Brésil 2002-2003 La victoire de «Lula» L'année 2002 a entièrement été dominée par les élections des 6 et 22 octobre....
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Brésil 2002-2003
La victoire de «Lula»
L'année 2002 a entièrement été dominée par les élections des 6 et 22 octobre.
De
fait, 115 millions d'inscrits étaient appelés à élire leur président de la
République.
Le même jour, ils devaient aussi renouveler la totalité des 513
sièges de la Chambre des députés et deux tiers des 81 sièges du Sénat fédéral.
Ils étaient aussi appelés à élire leurs gouverneurs (un pour chacune des 27
unités fédératives) et la totalité des membres de chacune des assemblées
législatives (une par unité fédérative).
Si la simultanéité de ces cinq scrutins
a provoqué un mélange des enjeux nationaux et locaux nuisible à la clarté des
débats, elle n'a pas occulté l'importance du scrutin présidentiel.
Celui-ci a
été remporté par Luis Inacio «Lula» da Silva, qui a obtenu 61,3 % des suffrages
exprimés au second tour, soit un score nettement supérieur à celui de tous ces
prédécesseurs.
Contrairement à ses devanciers et à l'immense majorité des dirigeants
brésiliens, Lula n'est pas un fils de bonne famille.
Né de paysans très pauvres
et analphabètes, il doit, après avoir fui avec sa famille la misère des
campagnes du Nordeste, quitter l'école à l'âge de douze ans pour exercer divers
petits métiers.
Six ans plus tard, il est ouvrier tourneur, profession qu'il
exercera pendant une douzaine d'années, à la fin comme contremaître.
En 1969, il
entre dans le syndicalisme et est élu en 1975 à la présidence du syndicat des
métallurgistes des banlieues industrielles de São Paulo.
Fervent orateur et
habile organisateur, il souhaite que les syndicats s'éloignent des pratiques
corporatistes d'alors.
Au printemps 1980, il est le leader des grandes grèves
qu'affronte le régime militaire.
Profitant alors du retour au multipartisme, il
cofonde le Parti des travailleurs (PT), formation mêlant à l'époque des courants
et des groupuscules d'inspirations diverses, principalement le socialisme (de
conception sociale-démocrate, marxiste-léniniste ou trotskiste), le catholicisme
(modéré ou proche de la théologie de la libération), le tiers-mondisme et le
pragmatisme syndical.
Lula en est, dès sa fondation, élu président.
Brillamment
élu député fédéral en 1986, il ne briguera par la suite qu'un seul poste : la
présidence de la République.
À trois reprises, il arrive deuxième du premier tour, améliorant à chaque fois
son score : 17,2 % en 1989 (puis 47 % au second tour contre le néolibéral
Fernando Collor), 27 % en 1994 (le sociologue Fernando Henrique Cardoso, centre
gauche, l'emportant dès le premier tour), 31,7 % en 1998 (F.
H.
Cardoso étant
réélu dès le premier tour).
Dans ce pays toujours gouverné par les élites et se
classant au premier rang du monde pour les inégalités sociales (les 10 % de
Brésiliens les plus riches jouissaient, fin 2001, de quatre fois et demie plus
de richesses que les 40 % les plus pauvres), la victoire de Lula a d'abord
résonné comme une revanche sociale et a tendu à offrir plus de dignité aux
petites gens dans l'espace public.
Un programme rassurant, plus rose que rouge
Pour l'emporter, Lula a dû devenir rassurant.
Il a multiplié les formules
consensuelles et défendu en matières économiques des propositions bien plus rose
pâle que rouges (notamment le ferme engagement d'honorer le remboursement de la
dette externe et les accords avec le FMI).
Un slogan a d'ailleurs subsumé cette
identité stratégique nouvelle : «Lula, paix et amour».
Pour rendre cette
mutation crédible, Lula, qui n'a jamais été un doctrinaire, a également imposé
au PT des alliances politiques plus larges, principalement avec le parti libéral
(PL, centre droit).
Cet accord visait à prouver que PT n'était plus un parti
sectaire, mais une formation réaliste, prenant en compte la mondialisation et
l'importance des marchés.
Il avait aussi l'avantage d'amener nombre d'électeurs
protestants et/ou évangélistes à voter en faveur de Lula, puisque le PL est très
lié avec des Églises néopentecôtistes et qu'au sein des évangélistes un électeur
sur quatre dit voter comme son pasteur le lui recommande.
Le principal rival de Lula fut José Serra, membre du Parti de la
sociale-démocratie brésilienne (PSDB, centre gauche), longtemps ministre de la
Santé du président sortant, F.
H.
Cardoso, et protégé de celui-ci (F.
H.
Cardoso
ne pouvant briguer un troisième mandat consécutif).
Sa candidature a d'abord
souffert d'une conjoncture économique et sociale morose.
La croissance du PIB
demeurait trop modeste (1,5 % en 2002 après 1,5 % déjà en 2001) pour entraver la
dégradation de l'emploi (le taux de chômage s'élevait à 11,7 % dans les grandes
villes du pays, jusqu'à 19 % dans la mégapole de São Paulo).
En outre, les gains
de pouvoir d'achat obtenus par les Brésiliens durant le premier mandat Cardoso
s'étaient évaporés au cours du second.
Les déconvenues du clan Sarney
De surcroît, J.
Serra ne bénéficiait pas de l'appui de la principale formation
conservatrice, le Parti du front libéral (PFL), qui avait vivement contribué au
succès....
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