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La liberté comme but et comme expérience

Publié le 09/08/2014

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ANNEXE : TABLEAU DES CORRÉLATIONS PERMETTANT DE SITUER LE PROBLÈME DE LA LIBERTÉ.

·     Vie, mort, existence [approche de la finitude humaine, distinction stoï­cienne de ce qui dépend de nous et de ce sur quoi nous n'avons aucune prise].

·     Histoire [approche des conditionnements historiques et sociaux].

·     Art [statut d'une activité « libre � par rapport à une activité aliénée].

·     Passions [probl�me de la maîtrise de soi].

·     Jugement [probl�me des conditions d'une pensée rigoureuse et autonome].

·     Conscience et inconscient [probl�me de la maîtrise de l'activité psychique].

·     La volonté [approche du libre arbitre et des facteurs qui déterminent le comportement ou la pensée].

·     L'illusion [repérage de tout ce qui peut asservir ou aveugler la réflexion].

·     La philosophie [la systématisation de l'esprit critique comme condition d'une véritable autonomie du jugement, mais aussi de la conduite].

·     La science [de l'élucidation de l'illusion à la construction du vrai].

·     La société [interdépendance et servitude : position du probl�me].

·     Le pouvoir [approche des mécanismes de l'oppression politique et de ses justifications].

·     L'État [intérêt général, lutte des classes et liberté].

·     La justice [les conditions éthiques et sociales d'une véritable liberté].

SUJETS

n                Dégagez l'intérêt philosophique de ce texte en procédant à son étude ordonnée.

D'apr�s le sens propre (et généralement reçu) du mot, un homme libre est celui qui, s'agissant des choses que sa force et son intelligence lui permettent d'accomplir, n'est pas empêché de faire celles qu'il a la volonté de faire. Quand au contraire les mots de libre et de liberté sont appliqués à autre chose que des corps, c'est un abus de langage. En effet, ce qui n'est pas susceptible de mouvement n'est pas susceptible de se heurter à un obstacle. Donc, quand on dit, par exemple : la route est libre, on n'évoque pas par là une liberté qui appartiendrait à la route, mais celle des gens qui y passent sans se trouver arrêtés. Et quand on parle d'un libre don, on n'entend pas parler d'une liberté que posséderait le don lui-même, mais de celle du donateur, qui n'était pas tenu de le donner par l'effet d'une loi ou d'une convention. De même, quand on parle librement, il ne s'agit pas de la liberté de la voix, ou de l'élocution,

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mais de celle de l'homme qu'aucune loi n'a obligé à parler autrement qu'il n'a fait. Enfin, de l'usage de l'expression libre volonté, on ne saurait inférer aucune liberté de la volonté, du désir, ou de l'inclination, mais seulement de la liberté de l'homme, qui consiste en ce qu'il ne se trouve pas arrêté quand il fait ce à quoi le portent sa volonté, son désir, ou son inclination.

HOBBES

[SÉRIE B. Bordeaux et académies rattachées, 1992.]

n     Dégagez l'intérêt philosophique de ce texte en procédant à son étude ordonnée :

La patrie ne peut subsister sans la liberté, ni la liberté sans la vertu, ni la vertu sans les citoyens ; vous aurez tout si vous formez des citoyens ; sans cela vous n'aurez que de méchants esclaves, à commencer par les chefs de l'État. Or former des citoyens n'est pas l'affaire d'un jour ; et pour les avoir hommes, il faut les instruire enfants. Qu'on me dise que quiconque a des hommes à gouverner, ne doit pas chercher hors de leur nature une perfection dont ils ne sont pas susceptibles ; qu'il ne doit pas vouloir détruire en eux les passions, et que l'exécution d'un pareil projet ne serait pas plus désirable que possible. Je conviendrai d'autant mieux de tout cela, qu'un homme qui n'aurait point de passions serait certaine­ment un fort mauvais citoyen : mais il faut convenir aussi que si l'on n'apprend point aux hommes à n'aimer rien, il n'est pas impossible de leur apprendre à aimer un objet plutôt qu'un autre, et ce qui est véri­tablement beau, plutôt que ce qui est difforme.

