LES SIX POINTS DE VUE ORTHODOXES Traditionnellement, ce qu'il est convenu d'appeler la «philosophie classique» de l'Inde se distribue entre...
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LES SIX POINTS DE VUE
ORTHODOXES
Traditionnellement, ce qu'il est convenu d'appeler
la «philosophie classique» de l'Inde se distribue entre
six «points de vue» (darshana), considérés comme
orthodoxes en ce sens qu'ils prennent appui sur les
croyances et postulats védiques, ou, à tout le moins, ne
les nient pas.
Postulats que sont les doctrines du karma-samsâra
que nient les matérialistes et autres «négateurs» et
«beaux parleurs», mais non les bouddhistes et les
jaïns.
Croyance en l'identité âtman-brahman que nient les
bouddhistes, jaïns et matérialistes.
Outre les points de vue orthodoxes et hétérodoxes
qui sont restés, il y eut donc d'autres points de vue,
individuels ou collectifs, élaborés par des ascètes, des
renonçants, des lettrés en rupture de caste et d'esta
blishment, mais, d'une part, leur littérature ne nous est
vaguement connue que par les mentions critiques de
leurs adversaires et, d'autre part, ces points de vue, de
marginaux qu'ils étaient, ont disparu avec le temps
sans laisser de traces.
Tout se passant comme si face à
l'énorme emprise d'un monde indien, religieux de part
en part, leur contestation de celui-ci ne faisait pas le
poids.
Les seules contestations ayant réussi sont le boud
dhisme et le jaïnisme, considérées comme hétérodoxes
en ce qu'elles se sont volontairement coupées de la
révélation védique, mais non bien sûr de tout aspect
mythologique, ni du postulat majeur - même revisité
- de la doctrine panindienne du karma-samsâra.
·Remarquons toutefois que ces contestations n'ont pu
ni s'établir durablement en Inde - dès le VIW siècle
de notre ère le boudhisme y est très minoritaire
ni
s'y répandre - le jaïnisme reste localisé principale
ment dans le Bihar, son lieu de naissance.
Combattus
9u récupérés I par l'hindouisme, ces points de vue hété
rodoxes n'en sont pas moins «indic» 2, en ce que, nés
sur la terre indienne, ils en partagent certaines valeurs
et postulats.
D'un point de vue historique, nous aurions pu ou
dû soit parler du jaïnisme et du bouddhisme avant de
rendre compte des six points de vue orthodoxes, soit
suivre un ordre chronologique tenant compte des évo
lutions respectives de l'orthodoxie et de l'hétérodoxie
ainsi que de leurs affrontements.
Remarquons, en pas
sant, qu'ils furent généralement pacifiques, aucun
pouvoir séculier ne se faisant ni l'arbitre ni le défen1.
l'hindouisme n'a aucune peine à « récupérer» Bouddha.
Il
lui suffit de le considérer tout simplement comme un avatar de
Vishnu.
Ce qu'ils pourraient tout aussi bien affirmer du Christ, si
l'envie en prenait à certains hindouistes modernes.
2.
« Ils sont nés sur la terre indienne, ils sont indic et admettent
notamment la loi du karman.
Musulmans et chrétiens ne sont ni
hindu ni indic, ils sont indian.
» (Guy Bugault, l 'lnde pense
t-elle ?, PUF, 1994, p.
32.)
seur d'une orthodoxie dogmatique, même si locale
ment et à certaines époques il y eut bien sûr des débor
dements sectaires et fanatiques.
Nous avons préféré
pour la commodité même de notre parcours opter pour
une démarche traitant d'abord des six points de vue,
admettant ou ne niant pas la révélation védique, et
ensuite des deux points de vue hétérodoxes - boud
dhisme et jaïnisme -, alors pourtant que les six
points de vue constitués sont, pour ce que nous en
savons, tous postérieurs au bouddhisme et au jaï
nisme.
Une d�mière remarque.
Les six points de vue
vont traditionnellement par paires comme si, mais
c'est un peu forcé parfois, ils étaient complémentaires.
Les six points de vue (darshana) nous sont connus
sous la forme initiale de sûtras, rédigés approximati
vement entre le me et le VIe siècles de notre ère.
L'enseignement étant fondamentalement oral et
selon le mode, déjà souvent indiqué, de relation néces
saire et privilégiée entre le maître (guru) et son (ou
ses) disciple(s), il en....
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