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Le 2 décembre 1851, jour anniversaire d'Austerlitz et du sacre de son oncle, il abat son jeu : le coup d'État.

Publié le 06/01/2014

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Le 2 décembre 1851, jour anniversaire d'Austerlitz et du sacre de son oncle, il abat son jeu : le coup d'État. Dissolution de l'Assemblée et pleins pouvoirs. En province, on se bat au nom de la légalité, beaucoup plus que nous l'a fait croire longtemps la propagande impériale, nous disent aujourd'hui les historiens, mais la répression est farouche et étouffe vite la résistance. À Paris, on monte quelques barricades. Baudin, un député héroïque, est tué. D'autres sont emprisonnés, d'autres encore prennent le chemin de l'exil. Les faubourgs populaires, eux, ont été très calmes. Qui aurait eu envie de se battre pour défendre une assemblée qui, trois ans auparavant, avait fait tirer sur le peuple ? Un an plus tard, le prince-président suit les traces de l'oncle, il prend le titre d'empereur. Le chiffre II était celui du fils de Napoléon Ier. Le neveu se fait donc appeler Napoléon III. Victor Hugo, son plus célèbre opposant, exilé du début à la fin du régime pour ne pas se compromettre avec celui qui a tué la république, ne l'appelle que Napoléon le Petit. Le Second Empire La période est riche : dix-huit ans, ce n'est pas rien dans la vie d'un pays. Tâchons de les résumer. À l'intérieur, le Second Empire, comme le premier, est d'abord une dictature. Sur la fin, dans les années 1860, l'empereur fera mine de desserrer les écrous en faisant succéder « l'Empire libéral », à « l'Empire autoritaire ». En fait, du coup d'État à la chute du régime, les principes appliqués sont simples : censure de la presse ; opposition muselée ; élections faussées (le préfet nomme des « candidats officiels » qui seuls ont droit à l'affichage et à la publication de leur programme, ce qui ne laisse quasiment aucune chance à leurs rivaux) et, parfois, des « plébiscites » pour faire semblant de quérir l'assentiment populaire, comme du temps de l'oncle. Depuis la fin du xxe siècle, en France, de nombreux historiens ou hommes politiques ont écrit des livres pour tenter de réhabiliter la période, à leurs yeux trop décriée jusqu'alors. Le phénomène est normal, le balancier est parti dans un sens, il part dans l'autre, dans quinze ans on écrira à nouveau le contraire. N'oublions pas toutefois à quel point le Second Empire fut détesté par ses opposants, n'oublions pas ce que la république qu'ils fondèrent ensuite doit à cette réaction quasi allergique au régime : les principes posés alors sont toujours les nôtres et ils viennent de là. Si la IIIe République fut à ce point déterminée à promouvoir et à défendre les libertés publiques - presse, réunion, etc. -, c'est aussi parce qu'elles avaient été bafouées pendant vingt ans. Si toutes les Constitutions depuis, même celle qui laisse beaucoup de place au président, celle de la Ve, ont pris garde à maintenir les droits et la puissance du Parlement, si elles se méfient du « césarisme », comme on l'appelle en politique, c'est-à-dire le pouvoir autoritaire d'un seul, c'est toujours à cause du mauvais souvenir laissé par un certain prince-présidentempereur. En économie, c'est l'explosion. La période est celle de l'essor industriel et financier, les usines couvrent de nombreuses régions françaises, les villes se développent et se métamorphosent à une vitesse jamais vue jusque-là. Le grand nom est celui d'Haussmann, préfet de la Seine, qui refait Paris, détruit les quartiers insalubres, perce, creuse, trace de grands boulevards qui ont toutes les qualités : ils assainissent l'urbanisme et peuvent servir à transporter la troupe en cas de désagréments sociaux. Napoléon III, pourtant, aime à se souvenir qu'au jeune temps où il se disait socialiste, il avait écrit un ouvrage intitulé L'Extinction du paupérisme. Il fait parfois quelque effort envers les classes populaires : c'est lui qui, en 1864, donne le droit de grève aux ouvriers. Pour autant, les grands bénéficiaires du système se trouvent de l'autre côté de l'échelle sociale. Les spéculateurs règnent, dont le moins scrupuleux campe au sommet de l'État : le duc de Morny, demi-frère de l'empereur. Il bâtit une immense fortune en jouant ses meilleurs coups dans l'immobilier ou l'industrie grâce aux renseignements qu'il tient de sa position. À travers l'histoire de la famille Rougon-Macquart, Émile Zola entreprendra plus tard de décrire le Second Empire sous toutes ses facettes. Le volume consacré au monde des affaires s'appelle La Curée. On ne saurait, enfin, être un Bonaparte sans chercher la gloire hors des frontières. Le neveu, heureusement pour ses voisins, n'est pas un conquérant. Il rêve plutôt de passer à la postérité comme apôtre d'une Europe renouvelée, où chaque « nationalité », c'est-à-dire chaque peuple, aurait sa juste place. Noble idéal. La réalité est moins facile. Dans les faits, sa politique étrangère sera toujours confuse et souvent ratée. Pour contrer la Russie qui veut dépecer l'Empire ottoman, il se range au côté de l'Angleterre pour défendre le sultan contre le tsar. C'est