pylône conduit au Per-hai, un pavillon, qui permet d'accéder à la première d'une série de six cours, dont les deux dernières constituent le sanctuaire proprement dit, le Gematon. Les quatre premières sont organisées sur le même principe : deux travées, en contrebas d'une rampe axiale ascendante vers l'est, sont occupées par des rangées d'autels. La cinquième cour est bordée de chapelles rayonnantes et contient probablement l'autel principal. La revanche d'Amon Le retour à l'orthodoxie amonienne se fait probablement sous l'influence du Divin Père Ay qui guide les pas du jeune Toutankhaton. Celui-ci prend un édit de restauration des cultes qui décrit longuement l'état misérable auquel les errements d'Amenhotep IV ont réduit le pays. Cet édit est affiché dans le temple d'Amon-Rê de Karnak, au pied du IIIe pylône (Urk. IV 2025-2032). Les mesures qu'il annonce reviennent à un retour à la situation qui précédait la montée sur le trône d'Amenhotep IV. Il commence lui-même par changer son nom de Toutankhaton, « Image vivante d'Aton », en Toutankhamon, « Image vivante d'Amon ». Il se fait aménager une tombe à proximité de celle d'Amenhotep III et fait commencer les travaux pour un temple funéraire à Medinet Habou, dont subsistera seule une statue colossale du roi... qu'Horemheb usurpera. Il construit dans le temple de Karnak et termine à Soleb le pendant du lion de granit d'Amenhotep III. Mais il n'aura pas le temps de le mettre en place : il meurt, après neuf années, à environ dix-neuf ans. L'examen de sa momie a révélé une blessure dans la région de l'oreille gauche qui a fait croire qu'il est peut-être mort d'une hémorragie cérébrale. Quoi qu'il en soit, il disparaît prématurément, sans avoir eu d'enfants de son épouse Ankhesenamon. Les deux foetus retrouvés dans sa tombe sont-ils des enfants mort-nés accompagnant leur père dans l'au-delà ? Les hypothèses les plus hasardées ont été avancées autour de ce jeune roi auquel les circonstances tragiques de l'époque ont incité certains à prêter un destin romantique que semblait confirmer l'état de sa tombe (VdR 62). La découverte sensationnelle de celle-ci par H. Carter frappa encore plus les imaginations, lorsque les égyptologues apprirent au public que ce qui lui paraissait un trésor d'un luxe inouï n'était en réalité qu'un bric-àbrac hâtivement constitué en partie des dépouilles de ses deux prédécesseurs pour ensevelir un roitelet sans pouvoir qu'il voyait flânant dans un jardin merveilleux en compagnie de sa jeune épouse. Avec lui s'éteint la lignée d'Ahmosis. Sa veuve supplie le roi hittite Suppiluliuma de lui envoyer un de ses fils pour l'épouser et en faire le pharaon d'Égypte. Il accepte et fait partir le prince Zannanzach... qui n'arrivera jamais. L'union des empires hittite et égyptien ne se fera pas. Ankhesenamon épouse peut-être le vizir de son défunt mari, Ay, que l'on voit dans la tombe de Toutankhamon pratiquer sur la momie du roi le rite de l'ouverture de la bouche, qui incombe traditionnellement au fils, donc à l'héritier. Ce mariage reste hypothétique, dans la mesure où l'on perd la trace d'Ankhesenamon après la mort de Toutankhamon et où Ay se fait représenter dans sa tombe en compagnie de son épouse Tiy II. Lui-même ne règne que pendant quatre ans, ce qui lui laisse le temps de construire à Karnak et Louxor, de consacrer un temple rupestre à Min à Akhmîm et de s'aménager à Medinet Habou un temple funéraire incluant un palais qui sera repris et augmenté par Horemheb. Il est enterré dans la Vallée des Rois, à proximité d'Amenhotep III, dans une tombe (TT 23) sans doute prévue pour un autre que lui. Même si la damnatio memoriae du pharaon hérétique bat son plein depuis le retour à l'orthodoxie, on ne peut pas dire que l'épisode amarmien soit terminé avec Ay. Certes, l'ancien chef des écuries n'appartient pas à la lignée d'Ahmosis, mais sa famille y est trop liée pour que l'on puisse considérer son règne comme une vraie coupure. Il fallait un homme neuf pour tourner définitivement la page. C'est, comme bien souvent dans ce genre de situation, un militaire, le commandant en chef de l'armée, Horemheb, qui s'en charge. Ce soldat, qu'il ne faut pas confondre avec le commandant en chef des troupes d'Amenhotep IV, Paatonemheb, commence sa carrière politique sous Toutankhamon, aux