Mon grand-père venait chaque année pendant l'été, puisque le climat de Long Island, l'été, était moins oppressant que celui de Miami Beach.
Publié le 06/01/2014
Extrait du document
«
vision
àla fois bizarre etmajestueuse :tous lesmatins, aprèslelever dusoleil, touten
murmurant enhébreu, ilpassait l'immense taies délavé
etle yarmulke, puis
enlaçait son
avant-bras aveclesliens decuir, puisentourait autourdesatête lalarge bande decuir à
laquelle étaitattachée unepetite boîtedecuir contenant lesversets delaTorah, qu'ilcalait au
milieu deson front, sortait son siddur, le
livre desprières quotidiennes, etmarmonnait
pendant unedemi-heure environdesmots quinous étaient absolument incompréhensibles.
Parfois, quandilavait terminé, ilnous disait, J'ai
placé unbon mot pour vous, puisque vous
n'êtes queRéforme.
Mon
grand-père étaitunJuif orthodoxe delavieille écoleetc'était grâceà
lui, plus quetoute autrechose, quenous avions unpeu dereligion :nous allions auxservices
pendant lesfêtes, nousavons faitnotre bar-mitsva.
Pourautant quejesache, monpère, un
scientifique quinepartageait paslepoint devue deson loquace beau-père, estallé exactement
quatre foisàla petite synagogue àlaquelle nousappartenions :le matin desbar-mitsva deses
fils.
La séance d'habillage demon grand-père, chaquematin,n'était enrien moins précise et
méticuleuse quelerituel delaprière.
Mongrand-père étaitcequ'on appelait autrefois un
« type chic ».
Sonallure léchée etapprêtée, sesvêtements élégantsétaientl'expression d'une
qualité intérieure qui,pour luietsa famille, caractérisait ceque signifiait êtreunJäger, une
chose qu'ilsappelaient Feinheit
: un
raffinement quiétait àla fois éthique etesthétique.
On
pouvait toujours compter surlefait que seschaussettes seraientassorties àson pull et,s'ilest
vrai qu'il préférait leschapeaux mous,onpouvait toujours trouversurleur bandeau uneou
deux plumes désinvoltes, jusqu'àceque ladernière deses quatre femmes – quiavaitperdu son
premier marietune filledequatorze ansàAuschwitz etdont j'aimais teniretcaresser l'avant-
bras doux ettatoué quandj'étaispetit,etqui, jepense àprésent, nepouvait supporter une
chose aussifrivole qu'une plumesurunchapeau parcequ'elle avaittantperdu – commençât à
les arracher systématiquement.
Pourunejournée d'étéclassique desannées 1970,ilaurait pu
porter latenue suivante :pantalon jaunemoutarde enlaine d'été, parfaitement repassé;une
chemise blanchetisséeetnon amidonnée sousungilet enlaine àlosanges moutarde etblanc ;
chaussettes jaunepâle,chaussures endaim blanc, etchapeau mouavecousans plume, selon
l'année deladécennie 1970enquestion.
Avantdesortir pourfaireplusieurs foisletour dupâté
de maisons oupour allerauparc, ils'aspergeait lesmains d'eaudeCologne 4711avant deles
tapoter surses tempes etsur lescaroncules deson menton.
Et
maintenant, disait-il
ense
frottant lesmains manucurées, nous
pouvons sortir.
J'observais
toutcelasoigneusement (oudumoins jelepensais).
Ilpouvait aussiporter une
veste – cequime paraissait incroyable, puisqu'iln'yavait nimariage nibar-mitsva oùaller
– dans laquelle ilglissait, invariablement, sonportefeuille et,dans lapoche intérieure del'autre
côté, unporte-billet àl'aspect étrange :long etmince, unpeu trop grand ausens où,pour un
œil américain, certainsarticlespourhommes européens paraissenttoujoursavoirlamauvaise
taille ;et dans uncuir, uséjusqu'à luidonner l'aspect dudaim, quiétait, jem'en rends compte
aujourd'hui, del'autruche, puisquej'enaihérité, maisqui,àl'époque, m'amusait parcequeje
trouvais qu'illuidonnait l'allured'unmaquereau.
Jem'asseyais surlelit de mon petit frère
pendant qu'ilparlait, observant etadmirant toutessespossessions :le gilet àlosanges, les
chaussures blanches,lesceintures élégantes, lagrosse bouteille d'eaudeCologne bleueet
dorée, lepeigne enécaille aveclequel ilplaquait enarrière lescheveux blancsclairsemés, le
portefeuille uséetplissé dontjesavais, mêmealors,qu'ilnecontenait pasd'argent, incapable
que j'étais d'imaginer àce moment-là cequ'il pouvait avoirdesiprécieux pourqu'illeportât
chaque foisqu'il s'habillait aussiimpeccablement.
.
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