Vocabulaire: COMPTANT, participe présent, adjectif masculin, substantif masculin et adverbe. I.— Participe présent de compter* II.— Adjectif masculin. [En parlant d'argent] Payé en espèces et sur le champ. Payer argent comptant Son terrain du boulevard Malesherbes, que les Sieurs Mignon et Charrier lui payèrent argent comptant, mais en retenant un escompte formidable (ÉMILE ZOLA, La Curée, 1872, page 492 ). Votre procureur (...) vous vendra à beaux deniers comptants (PAUL CLAUDEL, Le Ravissement de Scapin, 1952, préface, page 1332 ). — Locutions. · Avoir de l'esprit argent comptant (vieilli). Être prompt à la répartie. · C'est de l'argent comptant (vieilli). Cela arrivera avec certitude. · Prendre pour (de l')argent comptant Accorder trop facilement du crédit. Les royalistes improvisés que le bon Empereur [de Russie] prit pour argent comptant (CÉLINE BUISSON DE LA VIGNE, VICOMTESSE DE CHATEAUBRIAND, Mémoires et lettres, 1847, page 55) : Ø 1.... il y aurait de quoi perdre la tête s'il fallait prendre pour de l'argent comptant toutes les paroles affectueuses que les salons nous prodiguent. VLADIMIR JANKÉLÉVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, page 161. III.— Substantif masculin. A.— Vieux, familier. Argent liquide. Mille écus de comptant (HONORÉ DE BALZAC, Une Double famille, 1830, page 258 ). Voilà Marianne seule, sans ressources, sur le pavé de Paris, avec un comptant des plus minces et son joli visage (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, tome 9, 1851-62, page 358 ). B.— Au comptant En payant sur le champ ou dans un bref délai. Acheter au comptant Antonymes : à crédit, à tempérament, à terme. J'eus recours au crédit. La maison ne paya plus au comptant, et dès lors fut moins bien servie (LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale, 1842, page 391 ). · Par métaphore. Si le génie ne réussit parfois qu'à terme, le travail bien fait réussit toujours au comptant (ALBERT THIBAUDET, Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours, 1936, page 209 ). · BOURSE. Marché* au comptant, par ellipse, le comptant Antonyme : marché à terme : Ø 2. Il convient toutefois d'observer que les ventes ont été aisément absorbées, grâce notamment à l'activité persistante du comptant Le Monde. 19 janvier 1952, page 11, colonne 1. IV.— Adverbe. Synonyme : au comptant. Acheter, payer comptant 300 livres sterling comptant vont m'être payées (VICTOR HUGO, Correspondance, 1861, page 359 ). Il n'y a que les pauvres gens qui payent comptant (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Pierre Nozière, 1899, page 69 ). Deux cent mille francs, moitié comptant, moitié dans six mois (RAYMOND QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, page 155 ). Remarque : On rencontre dans la documentation quelques exemples de (tout) son comptant pour (tout) son content. Elle eut honte de son chagrin (...) et s'en aLa dans la grange pleurer tout son comptant (George Sand, François le Champi, 1850, page 116). Affamé qui n'a jamais mangé son comptant (Jules Vallès, Jacques Vingtras, L'Insurgé, 1885, page 4). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 714. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 1 490, b) 1 159; XXe. siècle : a) 890, b) 608. Forme dérivée du verbe "compter" compter COMPTER, verbe. I.— Emplois transitifs. A.— 1. Déterminer une valeur ou une grandeur numérique par un calcul ou une suite de calculs, ou, le plus souvent, par une énumération, un dénombrement. Compter son argent. J'essayai de m'endormir en comptant des moutons (ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Climats, 1928, page 105 ). Le garçon comptait et recomptait son addition (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 384) : Ø 1. Sous prétexte d'être fidèle au mécanisme philosophique, préférer, en physique, les modèles mécaniques à des exposés mathématiques, serait aussi enfantin que de vouloir compter les objets en calculant sur ses doigts au lieu de faire une