côtés duquel il s'est fait représenter dans sa tombe memphite. Il joue alors le rôle de porte-parole du roi en matière de politique extérieure. C'est lui qui mène une campagne diplomatique auprès des gouverneurs nubiens, dont le résultat est la visite que fit le prince de Miam (Aniba) à la Cour de Toutankhamon -- visite relatée dans la tombe du vice-roi Houy. C'est toujours lui qui entreprend une campagne de « démonstration » en Palestine aux côtés de Toutankhamon. On sait en effet selon les sources en cunéiformes que les Hittites avaient fait un raid contre Amqa, entre le Liban et l'Antiliban, ce qui constituait une violation du territoire sous domination égyptienne. En représailles, les Égyptiens s'emparent de Qadech et soulèvent Nougès, reprenant ainsi le contrôle de la région pour quelques années, jusqu'à ce que les Hittites reprennent à nouveau Qadech et Amqa à la suite de l'assassinat de Zannanzach. Lors de cette attaque, Suppiluliuma emmène prisonniers les Égyptiens présents dans Amqa. Malheureusement pour lui, il y avait parmi eux des pestiférés à cause desquels la peste devint endémique quelques années plus tard dans le royaume hittite... ce que l'on ne manqua pas d'interpréter comme un signe de la colère des dieux contre ceux qui avaient osé rompre la paix. Aussi, lorsqu'il prit le pouvoir après les événements que nous avons évoqués plus haut, Mursili II rendit-il Amqa aux Égyptiens en expiation du sacrilège. Pendant tout le règne d'Horemheb, la frontière resta fixée approximativement à la hauteur du Liban. Horemheb est avant tout le restaurateur de l'ordre établi, comme l'indique sa titulature-programme. Il est l'Horus « Taureau puissant aux décisions avisées ». Le verbe employé, seped, est un terme technique qui décrit la mise en ordre et que d'autres législateurs comme Amasis réutiliseront. Son nom d'Horus d'Or va dans le même sens : « Celui qui se satisfait de Maât et fait croître les Deux Terres. » Là encore, le verbe herou, que je traduis par « satisfaire », a un sens juridique précis lié à l'application de la loi. La restauration de l'ordre passe par la reconstruction. Ce second volet est évoqué par son nom de nebty, « Aux nombreux miracles dans Karnak ». Il est en effet un grand constructeur : à Medinet Habou où il agrandit pour lui-même le temple funéraire d'Ay, mais aussi au Gebel el-Silsile, avec un spéos sur la rive droite et au Gebel Adda où il consacre un autre spéos à Amon et Thot. Il confirme l'importance de Memphis en faisant élever des édifices dans l'enceinte du temple de Ptah et dans celui d'Héliopolis. Mais c'est à Karnak qu'il donne toute sa mesure, comme il a voulu lui-même le souligner dans son nom. Il commence la salle hypostyle et élève trois pylônes : le deuxième, qui ferme la salle ypostyle à l'ouest, et, dans l'axe nord-sud du temple, les IXe et Xe, qu'il bourre avec les talatates provenant e la destruction du temple atonien de l'Est. Au pied du Xe pylône, qu'il relie par une allée de criosphinx au temple de Mout, il fait élever une stèle portant le texte d'un décret qu'il prend pour remettre en ordre le pays. Il y fixe des dispositions contre les abus dus à la centralisation mise en place par Amenhotep IV et que l'édit de outankhamon n'avait pas suffi à réprimer : dénis de justice et corruption avaient survécu au système amarnien. l met pour cela en place des juges et des tribunaux régionaux et réintroduit les instances religieuses locales. Le ouvoir juridique est réparti entre la Haute et la Basse-Égypte : entre le vizir de Thèbes et celui de Memphis. La ualité du pays se retrouve également dans l'armée, dont les cadres sont refondus et répartis en deux irconscriptions militaires : l'une au nord, l'autre au sud. l se fait enterrer, après vingt-sept ans de règne, non pas dans la tombe qu'il s'était aménagée à Memphis du emps où la Cour de Toutankhamon y séjournait, mais à Thèbes, dans la Vallée des Rois. Sa tombe (VdR 57) conserve le souvenir de l'époque amarnienne par la mode des costumes et un certain style. Elle innove aussi sur le plan technique avec l'emploi du relief dans le creux, qui se substitue à la peinture sur plâtre ou enduit. Elle apporte aussi de nouveaux thèmes : elle contient le premier exemplaire du Livre des Portes, l'un des grands « livres » funéraires royaux