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SIXIÈME PARTIE BORORO XXI L'OR ET LES DIAMANTS En face de Porto Esperança, sur la rive du Rio Paraguay, Corumba, porte de la Bolivie, semble avoir été conçue pour ules Verne.

Publié le 06/01/2014

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SIXIÈME PARTIE BORORO XXI L'OR ET LES DIAMANTS En face de Porto Esperança, sur la rive du Rio Paraguay, Corumba, porte de la Bolivie, semble avoir été conçue pour ules Verne. La ville est campée au sommet d'une falaise calcaire qui domine le fleuve. Entourés de pirogues, un ou deux etits vapeurs à aubes avec deux étages de cabines posés sur une coque basse et surmontés d'une cheminée grêle, sont marrés au quai d'où part un chemin montant. Au début s'élèvent quelques bâtiments d'une importance isproportionnée avec le reste : douane, arsenal, qui évoquent le temps où le Rio Paraguay formait une frontière précaire ntre des États récemment parvenus à l'indépendance et bouillonnant de jeunes ambitions, et où la voie fluviale servait à n trafic intense entre le Rio de la Plata et l'intérieur. Parvenu en haut de la falaise, le chemin la suit en corniche pendant deux cents mètres environ ; puis il tourne à angle roit et pénètre dans la ville : longue rue aux maisons basses avec des toits plats, badigeonnés en blanc ou en beige. La ue aboutit à une place carrée où l'herbe pousse entre les flamboyants aux couleurs acides, orange et vert ; au-delà, c'est la campagne pierreuse jusqu'aux collines qui ferment l'horizon. Un seul hôtel, et toujours plein ; quelques chambres chez l'habitant, dans des rez-de-chaussée où s'accumule la moiteur des marécages, et où des cauchemars fidèles à la réalité transforment le dormeur en martyr chrétien d'un nouveau genre, jeté dans une fosse étouffante pour servir de pâture aux punaises ; quant à la nourriture, elle est exécrable tant la campagne, pauvre ou inexploitée, échoue à subvenir aux besoins de deux à trois mille habitants, sédentaires et voyageurs, qui forment la population de Corumba. Tout est hors de prix et l'agitation apparente, le contraste qu'elle fait avec le paysage plat et désertique - brune éponge qui s'étend au-delà du fleuve - donne une impression de vie et de gaieté, comme pouvaient la procurer, il y a un siècle, les villes pionnières de la Californie ou du Far West. Le soir, toute la population se rassemble sur la corniche. Devant les garçons muets, assis les jambes pendantes sur la balustrade, les filles déambulent par groupes de trois ou quatre en chuchotant. On croirait observer une cérémonie ; rien de plus étrange que cette grave parade prénuptiale qui se déroule à la lueur d'une électricité fluctuante, en bordure e cinq cents kilomètres de marécage où, jusqu'aux portes de la ville, errent les autruches et les boas. Corumba est à quatre cents kilomètres à peine à vol d'oiseau de Cuiaba ; j'ai assisté au développement de l'aviation ntre les deux villes, depuis les petits appareils à quatre places qui parcouraient la distance en deux ou trois heures iolemment agitées, jusqu'aux Junker à douze places des années 1938-39. En 1935 pourtant, on pouvait gagner Cuiaba eulement par eau, et les quatre cents kilomètres étaient doublés par les méandres du fleuve. Pendant la saison des luies, il fallait huit jours pour atteindre la capitale de l'État, et trois semaines parfois en saison sèche quand le bateau 'échouait sur les bancs malgré son faible tirant d'eau ; on perdait des jours à le remettre à flot, à l'aide d'un câble ttaché à quelque tronc robuste de la rive sur quoi le moteur tirait rageusement. Dans le bureau de la compagnie, une ffiche s'étalait, pleine de séduction. Je la traduis littéralement ci-contre en respectant le style et la disposition ypographique. Inutile de dire que la réalité correspondait peu à la description. Pourtant, quel exquis voyage ! Peu de passagers : familles d'éleveurs allant rejoindre leurs troupeaux ; commerçants mbulants libanais ; militaires en garnison ou fonctionnaires provinciaux. À peine monté à bord, tout ce monde arborait la enue de plage de l'intérieur, c'est-à-dire un pyjama rayé, de soie pour les élégants, dissimulant mal des corps velus, et es savates ; deux fois par jour, on s'attablait autour d'un menu immuable consistant en une platée de riz, une autre de aricots noirs, une troisième de farine sèche de manioc, le tout accompagnant une viande de boeuf fraîche ou de onserve. C'est ce qu'on appelle la feijoada, de feijão : haricot. La voracité de mes compagnons de voyage n'avait d'égal que le discernement qu'ils mettaient à juger l'ordinaire. Selon les repas, la feijoada était proclamée muito boa ou muito ruirn, c'est-à-dire « fameuse » ou « infecte » ; de même, ils ne possédaient qu'un terme pour qualifier le dessert, omposé de fromage gras et de pâte de fruit, qu'on mange ensemble à la pointe du couteau : celui-ci était ou non bem doce, « bien - ou pas assez - sucré ».
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« XXI L’OR ETLES DIAMANTSEn face dePorto Esperança, surlarive duRio Paraguay, Corumba,portedelaBolivie, sembleavoirétéconçue pour Jules Verne.

