III ANTILLES Sur le coup de deux heures après midi, Fort-de-France était
Publié le 06/01/2014
Extrait du document
«
résonner
certaines cordessensibles ; nonsans succès, puisque aprèsquelques heurespassées ensueurs froides (les
collections ethnographiques étantmélangées danslescaisses avecmon mobilier etma bibliothèque, carjequittais le
Brésil defaçon définitive, j’avaisàcertain moment lacrainte qu’onlesmît enpièces surlesquais pendant quelebateau
lèverait l’ancre), c’estmoi-même quidictai àmon interlocuteur lestermes cinglants d’unrapport oùils’attribuait lagloire
d’avoir, enpermettant mondépart etcelui demes bagages, sauvésonpays d’unconflit international etde l’humiliation
subséquente.
Peut-être, d’ailleurs,n’aurais-je pasagiavec tantd’audace sije ne m’étais encoretrouvésousl’influence d’unsouvenir
qui dépouillait detout leursérieux lespolices sud-américaines.
Deuxmoisauparavant, devantchanger d’aviondansun
gros village debasse Bolivie, j’yfus bloqué pendant quelques joursavecuncompagnon, leDr J.A.
Vellard, pourattendre
une correspondance quin’arrivait pas.En1938, l’aviation ressemblait peuàce qu’elle estaujourd’hui.
Sautant,dansdes
régions reculées del’Amérique duSud, certaines étapesduprogrès, elles’était installée deplain-pied danslerôle de
patache pourdesvillageois quijusqu’alors, enl’absence deroute, perdaient plusieursjourspourserendre àla foire
voisine, àpied ouàcheval.
Maintenant, unvol dequelques minutes(mais,àdire vrai, souvent enretard d’unnombre très
supérieur dejours) leurpermettait detransporter leurspoules etleurs canards entrelesquels onvoyageait leplus
souvent accroupi, carlespetits avions étaient bourrés d’unmélange bigarrédepaysans nu-pieds, d’animaux debasse-
cour etde caisses troplourdes outrop volumineuses pourpasser danslespistes deforêt.
Nous tranions doncnotre désœuvrement danslesrues deSanta CruzdelaSierra, transformées parlasaison des
pluies entorrents boueuxqu’onpassait àgué surdegrosses pierresplacées àintervalles régulierscommedespassages
cloutés vraiment infranchissables auxvéhicules, quandunepatrouille remarqua nosvisages peufamiliers ; raison
suffisante pournous arrêter et,enattendant l’heuredesexplications, nousenfermer dansunepièce d’unluxedésuet :
ancien palaisdegouverneur provincialauxmurs couverts deboiseries encadrant desbibliothèques vitréesdontdegros
volumes richement reliésgarnissaient lesrayons, interrompus seulementparunpanneau, vitréluiaussi etencadré,
présentant l’étonnante inscriptioncalligraphiée quejetraduis icide l’espagnol : « Souspeinedesévères sanctions, ilest
rigoureusement interditd’arracher despages desarchives pours’enservir àdes fins particulières ouhygiéniques.
Toute
personne quicontreviendra àcette interdiction serapunie. »
Je dois àla vérité dereconnaître quemasituation àla Martinique s’amélioragrâceàl’intervention d’unhaut
fonctionnaire desPonts etChaussées quidissimulait derrièreuneréserve unpeu froide dessentiments éloignésdeceux
des milieux officiels ; peut-être aussiàcause demes visites fréquentes àun journal religieux, danslesbureaux duqueldes
Pères dejene sais quel ordre avaient accumulé descaisses pleines devestiges archéologiques remontantàl’occupation
indienne, etque j’employais mesloisirs àinventorier.
Un jour, jesuis entré danslasalle delaCour d’assises quiétait alors ensession ; c’étaitmapremière visiteàun
tribunal, etc’est demeuré laseule.
Onjugeait unpaysan qui,aucours d’une querelle, avaitemporté d’uncoup dedent un
morceau d’oreilledeson adversaire.
Accusé,plaignant ettémoins s’exprimaient enun créole volubile dont,enun tel lieu,
la cristalline fraîcheuroffraitquelque chosedesurnaturel.
Ontraduisait àtrois juges quisupportaient mal,sous la
chaleur, destoges rouges etdes fourrures àquoi l’humidité ambianteavaitenlevé leurapprêt.
Cesdéfroques pendaient
autour deleurs corps comme despansements ensanglantés.
Encinq minutes exactement, l’irasciblenoirs’entendit
condamner àhuit ansdeprison.
Lajustice étaitetreste toujours associée dansmapensée audoute, auscrupule, au
respect.
Qu’onpuisse, aveccette désinvolture, disposerenun temps sibref d’un êtrehumain mefrappa destupeur.
Jene
pouvais admettre quejevenais d’assister àun événement réel.Aujourd’hui encore,nulrêve, sifantastique ougrotesque
qu’il puisse être,neparvient àme pénétrer d’untelsentiment d’incrédulité.
Quant àmes compagnons debord, ilsdurent leurlibération àun conflit entrel’autorité maritimeetles commerçants.
Si l’une lesconsidérait commedesespions etdes traîtres, lesautres voyaient eneux une source deprofits que
l’internement auLazaret, mêmepayant, nepermettait pasd’exploiter.
Cesconsidérations l’emportèrentsurlesautres et,
pendant unequinzaine dejours, toutlemonde futlibre dedépenser lesderniers billetsfrançais, sousunesurveillance
fort active delapolice quitissait autour dechacun, etparticulièrement desfemmes, unréseau detentations,
provocations, séductionsetreprésailles.
Enmême temps, onimplorait desvisas auconsulat dominicain, oncollectionnait
les faux bruits surl’arrivée desbateaux hypothétiques quidevaient tousnous tirerdelà.Lasituation changeaànouveau
quand lecommerce villageois,jalouxdelapréfecture, fitvaloir qu’ilavait luiaussi droitàsa part deréfugiés.
Dujour au
lendemain, onmit tout lemonde enrésidence forcéedanslesvillages del’intérieur ; j’yéchappai encore,maisanxieux de
suivre mesbelles amies dansleurnouvelle résidence aupied dumont Pelé,jedus àcette dernière machination policière
d’inoubliables promenadesdanscette îled’un exotisme tellement plusclassique quelecontinent sud-américain : sombre
agate herborisée enclosedansuneauréole deplages ensable noirpailleté d’argent, tandisquelesvallées englouties dans
une brume laiteuse laissentàpeine deviner –et, par unégouttement continuel,àl’ouïe plusencore qu’àlavue –la
géante, plumeuse ettendre mousse desfougères arborescentes au-dessusdesfossiles vivantsdeleurs troncs.
Si j’avais étéjusqu’alors favoriséparrapport àmes compagnons, jen’en restais pasmoins préoccupé d’unproblème
qu’il fautbien quej’évoque icipuisque larédaction mêmedecelivre devait dépendre desasolution, laquelle,onvale
voir, n’alla passans difficulté.
Jetransportais pourseule fortune unemalle remplie demes documents d’expédition :.
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