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distingué dans toute la ville, et je voyage continuellement.

Publié le 06/01/2014

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distingué dans toute la ville, et je voyage continuellement.   le nez haut, ai-je dit. Malcia a souri et hoché la tête, et je n'avais aucune raison de ne pas la croire. Tout colle parfaitement, ai-je pensé. À ce moment-là, Malcia a décidé de servir le déjeuner et nous avons parlé pendant quelque temps de choses plus joyeuses.     Plus tard, une fois terminé l'énorme repas qu'elle avait préparé, Malcia a dit, Et après, que s'est-il passé pendant l'Occupation, vous savez ? J'ai remarqué que Shumek - Shlomo appelait régulièrement Solomon Reinharz par son surnom polonais - ne donnait aucun signe de vouloir retourner travailler. Je le savais - ou, du moins, je croyais le savoir -, mais comme je l'avais fait à Sydney, je lui ai demandé de se souvenir pour moi de ce qui était arrivé et quand. Cette fois, cependant, j'ai essayé de raisonner un peu plus comme Matt. Je lui ai demandé non pas seulement ce qui s'était passé, mais aussi ce que les gens pensaient, ressentaient et disaient. J'ai dit, Quand vous avez su que les Allemands arrivaient, au cours de l'été 41, qu'est-ce que les gens racontaient avant qu'ils fussent vraiment là - quelle idée se faisaient les gens de la tournure que ça allait prendre ? Shumek et Malcia ont échangé des regards. Elle a dit, Nous savions, nous savions, nous savions. La première nuit après le départ des Russes à Bolechow, nos Ukrainiens, nos goyim, ont tué cent vingt Juifs et les ont jetés à l'eau. J'ai hoché la tête. Je me suis souvenu de Jack et de Bob à Sydney disant, La première chose qui s'est passée, c'est que les Ukrainiens sont arrivés et ils ont commencé à tuer des Juifs. Vous savez, si vous aviez un problème avec les Juifs, vous pouviez les tuer tout simplement. Mais qu'est-ce que vous attendiez des Allemands ? ai-je demandé. De quoi étaient-ils informés à ce moment-là ? Après avoir échangé un regard avec son mari, elle a dit avec un petit rire amer, Alle gloybten duss di doytscher wirdn uns tzvingen in a fabrik. Tout le monde pensait que les Allemands allaient nous forcer à travailler dans une usine. A ce stade de la conversation, j'ai demandé ce que les gens savaient en général des projets des Allemands concernant les Juifs d'Europe quand la guerre a commencé. Malcia a répété, Nous savions, nous savions, nous savions. En 39, tous les gens, tous les Juifs, ils sont partis de Pologne - c'était le gouvernement polonais - et ils ont pris la fuite. Elle a soudain couvert son visage de ses deux mains, se souvenant de quelque chose. Oh ! a-telle dit. Si vous aviez vu les gens avec leurs petits bagages, et les familles... Meg Grossbard s'était souvenue, elle aussi, d'avoir vu des hordes de Juifs, avec quelques Polonais, fuyant leur foyer soit vers l'est, soit vers le sud, en direction de la moitié soviétique de la Pologne, en direction de la Hongrie, en voiture, à cheval, à pied, fuyant aussi vite qu'ils le pouvaient après que les Allemands eurent commencé à bombarder Varsovie, ce jour de septembre 1939. Bolechow, m'avait expliqué Meg, était la dernière ville avant la frontière hongroise ; des milliers de réfugiés étaient passés à travers la ville en quête d'un refuge. Un bon nombre d'entre eux étaient restés à Bolechow. Les Flüchtling, on les appelait : ceux qui sont en fuite. Mieux valait vivre sous la domination soviétique que sous celle des nazis. Comme si elle avait lu mes pensées, Malcia a dit, Ils fuyaient vers nous. Non seulement de Pologne, mais de Tchécoslovaquie, d'Autriche. Parce qu'ils savaient que nous allions rester sous gouvernement russe. Elle a secoué de nouveau la tête, à mesure que les souvenirs affluaient, et elle a ajouté, Cette image, je ne peux pas l'oublier. Shlomo l'a brusquement interrompue. Malcia, a-t-il dit, tu as quelques années de plus que moi. Et tu as vu ces choses... les réfugiés... Oh, les réfugiés ! a-t-elle dit en couvrant son visage de ses mains à nouveau. Et tu te souviens qu'il y a eu deux années de tranquillité, de 1939 à 1941, a poursuivi Shlomo. Et puis, tu te souviens que les gens ont su que les Allemands allaient venir. Malcia a hoché la tête