières "sacrées" du royaume.
Pour avoir soutenu,
elle aussi, le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination, Danielle
Mitterrand, présidente de la fondation humanitaire France Libertés, était
apostrophée par le roi, le 21 juillet sur la chaîne de télévision française TF1
comme "l'épouse morganatique" du chef de l'État français.
Au cours de la même émission, Hassan II traita de "poseur de bombes" le plus
ancien prisonnier politique du Maroc, le marxiste Abraham Serfaty, dont l'épouse
française se vit retirer son droit de visite pour avoir inlassablement témoigné
à propos du bagne secret de Tazmamart.
Le roi s'acharnait à en nier l'existence.
Mais, le 13 septembre, Abraham Serfaty était libéré de la prison de Kénitra et,
sous le prétexte spécieux d'être "brésilien",....
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