opération avec des chiffres, sous prétexte que l'on n'accepte pas la conception idéaliste du nombre. RAYMOND RUYER, Esquisse d'une philosophie de la structure, 1930, page 231. a) [Le verbe est suivi d'une complétive ou d'une interrogation indirecte] On ne saurait compter combien de désastres auraient pu être épargnés à la France, si ce parti de jeunes gens se fût réuni avec les modérés (GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, tome 1 1817, 1817, page 240) : Ø 2. La fenêtre lui ayant enfin donné tout ce qu'il attendait d'elle, il revint sur la chaise longue. Largilier compta que c'était la quatrième fois qu'il se déplaçait ainsi. JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 480. b) Emploi pronominal. — Passif : Ø 3. Il y a du temps dans l'éternité même; mais ce n'est pas un temps terrestre et mondain, qui se compte par le mouvement et la succession des corps;... JOSEPH JOUBERT, Pensées, tome 1, 1824, page 330. — Réfléchi. Ne recommençons pas la pagaille. Comptez-vous par dix (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 486 ). c) emploi absolu. Elle avait dix-huit ans et un mois. Je comptai sur mes doigts et trouvai qu'elle ne serait pas majeure avant deux ans et onze mois (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1881, page 454 ). Je compte : 1903 moins 69. Cela fait 1834 (PAUL LÉAUTAUD, In memoriam, 1905, page 186 ). — Spécialement. · Énumérer la suite des nombres entiers. Les petites filles qui veulent apprendre à compter jusqu'au milliard (JEAN GIRAUDOUX, Intermezzo, 1933, II, 1, page 85 ). Je compte jusqu'à 3. 1... 2... 3... (ALBERT CAMUS, Révolte dans les Asturies, 1936, II, 4, page 419 ). · À compter de. En prenant comme début, à partir de. Qu'on ne tire rien sans mon « bon », à compter de la feuille 16 inclusivement que j'ai (HONORÉ DE BALZAC, Correspondance, 1838, page 501 ). C'est à compter du quinzième siècle que nous rencontrons, non plus des chanteurs ambulants, mais de vrais écrivains (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie littéraire, tome 1, 1888, page 50 ). · Faire des comptes d'argent. Il [Graslin] voulut compter avec la cuisinière, il entra dans les minuties de la dépense (HONORÉ DE BALZAC, Le Curé de village, 1839, page 44 ). Rare. Compter de : Ø 4. Ne vous donnez nul souci de ces quatre cents francs; je les donnerai le mois prochain à Lisette, et, à notre première rencontre, nous en compterons. HONORÉ DE BALZAC, Lettres à l'Étrangère, tome 2, 1850, page 450. Savoir compter. Savoir veiller à ses intérêts. Vieilli. Compter sans son hôte. Ne pas prendre en considération l'avis d'une personne avec laquelle on est en relations d'affaires, au risque d'essuyer un mécompte; par extension se tromper. Qui compte sans son hôte, compte deux fois : Ø 5.... elle [Jeanne] avait fait raser ses magnifiques cheveux (...) elle espérait que ce pénible sacrifice (...) lui en épargnerait de plus pénibles encore. Elle avait compté sans son hôte. M. de Maurescamp (...) trouva que cette coiffure de petit soldat lui prêtait quelque chose d'original et de piquant OCTAVE FEUILLET, L'Histoire d'une Parisienne, 1881, pages 29-30. d) Locutions proverbiales. — Brebis comptées, le loup les mange (vieux). L'excès de précautions peut être funeste. — Compter (tous) les pas de quelqu'un. Surveiller quelqu'un très attentivement. — Compter les clous de la porte (familier). Attendre devant une porte fermée. Il la prend par la main, la ramène jusque sur les marches. Maintenant, compte les clous de la porte, tu sauras combien il y en a (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, Le Pavillon des amourettes, 1930, page 133 ). — Compter les points, les coups. Assister sans intervenir à une discussion, une lutte. Messieurs Philip et Gazier menèrent l'attaque avec passion, soutenus par les applaudissements de leurs collègues socialistes; les radicaux comptant les coups (CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1959, page 279 ). e) Littéraire. [La