Dictionnaire en ligne: ENTRAÎNANT, -ANTE, participe présent et adjectif.

Dictionnaire en ligne: ENTRAÎNANT, -ANTE, participe présent et adjectif. I.— Participe présent de entraîner* II.— Emploi adjectival. A.— Qui entraîne, qui exerce un effet stimulant Air, rythme entraînant; musique entraînante : Ø Lorsque Christophe jouait, il se taisait un moment, écoutait, puis sifflait de plus belle; aux passages entraînants, il marquait la mesure sur le toit, à grands coups de marteau. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Dans la maison, 1909, page 963. B.— Qui est éloquent, qui persuade. Ainsi la structure de la phrase oratoire est dirigée et entraînante (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Système des beaux-arts, 1920, page 312 ). Sa voix chantante de méridional possédait une vertu entraînante, dont il tirait, d'instinct, un parti prodigieux (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 42 ). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 527. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 602, b) 928; XXe. siècle : a) 671, b) 825. Forme dérivée du verbe "entraîner" entraîner ENTRAÎNER, verbe transitif. I.— [L'idée dominante est celle de mouvement imprimé à quelque chose ou à quelqu'un] A.— 1. [Le sujet désigne une entité concrète animée de mouvement] Traîner après soi, déplacer en tirant derrière soi. Quatre remorqueurs décollèrent « l'Étoile-desmers » du quai, deux autres l'entraînèrent (ÉDOUARD PEISSON, Parti de Liverpool, 1932, page 29 ). 2. MÉCANIQUE. Transmettre, communiquer un mouvement à une partie d'un mécanisme : Ø 1. Le mouvement d'horlogerie entraîne le cylindre ainsi préparé avec une vitesse uniforme et régulière que l'on peut régler à volonté. DOCTEUR JEAN BARATOUX, La Voix, 1912, page 47. — Emploi pronominal réciproque : Ø 2. Quand le mouvement qui anime toutes les parties d'une machine est très rapide, il est ininterrompu parce qu'il passe sans relâche des unes aux autres. Elles s'entraînent mutuellement, pour ainsi dire. ÉMILE DURKHEIM, De la division du travail social, 1893, page 386. — Par analogie. a) [Le sujet désigne une chose concrète] Attirer vers le bas. Un pavé se détache rarement d'un mur sans entraîner dans sa culbute une certaine quantité de plâtras (GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, Messieurs les Ronds-de-cuir, 1893, 6e. tableau, 2, page 228 ). Je sens mes genoux fléchir : je sens un poids à mon cou qui m'entraîne (PAUL CLAUDEL, Le Repos du 7e. jour. 1901, II, page 831 ). b) [Le sujet désigne une personne qui tombe] Emporter rapidement avec soi dans sa chute. Puis, battue, renversée, mais acharnée en son étreinte, elle entraîna son mari, qui s'abattit à côté d'elle (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Une Page d'histoire inédite, 1880, page 1212) : Ø 3.... elle prit l'épée par le milieu de la lame et en asséna le lourd pommeau sur la tête du comte qui vacilla, assommé, s'accrochant aux meubles et les entraînant dans sa chute. JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, page 93. 3. [Le sujet désigne une personne] Emmener, conduire avec soi, en faisant parfois usage de la force. D'un mouvement imperceptible et léger, le père l'entraîna, et ils commencèrent à marcher côte à côte, ainsi qu'autrefois (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, page 197 ). Daniel les [Jacques et Nicole] entraîna de force dans le salon, où la lumière, disait-il, était meilleure (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Le Pénitencier, 1922, page 794) : Ø 4.... de tous les bancs, accouraient les mères, les bonnes, les tantes, qui saisissaient par la main les fillettes confiées à leur garde et les entraînaient brutalement. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Madame Baptiste, 1882, page 355. — Entraîner vers.. Diriger quelqu'un vers un lieu déterminé. Craignant de succomber lui-même à l'envie d'entrer chez elle, il l'entraînait vers la route (ÉMILE ZOLA, Germinal, 1885, page 1371 ). B.— Par extension. 