ROUSSEAU

[SÉRIE A. Caen et Amérique du Nord, 19931

n     Dégagez l'intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée :

Pour former l'État, une seule chose est nécessaire : que tout le pouvoir de décréter appartienne soit à tous collectivement, soit à quelques-uns, soit à un seul. Puisque, en effet, le libre jugement des hommes est extrêmement divers, que chacun pense être seul à tout savoir et qu'il est impossible que tous opinent pareillement et parlent d'une seule bouche, ils ne pourraient vivre en paix si l'individu n'avait renoncé à son droit d'agir suivant le seul décret de sa pensée. C'est donc seulement au droit d'agir par son propre décret qu'il a renoncé, non au droit de raisonner et de juger ;par suite nul à la vérité ne peut, sans danger pour le droit du souverain, agir contre son décret, mais il peut avec une enti�re liberté opiner et juger et en consé­quence aussi parler, pourvu qu'il n'aille pas au delà de la simple parole ou de l'enseignement, et qu'il défende son opinion par la Raison seule, non par la ruse, la col�re ou la haine, ni dans l'intention de changer quoi que ce soit dans l'État de l'autorité de son propre décret.

SPINOZA

[SÉRIE A. Antilles Guyane, 19921

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n       L'expression «perdre sa liberté � a-t-elle un sens ?

[SÉRIE B. Aix-Marseille, Nice, 19931

n       S'engager, est-ce perdre ou affirmer sa liberté ?

[SÉRIES F.G.H. Antilles Guyane, 19921

n       Peut-on se fier au sentiment de la liberté ?

[SÉRIES F.G.H. Congo, Niger, 1993.]

n       Dégagez l'intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée :

Résistance et obéissance, voilà les deux vertus du citoyen. Par l'obéis­sance il assure l'ordre ; par la résistance il assure la liberté. Et il est bien clair que l'ordre et la liberté ne sont point séparables, car le jeu des forces, c'est-à-dire la guerre privée à toute minute, n'enferme aucune liberté ; c'est une vie animale, livrée à tous les hasards. Donc les deux termes, ordre et liberté, sont bien loin d'être opposés ; j'aime mieux dire qu'ils sont corrélatifs. La liberté ne va pas sans l'ordre ; l'ordre ne vaut rien sans la liberté.

Obéir en résistant, c'est tout le secret. Ce qui détruit l'obéissance est anarchie ; ce qui détruit la résistance est tyrannie. Ces deux maux s'ap­pellent, car la tyrannie employant la force contre les opinions, les opi­nions, en retour, emploient la force contre la tyrannie ; et, inversement, quand la résistance devient désobéissance, les pouvoirs ont beau jeu pour écraser la résistance, et ainsi deviennent tyranniques. Dés qu'un pouvoir use de force pour tuer la critique, il est tyrannique.

 

ALAIN [SÉRIE B. Rouen, 19931

Ne faut-il pas d�s lors revenir à la sagesse grecque et penser que le libre arbitre sans connaissance n'est qu'une illusion, au demeurant tragique lorsqu'on prend l'exemple d'OEdipe, qui dut troquer sa cécité morale contre une cécité physique pour n'avoir pas saisi, dans chacune de ses actions, les implications d'un destin qu'il s'attachait à fuir? La caractérisation du libre arbitre comme illusion reposant sur une méconnaissance (Spinoza) n'équivaut pas, comme on le croit trop souvent, à un refus de la liberté ; elle en appelle bien plutôt à une autre défini­tion. D�s lors que l'on veut solidariser liberté et puissance d'agir efficace, on pose la connaissance comme condition de la liberté. Or cette connaissance, nous l'avons vu, n'est jamais immédiate. En rupture avec les évidences pre­mi�res, elle est une conquête sans cesse recommencée, un processus. Condi­tionnée par la connaissance, la liberté n'est peut-être elle-même qu'une conquête, un processus, c'est-à-dire une libération. Et nous entendons par là le processus complexe par lequel l'homme acquiert la maîtrise de son activité mentale, la maîtrise des choses et la maîtrise de la société. Prendre le contre-pied de la problématique traditionnelle du libre arbitre, c'est inscrire le pro­bl�me de la liberté non dans la vivacité d'une évidence psychologique qui se suffirait à elle-même, mais dans un cheminement nécessaire par lequel l'homme s'affranchit de tout ce qui entrave son action, soit en l'aveuglant (pré­jugés, fausses connaissances, conflits intérieurs), soit en l'opprimant (servi­tudes économiques, sociales ou politiques).