chose à dénombrer est quantifiable par suite d'une décision de la personne qui compte] L'heure où l'on compte ses fatigues, où l'on regarde avec épouvante les gerçures de sa peau (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1853, page 342 ). — emploi absolu. Compter avec soi-même. Examiner sa conduite, se fournir des explications : Ø 6. Son premier projet [de l'auteur] (...) était de donner l'oeuvre toute seule au public (...). C'est après l'avoir dûment close et terminée, qu' (...) il s'est déterminé à compter avec lui-même dans une préface... VICTOR HUGO, Préface de Cromwell, 1827, page 36. — Emploi pronominal passif. Toute une ville se repent pour lui [Égisthe] . Ça se compte au poids, le repentir (JEAN-PAUL SARTRE, Les Mouches, 1943, I, 1, page 18 ). 2. Spécialement. a) [Le complément d'objet désigne une unité de temps] Dénombrer les unités écoulées en trouvant le temps long. Tout le monde bâille en comptant les heures qui jamais ne finissent (EUGÉNIE DE GUÉRIN, Journal intime, 1835, page 80 ). Trois jours s'écoulèrent, soixante-douze mortelles heures comptées minute par minute! (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Cristo, tome 1, 1846, page 173 ). Scott comptait les jours quand il était dans la tranchée : or celui-ci était le premier de dix (ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Les Silences du colonel Bramble, 1918, page 86 ). b) [Le complément d'objet désigne une somme d'argent] Déterminer sa valeur pour la payer et, par métonymie, la payer. Veuillez (...) me compter la somme convenue (GÉRARD DE NERVAL, Petits châteaux de Bohême, 1853, page 32 ). Le monsieur, alors, l'a prié de signer un billet et lui a compté autant d'argent qu'il en a voulu (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, Le Château des sept portes, 1922, page 98 ). Il n'était point d'homme un peu raisonnable qui voulût compter monnaie à une vertu d'aussi piètre ragoût (MARCEL AYMÉ, Le Vaurien, 1931, page 91 ). c) Déterminer la valeur d'une chose pour la faire payer à quelqu'un. Vous m'avez compté le mètre de terrain à deux cent cinquante francs (ÉMILE ZOLA, La Curée, 1872, page 358 ). Oh! On la connaît! On lui comptera du brut et on nous servira du mousseux (JEAN ANOUILH, La Sauvage, 1938, I, page 149 ). d) Attribuer, utiliser avec parcimonie. Il lui mesurait le vin, il lui pesait la viande, il lui comptait le sommeil (VICTOR HUGO, L'Homme qui rit, tome 2, 1869, page 6 ). Le rêve est à la terre dont les jours sont comptés, la réalité est à l'éternel (OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation, 1910, page 244 ). Que ne pouvons-nous, sans compter notre temps, ouvrir le dossier? (MAURICE BARRÈS, Le Génie du Rhin, 1921, page 57 ). — Emploi absolu : Ø 7. Il n'a pas simplement emprunté aux mystiques allemands de nombreuses expressions, puisant sans compter dans l'immense richesse de leur admirable vocabulaire;... ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, page 88. · Spécialement. [Le complément d'objet sous-entendu désigne de l'argent, des biens matériels] Le music-hall (...) fit (...) de moi, tout étonnée de compter, de débattre et de marchander, une petite commerçante honnête et dure (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Vagabonde, 1910, page 35 ). Elle recevait à ravir avec beaucoup d'aisance, et dépensait sans compter son énorme fortune (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Souvenirs d'une petite fille, 1928, page 222 ). — Locutions. · Compter les morceaux à/de quelqu'un. (vieilli). Le réduire à la portion congrue. · Compter ses pas. Marcher lentement. Au figuré. Agir avec circonspection. e) Indiquer, marquer. — Vieux, littéraire. [Le sujet désigne une personne] Cet homme, puissant à briser les obstacles, Comptait depuis longtemps ses jours par des miracles (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Caligula, 1837, I, 2, page 42 ). — [Le sujet désigne une chose] La lampe à huile compte goutte à goutte les secondes (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, L'Ingénue libertine, 1909, page 1 ). La trotteuse qui compte les secondes, bonds par bonds (ALEXANDRE ARNOUX, Visite à Mathusalem 1961, page 15) : Ø 8. Les campanes de Venise Et les cloches de Moscou, l'horloge de la Porte-Rouge qui me comptait les heures quand j'étais dans un bureau... BLAISE CENDRARS, Du Monde entier au coeur du monde, Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France, 1913, page 48. 