Les premiers mouvements naturels de l'homme étant de se mesurer avec tout ce qui l'environne, et d'éprouver dans chaque objet...
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Les premiers mouvements naturels de l'homme étant de se mesurer
avec tout ce qui l'environne, et d'éprouver dans chaque objet qu'il
aperçoit toutes les qualités sensibles qui peuvent se rapporter à lui,
sa première étude est une sorte de physique expérimentale relative à
sa propre conservation, et dont on le détourne par des études spécu
latives avant qu'il ait reconnu sa place ici-bas.
Tandis que ses organes
délicats et flexibles peuvent s'ajuster aux corps sur lesquels ils doivent
agir, tandis que ses sens encore purs sont exempts d'illusion, c'est le
temps d'exercer les uns et les autres aux fonctions qui leur sont
propres; c'est le temps d'apprendre à connaître les rapports sensibles
que les choses ont avec nous.
Comme tout ce qui entre dans l'en
tendement humain y vient par les sens, la première raison de
l'homme est une raison sensitive ; c'est elle qui sert de base à la rai
son intellectuelle : nos premiers maîtres de philosophie sont nos
pieds, nos mains, nos yeux.
Substituer des livres à tout cela, ce n'est
pas nous apprendre à raisonner, c'est nous apprendre à nous servir
de la raison d'autrui; c'est nous apprendre à beaucoup croire, et à ne
jamais rien savoir.
ROUSSEAU
1.
Dégager la thèse du texte et son argumentation.
2.
a.
Pourquoi la perception de l'enfant constitue-t-elle, selon Rous
seau, une forme de « physique expérimentale relative à sa propre
conservation» ?
b.
Expliquez la différence entre « raison sensitive» et« raison intel
lectuelle».
3.
La perception suffit-elle à fonder un savoir?
l.
Dégager la thèse du texte et son argumentation.
La thèse du texte porte sur une question d'éducation : quelle doit être la .
place respective de l'expérience personnelle et de la lecture dans l'instruction ? Rousseau, qui dans les Confessions affirme avoir, dans son enfance, lu
trop et sans discernement, plaide ici pour une priorité forte de l'expérience
personnelle sur l'instruction par les livres.
Rousseau commence par poser le problème en évoquant dans le même
mouvement le besoin premier de l'homme et la mauvaise réponse qu'on lui
apporte : alors que les hommes doivent avant tout se donner les moyens
d'une bonne adaptation à leur environnement concret, la société leur propose trop tôt des sujets d'étude inadaptés.
Rousseau justifie alors la priorité qu'il entend donner à l'expérience
directe en soulignant la vivacité et la« délicatesse» de la sensibilité chez l'enfant.
Les sens ont comme fonction première la connaissance de notre environnement concret, c'est à cela qu'il convient de les exercer.
Enfin, Rousseau passe du rapport des sens à la nature à celui des sens à
l'intelligence : il confirme sa thèse en rappelant l'ordre réel du savoir dans
lequel l'expérience doit précéder la théorie.
Laisser les livres se glisser entre
nous et la sphère expérimentale, c'est « apprendre à beaucoup croire, et à ne
jamais rien savoir».
2.
a.
Pourquoi la perception de l'enfant constitue-t-elle, selon Rousseau, une
forme de « physique expérimentale relative à sa propre conservation» ?
La physique décrit moins les choses elles-mêmes que leurs mouvements
et leurs interactions.
La perception de l'enfant est une ouverture sur le monde,
une façon de laisser le monde agir sur lui et de tester ses capacités d'action sur
le monde.
Il s'agit d'une physique «expérimentale» car l'enfant rencontre des
situations particulières avant d'avoir connaissance des lois générales, et qu'il
découvre du monde ce qui est à sa portée, à son échelle.
C'est cette approche
qui est la mieux adaptée à sa conservation: pour assurer sa survie le jeune être
humain doit, du moins dans la nature, apprendre vite à se reconnaître dans
son environnement.
Rousseau suggère ici que l'enfant n'a pas encore
conscience du fait qu'il n'est plus à l'état de nature mais dans l'état social.
Tout
jeune, il dispose d'aptitudes sensibles qu'il perdra rapidement parce que la
société les rend superflues.
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b.
Expliquez la différence entre « raison sensitive» et « raison intellectuelle».
Le terme de « raison sensitive» pourrait sembler contradictoire puisque
la raison est habituellement distinguée de la sensibilité.
Mais notre sensibilité n'est pas organisée de manière «irrationnelle» : nos perceptions s'organisent de façon cohérente, notre conscience forme une image du monde et
une expérience dans le temps en coordonnant ces différentes images.
La
« raison....
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