« plutôt sa faiblesse et son ignorance qu'une liberté réelle.

Ne faut-il pas dès lors revenir à la sagesse grecque et penser que le libre arbitre sans connaissance n'est qu'une illusion, au demeurant tragique lorsqu'on prend l'exemple d'Œdipe, qui dut troquer sa cécité morale contre une cécité physique pour n'avoir pas saisi, dans chacune de ses actions, les implications d'un destin qu'il s'attachait à fuir? La caractérisation du libre arbitre comme illusion reposant sur une méconnaissance (Spinoza) n'équivaut pas, comme on le croit trop souvent, à un refus de la liberté; elle en appelle bien plutôt à une autre défini­ tion.

Dès lors que l'on veut solidariser liberté et puissance d'agir efficace, on pose la connaissance comme condition de la liberté.

Or cette connaissance, nous l'avons vu, n'est jamais immédiate.

En rupture avec les évidences pre­ mières, elle est une conquête sans cesse recommencée, un processus.

Condi­ tionnée par la connaissance, la liberté n'est peut-être elle-même qu'une conquête, un processus, c'est-à-dire une libération.

Et nous entendons par là le processus complexe par lequel l'homme acquiert la maîtrise de son activité mentale, la maîtrise des choses et la maîtrise de la société.

Prendre le contre­ pied de la problématique traditionnelle du libre arbitre, c'est inscrire le pro­ blème de la liberté non dans la vivacité d'une évidence psychologique qui se suffirait à elle-même, mais dans un cheminement nécessaire par lequel l'homme s'affranchit de tout ce qui entrave son action, soit en l'aveuglant (pré­ jugés, fausses connaissances, conflits intérieurs).

soit en l'opprimant (servi­ tudes économiques, sociales ou politiques).

• La liberté est-elle un droit ou un fait? Un pouvoir réel ou une donnée psychologique? Un état ou une conquête? Une négation ou une prise en charge de la nécessité? Y a-t-il une liberté ou des libertés? Peut-on être plus ou moins libre? Toutes ces questions mettent en évidence la complexité d'un problème dont l'analyse ne peut se tenir dans le seul domaine de la philosophie, et qu'il semblait difficile d'aborder au début de notre itinéraire.

La réflexion ne pouvait s'engager efficacement qu'après accomplissement d'un bilan où l'on prend la mesure des déterminismes qui façonnent l'être et son milieu, définis­ sant les cadres et les conditions de son action.

Ce bilan, nous en présentons une esquisse à la fin de ces remarques sous la forme d'un tableau des corrélations permettant une «mise en situation» du problème de la liberté.

• Un bref historique des conceptions de la liberté ferait apparaître le rôle qu'a joué, dans notre culture, la genèse de la conception-référence d'un sujet humain prédéfini, détenteur du libre arbitre et possédant une nature inaliénable.

Liée au sentiment intérieur de la liberté, cette conception s'est déployée sur le plan philosophique en plusieurs étapes : - avènement du sujet moral avec la tradition judéo-chrétienne de la théma­ tique de la création (le libre arbitre de la créature); - avènement du sujet épistémologique avec la Renaissance et la pensée classique (libre arbitre cartésien comme indépendance de la faculté de juge­ ment; négation du principe d'autorité dans les sciences), puis la philosophie critique (théorie kantienne des facultés de connaissance); - avènement du sujet-individu de l'économie politique (dissolution histo­ rique progressive des groupements féodaux).

Formulation de l'égalitarisme juridique qui permet d'émanciper le sujet économique (initiative individuelle) et politique (modèle du contrat).

• Dans le contexte de ces apports, on peut ressaisir l'intérêt d'une philo­ sophie comme celle de Spinoza.

qui assignait à la réalité humaine une place bien précise dans une totalité vivante où s'enchaînent des causalités multiples, 187. »

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