et Shlomo a ajouté sur ce ton emphatique qu'il a, Alors pourquoi nous n'avons pas fui comme fuyaient ces réfugiés ? Malcia a eu un sourire grave. Pourquoi, pourquoi ?Ahhh... Parce qu'on ne peut pas quitter une maison ! Comment quitter sa maison ? ! Comment quitter sa maison ? Je me suis alors souvenu de quelque chose d'autre dans les lettres de Shmiel - comment, le temps passant, il oscillait entre des fantasmes désespérés de fuite et un refus orgueilleux de s'en aller. Il allait écrire au président Roosevelt, annonçait-il dans une lettre ; il allait vendre ce qu'il avait, tout, pour les faire sortir ; pour faire sortir les filles ; pour faire sortir une fille. La chère Lorka. Et cependant, dans la même lettre parfois, il changeait d'avis. Mais je souligne pour vous tous que je ne veux pas partir d'ici sans avoir de quoi vivre - inversement, j'ai ici, grâce à Dieu, tout ce qu'il me faut... Je sais maintenant que je ne pourrais pas avoir une telle vie très rapidement en Amérique. Je me suis interrogé, autrefois, sur ces changements d'humeur extravagants, mais évidemment c'était il y a des années, quand j'étais adolescent et jeune homme, avant d'avoir une vie, une maison, des enfants. Souvent, lorsque je parle de l'Holocauste à certaines personnes, de ce que j'ai découvert dans les lettres de mon grand-oncle, sa compréhension tardive du fait que son monde était en train de se refermer sur lui, ses efforts désespérés pour s'en échapper, je m'aperçois que ceux qui ont bénéficié d'une perspective historique disent ce que Shlomo venait de dire à l'instant - même si la question un peu furieuse de Shlomo était provoquée par le chagrin et non par la bonne volonté complaisante qui naît de l'évaluation des crises historiques à partir du confort d'une vie sans danger. On se demande pourquoi ils n'ont pas lu ce qui était écrit sur les murs, se plaisent à dire ces personnes. Mais en vieillissant, je ne m'interroge plus beaucoup, vraiment. Je ne m'interroge plus et, je m'en apercevais maintenant, Malcia ne l'avait pas fait non plus. Comment quitter sa maison ? ! Malcia s'est levée pour aller faire quelque chose dans la cuisine ; nous n'avions pas encore pris de dessert ! s'était-elle écriée. Pendant qu'elle y était, Shumek et Shlomo ont parlé rapidement en yiddish de leurs souvenirs du temps de guerre. J'ai essayé de suivre, mais ils parlaient trop vite. A un moment donné, j'ai entendu Shlomo demander à Shumek quelque chose à propos des Yiddishpolizianten, des milices juives qui avaient été créées dans chaque ville et contraintes, souvent, de faire le sale boulot des occupants : arrêter un certain nombre de gens, retrouver tel ou tel Juif, l'arrêter et l'emmener dans un endroit dont il ou elle ne reviendrait jamais. J'avais lu, et maintenant j'en entendais parler, que la police juive était souvent redoutée et détestée par les gens qui avaient été autrefois des voisins ou même des amis. Anna Heller Stern avait eu une réaction très forte, deux jours plus tôt, lorsque le sujet de la police juive était venu dans la conversation. J'avais plus peur d'eux que de n'importe qui d'autre, avait-elle dit. Mais alors même qu'elle avait dit cela, je m'étais dit : si j'avais pensé pouvoir sauver ma famille en rejoignant la police juive, est-ce que je l'aurais fait ? J'ai pensé à mes enfants et j'ai refusé d'émettre des jugements. En tout cas, comme le disait maintenant Shumek à Shlomo, la police juive était loin d'être indispensable. Und vuss hut zey getin ? Zey hutten zi alle geloysht. Et qu'est-ce qu'ils ont fait ? Ils les ont liquidés, eux aussi. C'est dans ce contexte que Shlomo a demandé ce qu'étaient devenus deux de ces policiers qu'il avait connus. Ils parlaient vite et je n'ai pas pu retenir les noms. Es is oykh geloysht geveyn ? a demandé Shlomo. Et il a été liquidé, lui aussi ? Shumek, à cet instant précis, avait une expression à la fois gentille et quelque peu résignée. Yaw, er oykh. Oui, lui aussi. Malcia est réapparue avec un énorme gâteau et, ayant entendu ce dont parlaient son mari et Shlomo depuis un moment, elle s'est tournée vers nous et a dit, Ça suffit. Je ne veux pas parler des mishugenah tzayten et des mishugenah menshen. De l'époque folle et des hommes fous. Elle a ajouté, Qui veut une bonne tasse de thé ?  

