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Ce qu'il faut comprendre □ Il faut éviter une fausse problématique, en réalité la simple jux­ taposition de deux aspects...

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« Ce qu'il faut comprendre □ Il faut éviter une fausse problématique, en réalité la simple jux­ taposition de deux aspects d'une même opinion: si vous dites que l'oubli est une bonne chose lorsqu'il s'agit de souvenirs désagréables, mais qu'il est une mauvaise chose dont le cas contraire, d'une part vous ne faites qu'énoncer une platitude qui ne fait pas avancer la réflexion, d'autre part cette platitude n'a pas même l'excuse d'être vraie: il y a de mauvais moments dont il faut se souvenir à cause des leçons qu'ils contiennent, et de bons moments qui peuvent très bien s'oublier sans conséquences. On peut en revanche légitimement s'interroger sur le fait que notre rapport au passé implique la mémoire, et par conséquent l'oubli. En effet, le terme de « déficience » peut être critiqué dans la mesure où la mémoire implique l'oubli.

Il s'ensuit que le passé n'est jamais rendu présent à notre conscience, car se souvenir n'est pas revivre.

Il faudrait alors montrer comment la mémoire reconstitue le passé, en le modifiant au fil de ses différentes évocations.

En effet, lorsque nous racontons pour la première fois un souvenir, notre récit lui imprime une modification.

Et si nous continuons à le raconter, notre mémoire va mêler le souvenir proprement dit et les récits qui lui ont été consacrés.

Chaque récit nouveau augmenterait ainsi la part d'inexactitude du souvenir. Pourtant, si étrange que cela puisse paraître, il est possible que cet éloignement progressif nous rapproche de la vérité, car le récit peut en venir progressivement à discerner l'essentiel masqué sous la profusion des détails de l'événement vécu.

C'est entre autres pour cette raison qu'on dit que l'histoire a besoin de recul, et que la compréhension des événements ne peut se faire que lorsqu'ils se sont éloignés dans le temps, et même lorsque l'on n'en a plus le souvenir au sens précis du terme. Mais on peut également choisir une autre problématique, sans doute plus facile à développer.

Il faudrait se demander ce qu'il y a de positif dans l'oubli, qui permet de vivre tourné vers l'avenir.

Certes, comprendre que l'on n'agit que par une certaine forme d'inconscience, dont l'oubli partiel du passé est la marque la plus incontestable, peut effrayer.

Les hommes vivraient donc en aveugles.

Mais ce serait une autre forme d'illusion, sans doute plus grave, que de croire qu'il ne faut rien oublier, comme si c'était possible.

Il faut ajouter que ce que nous avons vécu autrefois peut à son tour faire illusion, dans la mesure où nous pouvons en tirer des enseignements contestables qui peuvent nous enfermer en restreignant abusivement nos possibilités.

Il n'est pas sûr □ □ que le meilleur guide de la vie soit l'expérience passée, et ce qui a échoué un jour peut réussir un autre jour. 0 Nous pouvons tirer de là une.... »

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