La certitude de sa mort condamne-t-elle l'homme au désespoir 7 I. ANALYSE DU SUJET. CONSEILS. REMARQUES DE MÉTHODE • Devant...
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La certitude de sa mort condamne-t-elle l'homme
au désespoir 7
I.
ANALYSE DU SUJET.
CONSEILS.
REMARQUES DE MÉTHODE
• Devant l'intitulé du sujet, plusieurs conceptualisations
s'imposent d'emblée à vous: la mort peut être considérée de
manière purement empirique, comme cessation définitive de
la vie, comme terme de la vié humaine considérée dans le
temps (décè�).
mais.
elle peut aussi requérir une analyse en
tant que forme et structure a priori de la conscience de
l'homme.
De même, le concept de certitude doit être défini
(caractère d'une affirmation à laquelle on donne une
adhésion entière, etc.).
Mais le concept-clef dans ce sujet, c'est, à coup sûr, celui
de désespoir {littéralement: état de celui qui n'a plus
d'espoir).
Ici, il faut faire jouer progressivement les distinc
tions et conceptualisations (désespoir/inquiétude/ espoir/ es
pérance/ désespérance), pour organiser votre réflexion sur
ce très beau sujet de baccalauréat.
C'est donc le travail
d'analyse sémantique et conceptuelle qui commande ici.
Si
vous le répudiez, vous vous en tiendrez à des généralités et
ne traiterez pas le sujet
• D'autre part, un certain-nombre de conceptions et de
lectures sont certainement à votre disposition (thèses de
Heidegger, etc.).
Il faut les intégrer avec souplesse dans
votre devoir.
• Ici, le plan dialectique par thèse, antithèse et synthèse
semble particulièrement indiqué pour adapter vos connais
sances et faire progresser la réflexion.
Mais ce plan dialec
tique offrira dans ce cas la particularité de compléter le
plan progressif.
En effet, il va être très intéressant de faire
progresser le concept de désespoir et aussi celui de mort, de
manière à en tirer le maximum de richesses possibles.
Il.
BIBLIOGRAPHIE
Albert CAMUS
Le mythe de Sisyphe (Idées-N.R.F.).
Edgar MORIN
L'homme et la mort_ dans l'histoire (Poche-Seuil).
Martin HEIDEGGER
Qu'est-ce que la métaphysique (Gallimard), (extraits du
livre L'Être et le temps, p.
115 sq).
KIERKEGAARD
Traité du désespoir (Idées-N.R.F.).
III.
DISSERTATION
l O Introduction
I
' --
Le concept de mort est loin d'être univoque.
;�a mort
·( peut, en effet, se définir, de la manière la plus immédiate
la plus empirique, comme le terme de la viç_ humaine,
tant que celle-ci est considérée dans le temps.
Mais la
peut aussi être envisagée comme structure a priori de
conscience de l'homme.
Cette ambiguîté devra certaine
ment être questionnée
Mais kter,me d('} certitude gagnera aussi à être explicité,
Définissons la certitude comme le caractère d'une affirma
tion à laquelle on donne une adhésion entière ou bien comme
l'état dè l'esprit qui ne doute pas et n'a aucune crainte
d'erreur.
C.e type de croyance et d'adhésion spirituelle
(adhésion spirituelle et croyance en sa propre mort) devra
être soumis à lout un «questionnement» philosophique.
Si le verbe, condamner mérite certainement, de retenir'·
!.'attention (condamner, c'est frapper d'une peine'.
c'est faire
subir une punition), le concept de désespoir va être au
· centre de nos analyses.
Si l'espoir est le fait d'attendre
quelque chose avec confiance, en visant le succès · et la
réussite, le désespoir peut être défini de la manière la plus
élémentaire comme la perte de tout espoir.
Deux notions
sont intéressantes à distinguer ici et peuvent jouer un rôle
moteur dans nos analyses, ce sont les notions d'espérânce
(sentiment de confiance, ne portant jamais sur des résultats
extérieurs) et de désespérance (état psychologique de celui
qui a pèrdu toute foi et toute confiance, et qui se trouve
au-delà de touides désespoirs).
Ce qu'il faut retenir comme notion essentielle dans le
désespoir, c'est sans doute l'idée d'une détrtsse infinie
portant sur l'organisation même du moi.
celle d'une
atteinte profonde à notre structure et à notre synthèse.
Enfin, l'homme sera conçu ici comme le sujet et la
.
personne.
Au-delà de l'intitulé immédiat de la question, le problème
est donc de savoir si la certitude de sa mort laisse à l'homme
une disponibilité à l'avenir, si elle permet l'accomplissement
de la personne et la production de l'homme par lui-même.
N'y a-t-il pas contradiction entre la mort (qui fait partie du
négatif, qui est lé négatif même) et la création (positive) de
la personne humaine?
2• Discussion
A} Thèse: la certitude de sa mort condamne l'homme au
désespoir.
La cerfüud� de ma mort est enveloppée dans une série de
paradoxes qu'il faut souligner dès l'abord.
Nous croyons .
r�
pas vraiment et totalement en notre mort (envisagée empi
riquement comme décès).
Nous savons que la mort est notre
lot mais nous n'en sommes pas totalement certains, du point
de vue subjectif.