« s'est passée, c'estquelesUkrainiens sontarrivés etils ont commencé àtuer desJuifs.

Vous savez, sivous aviez unproblème aveclesJuifs, vouspouviez lestuer tout simplement.

Mais qu'est-ce quevous attendiez desAllemands ?ai-je demandé.

Dequoi étaient-ils informés à ce moment-là ?Après avoiréchangé unregard avecsonmari, elleadit avec unpetit rire amer, Alle gloybten dussdidoytscher wirdnunstzvingen inafabrik.

Tout lemonde pensait que lesAllemands allaientnousforcer àtravailler dansuneusine. A ce stade delaconversation, j'aidemandé ceque lesgens savaient engénéral desprojets des Allemands concernant lesJuifs d'Europe quandlaguerre acommencé. Malcia arépété, Noussavions, noussavions, noussavions.

En39, tous lesgens, touslesJuifs, ils sont partis dePologne – c'étaitle gouvernement polonais – etilsont pris lafuite. Elle asoudain couvertsonvisage deses deux mains, sesouvenant dequelque chose.Oh !a-t- elle dit.Sivous aviez vules gens avecleurs petits bagages, etles familles... Meg Grossbard s'étaitsouvenue, elleaussi, d'avoir vudes hordes deJuifs, avecquelques Polonais, fuyantleurfoyer soitvers l'est, soitvers lesud, endirection delamoitié soviétique de la Pologne, endirection delaHongrie, envoiture, àcheval, àpied, fuyant aussivitequ'ils le pouvaient aprèsquelesAllemands eurentcommencé àbombarder Varsovie,cejour de septembre 1939.Bolechow, m'avaitexpliqué Meg,étaitladernière villeavant lafrontière hongroise ;des milliers deréfugiés étaientpassésàtravers laville enquête d'unrefuge.

Unbon nombre d'entreeuxétaient restésàBolechow.

Les Flüchtling, on les appelait :ceux quisont en fuite.

Mieux valaitvivresousladomination soviétiquequesous celle desnazis. Comme sielle avait lumes pensées, Malciaadit, Ilsfuyaient versnous.

Nonseulement de Pologne, maisdeTchécoslovaquie, d'Autriche.Parcequ'ilssavaient quenous allions restersous gouvernement russe. Elle asecoué denouveau latête, àmesure quelessouvenirs affluaient, etelle aajouté, Cette image, jene peux pasl'oublier. Shlomo l'abrusquement interrompue. Malcia, a-t-ildit,tuas quelques annéesdeplus quemoi.

Ettu as vu ces choses...

lesréfugiés... Oh, lesréfugiés ! a-t-elleditencouvrant sonvisage deses mains ànouveau. Et tu tesouviens qu'ilya eu deux années detranquillité, de1939 à1941, apoursuivi Shlomo.Et puis, tutesouviens quelesgens ontsuque lesAllemands allaientvenir. Malcia ahoché latête etShlomo aajouté surceton emphatique qu'ila, Alors pourquoi nous n'avons pasfuicomme fuyaient cesréfugiés ? Malcia aeu un sourire grave.

Pourquoi, pourquoi?Ahhh...Parcequ'on nepeut pasquitter une maison ! Comment quittersamaison ? ! Comment quittersamaison ? Je me suis alors souvenu dequelque chosed'autre dansles lettres deShmiel – comment, letemps passant, iloscillait entredesfantasmes désespérés de fuite etun refus orgueilleux des'en aller.

Ilallait écrire auprésident Roosevelt, annonçait-il dans unelettre ;il allait vendre cequ'il avait, tout,pourlesfaire sortir ;pour fairesortir lesfilles ; pour fairesortir unefille.

La chère Lorka.

Et cependant, danslamême lettreparfois, il changeait d'avis.

Mais jesouligne pourvoustousquejene veux paspartir d'icisans avoir de. »

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