3. Par extension. a) [Le complément d'objet fait partie d'un ensemble dénombrable] Inclure dans un ensemble, un total. Une facture de deux cent soixante-et-dix francs sans compter les centimes (GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 2, 1857, page 28 ). Ces gars-là, en février, étaient deux ou trois mille si l'on compte les communistes (ANDRÉ MALRAUX, La Condition humaine, 1933, page 237 ). — Emploi pronominal. · Passif. Dès l'an neuf cent, les Laginski se comptaient parmi les familles illustres du Nord (HONORÉ DE BALZAC, La Fausse maîtresse, 1841, page 8 ). · Réfléchi. Quand il faut donner la pâtée à une famille de sept personnes, sans se compter, il y a du tirage! (EUGÈNE SUE, Les Mystères de Paris, 1842-43, page 122 ). b) Au figuré, littéraire. Prendre en considération, tenir compte. Le forfait/N'est pas toujours compté pour celui qui le fait (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Christineou Stockolm, Fontainebleau ou Rome. 1830, 6, page 300 ). Un effort qui, je l'espère me sera compté par vous (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine s'en va, 1903, page 105 ). · [Le verbe est suivi d'une complétive] Elle [la princesse] n'eut alors que vingt ans! Mais comptez qu'elle s'était préparée à cette heure de comique mensonge avec un art inouï dans sa toilette (HONORÉ DE BALZAC, Les Secrets de la princesse de Cadignan, 1839, page 349 ). Courant. Sans compter que : Ø 9. On remarquera enfin que le rouge et la poudre, de même que les ornements plus primitifs, comme tatouages ou plumes, ont pour effet de dissimuler et d'affaiblir la plupart des mouvements de la physionomie, sans compter qu'ils obligent aussi à les retenir; ainsi naît l'expression, toujours composée. ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Système des beaux-arts, 1920, page 63. · Emploi absolu, courant. Compter avec quelqu'un, quelque chose. L'armée hollandaise (...) représente une force avec laquelle toute puissance militaire (...) doit compter (JEAN JAURÈS, L'Armée nouvelle, 1911, page 493) : Ø 10. Le pouvoir de tous ne compte avec personne, le pouvoir d'un seul est obligé de compter avec les sujets, avec les grands comme avec les petits. HONORÉ DE BALZAC, Sur Catherine de Médicis, 1843, introduction, page 11. · [Le complément est suivi d'un déterminant] La maladie à laquelle nous consentons, nous est comptée à crime, comme si nous l'avions provoquée et voulue (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal intime, 1866, page 415 ). [Il] avait laissé percer des opinions et des sentiments qui ne lui furent pas comptés pour bons (JOSEPH ARTHUR COMTE DE GOBINEAU, Les Pléiades, 1874, page 288) : Ø 11. Monsieur prend femme, c'est fort bien, Il la prend jeune et belle : Mais, comptant ses amis pour rien, Monsieur la prend fidèle. PIERRE-JEAN DE BÉRANGER, Chansons, tome 1, Le Célibataire, 1829, page 149. Ø 12.... l'homme qui paye bien n'a pas pour cela toutes les vertus, cela est certainement religieux, mais serait aisément compté comme irreligieux orgueil. ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1933, page 1129. — En particulier. Attribuer une grande valeur. Du Guet dont les opinions étaient fort comptées dans l'Oratoire (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 5, 1859, page 367) : Ø 13.... je ne me vante pas d'avoir tenu le premier rang parmi les illustres, mais je n'ai pas non plus été relégué au dernier; on me compte; enfin je suis quelqu'un; mon opinion a du poids au club,... JOSEPH ARTHUR COMTE DE GOBINEAU, Les Pléiades, 1874, page 82. · Emploi pronominal réfléchi : Ø 14. L'insouciance que j'avais de ma personne me trompa sur l'importance des faits : la plupart des hommes ont le défaut de se trop compter; j'ai le défaut de ne me pas compter assez : je m'enveloppai dans le dédain habituel de ma fortune;... FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 621. 