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Commentez ce jugement dé M. Philippe Van Tieghem : « Le Surréalisme est foncièrement anti-mystique, puisque le mysticisme suppose un...

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« Commentez ce jugement dé M.

Philippe Van Tieghem : « Le Surréalisme est foncièrement anti-mystique, puisque le mysticisme suppose un monde second et le transfert d'un monde à l'autre; la négation du mysticisme évite le ·déchirement de l'homme et rend l'individu cohérent dans un monde cohérent.

» (Petite histoire des grandes doctrines littéraires en France, page'295.) RÉFLEXIONS PRÉLIMINAIRES . 1.

Nous arriv�ns ai>ec cette étude à l'extrême pointe du « modernisme ll unipersitaire.

A · notre connaissance, aucun: suiet concernant le Surréalisme n'a été proposé à un examen de Lettres,· depuis le Baccalauréat jusqu'à l'Agrégation.

Toute/ois on poudra bien consi­ dérer que le temps n'est plus où le Parnassè constituait l'avant-garde un peu audacieuse de ces sujets, que l'Université tend de plus en plus. à abolir la différence entre auteurs classiques et auteurs contemporains (des icrivains très récents, comme Valéry, ont fait l'objet de thèses, et des collections scolaires, par, exempu, 1qs « Classiques Illustrés V.au• bourdolle ))' ouvrent désormais leurs portes à des pivants comme Mau­ rois, J.

Romains,· Montherlant, etc.), et que bien des sujets amènent à embrasser, sinon le Surréalisme en particulier, du moins l'esprit d.e la littérature contemporaine dans son ensemble : c'est ainsi que le sujet proposé en 1944 aux candidats à l' E.

N.

S.

les invitait, à propos d'un mot de V.

Hugo sur la poésie; à réfléchir sur« le développement de la poésie française depuis l'.

époque romantique jusqu'à nos jours n et que le sujet donné au même concours en 1952 concernait le problème de l'obscurité poétique.

(Cf.

notamment les sujets proposés, JIJe Partie, ch.

x.m, n° •·32 ·à 35.) Dam ces cas et dans plusieurs autres, le Sur­ réalisme pouvait fournir des arguments de choix.

Par conséquent, un étudiant.

sera bien avisé, pour éviter toute surprise, de poursuine jusqu'à nos jours l'étude des tendanceà· et iles Écoles. 2., Parmi · celles-ci, le Surréâlismé est particulièreriient: important, moins · peut-Atre, à cause de· ses réalisations que parce que de_ nombreux écri­ : Pains modernes ont trayersé cette École, et surtout parce qu'elle apparaît dans presque tous les domaines poétiques comme le terme de, l'éyolution du.

X/Xe siècle.

Aussi, réfl,échir sur une question pôétique à propos du Surréalisme, est-ce presque toujours.

aller à l'essence de cette question et, par_ là, à l'essence de la poésie.

Les sujets proposés à la· fin du présent chapitre condu_isent soupent à creuser à fand le , problème de l'image, de la folie, etc., en poésie. 3.

Les lignes de M.

Philippe Van· Tieghem nous amènent directement au . cœur d'un problème capital en ffoésie, celui du mysticisme.

Cette question nous semble au surplus capitale pour comprendre quoi que ce soit du Surréalisme : habituellement celui-ci est présenté comme le point d'aboutissement extrême de cette tendance, qui traYerse tout le XJXe siècle poétique, des Romantiques allemands aux ·Symbolistes, · suiYant laquelle le poète est l'explorateur d'un autre monde, une sorte • de mystique, laïc ou religieux, qui a la clef d'un uniYers supérieur. Or, dit M.

Van Tieghem, le Surréalisme pousse sans doute à la limite cette tendance, mais, en même temps, il en .modifie complètement ,· l'esprit, car, d'après les Surréalistes, tout ce que les poètes ont cherché aY'ant eux dans la direction de l'Absolu, ils ar,aient raison sans doute de le chercher, mais ils ar,aient tort de le supposer dans un autre monde.

En réalité, ces �isions nour,elles que cherchaien{tous ces prédécesseurs sont de ce monde et justement ces prédécesseurs ont échoué pt1,rce qu'ils les cherchaient hors du· monde : c'était ce monde-ci, qu'il. fallait simplement mieux çoir, d'une façon plus large et plus complète. 4.

Ainsi un paradoxe apparent, une Yérité · incontestable, telles nous apparaissent les lignes que nous ayons à commenter.

Elles ne sont · tQutefois pas sans appeler une certaine discussion, dans· la mesure où, presque tout l'essentiel de l'attitude mystique {passiYité, culte des mystérieux trésors qu'on porte en soi, etc.} est gardé par le Surréa­ lisme, que certains critiques catholiques, comme M.

André Rousseaux, Paient açec la plus YÎYe sympathie.

On peut se demander dans quelle mesùre aussi la conception de la mystique à laquelle se réfère M.

Ph.

Van Tieghem n'est pas un peu erronée.

La plupart des mys, tiques, s'ils admettent en effet un monde second, refuseraient sans doute d:accorder qu'ils se transportent d:un monde à l'autre et surtout qu'il y a pour eux déchirement entre les deux mondes et incohérence (au contraire, aux yeux de la Charité, du troisième ordre, comme dirait • Pascal, le monde est beaucoup plus cohérent qu'aux yeux ' de l'homme or_dinaire).

De toute façon, le texte à commenter est l'occa­ sion de méditations fécondes sur « Mystique et Poésie », et le Surréa­ lisme est déjà important parce qu'il amène à remettre totalement en cause les çaleurs et les positions. 5.

On parlera ar,ec précaution du Surréalisme enPisagé comme un mouPement qui a éyolué depuis sa fondation à l'époque de Dada (çers 1920) et qui se poursuit encore actuellement.

Du reste, dans •l'idée de son chef, . ' LE SURR/J;ALISME. André Breton; il s'agit moins d'une École que d'une méthode de tra­ yail, en sorte qu'il y a e'u des Surréalistes bien ayant le Surréalisme comme il y a eu de Yéritables expériences, scientifiques bien ayant Claude Bernard et ses traYaux sur la méthode expérimentale.

Au fond, le Surréalisme se borne à explorer systématiquement ce que, d'après les Surréalistes, tous les grands poètes ayaient déjà plus ou moins entreYu. 6.

Nous en parlerons donc comme d'une méthode et d'un esprit, en négli­ geant Yolontairement son histoire et son éyolution.

Nous croyons bon toutefois, aussi bien pour fixer les idées que pour rendre serYice à l'étu­ diant, de rappeler ici les principales dates,.... »

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