Laville estcampée ausommet d’unefalaise calcaire quidomine lefleuve.

Entourés depirogues, unou deux petits vapeurs àaubes avecdeux étages decabines poséssurune coque basseetsurmontés d’unecheminée grêle,sont amarrés auquai d’où partunchemin montant.

Audébut s’élèvent quelques bâtiments d’uneimportance disproportionnée aveclereste : douane, arsenal,quiévoquent letemps oùleRio Paraguay formaitunefrontière précaire entre desÉtats récemment parvenusàl’indépendance etbouillonnant dejeunes ambitions, etoù lavoie fluviale servaità un trafic intense entreleRio delaPlata etl’intérieur. Parvenu enhaut delafalaise, lechemin lasuit encorniche pendantdeuxcents mètres environ ; puisiltourne àangle droit etpénètre danslaville : longue rueaux maisons bassesavecdestoits plats, badigeonnés enblanc ouenbeige.

La rue aboutit àune place carrée oùl’herbe pousseentrelesflamboyants auxcouleurs acides,orange etvert ; au-delà, c’est la campagne pierreusejusqu’aux collinesquiferment l’horizon. Un seul hôtel, ettoujours plein ;quelques chambres chezl’habitant, dansdesrez-de-chaussée oùs’accumule la moiteur desmarécages, etoù des cauchemars fidèlesàla réalité transforment ledormeur enmartyr chrétien d’un nouveau genre,jetédans unefosse étouffante pourservir depâture auxpunaises ; quantàla nourriture, elleest exécrable tantlacampagne, pauvreouinexploitée, échoueàsubvenir auxbesoins dedeux àtrois mille habitants, sédentaires etvoyageurs, quiforment lapopulation deCorumba.

Toutesthors deprix etl’agitation apparente, le contraste qu’ellefaitavec lepaysage platetdésertique –brune éponge quis’étend au-delà dufleuve –donne une impression devie etde gaieté, comme pouvaient laprocurer, ilya un siècle, lesvilles pionnières delaCalifornie ouduFar West.

Lesoir, toute lapopulation serassemble surlacorniche.

Devantlesgarçons muets,assislesjambes pendantes sur la balustrade, lesfilles déambulent pargroupes detrois ouquatre enchuchotant.

Oncroirait observer unecérémonie ; rien deplus étrange quecette grave parade prénuptiale quisedéroule àla lueur d’une électricité fluctuante, enbordure de cinq cents kilomètres demarécage où,jusqu’aux portesdelaville, errent lesautruches etles boas. Corumba estàquatre centskilomètres àpeine àvol d’oiseau deCuiaba ; j’aiassisté audéveloppement del’aviation entre lesdeux villes, depuis lespetits appareils àquatre placesquiparcouraient ladistance endeux outrois heures violemment agitées,jusqu’aux Junkeràdouze places desannées 1938-39.

En1935 pourtant, onpouvait gagnerCuiaba seulement pareau, etles quatre centskilomètres étaientdoublés parlesméandres dufleuve.

Pendant lasaison des pluies, ilfallait huitjours pouratteindre lacapitale del’État, ettrois semaines parfoisensaison sèchequand lebateau s’échouait surlesbancs malgré sonfaible tirantd’eau ; onperdait desjours àle remettre àflot, àl’aide d’uncâble attaché àquelque troncrobuste delarive surquoi lemoteur tiraitrageusement.

Danslebureau delacompagnie, une affiche s’étalait, pleinedeséduction.

Jelatraduis littéralement ci-contreenrespectant lestyle etladisposition typographique.

Inutilededire quelaréalité correspondait peuàla description. Pourtant, quelexquis voyage ! Peudepassagers : famillesd’éleveurs allantrejoindre leurstroupeaux ; commerçants ambulants libanais ;militaires engarnison oufonctionnaires provinciaux.Àpeine monté àbord, toutcemonde arborait la tenue deplage del’intérieur, c’est-à-dire unpyjama rayé,desoie pour lesélégants, dissimulant maldescorps velus, et des savates ; deuxfoisparjour, ons’attablait autourd’unmenu immuable consistant enune platée deriz, une autre de haricots noirs,unetroisième defarine sèchedemanioc, letout accompagnant uneviande debœuf fraîche oude conserve.

C’estcequ’on appelle la feijoada, de feijão  : haricot.

Lavoracité demes compagnons devoyage n’avaitd’égal que lediscernement qu’ilsmettaient àjuger l’ordinaire.

Selonlesrepas, la feijoada était proclamée muito boa ou muito ruirn, c’est-à-dire « fameuse » ou« infecte » ; demême, ilsne possédaient qu’unterme pourqualifier ledessert, composé defromage grasetde pâte defruit, qu’on mange ensemble àla pointe ducouteau : celui-ciétaitounon bem doce, « bien –ou pas assez –sucré ».. »

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