4. Par métonymie. a) Avoir, comporter. — [Le sujet désigne une personne ou un ensemble de personne ou de choses relatives à des personnes] Clapart ne pouvait pas prétendre à une retraite, ne comptant point assez d'années de services au Trésor (HONORÉ DE BALZAC, Un Début dans la vie, 1842, page 420 ). Ma cousine Éva (...) comptait dix-neuf ans (FRANCIS JAMMES, Les Robinsons basques, 1925, page 173) : Ø 15. Papa était l'un des plus grands sirphidiens du monde. C'est, il est vrai, une corporation qui ne compte pas cent membres. HERVÉ BAZIN, Vipère au poing, 1948, page 41. · Compter dans. Ces enfants mores de haut rang, princes sordides sous la djellaba bleue, qui comptent dans leur ascendance quelque chrétienne capturée (HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires, 1926, page 425 ). Le parti autrichien (...) devait bientôt compter dans ses rangs le nouvel empereur (LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, page 167 ). · [Le complément d'objet est suivi d'un attribut] Si je le contredis, il me brisera. Et il compte ma soeur pour alliée (PAUL ADAM, L'Enfant d'Austerlitz, 1902, page 470 ). — Par extension. [Le sujet désigne une chose] Trois corps de bâtiment comptant à chaque étage trente-huit fenêtres (PAUL VERLAINE, Œuvres posthumes, tome 1, Souvenirs, 1896, page 236 ). Le bourg ne comptait qu'une trentaine d'électeurs (ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, La Vie de Disraëli, 1927, page 80 ). Une jeune futaie compte ordinairement de quarante à soixante ans (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1928, page 21 ). b) [Le sujet est un indéfini] Pouvoir compter. En un an, on compte quatorze cents meurtres à Gand (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Philosophie de l'Art, tome 2, 1865, page 3 ). Sur le côté ouest, on comptait d'abord trois tours, puis les deux tours de la porte (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Vie de Jeanne d'Arc, tome 1, 1908, page 126 ). — En particulier. · Compter les os, les côtes (d'une personne, d'un animal très maigre). — Un seul cheval! — Et pas beau. On lui compte les côtes (RENÉ BAZIN, Le Blé qui lève, 1907, page 351 ). · [Le complément d'objet désigne une chose rare, ou, avec l'emploi d'une négation, une chose abondante] : Ø 16. Ces faux biens nous abusent; on ne recherche plus Dieu, parce qu'on ne voit pas qu'on est pauvre. On se croit riche parce qu'ils sont nombreux; on en a tant; on ne les compte plus... Il n'y a qu'un bien qui fasse riche : c'est Dieu. ANDRÉ GIDE, Journal, 1891, page 27. Emploi pronominal passif : Ø 17. La Providence, pour une fois, faisait bien les choses; cela lui arrive, exceptionnellement; ses ratages ne se comptent plus. ALEXANDRE ARNOUX, Roi d'un jour, 1956, page 210. B.— Au figuré. Déterminer une valeur ou une grandeur numérique future, la probabilité de réalisation d'une chose espérée. 1. [Construction nominale] Prévoir, s'attendre à. Je suis parti (...) pour le col de Bormes. Il faut compter six bonnes heures de chemin (HENRI BOSCO, Le Mas Théotime, 1945, page 329) : Ø 18. Mais un enfant comprendrait qu'à partir de la seconde année l'affaire entre en pleine prospérité et que tout le monde achètera l'alcool Mazarakis-Meillan et Compagnie. Ce n'est donc pas dix mille, c'est trente mille litres par jour qu'il faut compter au minimum. FRANCIS DE MIOMANDRE, Écrit sur de l'eau. 1908, page 83. 