Brésil 1991-1992 La tentation du populisme économique Le président Fernando Collor a inauguré, en mars 1992, la troisième année de...
Extrait du document
«
Brésil 1991-1992
La tentation du populisme économique
Le président Fernando Collor a inauguré, en mars 1992, la troisième année de son
mandat par un profond remaniement ministériel.
Longtemps isolé, il s'est
construit une base parlementaire en se rapprochant des partis de droite.
Plusieurs des ministres du nouveau cabinet ont occupé des postes à
responsabilité pendant la dictature militaire qui a régné sur le pays entre 1964
et 1985.
La situation économique est demeurée catastrophique: la croissance en 1991 a été
quasi nulle (1,2%) et l'inflation dans les premiers mois de 1992 s'était
"stabilisée" au-dessus de 23%.
Les ventes au détail sont tombées au niveau de
1985.
Le salaire minimum, qui constitue la base de la rémunération de près de
70% des travailleurs dans les régions les plus pauvres, a oscillé entre 40 et 80
dollars au rythme des réajustements décrétés, soit son plus bas niveau depuis sa
création, en 1940.
Seule l'agriculture s'est bien portée; la récolte de 1992
aura été la meilleure de l'histoire du pays.
Les problèmes d'infrastructures sont criants.
Les insuffisances des systèmes de
traitement des eaux ont facilité la progression du choléra qui s'est rapidement
propagé dans le nord et le nord-est du pays.
Fin avril 1992, 227 municipalités
étaient touchées et près de 22000 cas étaient déclarés.
Les enfants des rues et
les sans-abri ont pris possession des places, des parcs et des viaducs, étalant
leur misère et provoquant la peur.
A São Paulo, la violence policière a fait
1074 victimes en 1991.
Tandis qu'à Rio de Janeiro les autorités ont restauré la
vitrine défraîchie de la "ville merveilleuse" pour recevoir, en juin 1992, la
conférence mondiale sur l'environnement et le développement organisée par les
Nations unies.
Le discours écologique brésilien a toujours placé la Nature au
service de la croissance et du développement et les débats sur l'environnement
se sont situés dans le contexte plus large des relations Nord-Sud.
Avec une
classe politique presque unanime sur ce point, c'est le réflexe nationaliste qui
a primé, les Brésiliens ne voulant pas que les États-Unis leur dictent les
conditions d'exploitation de la bio-diversité amazonienne.
Dans les bras de la droite
L'isolement politique du président - élu sous une bannière de convenance, le
Parti de la reconstruction nationale (PRN) - n'a pas tardé à provoquer la
paralysie du gouvernement et de l'administration.
En octobre 1990, les premières
dénonciations de trafic d'influence, contrats illicites et surfacturation sont
apparues dans les médias.
Les scandales ont pris de l'ampleur en 1991, allant
jusqu'à mettre en cause la femme du président, Rosane, qui dirigeait alors un
organisme public d'assistance sociale.
Même l'armée a été incriminée dans une
affaire d'achat illicite d'uniformes.
Fin 1991, le ministre de la Santé, Alceni
Guerra, est tombé, puis, quelques semaines plus tard, le ministre du Travail,
l'ancien chef syndical, Antonio Rogerio Magri, est pris en flagrant délit de
corruption.
Le secrétaire à l'Environnement, José Lutzenberger, a été démis à
son tour en mars 1992 après avoir accusé les fonctionnaires de l'Ibama,
organisme dont il avait la responsabilité, de favoriser le déboisement de
l'Amazonie.
Plus tard, c'était au tour d'un grand journal de Rio d'affirmer que
le ministre de la Justice, Jarbas Passarinho, avait demandé à l'armée d'enquêter
sur le chef de la police fédérale, Romeu Tuma, soupçonné d'avoir participé à une
affaire de contrebande d'armes et de café.
Enfin, un intime du président, Pedro
Paulo Leoni Ramos, et secrétaire des Affaires stratégiques, a été soupçonné
d'avoir monté au sein de La Petrobas, la société pétrolière qui exerce le
monopole d'État sur le secteur, un important réseau destiné à canaliser des
contrats vers des amis du régime.
Le 27 mars 1992, F.
Collor demanda la démission collective de ses ministres.
Marcilio Marques Moreira fut aussitôt reconduit dans ses fonctions de ministre
de l'Économie, de même que les ministres militaires, ceux de l'Éducation et de
la Santé.
Jorge Bornhausen, du Parti du front libéral (PFL, de droite) et
secrétaire du gouvernement, fut chargé de mener les négociations avec les partis
politiques à la recherche de personnalités "ministrables" et, en particulier,
avec le PSDB (Parti social-démocrate du Brésil, centre), pièce essentielle de la
nouvelle majorité gouvernementale.
Le président avait besoin de 43 députés et 9 sénateurs du PSDB pour former une
majorité au Congrès et au Sénat, et de la caution des vedettes du parti (Mario
Covas, Fernando H.
Cardoso, José Serra) pour donner de la crédibilité à son
programme sans être l'otage du PFL et de l'intrigant Antonio Carlos Magalhaes,
le puissant gouverneur de Bahia.
Mais après dix jours, les négociations furent
rompues.
D'une part, le président refusa de s'engager sur un programme élargi de
gouvernement, et d'autre part, la machine du PSDB craignit que la participation
à un gouvernement impopulaire diminue ses chances aux élections.
Plus âgé et plus expérimenté dans les affaires de l'État, le gouvernement formé
comptait 22 membres dont un tiers appartenant à l'ARENA, le parti qui avait été
créé pour appuyer la dictature militaire.
Le nouveau ministre de la Justice,
Celio Borja, a été député et président du Congrès pendant les premières années
du gouvernement militaire du général Greisel en 1979.
Marcus Vinicias Pratini de
Moraes, le ministre des Mines et de l'Énergie, a participé aux trois premiers
gouvernements militaires, au plus fort de la répression.
Néanmoins, l'opération politique s'est soldée par un échec, la majorité à
l'Assemblée (252 députés) et au Sénat (41 sénateurs) n'étant pas acquise.
Le
président pouvait compter sur 220 voix au Congrès et 34 au Sénat, mais il allait
avoir....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