Algérie 1985-1986 Vers l'austérité "C'est la crise": l'année 1986, qui annonçait un second souffle pour le régime du président Chadli...
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Algérie 1985-1986
Vers l'austérité
"C'est la crise": l'année 1986, qui annonçait un second souffle pour le régime
du président Chadli Bendjedid avec l'adoption de la nouvelle Charte nationale, a
commencé dans un climat pessimiste.
98% de ses recettes d'exportation provenant
des hydrocarbures, l'Algérie se trouve frappée de plein fouet par la
dégringolade des prix du pétrole (-50% en six mois) et l'érosion parallèle de la
monnaie américaine, utilisée pour les transactions pétrolières, alors que le
coût des biens d'équipement importés est resté à peu près stable.
Ses revenus en
devises, qui, selon les chiffres officiels, s'étaient maintenus en 1985 aux
alentours de 12,8 milliards de dollars, pourraient tomber à seulement 8 ou 9
milliards.
Car la baisse des tarifs pétroliers a une incidence directe sur ceux du gaz,
dont l'Algérie possède des réserves qui la placent au quatrième rang mondial.
En
raison d'une stratégie commerciale fondée sur des accords à long terme et des
prix élevés, elle a perdu progressivement tous ses clients sur le marché
américain et elle devait renégocier en 1986, avec ses partenaires belge, italien
et français, dans des conditions peu favorables ; pour ce pays de 23 millions
d'habitants dont les besoins croissent au rythme d'une démographie "galopante",
les temps difficiles de "après-pétrole" sont arrivés plus tôt que prévu.
Dès la fin février 1986, le gouvernement a décidé d'informer ses concitoyens de
la situation et d'opérer des compressions budgétaires (-20% sur le programme
d'importations, -26% sur les équipements).
Et à partir du mois d'avril, les
autorités algériennes ont commencé à expulser quelque 20 000 Maliens et
Nigériens qui s'étaient installés illégalement dans le Sud saharien et
devenaient un fardeau économique.
Dans ce contexte difficile, les dirigeants algériens ont gardé au moins deux
motifs de satisfaction.
D'abord la nette amélioration des performances de
l'agriculture, grâce à l'aide accordée par l'État aux petits paysans, à la
restructuration des domaines autogérés, au relèvement des prix offerts aux
producteurs et à des pluies régulières.
La récolte de céréales a ainsi atteint
en 1985 le niveau exceptionnel de 30 millions de quintaux (dont 16,4 de blé)
contre 16 millions l'année précédente, tandis que la production de pommes de
terre a doublé en l'espace de deux ans (on en espérait 10,5 millions de quintaux
en 1986).
Ces progrès ont allégé d'autant la facture des importations
alimentaires, lesquelles couvrent 60% des besoins.
L'autre indice de bonne santé
économique est le niveau de la dette, maintenu - grâce à une gestion très
prudente - autour de 17 milliards de dollars.
L'Algérie peut donc se permettre d'emprunter pour affronter cette mauvaise
passe.
Mais ses dirigeants semblent hésiter à la fois sur l'ampleur de la crise
et sur la stratégie à adopter: si l'austérité (et non la simple rigueur) se
révèle indispensable, qui va-t-elle toucher en priorité parmi les secteurs de
l'État et dans la population? Et peut-on sans risque remettre brutalement en
cause les alliances nouées avec les couches populaires sur la base d'un partage
de la rente des hydrocarbures? On a vu affleurer dans la presse (suivant qu'elle
est plus proche du Parti ou de la Présidence) un débat sur la crise qui paraît
recouper assez exactement les discussions parfois très polémiques auxquelles on
a assisté en 1985 à propos de la Charte nationale.
Adoption de la Charte nationale
Le président Chadli avait annoncé, début 1985, que ce document de base du
socialisme algérien, adopté par référendum le 27 juin 1976 à l'issue d'un large
débat populaire, serait "enrichi" à la lumière des dix années écoulées.
Soumise
fin décembre à un Congrès extraordinaire du Front de libération nationale (FLN),
puis approuvée le 16 janvier 1986 par une écrasante majorité d'électeurs, la
seconde mouture est le résultat d'un compromis plus malaisé que prévu entre les
forces qui composent l'assise traditionnelle du régime (le Parti, la
technocratie et l'armée), elles-mêmes partagées entre les défenseurs de
"l'héritage" du président Boumediene et les partisans de réformes économiques
audacieuses à la manière chinoise.
Le nouveau texte ne remet pas en cause "l'option socialiste" et consacre la
prééminence du Parti, dont le rôle a été renforcé depuis l'arrivée au pouvoir du
président Chadli en 1979.
Mais il accorde aussi une plus grande place aux
origines historiques de la nation algérienne (en reconnaissant notamment
l'apport des royaumes berbères), à l'islam - qui devient la principale
"référence idéologique" de la Charte -, et au secteur privé, considéré désormais
comme un instrument du développement national, alors que le texte de 1976 le
cantonnait dans l'artisanat et le commerce de détail.
Employant déjà un quart de
la main-d'oeuvre industrielle, le capital privé est fortement sollicité pour la
mise en valeur agricole du Grand Sud saharien, et dans les domaines du tourisme
et des industries légères (10% du secteur) ainsi que dans le bâtiment où il
existe 5 000 à 6 000 petites entreprises, autorisées depuis peu à faire de la
promotion immobilière.
La Charte met aussi l'accent sur le contrôle de la croissance démographique:
avec un taux de 3,2% par an, il
Co
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Encyclopédie de l'État du monde
fallait déjà scolariser, en 1985, près de 6 millions d'enfants et d'adolescents.
Dans ce domaine, la rupture est nette avec les idées natalistes professées il y
a dix ans dans la foulée d'un tiers mondisme militant.
Au lieu du remaniement en profondeur auquel on s'attendait après le plébiscite
de la....
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