de l'époque ramesside. Sans doute a-t-elle été commencée tardivement, car a décoration en est inachevée. oremheb n'ayant pas d'héritier mâle, qui lui ait survécu en tout cas, transmet le pouvoir à un autre militaire, un énéral originaire du Delta qui va fonder une nouvelle dynastie, celle des Ramsès. CHAPITRE XI Les Ramessides L'origine de la dynastie La famille de Ramsès Ier n'est pas de sang royal. C'est une lignée de militaires originaires du Delta oriental, robablement de la région de Qantir. Le roi lui-même est un ancien officier, qui fut vizir avant d'être roi sous le om de Paramessou ou Ramessou. On peut supposer que, devant la puissance politique qu'il représentait, oremheb a choisi de l'associer au trône avant de mourir. Ramsès a épousé une fille de militaire également, atrê, qui lui donne un fils, le futur Séthi Ier. l affirme par son nom d'Horus d'Or sa volonté de continuer l'oeuvre d'Horemheb : il est « Celui qui confirme aât à travers les Deux Terres ». En même temps, il consacre la nouvelle orientation politique du pays en hoisissant un nom de couronnement qui souligne la relation privilégiée avec Rê qu'exprime déjà son prénom, amessou, «Rê l'a mis au monde » : Menpehtyrê, « Stable est la puissance de Rê ». Il va même plus loin, et ffirme le primat de la théologie héliopolitaine en se plaçant sous l'invocation d'Atoum dans son nom de nebty : Celui qui a été couronné roi, l'élu d'Atoum ». La conséquence la plus importante de la révolution amarnienne st, en effet, que le pouvoir ne se réfère plus à Thèbes, mais à Memphis, et ce autant pour y retrouver les acines de la théocratie que pour éviter de donner à nouveau au clergé thébain un poids qui ne pourrait onduire qu'à un nouvel affrontement. Cela n'empêche pas Ramsès Ier, dans les deux courtes années que dure on règne, de participer au programme décoratif de Karnak, bien qu'il consacre plutôt ses efforts à Abydos, vec une chapelle et un petit temple que son fils achèvera. a brièveté de son règne empêche d'évaluer correctement les conséquences immédiates de cette politique. ais on a l'impression, à considérer la tombe qu'il s'est fait construire dans la Vallée des Rois (VdR 16), d'un etour en arrière. Si la seule décoration en est le Livre des Portes, sur le modèle d'Horemheb, le mobilier unéraire (BM 854 et 883) est, lui, plus proche du début de la XVIIIe dynastie que du style qu'illustrera son fils. Fig. 112 Arbre généalogique simplifié de la famille de Ramsès II. Ier Lorsque Séthi lui succède, il est déjà associé au trône, probablement depuis le début du règne de Ramsès er, qui lui a fait jouer un rôle proche de celui de vizir et surtout de général en chef chargé de la politique xtérieure. Cette association est vraisemblablement née du souci qu'auront tous les Ramsès d'éviter les problèmes successoraux qui ont conduit la XVIIIe dynastie à sa perte. Séthi Ier insiste longuement sur cette ssociation en mettant en avant les rites de piété filiale qu'il accomplit à Abydos pour son père (KRI I 110,1114,15). Il poursuit également l'oeuvre de restauration intérieure, qu'il replace dans un contexte historique égitimant sa propre lignée : il se fait représenter, dans son temple funéraire d'Abydos, en train d'adorer en compagnie de son fils et successeur Ramsès II les cartouches des pharaons qui l'ont précédé. La liste, qui omprend soixante-seize noms, commence à Ménès et s'arrête à Séthi Ier. Elle établit le canon de 'historiographie officielle pour la XVIIIe et le début de la XIXe dynastie, soit, dans l'ordre : Ahmosis, Amenhotep er, Thoutmosis Ier, Thoutmosis II, Thoutmosis III, Amenhotep II, Thoutmosis IV, Amenhotep III, Horemheb et amsès Ier. On voit que tous les rois d'Amarna ont été gommés, de la même manière que leurs noms ont été ffacés des monuments. Mais il y a une autre absente : Hatchepsout qui, malgré tous ses efforts, reste onsidérée comme une usurpatrice. Cette liste sera reprise telle quelle (en ajoutant au fur et à mesure les ouveaux rois) jusque sous le règne de Ramsès III. Séthi Ier maintient également le lien privilégié qui unit sa famille au Nord : le décret qu'il prend pour le temple de Bouhen en l'an 1 de son règne (KRI I 37,7-39,16) est daté de Memphis. Il possède également un palais à Qantir. Mais il ménage Thèbes, qui reste la capitale. Cette