Il y a, par conséquent, dans cette notion et.
cc vécu de la mort, une part d'abstraction.
Je suis mortel :
ceci est parfaitement abstrait, sous un certain angle.
La
certitude de notre mort arrive difficilement à cerner la mort
concrètement.
Comme on l'a souvent noté, la pensée glisse,
bien souvent, impuissante, sur ce monstrueux a priori qu'est
la mort.
La certitude de ma mort enveloppe, par consé
quent, paradoxes et ambiguïtés.
C'est une sorte de pseudo
croyance et de pseudo-certitude dans notre existence et dans
notre vécu.
Néanmoins, malgré ces paradoxes.
la croyance en· ma
mort peut être source d'angoisse et me condamner même au
désespoir.
Qu'e�t-ce que le désespoir? li faut revenir sur ee
sentiment, préalablement défini.
Le désespoir est la forme
extrême de l'inquiétude, mouvement de l'âme par lequel je
suis, non point en repos, mais, tout au contraire, en
perpétuel devenir.
Quel est le noyau de cette forme d'in
quiétude qu'est le désespoir? Il est, en profondeur, une
détresse infinie qui porte sur l'organisation même du moi.
L'homme est une union de fini et d'infini, d'éternel et de
temporel, de liberté et de nécessité.
C'est ce double mou
vement qui est constitutif de la réalité humaine.
Lorsque
s'accomplit seulement un mouvement vers le fini ou l'infini,
alors le désespoir apparaît, car la synthèse humaine se
déséquilibre.
Il y a discordance et rupture.
Or la certitude de notre mort peut, bel et bien, conduire
au désespoir, conçu comme atteinte à notre organisation et à
notre synthèse profonde.
Tout d'abord, la certitude de ma mort fait obstacle au
sens de ma vie, eUe est absence de sens, elle rend absurdes
tous mes projets et toutes mes intentions.
Elle les enracine
dans la finitude de mon existence mortelle.
En faisant
obstacle au sens ultime de mes projets qu'elle rend à leur
finitude fondamentale, elle m'entraîne dans le désespoir (il y
a alors place pour le non-sens, la finitude, etc.).
Ma synthèse
et mon organisation (comme sens et postulation vers l'infini)
sont donc « destructurées ».
La certit�de de.ma mort, en me condam�ant au non-sens,
déchire tous mes liens avec le réel et me dévaste, me
conduisant à la douleur absolue (et au désespoir).
Mon Moi.
est dévasté, et toutes mes p�rticipations au monde se défont.
Ce non-sens et cette destruction peuvent condamner mon
moi à la désagrégation totale.
La synthèse humaine se
disloque alors parce qu'elle est vouée uniquement à la
finitude.
La certitude de ma mort peut donc entraîner la
dissolution de mon organisation psychique.
Ce mouvement de désespoir inhérent à la certitude de la
mort, nous pourrions continuer à le cerner indéfiniment : la
mort me voue au nihil.
au rien.
au « tout est vain ».
au
« tout est permis».
Devant la mort, c'est le rien qui
triomphe.
Ainsi volent en éclat toutes les valeurs.
La
conscience seule, isolée.
est, face à la mort, sans appuis et
sans supports.
Telle est bien la discordance totale de la
synthèse humaine, coupée de l'infini, de l'éternel, du sens de
ses œuvres.
Ainsi, en conclusion de cette première partie, nous dirons
que la croyance en ma mort me condamne au désespoir,
parce que la mort apparaît comme le maitre absolu de ma
vie.
Toute-puissante, elle assure le triomphe du rien sur '
l'être, m'arrache au Sens et détruit l'organisation profonde
de mon moi.
Mais· me condamne+elle vraiment à cette détresse infi
nie? C'est ce sur quoi il nous faut maintenant réfléchir.
B) Critique de la thèse et antithèse.
La certitude (paradoxale) de sa mort entraîne-t-elle
nécessairement le sujet réfléchissant.
sur elle vers la discor
dance de la synthèse humaine, la solitude désespérée de
celui qui expérimente le néant sans limite, le Rien? Ici, il
semble bien qu'il faille revenir sur les diverses notions
figurant dans l'intitulé du sujet et voir si elles ne sont pas
susceptibles de recevoir une autre acception, profondément
différente, et s'intégrer dans un autre type d'expérience.
Et, tout d'abord, c'est le concept de mort qu'il nous faut
maintenant qr,.estiom;ier.
La mort; disions-nous auparavant,
c'est le décès, l'acte terminal de la vie (quand la Parque
coupe le fil de notre existence ...
).
Mais il semble que chaque
instant de îa · v·ie, loin 'd'exclure la mort, se don·ne comme ·
réalité finie, limitée et qu'ainsi la mort, loin d'être seule.
ment un décès, un acte terminal, se présente aussi comme ·
forme et comme structure générale, a priori, de mon
existence quotidienne.
La certitude de la mort peut ainsi,
revêtir la forme d'une croyance et d'une adhésion spirituelle
à cette structure fondamentale de la vie humaine.
Alors la
mort apparaît comme le noyau même de la vie, ainsi que
certains poètes nous le disent : ce noyau qu'est la mort
s'épanouit et donne à la vie son sens.
La mort n'est
nullement le décès, elle n'est....
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