D'où vient le pouvoir des mots 7 I. ANALYSE DU SUJET. CONSEILS. REMARQUES DE MÉTHODE L'intitulé du sujet fait appel...
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«
D'où vient le pouvoir des mots 7
I.
ANALYSE DU SUJET.
CONSEILS.
REMARQUES DE MÉTHODE
L'intitulé du sujet fait appel immédiatement à vos
connaissances sur le langage et le pouvoir.
Vous ne devriez
pas avoir de difficulté à correctement définir .les concepts de
« mots » et « pouvoir ».
En particulier il faut bien se rappe
ler, à propos des mots, les notions de signifié et de signifiant,
qui montrent l'existence d'un «intérieur» et d'un « exté·.
rieur » des mots.
.
Cette dernière distinction va vous conduire d'abord au
problème : le pouvoir des mots vient-il des mots eux-mêmes
ou d'autre chose?
Elle va également vous orienter dans le choix du plan qt,ii
est fondamentalement un plan de type dialectique; appuyé
dans une de ses parties, la thèse, sur un pla� progressif.
Thèse : le pouvoir des mots vient des mots eux-mêmes.:
• un appareil symbolique d'emploi très pratique;
• un système de thaumaturgie et d'acti.on.
Antithèse : le pouvoir des mots vient du porte:parole.
Synthèse, répondant au problème posé : la· puissance des
mots vient du dedans et du dehors du .langage.
li.
BIBLIOGRAPHIE
Pierre :BOURDIEU
Ce que parler veul dire (Fayard) ..
BENVENISTE
Problèmes de linguistique générale (Gallin:iard, Tel).
G.
GUSDORF
La parole (P.U.F.-Initiation philosophique).
•
III.
DISSERTATION
1 ° Introduction
Les mots sont définis, en linguistique, comme des sons ou
des groupes de sons articulés constituant une unité séman
tique, comme des unités linguistiques fonctionnant de
manière relativement autonome.
Le mot désigne donc le
signe linguistique et associe deux éléments, l'idée de la
chose, le signifié (exemple: l'idée de table) et, d•autre part,
l'image acoustique, le signifiant.
Le mot, signe linguistique,
constitue, par conséquent, la synthèse et l'unité du signifié
et du signifiant.
Les mots en tant que tels apparaissent donc comme les
unités de base du langage, défini comme la faculté qu'ont
les hommes de s'entendre au moyen de signes voc;iux.
D'autre part, qu'est-ce que le pouvoir? C'est, avant tout,
la possibilité d'agir sur quelqu'un ou sur quelque chose,
c'est une capacité de maîtriser les objets, mais aussi
d'obtenir, pour un dominant, certains actes et certains
· comportements chez un dominé.
Donc, le pouvoir est
puissance, puissance sur les choses ou les êtres.
Les signes linguistiques véhiculent bien, comme le montre
toute observation courante, une puissance, une possibilité
d'agir sur quelque chose ou quelqu'un.
« II n'a qu'un mot à
dire», affirmo-t-on de celuï dont on souligne ou proclame Ja
puissance.
L'intitulé du sujet et la question nous invitent à
rechercher l'origine du pouvoir des mots, à nous interroger :
où réside exactement le pouvoir des signes linguistiques?
Mais, plus profondément, le problème que soulève le sujet
est celui de savoir si le pouvoir des mots se situe dans les
signes linguistiques eux-mêmes ou dans une autre sphère.
L'autorité et la puissance viennent-elles au langage du
dedans ou du dehors?
2o Discussion
A)
u pouvoir
des mots vient des· mots eux-mêmes.
.
-
a) Un appareil symbolique commode et léger.
• Avant· les mots : rien.
Le pouvoir des mots se comprend, en 'tout premier lieu, à
partir du « néant ,.
pur qui précède l'ordre de la dénomina
tion.
Avant le langage, l'univers qui nous est donné est de
l'ordre du singulier, de l'imprécis, de l'indéterminé, du
flottant, du vague, du nébuleux.
