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Expliquer le texte suivant : La philosophie ne peut être rapprochée de la science, en ce sens qu'elle en formerait,...

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« Expliquer le texte suivant : La philosophie ne peut être rapprochée de la science, en ce sens qu'elle en formerait, soit le premier, soit le dernier échelon.

C'est le pro­ duit d'une autre faculté de l'intelligence, qui, dans la sphère de son acti­ vité, s'exerce et se perfectionne suivant un mode qui lui est propre.

C'est aussi quelque chose de moins impersonnel que la science.

La science se transmet identiquement par l'enseignement oral et dans les livres ; elle devient le patrimoine commun de tous les esprits, et dépouille bientôt le cachet du génie qui l'a créée ou agrandie.

Dans l'ordre des spéculations philosophiques, les développements de la pensée sont seulement susci­ tés par la pensée d'autrui ; ils conservent toujours un caractère de per­ sonnalité qui fait que chacun est obligé de se faire sa philosophie.

La pensée phoilosophique est bien moins que la pensée poétique sous l'in­ fluence des formes du langage, mais elle en dépend encore, tandis que la science se transmet sans modification aucune d'un idiome 1 à l'autre. COURNOT 1.

idiome : langue. La connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise.

Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la compréhension pré­ cise du texte, du problème dont il est question. COUP DE POUCE ■ Analyse du sujet - Texte assez facile à comprendre : le thème concerne le problème classique des rapports entre science et philosophie, et Cournot formule successivement trois points de vue différents. - Ce qu'il cônvient de faire pour un bon commentaire, c'est fournir des illustrations à propos des trois points de vue. - On accordera autant d'importance à la question du langage qu'aux deux autres aspects, bien qu'elle soit moins développée dans le texte. ■ Pièges à éviter - Inutile de recenser toutes les conceptions possibles à propos des rela­ tions science-philosophie: on s'en tiendra au texte seul. - Ne pas donner un sens outrancier à la formule«chacun est obligé de sa faire sa philosophie» : «chacun» désigne d'abord chaque philo­ sophe... - Ne pas réduire, dans le dernier point, l'influence des «formes du langage» au seul problème de la traduction: ce serait négliger l'influence qes mêmes formes dans ce que Cournot nomme la«pensée poétique». CORRIGÉ [Introduction] Parce que la philosophie est antérieure à la science au sens moderne, la question de leur relation a souvent été évoquée, par des philosophes aussi bien que par des scientifiques.

L'originalité de Cournot est ici d'affirmer que leurs démarches sont en réalité différentes, ce qui garantit la spécifi­ cité et aussi la nécessité de chacune.

Il n'y a donc pas lieu de tenter de les classer l'une par rapport à l'autre ou de les hiérarchiser; chacune possède sa dignité propre, même si leurs modes d'élaboration, de transmission et de discours sont nettement distincts. [I.

Deux activités intellectuelles différentes] Avant l'apparition de la science moderne, soit avant le XVII" siècle, on pouvait concevoir une relation hiérarchique entre la philosophie et les «savoirs».

C'est bien ce que fait Platon, lorsqu'il affirme que la connais­ sance dialectique constitue le dernier niveau de la connaissance, supérieur aux savoirs qui concernent le monde (qu'il s'agisse de la médecine ou de l'astronomie).

C'est aussi le point de vue d'Aristote, lorsqu'il distingue les philosophies «secondes» (tous les savoirs sur le monde, jusqu'à la «physique») de la philosophie «première» (que l'on nomme ensuite métaphysique, et à laquelle on accède chronologiquement en dernier, parce qu'elle est la science des premiers principes et de l'être). Après Galilée et avec le développement des sciences expérimentales, la relation peut en quelque sorte s'inverser.

Non que les sciences soient conçues comme«dépassant» la philosophie (thèse qui n'apparaît qu'avec le scientisme).

C'est plutôt que cette dernière doit alors les fonder : ainsi, pour Descartes et ses successeurs, la métaphysique constitue les « racines» de l'arbre de la c onnaissanc e, dont les mathématiques sont le tronc, et les branches maîtresses la mécanique, la médecine et la morale. Pour Cournot, de telles conceptions ne sont plus tenables, et il préfère considérer que philosophie et science se distinguent à la fois par la « faculté de l'intelligence» qui s'y trouve à l'œuvre, par une « sphère d'activité»·propre et par une manière de se perfectionner historiquement également spécifique.

On peut en effet admettre que la raison ne s'exerce pas de la même façon dans les deux domaines, mais surtout que les pro­ blèmes à résoudre n'ont pas grand-chose en commun, ce qui garantit la « sphère d'activité» propre à chaque attitude (on peut rappeler à ce pro­ pos que la mentalité scientifique renonce à examiner les causes premières ou finales, tandis que la philosophie peut continuer à s'en préoccuper). [Il.

Universalité et personnalité] Sans doute est-ce en raison de la différence des objectifs et des pro­ blèmes abordés, autant que des méthodes, que science et philosophie s'opposent comme l'universel au singulier.

La science est « imperson­ nelle», ce qui indique aussi bien l'universalité de ses affirmations que la façon dont elle concerne potentiellement tous les esprits de la même manière.

Son enseignement, qu'il soit oral ou textuel, ne peut donc pas en modifier les contenus, car l'enseignant ne peut que répéter ce qui a été établi sans y introduire de modification.

Ainsi s'affirme-t-elle comme « patrimoine commun» pour tous les esprits, ce qui a pour conséquence que les affirmations scientifiques sont rapidement indépendantes de leurs inventeurs.

Évoquer un théorème d'Euclide ou une loin de Newton, ce n'est pas signifier que ce théorème ou cette loi appartiendraient person­ nellement à ces deux personnages célèbres, c'est simplement rappeler qu'ils furent les premiers à les établir.

Une fois acquis, ces savoirs devien­ nent un bien commun, éventuellement anonyme car on ne se donne pas la peine de signaler pour toute loi le nom de.... »

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