Les fonctions du rire Le rire remplit une triple fonction : morale, parce qu'il sanctionne des abus; sociale, parce qu'il...
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Les fonctions du rire
Le rire remplit une triple fonction : morale, parce qu'il sanctionne
des abus; sociale, parce qu'il repose.sur un consensus; et libéra
trice, parce qu'il délivre des contraintes de toutes sortes.
LE RIRE COMME SANCTION MORALE
L'idée que la comédie possède une vertu morale remonte à
!'Antiquité.
Selon l'adage latin : Castigat ridendo mores, elle «corrige
les mœurs par le rire».
C'est au nom de cette conception que Molière
justifie le sujet de Tartuffe :
Le devoir de la comédie étant de corriger les hommes en les diver
tissant, j'ai cru que [...] je n'avais rien de mieux à faire que d'atta
quer par des peintures ridicules les vices de mon siècle ; et comme
l'hyp ocrisie sans doute en est un des plus en usage, des plus incom
modes et des plus dangereux, j'avais eu, Sire, la pensée que je ne
rendrais pas un petit service à tous les honnêtes gens de votre
royaume, si je faisais une comédie qui décriât les hypocrites et mît
en vue comme il faut toutes les grimaces étudiées de ces gens de
bien à outrance, toutes les :friponneries couvertes de ces faux-mon
nayeurs en dévotion, qui veulent attaquer les hommes avec un zèle
contrefait (Premier Placet au Roi).
De fait, le comique reposant sur un écart, sur la transgression
d'une norme1, le rire sanctionne les excès et les attitudes extrêmes.
C'est pourquoi Alceste reste, dans Le Misanthrope, un personnage
comique, non pas malgré mais à cause de son exigence de sincérité
absolue.
1.
Pour plus de détails, voir le chapitre 10, p.
115.
Dans la comédie, à la sanction du comportement par le rire
s'ajoute presque la sanction par l'échec.
Celui dont on rit ne peut pas
voir ses projets triompher.
Tous les personnages ridicules de Molière
comme de Beaumarchais ou de Marivaux échouent dans leur entreprise.
Ils sont moqués, dupés et roulés.
LE RIRE COMME FACTEUR
DE COHÉSION SOCIALE
En riant d'un personnage qui s'écarte des normes, le public
affirme par là même son attachement à ces mêmes normes.
Sans
quoi il ne rirait pas.
Le rire renvoie implicitement à une opinion dominante, à un ensemble de conventions et, à la limite, à une certaine
forme de conservatisme.
Si un chapelet d'injures fait rire, comme dans la farce, par
exemple, ce n'est pas que la grossièreté soit par elle-même
comique, mais c'est parce qu'elle détonne dans des relations
sociales régies en principe par la civilité.
La comédie classique du xvne siècle s'adresse en priorité à un
public d'honnêtes gens pour qui la bienséance, la recherche de
l'équilibre et du juste milieu constituent l'idéal social par excellence.
L'extravagance, la démesure, les excès relèvent dès lors du ridicule.
La difficulté peut venir du fait qu'avec les générations et les siècles
les conventions sociales passent et se modifient.
Ce qui était de
règle à une époque ne l'est pas forcément à une autre.
La perception
de l'écart devient moins évidente.
Le comique perd de sa force et,
parfois, peut en partie s'estomper.
C'est le cas pour une pièce comme George Dandin, de Molière.
Le
héros éponyme est un riche paysan, sans grand travers, sauf celui
d'avoir épousé, par vanité, la fille d'un petit noble de province.
Sa
femme, ses beaux-parents lui font constamment sentir la différence
des milieux sociaux qui les sépare.
Lui enrage et se plaint d'autant
plus de son sort....
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