2. [Construction verbale] Espérer, avoir l'intention de. a) Compter que + complétive. Je compte que l'on me régalera à mon arrivée d'un trio piano, violon et cor de chasse (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1858, page 284 ). Je compte bien que vivre ne deviendra jamais pour moi une habitude (HENRI DE MONTHERLANT, Le Démon du bien, 1937, page 1356 ). b) Compter + infinitive. J'ai découvert ce matin un cheval qui vaut de l'or (...) je compte le faire courir à Chantilly (EUGÈNE LABICHE, Le Misanthrope et l'Auvergnat, 1852, 4, page 143 ). Le sujet dont je compte vous entretenir cette année est l'histoire de l'art (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Philosophie de l'Art, tome 1, 1865, page 1 ). — Vieux. Compter de + infinitive : Ø 19. Ah! qu'ils ne reposent point leur confiance dans leurs bienfaits, ceux qui commandent à la terre! Qu'ils sèment, mais sans compter de recueillir. FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Fragments du Génie du christianisme primitif, 1800, page 218. 3. emploi absolu. Compter sur quelqu'un, quelque chose. a) Compter sur quelqu'un.. S'attendre à un comportement favorable de la part de quelqu'un, lui faire confiance. Ne pouvoir compter sur personne. J'ai compté sur vous pour me rendre un petit service (EUGÈNE LABICHE, Le Misanthrope et l'Auvergnat, 1852, 4, page 142) : Ø 20. C'est toujours la même histoire, dans la vie : il y a des gens sur qui l'on compte, et dont on a besoin, qui ne font pas leur devoir; de sorte que ceux qui continuent de faire le leur font figure de poires et paraissent être joués. ANDRÉ GIDE, Journal, 1918, page 648. — Par extension. Ça, question de nous en faire baver, on peut compter sur Simon (MARCEL AYMÉ, Vogue la galère, 1944, page 161 ). — Par antiphrase, familier. Compte sur moi! b) Compter sur quelque chose. S'attendre à, espérer. Compter sur l'aide, l'appui, la reconnaissance de quelqu'un. Il [Riesener] remportait l'inquiétude d'avoir par trop compté sur ma bénignité (EUGÈNE DELACROIX, Journal, 1854, page 146) : Ø 21. — C'te ferme, vous n'voulez toujours point m'la vendre? — Pour ça, non. N'y comptez point. C'est dit, c'est dit, n'y r'venez pas. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Le Petit fût, 1884, page 147. — Par antiphrase, familier. Compte là-dessus et bois de l'eau fraîche! : Ø 22. Tu sais, il y en a qui disent aux pisseuses qu'ils veulent envoyer dinguer : je pars pour l'Algérie, bonsoir, mon andalouse, geins pas, je t'enverrai des dattes, — et intérieurement ils pensent : compte là-dessus, il pleut! GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Les Soeurs Vatard, 1879, page 125. II.— Emplois intransitifs. A.— Être inclus dans un ensemble, un total. N'être plus là, compter au rang des coeurs cachés (PAUL VERLAINE, Œuvres complètes, tome 2, Amour, 1888, page 14) : Ø 23. Celui-là peut compter parmi les grands défunts, Car son bras a guidé la première carène À travers l'archipel des Jardins de la Reine... JOSÉ-MARIA DE HEREDIA, Les Trophées, 1893, page 114. B.— Avoir une certaine importance. Paris est superbe. Les journées y comptent double pour la pensée et pour la vie (OCTAVE FEUILLET, Monsieur de Camors, 1867, page 260 ). Elle n'avait jamais compté pour rien dans sa famille (GUY DE MAUPASSANT, Une Vie, 1883, page 49 ). L'honneur est pour moi la chose qui compte le plus au monde (MARCEL AYMÉ, Uranus, 1948, page 268) : Ø 24. Hugo se plaît à faire rimer deux sonorités diphtongues, l'une comptant pour deux syllabes, l'autre pour une. ANDRÉ GIDE, Journal, 1949, page 343. · Populaire. Compter pour du beurre. N'avoir aucune importance, ne pas être pris en considération. « Ça compte pour du beurre », disent les enfants quand la vraie partie n'est pas encore commencée, quand on joue à l'essai (ROGER VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, page 13 ). — [Sans déterminant] Avoir une grande importance. Je compte dans le pays; on me salue très bas quand je passe (HENRY BECQUE, La Parisienne, 1885, III, 2, page 319 ). Ces jours terribles, où nous savons tous que chaque geste compte, que chaque parole a son poids éternel (FRANÇOIS MAURIAC, Le Bâillon dénoué, 1945, page 