volonté apparaît dans sa titulature : il est l'Horus « Taureau puissant qui vivifie les Deux Terres après avoir été couronné à Thèbes ». Il se concilie toutefois les deux centres religieux en faisant alterner dans les épithètes qui suivent son nom de couronnement, Menmaâtrê, « Souverain de Thèbes » et « Souverain d'Héliopolis », de même qu'il fait suivre son prénom, Séthi, soit de « aimé d'Amon » ou de « aimé de Ptah ». Cette politique d'équilibre se traduit par la promotion du dieu Seth d'Avaris et la construction -- ou la reconstruction -- à Héliopolis du sanctuaire de Rê, dont témoigne vraisemblablement un modèle votif de ce temple au nom de Séthi Ier provenant de Tell el-Yahoudiyeh. Dans le même temps, il entreprend à Karnak la construction d'une partie de la salle hypostyle, qui sera achevée par Ramsès II, et d'une autre salle hypostyle, en Nubie cette fois : celle du temple du Gebel Barkal, dont la dédicace date de sa 11e année. La grande oeuvre de son règne, qui ne dure que quatorze ans, est la politique extérieure. N'a-t-il pas d'ailleurs choisi comme nom de nebty, « Celui au bras fort, qui renouvelle les naissances et repousse les Neuf Arcs»? L'héritage amarnien était lourd, malgré la reprise des activités en Asie sous Horemheb et Ramsès Ier, dont on a retrouvé trace à Be(th-)San près du Jourdain dans le dépôt de fondation du temple que Séthi Ier construisit après sa première campagne militaire. On peut dire que, en gros, toute la Palestine est hostile à l'Égypte, qui ne conserve que les forteresses de Be(th-)San, Reheb et Megiddo. Il prend la route de l'Asie dès sa première année de règne. Il part de Tjel et remonte jusqu'à Raphia. En route, il doit lutter contre les Chosou, probablement basés à Raphia, pour la possession des neuf puits qui jalonnent la piste. Il prend Raphia et Gaza en Canaan. De là, il envoie une colonne vers Be(th-)San et Reheb, qui sont attaqués par une coalition d'Hamath et de Pella, à laquelle des bandes d'Apirou prêtent main forte dans la montagne. Pendant que l'armée de Rê se porte vers Be(th-)San, celle d'Amon marche sur Hamath, et celle de Seth sur Yenoam. Ensuite, les Égyptiens remontent encore vers le nord, prennent Acre et Tyr et s'avancent dans le Liban. Au retour, ils s'emparent de Pella. Séthi Ier profite des acquis de cette campagne pour en organiser une autre l'année suivante, qui le conduit jusqu'à Qadech. La pacification temporaire du pays d'Amourrou lui permet d'organiser une troisième campagne, cette fois-ci contre les Libyens. Mais il faudra une quatrième expédition en Asie pour que l'Égypte parvienne au moins à restaurer son image au Proche-Orient. On a peu de détails sur cette expédition contre les Hittites. Les Égyptiens s'assurent le contrôle de la Syrie. Leur influence s'arrête au sud de Qadech, qui retrouve son rôle traditionnel de ville frontière. Le roi Mouwatalli passe un accord de paix avec son rival. Cet accord ne durera pas, mais il permet à chacun de refaire ses forces. Fig. 113 Les campagnes de Séthi Ier au Proche-Orient. Plus près de l'Égypte, les activités avaient déjà repris sous Ramsès Ier dans les mines de turquoise du Sinaï. éthi Ier en continue l'exploitation. Il facilite également l'accès aux mines d'or du désert d'Edfou en ménageant, en l'an 9, les puits du Ouadi Mia et du Ouadi Abbad. En Nubie, il poursuit la mise en valeur de elles du Ouadi Allaqi, sans rencontrer d'obstacle, si l'on excepte une campagne de pacification d'Irem attestée ar une inscription de Qasr Ibrim. on hypogée de la Vallée des Rois (VdR 17) est l'un des plus complets du point de vue des livres funéraires et e la décoration, avec, en particulier, un splendide plafond astronomique. Son style, très caractéristique, reste ncore assez proche, par la finesse et la sensibilité du modelé, de l'art amarnien. On retrouve ces deux qualités ans le temple funéraire que le roi s'est fait construire à Gourna; mais c'est surtout à Abydos que l'on peut pprécier la subtilité et la grâce de l'art de Séthi Ier, dans son autre temple funéraire et l'Osireion, le tombeau 'Osiris, qu'il a fait édifier à proximité. L'occupation du site remonte au moins à la période nagadienne, et nous avons vu qu'Abydos est depuis toujours l'une des grandes villes saintes de l'Égypte. Fig. 114 . Plan général d'Abydos.