Devoir de Philosophie

Lancelot et Gauvain Lorsque Chrétien de Troyes écrit Le Chevalier de la char­ rette, il n'a pas besoin de présenter...

Extrait du document

« Lancelot et Gauvain Lorsque Chrétien de Troyes écrit Le Chevalier de la char­ rette, il n'a pas besoin de présenter Lancelot et Gauvain: ses lecteurs les connaissent déjà.

En effet, le romancier les a fait figurer dans ses œuvres antérieures, et la légende s'est rapidement emparée d'eux; tous les considèrent comme les meilleurs chevaliers de la cour d'Arthur. Les aventures respectives de Lancelot et de Gauvain créent un dédoublement de l'intrigue, une sorte de montage en parallèle: tous deux partent à la recherche de Guenièvre; tous deux ont à franchir un pont redoutable; et, pour finir, tous deux reviennent à la cour d'Arthur. Mais les ressemblances s'arrêtent là.

Les deux person­ nages s'opposent sur des points essentiels, tant dans la conduite de leur quête que dans leur conception de la che­ valerie et l'expérience de leur compagnonnage. LANCELOT ET GAUVAIN EN QUÊTE DE LA REINE Le parallélisme des départs et des retours Gauvain apparaît dès la première scène du roman, à la cour ,d'Arthur.

C'est à lui que revient I'« initiative» (v.

241) de la quête.

Neveu du roi (v.

239), il a toute la confiance de celui­ ci.

Il lui parle « en confidence» (v.

225) et lui impose facile­ ment son projet: partir à la recherche de la reine, qui vient d'être emmenée par le sénéchal Keu à la suite de Méléagant. Dans la forêt, Gauvain rencontre Lancelot, venu d'on ne sait où, mais lancé lui aussi dans une poursuite.

Ce mystérieux personnage, dont on ne connaîtra le nom que bien plus tard, va occuper peu à peu les devants de la scène. La fin du roman reproduit le même décalage entre les deux personnages.

Parti le premier, Gauvain est aussi le premier à revenir à la cour d'Arthur, où il ramène Guenièvre.

Ce n'est pas lui qui a libéré la reine: c'est Lancelot.

Gauvain n'usurpe pas pour autant le rôle du vainqueur.

En effet, ovationné par les habitants de Logres, il refuse un triomphe qu'il n'a pas mérité: L'honneur qu'on me rend me fait honte (v.

5324). De plus, la logique du récit impose cette primauté de Gauvain sur Lancelot.

Puisque la quête a été officiellement déclenchée par Gauvain, il est normal qu'il en assume la conclusion officielle, devant la cour de nouveau réunie.

D'ailleurs, Lancelot ne cherchait pas à ramener Guenièvre à Arthur.

Au contraire, il voulait la rencontrer loin d'Arthur, pour l'aimer, dans un autre monde.

Enfin, le retour de Gauvain et de la reine ne suffit pas à rétablir définitivement la tranquillité du royaume de Logres.

Il faut encore supprimer la cause du malheur initial, exterminer le mal en tuant Méléagant.

Si l'inauguration de l'histoire incombe à Gauvain, le dénouement en est donc assuré par Lancelot.

Le retour de celui-ci, comme son départ au début du roman, rejette Gauvain dans l'ombre, car sa vaillance ne peut rivaliser avec celle du héros. Prouesse et couardise Lancelot est preux, Gauvain est couard: l'un affiche un courage téméraire, l'autre ne parvient pas toujours à cacher sa peur.

La couardise de Gauvain se révèle au moment de choisir celui des deux ponts qui mènent au royaume de Gorre. Après avoir entendu une jeune fille décrire les « deux passages terrifiants» {v.

655), il n'agit pas comme devrait le faire un preux chevalier.

En effet, au lieu de choisir le plus grand danger, il feint de croire que les deux solutions sont équivalentes {v.

690-691) et choisit le Pont sous !'Eau, que la demoiselle avait présenté comme « le moins périlleux des deux» {v.

665).

En revanche, Lancelot, fortifié par« l'audace qu'Amour donne en tous points» (v.

630-631), accepte bien volontiers l'épreuve du Pont de !'Épée {v.

697-699). Là où Lancelot réussit, Gauvain échoue.

Le passage du Pont de l'Épée se solde par un martyre glorieux; celui du Pont sous l'Eau donne lieu à une scène tragi-comique. Gauvain, tombé dans l'eau profonde, submergé, disparaît et reparaît tour à tour, et finit par être repêché dans un état pitoyable, indigne d'un chevalier: Mais en le retirant de l'eau, ils ne croient pas qu'il soit vivant, tant il en avait avalé. (v.

5124-5126). Suprême humiliation : le sauveur parti à la rescousse de la reine a besoin d'être lui-même sauvé! Ainsi, le carrefour des deux voies qui mènent à Gorre matérialise la séparation de Lancelot et Gauvain : c'est là que leurs quêtes divergent, et que s'affirme la supériorité de l'un sur l'autre. DEUX FIGURES DE LA CHEVALERIE L'être et le paraÎtre Lancelot n'hésite pas à sacrifier son image sociale, publique, au profit de son moi intime.

En revanche, Gauvain est trop attaché à son paraître pour rechercher la perfection de son être. L'.épisode de la charrette illustre cette différence.

Par amour pour la reine, Lancelot accepte de perdre sa dignité chevaleresque en montant dans le véhicule infamant1• Gauvain ne peut suivre son exemple.

Son refus est dicté par l'amour propre, l'amour de soi-même.

Car.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