Descartes (1596-1650) LES MÉDITATIONS MÉTAPHYS/UUES(II): DE DIEU AU MONDE L e moi, au cœur même de sa solitude, a découvert...
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Descartes (1596-1650)
LES MÉDITATIONS MÉTAPHYS/UUES(II):
DE DIEU AU MONDE
L
e moi, au cœur même de sa solitude, a découvert l'existence
de Dieu.
Celle-ci est aussi indubitable que la sienne propre,
puisque l'idée claire et distincte de ma pensée est inséparable de celle
de Dieu qrii y est inscrite.
Dieu est le centre du moi.
Dieu va nous per
mettre, par la garantie définitive qu'il apporte à nos connaissances,
de fonder les sciences et de rejoindre le monde.
1.
Verreur
A.
La véracité divine
Dieu existe; or il n'est sujet à aucune imperfection ; donc il ne
peut être trompeur, puisque vouloir tromper implique nécessairement
quelque faiblesse ou malice.
Je puis donc avoir confiance, pour atteindre
la vérité, dans le témoignage de mes facultés intellectuelles, qui ont été
créées par Dieu.
• Pourtant, je me trompe.
Comment cela est-il possible ? Cela ne
peut venir de mes facultés, mais seulement du mauvais usage que j'en
fais lorsque je juge du vrai et du faux.
Il ne peut en effet y avoir de vérité, donc aussi de fausseté, que dans le
jugement, qui est l'acte de rapporter une idée à une chose en affirmant
que l'une est conforme à l'autre.
Deux facultés concourent au juge
ment : l'entendement, réceptif, qui conçoit les idées, et la volonté,
active, qui leur accorde librement son assentiment.
Se tromper
consiste à affirmer à tort la vérité d'une idée (le dauphin est un poisson,
le soleil est grand comme une assiette).
■
■
B.
La volonté et le jugement
C'est donc la volonté qui cause l'erreur• en donnant son assenti
ment à une idée qui n'est pas évidente.
En voici la raison: mon enten
dement est borné, fini, ne saisit pas tout avec clarté, alors que ma
volonté est infinie, peut s'étendre à tout, tout vouloir, tout affirmer.
Emportée par son élan, elle dépasse les limites de l'entendement, et
affirme des choses que celui-ci n'entend pas.
■ Le remède à l'erreur consiste donc à tenir ma volonté dans les
bornes de ce que l'entendement conçoit, de manière à ne donner mon
assentiment qu'à ce qui est clair et distinct.
Pour le reste, je dois recon
naître mon ignorance avec humilité, plutôt que me tromper par témé
rité.
L'ignorance est une marque de ma condition, l'erreur une faute de
ma volonté.
■
a Il faut dire « faute ,>, car la volonté est libre, pleinement en mon pou
voir.
Je suis responsable de mes affirmations.
Pourtant, devant l'évi
dence, il ne semble pas qu'il soit en mon pouvoir de refuser mon
assentiment.
Coupable lorsque je me trompe, suis-je sans mérite
quand je dis vrai ? La question demande examen.
2.
Le libre arbitre et la liberté
A.
Les deux degrés de liberté
ra Être libre, cela signifie d'abord avoir la puissance d'affirmer ou de
nier, de vouloir ou de refuser, sans être déterminé par quoi que ce
soit-bref avoir un libre arbitre•.
Ainsi, lorsque rien ne me pousse à vou
loir une chose plutôt qu'une autre, en l'absence de raisons claires, ma
liberté se manifestera par l'indifférence de ma volonté et l'arbitraire de
mon choix.
llil Mais cette indifférence, qui révèle un défaut de connaissance plus
qu'une perfection de la volonté, n'est que « le plus bas degré de
liberté».
Être libre, en effet, ne consiste pas seulement à être indé
pendant, déterminé par rien, mais aussi à développer sa propre
nature.
Or l'homme a une nature rationnelle, créée par Dieu.
Notre
volonté est donc destinée à s'accomplir dans la reconnaissance du vrai,
et notre nature à y trouver son épanouissement.
11 Je serai donc d'autant plus libre que j'aurai des raisons évidentes
d'agir et que je ne serai jamais indifférent.
Si je connaissais toujours
clairement ce qui est vrai et ce qui est bon, je ne serais jamais en peine
de délibérer, ma volonté agirait avec facilité, sans hésitation, en pleine
lumière.
B.
Liberté et vérité
■ Mais si je suis d'autant plus libre que je me soumets à l'évidence et au
bien, que devient le pouvoir de se déterminer par soi-même ? L e libre
arbitre n'est-il pas anéanti par la splendeur contraignante de la
vérité?
l!!I Non, car l'évidence ne contraint pas la volonté, le libre arbitre ne dis
paraît pas devant l'évidence, il est seulement «incliné» à donner
son assentiment, mais sans nécessité.
Car absolument parlant, il peut le
refuser, en préférant l'affirmation de son indépendance à la vérité.
111 L'homme est donc méritant de reconnaître le vrai, car il pourrait
en détourner son attention.
C'est librement que l 'homme accomplit sa
nature en développant sa raison, et librement qu'il peut déchoir.
Et si
réaliser sa nature, c'est devenir vraiment libre, on doit dire que c'est
librement que l'on devient libre.
En disant que le péché lui-même est
une erreur, Descartes ne disculpe donc personne, il fait plutôt de l'erreur
une sorte de péché contre soi-même.
Descartes
3.
La vérité des idées
A.
Garantie divine et poursuite de la recherche
■ Ces considérations sur l'erreur et la liberté m'ont appris ce qu'il faut
faire pour parvenir à la vérité, et continuer la recherche efficacement.
La ferme résolution de bien juger ne doit plus me quitter.
111 De plus, la découverte de l'existence d'un Dieu non trompeur garan
tit la vérité des idées claires et distinctes de manière absolue, en dehors
même des moments où....
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