474) : Ø 25. Les seuls livres qui comptent sont ceux dont on peut dire que l'auteur serait mort étouffé s'il ne les avait pas écrits. JULIEN GREEN, Journal, Le Bel aujourd'hui, 1955-58, page 190. Remarque : 1. On rencontre dans la documentation quelques exemples du participe passé adjectivé a) Vous êtes serré, ficelé, harnaché dans vos habits de bal; vous allez à pas comptés, regardant, observant (Honoré de Balzac, Petites misères de la vie conjugale, 1846, page 29). Je le savais bien, va, que c'était fini (...). Ah! pauvres jours comptés, qu'on n'a pas pu passer ensemble (Alphonse Daudet, L'Évangéliste, 1883, page 64) (confer I A 2 d). b) Bien compté. Au moins. C'était quinze kilomètres bien comptés, au retour, avec deux mille kilos pour les cailloux seulement (Joseph de Pesquidoux, Le Livre de raison, 1932, page 76). Confer de bon compte. 2. On rencontre dans la documentation a) Le substantif masculin compte-globules. Instrument qui compterait les globules. Le docteur avait eu le temps (...) de lire (...) le compte rendu (...) d'un mémoire qu'il avait présenté (...) au grand Congrès international d'Hygiène, sur un " compte-globules du sang " dont il était l'inventeur (Jules Verne, Les 500 millions de la Bégum, 1879, page 6). b) Le substantif masculin compte-paroles. Instrument qui compterait les paroles. Mme. Vernet continue. Elle a produit son effet et laisse tomber sa phrase comme avec un compte-paroles (Jules Renard, L'Écornifleur, 1892, page 245). c) Le substantif féminin compterie. Action de compter. J'adore beaucoup de vos pièces et non des moins hardies, dans l'envoyage faire foutre des rimes minutieuses et des compteries par trop sur les doigts (Paul Verlaine, Correspondance [avec Gustave Kahn] , 1887, page 188). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 11 998. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 16 250, b) 17 178; XXe. siècle : a) 16 108, b) 18 276. DÉRIVÉS : Comptage, substantif masculin. Action de compter. Radioactivité des solides déterminée par comptage de rayons a (Journal de chimie et de physique. 1936, page 78 ). Les repérages de la présence de choses agglomérées dans un lieu sont utilement complétés par le dénombrement des quantités transportées d'un point vers un autre, ou le comptage des passages d'un objet en un point (FRANÇOIS PERROUX, L'Économie du XXe. siècle. 1964, page 202 ). COMPOSÉS : 1. Compte-fils, substantif masculin Petit instrument constitué d'une loupe surmontant une ouverture carrée, servant à compter les fils d'un tissu. Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux — Confer compte. — 1re. attestation 1832 (RAYMOND); composé de la forme verbale compte (de compter) et de fil*. 2. Compte-pas, substantif masculin Petit instrument servant à compter les pas effectués par celui qui le porte. Synonymes : odomètre, podomètre. Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux — Dernière transcription dans DG : kont'-pá. Pour la non-prononciation de p, confer compte.— 1re. attestation 1647 comtepas (Mersenne, in CHR. HUYGENS, Œuvres complémentaires, i, 74 dans AUGUSTE BARBIER, Miscelleanées 24, no. 4); composé de la forme verbale compte (de compter) et de pas*. 3. Compte-tours, substantif masculin Mécanisme permettant de déterminer le nombre de tours effectués dans un temps donné par l'arbre d'un moteur; par métonymie, le cadran indiquant ce nombre. Synonyme : vieilli compteur de tours. L'avion volait à 30 degrés soutenu par un seul moteur. Langlois, le second pilote, indiqua de l'index le compte-tours : 1 400 au lieu de 1 800 (MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 822). — Pour la non-prononciation de p, confer compte.— 1re. attestation 1907 (L. PÉVISSE, Traité général des automobiles à pétrole, page 440); composé de la forme verbale compte (de compter) et de tour* « révolution, rotation »; confer compteur de tours 1861 (J. ARMENGAUD, Traité des moteurs à vapeur, tome 2, page 582). — Fréquence absolue littéraire : 4.