Le paradoxe est double. La poursuite de la croissance économique canadienne (+4,0% en 1987) et de la baisse du taux...
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Le paradoxe est double.
La poursuite de la croissance économique canadienne (+4,0% en 1987) et de la
baisse du taux de chômage - en deçà de 8% au printemps 1988, soit l'une des meilleures performances
d'Occident - à laquelle il faut ajouter le redressement du dollar canadien (de 74 à 80 cents américains)
n'a provoqué qu'une modeste remontée du Parti progressiste-conservateur dans les sondages.
Celui-ci
doit disputer la seconde place au Nouveau parti démocratique (NPD) d'Ed Broadbent, plusieurs points
derrière le Parti libéral de John Turner, qui se maintient en tête en dépit de l'impopularité personnelle de
son chef, hésitant et velléitaire.
Bon premier dans les sondages, le Parti libéral s'est néanmoins
entredéchiré sur la place publique.
La nécessité de contenir le déficit du gouvernement central, ramené en 1987-1988 à 5,5% du produit
national - un niveau jugé encore trop élevé par les milieux économiques -, interdit la mise sur pied de
programmes coûteux destinés à séduire l'électorat.
Il est vrai que le premier volet de la réforme fiscale,
celui qui déplace une partie de la charge des particuliers vers les entreprises, est entré en vigueur.
Le
second volet prévoit l'introduction d'une taxe à la valeur ajoutée (TVA) sur la plupart des biens de
consommation ; il a été reporté au-delà des élections législatives prévues pour le premier semestre de
1989.
Adhésion du Québec à la Constitution
Cette étroite marge de manoeuvre a donc obligé le gouvernement à tout miser sur deux dossiers aussi
fondamentaux que controversés, l'accord du lac Meech et celui de libre-échange avec les États-Unis.
Le
premier concerne la nouvelle entente constitutionnelle, signée par le gouvernement central et les dix
provinces canadiennes en juin 1987.
Il permet l'adhésion du Québec à la Constitution canadienne.
On sait
que le Québec avait catégoriquement refusé de signer l'Acte constitutionnel de 1982.
Pour avoir force de
loi, la nouvelle entente doit être ratifiée par les onze parlements canadiens avant le 23 juin 1990.
Pour obtenir cette entente, il a fallu accorder à chacune des provinces presque tout ce qui avait été
consenti au Québec, ce qui indique bien à quel point l'idée d'un véritable statut particulier pour la
province francophone choque le Canada anglais.
Or ce qui a été interprété comme une victoire pour le
Québec, malgré le flou entourant la portée réelle de la clause définissant la province francophone comme
une "société distincte", devait fatalement être considéré comme une défaite pour le Canada par ceux qui
restent attachés à une vision centralisatrice du pays.
Si un dossier pouvait faire sortir de son mutisme
politique l'ancien Premier ministre Pierre Elliot Trudeau, c'était bien celui-là.
Au grand dam de John
Turner, qui a accepté l'accord avec quelques réserves - poids électoral du Québec oblige -, Pierre Trudeau
a foncé tête baissée dans l'accord du lac Meech avec la volonté non dissimulée de le faire échouer.
Au
printemps 1988, il pouvait compter sur la victoire puisque au moins deux provinces, le NouveauBrunswick et le Manitoba, avaient décidé de ne pas présenter l'accord à leur Assemblée, du moins dans
sa facture originale.
Quant au Premier ministre, Brian Mulroney, et au chef du gouvernement québécois,
Robert Bourassa, ils ont beaucoup misé sur cet accord.
Un éventuel échec ne pourrait qu'être douloureux
pour le Québec qui se sentirait alors trahi une deuxième fois en sept ans par d'autres provinces
canadiennes...
et par l'aile centralisatrice du Parti libéral fédéral.
La profonde division de ce parti à propos de l'accord du lac Meech a joué un rôle majeur dans les diverses
campagnes internes menées contre John Turner.
Deux "putschs" ont été tentés, en août 1987 et en avril
1988, mais à la surprise générale, celui-ci a sauvé sa tête.
Il faut dire qu'il a défend bec et ongles.
La
proximité des élections législatives lui permet de croire que le pire est passé, du moins s'il en sort
vainqueur!
Accord de libre-échange avec les États-Unis
La seule véritable bouée de sauvetage encore disponible pour le gouvernement conservateur se trouve
du côté de Washington, qui a signé une entente de libre-échange avec le Canada en janvier 1988, après
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plusieurs mois de difficiles négociations.
Cet accord doit être approuvé à la fois par le Congrès américain
et par les deux chambres canadiennes avant d'entrer en vigueur le 1er janvier 1989: il implique de
nombreuses modifications législatives.
L'accord prévoit notamment l'abolition sur une période de dix ans
de tous les tarifs douaniers existant entre les deux pays (fort modestes au demeurant, 80% du commerce
canado-américain étant déjà libres de douane) et de la plupart des obstacles non tarifaires, une
circulation beaucoup plus libre des capitaux, la garantie d'approvisionnement pour les États-Unis en
ressources énergétiques canadiennes et la création d'un tribunal d'arbitrage des différends commerciaux.
Certaines industries continueront par ailleurs d'être protégées dans chacun des deux pays.
Le contenu de ce traité a soulevé de très....
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