Égypte 1984-1985 Crise d'identité Alors que les problèmes économiques, sociaux et de politique intérieure se sont accumulés sur les bords...
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Égypte 1984-1985
Crise d'identité
Alors que les problèmes économiques, sociaux et de politique intérieure se sont accumulés sur les bords
du Nil, l'année 1984 et les premiers mois de 1985 ont été assez favorables à la politique extérieure
égyptienne, puisque l'Égypte a commencé à sortir de l'isolement diplomatique où elle était plongée à
l'intérieur du monde arabe.
On sait qu'après la signature du traité de paix israélo-égyptien et le sommet
arabe de Bagdad, en mars 1979, les relations diplomatiques entre Le Caire et les principales capitales
arabes avaient été interrompues, sauf avec trois États membres de la Ligue arabe: la Somalie, le sultanat
d'Oman et le Soudan.
Déjà, en décembre 1983, il y avait eu la rencontre-surprise entre le président
Moubarak et Yasser Arafat.
En 1984, on a assisté aux retrouvailles égypto-jordaniennes, avec la reprise
des relations diplomatiques et politiques entre Le Caire et Amman, puis à la participation de l'Égypte à la
Conférence islamique de Sanaa, en décembre 1984.
Enfin, en mars 1985, le président Moubarak,
accompagné du roi Hussein de Jordanie, s'est rendu à Bagdad, concrétisant ainsi l'émergence d'un axe Le
Caire - Amman - Bagdad, même si l'Irak n'a pas encore rétabli ses relations diplomatiques avec l'Égypte.
En même temps, les relations égypto-israéliennes, gelées depuis l'invasion du Liban en juin 1982, se sont
débloquées au début de 1985: l'Égypte ne désespérait donc pas de pouvoir récupérer prochainement
l'enclave touristique de Taba, proche d'Eilath, conservée par les Israéliens après l'évacuation du Sinaï au
printemps 1982.
En revanche, la visite du président Moubarak aux États-Unis, en mars 1985, s'est soldée
par un échec, le Raïs n'ayant pu obtenir l'aide économique et militaire qu'il attendait de Washington, soit
1,9 milliard de dollars sur l'ensemble des années fiscales 1985 et 1986.
Une situation économique préoccupante
Or, la situation économique et financière de l'Égypte est devenue extrêmement préoccupante.
En effet,
depuis 1984, l'Égypte ne parvient plus à faire face à tous ses engagements financiers.
Le déficit
budgétaire a doublé entre 1983 et 1984, atteignant approximativement le quart du produit national brut
en 1985.
La dette extérieure, qui s'élevait à 22 milliards de dollars en 1983, aurait atteint 30 milliards de
dollars en 1985, mais le service de la dette (35% des recettes d'exportation du pays) est resté dans des
marges supportables, en comparaison avec la situation d'autres États du tiers monde.
Le déficit commercial n'a cessé de s'accentuer, pour atteindre 7,1 milliards de dollars en 1983.
La moitié
des importations est constituée de produits alimentaires.
Cette dépendance alimentaire grandissante a
coûté à l'Égypte 4 milliards de dollars en 1984.
Au même moment, les principales rentrées de devises ont
diminué ou stagné.
Ainsi, les apports des travailleurs égyptiens dans les pays pétroliers de la péninsule
Arabique ont été de 2 milliards de dollars en 1984, un milliard de moins qu'en 1983.
Les ventes d'armes
de l'industrie militaire avaient rapporté 1 milliard de dollars en 1983 ; mais depuis 1984, le principal client
de l'Égypte, l'Irak, ne peut plus payer.
En même temps, les recettes touristiques ont stagné autour de
600 millions de dollars, ainsi que les revenus procurés par le canal de Suez (1 milliard de dollars en
1984), dont le trafic a été légèrement perturbé durant l'été 1984 par l'affaire des mines flottantes dans la
mer Rouge.
Les principales recettes en 1984, les exportations pétrolières, ont rapporté 2,5 milliards de dollars, un peu
plus que l'année précédente (2,3 milliards de dollars).
Mais, si les exportations et la consommation
intérieure devaient se maintenir au niveau de 1985, les réserves pétrolières seraient épuisées en 1995.
C'est pourquoi le gouvernement a envisagé la construction d'une grosse centrale nucléaire.
La situation
financière de l'Égypte et la réticence des banques internationales à consentir des crédits commerciaux
non garantis risquent de compromettre sérieusement ce projet, qui intéressait directement l'industrie
électronucléaire française, d'autant que Le Caire a accumulé des retards de règlement considérables pour
payer les armes livrées par les États-Unis et la France, ses deux principaux fournisseurs.
Les répercussions de cette inquiétante situation économique et financière sur la vie quotidienne ont été
aggravées par une inflation galopante, proche de 40%, qui a touché particulièrement les salariés et la
majorité du peuple égyptien dont les conditions de vie n'ont cessé de se dégrader.
On estimait en 1985
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que 37% des Égyptiens vivaient au-dessous du seuil de la pauvreté, alors que 5% des familles les plus
fortunées disposaient du quart du revenu national.
Ces énormes disparités dans les niveaux de vie sont le
résultat de la politique d'ouverture (Infitah) amorcée par le président Sadate en 1974.
Dix ans plus tard,
les "nouveaux riches de l'Infitah" étalaient un luxe tapageur, de plus en plus mal supporté par les
catégories sociales les plus défavorisées.
Aussi le président Moubarak a-t-il tenté de corriger les "effets pervers" de la politique économique de son
prédécesseur, sans cependant véritablement remettre en cause l'Infitah.
Toutefois, le régime d'Hosni
Moubarak a montré sa volonté de lutter contre la corruption.
Déjà, en 1983, le Tribunal de l'éthique,
instauré en 1980 par Anouar El Sadate, avait condamné aux peines maximales le propre frère du
président défunt et trois de ses fils.
Ce même souci de moralisation s'est manifesté dans la décision prise
par le président Moubarak, le 30 mars 1985, de démettre de leurs fonctions le ministre de l'Économie et
le gouverneur de la Banque centrale, mis en cause l'un et l'autre par le Tribunal de l'éthique dans une
affaire de transferts de fonds illicites, qui est devenue un des plus grands....
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