la guerre de Crimée (1854-1856), affreusement meurtrière, qui ne nous laisse qu'un nom de boulevard en commémoration d'une victoire, Sébastopol, et guère plus. L'empereur est favorable à l'unification de l'Italie, toujours morcelée. Il accepte d'aider Victor-Emmanuel, le petit roi de Piémont-Sardaigne, qui, avec son célèbre ministre Cavour, veut la faire à son profit. Il envoie des troupes pour repousser les Autrichiens des plaines du Nord - une victoire à Magenta, puis un carnage à Solferino. Les Autrichiens cèdent. Victor-Emmanuel reçoit la Lombardie, la France récupère en échange Nice et la Savoie. Plus tard, quand les Italiens entendent parfaire leur unité en prenant Rome, l'empereur, poussé par le parti catholique dont sa femme Eugénie est le pilier, tourne casaque. Il expédie un corps de soldats pour défendre le pape et les États pontificaux contre les amis d'hier. Glissons sur le désastre mexicain : Napoléon III rêve d'établir là-bas un vaste empire latin et catholique qui ferait pièce à la puissance montante des États-Unis. Pourquoi pas ? Hélas pour lui, ni les Américains ni les Mexicains n'en acceptent le principe. Les Français réembarquent et l'empereur Maximilien, le protégé de la France, finit fusillé. Reste le voisin d'outre-Rhin. Comme Victor-Emmanuel et Cavour en Italie, le roi de Prusse Guillaume et son chancelier Bismarck rêvent d'unir sous leur égide tous les Allemands, toujours éparpillés en petites principautés, duchés, royaumes ou villes libres, le Wurtemberg, le Bade, la Bavière, le Hanovre, la Saxe, etc., tous ces lointains débris du Saint Empire remodelé à l'époque napoléonienne. L'empereur d'Autriche estimait de son droit de le faire à leur place, mais les Prussiens lui ont fait la guerre et l'ont battu (1866). Reste à trouver un moyen de pousser tout le monde à accepter la suprématie de Guillaume de Prusse. Un bon conflit contre un ennemi commun est toujours un moyen efficace de souder les gens entre eux : le nouveau Napoléon qui règne à Paris semble tout indiqué. Bismarck cherche donc un prétexte pour le défier. Le trône d'Espagne est vacant. Il y pousse un candidat prussien. Vu de France, cela ferait des Allemands à l'est et d'autres au sud, c'est-à-dire beaucoup. Napoléon III s'énerve. De tous côtés, les opinions s'enflamment. Bismarck en rajoute en tripatouillant une dépêche diplomatique qu'il réussit à rendre insultante pour tout le monde : on l'appelle la « dépêche d'Ems », du nom de la ville d'eaux d'où elle est partie. Rage allemande, rage française. C'est l'étincelle qui manquait. En juillet 1870, confiante dans sa puissance, la France déclare la guerre à la Prusse, qui est vite rejointe par tous les alliés germaniques espérés. Le 20 août, une première armée française est enfermée dans Metz. Le 2 septembre, la seconde se fait piéger dans la cuvette de Sedan. Les Français sont à terre, Napoléon III fait piteusement prisonnier. Le 4 à Paris, Gambetta, leader de l'opposition, proclame la république. La Troisième, donc. La IIIe République Elle est née d'une défaite, en 1870. Elle mourra d'une défaite, en 1940. Cela fait soixante-dix ans, belle longévité. Pourtant, une fois de plus, les débuts sont difficiles. Gambetta est un homme d'énergie, il a proclamé la république, il rêve aussi de la voir victorieuse. Mi-septembre, les Prussiens sont aux portes de Paris, dont ils commencent le siège. Dans un élan héroïque et fameux, notre républicain s'échappe de la capitale en ballon, pour aller exhorter le pays tout entier à la défense nationale. On se bat au nord, on se bat sur la Loire. Paris résiste miraculeusement à un siège impitoyable. On mange du chien, du chat, et même, raconte Victor Hugo enfin rentré d'exil, l'éléphant du Jardin des plantes. Tant d'efforts sont insuffisants. Bismarck a déjà ce qu'il veut. Le 18 janvier, dans la galerie des Glaces du château de Versailles - suprême offense pour les vaincus -, le roi de Prusse Guillaume relève la couronne millénaire d'Otton et de Charles Quint que Napoléon avait fait chuter. Tous les rois, les princes, les ducs d'un pays morcelé l'acceptent comme empereur d'Allemagne. Le « Deuxième Reich » est né. Fin janvier, la France épuisée demande l'armistice. Il conduira au traité de Francfort et à ce qui sera considéré comme un drame national : l'Alsace et une partie de la Lorraine deviennent allemandes. De notre côté du Rhin, on les appelle « les provinces perdues ». « N'en parler jamais, y penser toujours », dira-t-on pendant des années à leur propos, en ravalant de lourds sanglots patriotiques. La guerre étrangère est finie. Place à la guerre civile. En février 1871, sous contrôle prussien, le pays effondré a organisé des élections qui ont amené à l'Assemblée nationale une majorité très conservatrice. L'inusable Adolphe Thiers en est le chef. Dans quelques grandes villes, le peuple veut partir dans l'autre sens : des mouvements révolutionnaires éclatent à Lyon, à Marseille. Le plus important démarre à Paris en mars. Le gouvernement veut désarmer la garde nationale et reprendre ses canons. Le peuple parisien, écoeuré par la défaite, refuse. Le

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