Les mots apportent délimi
tation et précision dans un réel qu'ils tirent véritablement
du néant.
Il y a d'abord pouvoir des mots.
parce qu'avant
eux, il n'est rien.
Comme l'écrivait Nietzsche, les hommes
de génie sont des nommeurs.
Ils créent par les mots ce qui
n'existe pas.
Ayant les mots, il n'y a rien.
Leur pouvoir
s'enracine dans le néant qu'ils informent.
Néanmoins, si le pouvoir des mots procède à l'évidence
du néant qui les précède, nous ne savons pas encore quelle
est la source interne de ce mystérieux pouvoir.
Pourquoi
leur est-il donné d'agir sur les choses et les êtres, de
véhiculer une puissance à partir du rien? S'il est vrai qu'en
deçà des mots, il n'y a rien, d'où procède le pouvoir créateur
des mots à partir de ce rien?
• le système de signes le plus économique.
Les mots commandent, à partir du rien, l'accès à l'être et
à l'existence.
Ils commandent cet accès parce qu'ils incar
nent li:!- forme la plus haute de la faculté de symbolisation.
Ils expriment le réel par des signes, comme nous l'avons vu,
constituant une unité e'ntre ùn' signifié et un signifiant.
Or le
pouvoir des mots provient d'abord de ce qu'ils représentent
le symbolisme le plus économique.
En ceci, ils diffèrent
d'autres systèmes représentatifs, ils sont commodes, requé
rant le minimum d'investissement physique ou corporel.
L'appareil symbolique des mots est le plus « léger» qu'il soit
possible d'imaginer et tire de cette légèreté sa puissance.
Imaginons, écrit Benveniste, ce que serait la tâche de
représenter aux yeux une « création du monde » s'il était
possible de la figurer en images peintes, sculptées ou autres
au prix d'un labeur insensé.
Voyons ce que devient la même
histoire quand elle se réalise dans le récit, sui�e de petits
bruits vocaux qui s'évanouissent dès qu'ils sont émis.
Manifestement, les mots permettent de posséder une puis
sance maximale sur le monde et les choses à partir d'un
intermédiaire fort économique.
Ils tirent leur puissance
démiurgique d'un outil symbolique très facile à utiliser.
« Aucun pouvoir n'égalera )amais celui-là, qui fait tant avec
si peu» (Benveniste).
Ainsi, l'appareil des mots est léger, commode, le langage
tire son pouvoir de son extraordinaire « facilité », de sa
légèreté infinie.
b) Thaumaturgie et action.
• Thaumaturgie et magie.
Voici un système de signes économiqÙes, légers, d'utilisa
tion facile.
Ce système de signes tire son pouvoir non
seulement du fait qu'il exprime la réalité, mais de ce qu'il la
fait surgir et la révèle magiquement, c'est-à-dire en produi
sant, par des procédés « occultes», des phénomènes inexpli
cables ou qui semblent tels.
Le mot, si léger, si- impalpable,
est magie, envoûtement et sorcellerie.
Il n'intervient pas
comme une étiquette arbitraire, mais bien au contraire, il
est révélation de la chose.
Ceci est particulièrement net
chez le primitif : le mot tire son pouvoir de la puissance
magique contenue en lui.
Ainsi, "telle peuplade primitive
utilise-t�elle un système de médecine reposant tout entier
sur les noms des maladies et des remèdes.
On utilise les
plantes et les substances dont le nom évoque la santé ou la
guérison:
Mais ce n'est pas seulement dans les groupes primitifs
que le mot doit ,son pouvoir à cette essence inagique.
Dans.
nos sociétés· aussi, on peut parler de la puissance magique
du langage.
Les signes linguistiques sont d'emblée magi
ques.
Si, par exemple, la calomnie est possible, c'est bien
parce qu'il y a de la thaumaturgie dans les mo� : « D'un
mot,....
»
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