1. [Le sujet désigne généralement un cours d'eau, et parfois un phénomène naturel animé de mouvement] Emporter avec soi. Le ruisseau courait doucement sur les pierres polies, entraînant ces peuplades de poissons microscopiques et de mouches d'eau (JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Mariage de Loti, 1882, page 58) : Ø 5. L'un d'eux [prisonniers] trébucha, lâcha la file, perdit l'équilibre et l'eau le roula comme une solive, sans qu'il pût reprendre pied. Le courant l'entraînait, il était déjà loin. PIERRE MILLE, Barnavaux et quelques femmes..., 1908, page 174. · Par métaphore : Ø 6. Une fois le respect de la religion et de la monarchie sapé à la fois par les propres inconséquences de ces deux pouvoirs et par l'usure naturelle que le temps entraîne, il fallut bien aux hommes chercher un nouveau principe d'autorité. JEAN-RICHARD BLOCH, Destin du siècle, 1931, page 214. — emploi absolu. Et puis enfin, il y a la vie qui entraîne avec tous ses instants (PHILIPPE AUGUSTE MATHIAS DE VILLIERS DE L'ISLE-ADAM, Correspondance, 1873, page 177 ). 2. [Le sujet désigne une musique, un rythme] Emporter rapidement; exercer un effet stimulant : Ø 7. Les faux allaient toutes ensemble et l'herbe s'inclinait. Il y avait une sorte de musique sourde qui entraînait. Ça n'était pas une musique compliquée comme celle des bals (...) C'était comme une musique de tambour. Pas besoin de réfléchir : le corps s'y accorde de lui-même. JEAN GIONO, Que ma joie demeure, 1935, page 299. C.— Au figuré. 1. [Le sujet désigne un abstrait] a) Amener, faire venir à la suite. Ce don [le sens du théâtre] en suppose plusieurs autres, et qu'il entraîne avec lui tout un cortège de facultés (PAUL BOURGET, Nouveaux Essais de psychologie contemporaine, préface. 1885, page 18) : Ø 8. Le déterminisme associationniste se représente le moi comme un assemblage d'états psychiques, dont le plus fort exerce une influence prépondérante et entraîne les autres avec lui. HENRI BERGSON, Essai sur les données immédiates de la conscience, 1889, page 127. b) [Le complément désigne un événement, un phénomène] Produire, provoquer, avoir pour conséquence. Il y a des intérêts individuels qui entraînent des intérêts collectifs (JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, page 180 ). La dernière guerre a entraîné des pillages (L'Histoire et ses méthodes (CHARLES SAMARAN) 1961, page 1173) : Ø 9.... une tactique est singulièrement dangereuse quand elle ne peut échouer une fois sans entraîner pour la classe ouvrière des désastres immenses. JEAN JAURÈS, Études socialistes, 1901, page 104. · Entraîner à + substantif. Quelle que soit la haute supériorité intrinsèque de cette méthode sociologique, elle peut, cependant, entraîner à de graves erreurs (AUGUSTE COMTE, Cours de philosophie positive,tome 4, 1839-42, page 370 ). — DROIT. Avoir pour effet : Ø 10.... ces pièces, il faut le dire, ne sont pas faciles à se procurer, car le patriotisme les défend des deux parts, soutenus des lois draconiennes dont l'application entraîne un châtiment pire que la mort, l'éternel déshonneur. GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, page 278. c) [Le sujet désigne une chose abstraite] Emporter, pousser quelqu'un vers quelqu'un ou vers quelque chose sous l'effet d'une influence irrésistible : Ø 11.... puis les voyages, puis l'ardeur de produire, m'entraînèrent et ne me permirent pas de songer à des années qui étaient déjà loin de moi. ERNEST RENAN, Souvenirs d'enfance et de jeunesse, 1883, page 58. Ø 12.... pour le caractère, la première divination de l'orgueil de penser, et aussi un élément un peu morbide, cette difficulté d'agir qui a pour conséquence la difficulté de résister aux passions lorsqu'elles vous entraînent. PAUL BOURGET, Le Disciple, 1889, page 73. — emploi absolu. Elle avait tout, tout ce qui charme, tout ce qui entraîne, tout ce qui exalte (PAUL VALÉRY, Variété V, 1944, page 123 ). — Entraîner à + substantif ou + infinitif : Ø 13. J'ai peur que votre inexpérience ne vous entraîne parfois à des opinions imprudentes, et je vous demande seulement de professer en homme conscient et réfléchi... ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, page 199. Ø 14. « Le Calife fait partie de ces braves gens que leur sensiblerie entraîne à penser beaucoup de sottises sur la guerre... à méconnaître absolument ce qu'elle est en réalité. » ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 339. 2. [Le sujet désigne une personne] Amener quelqu'un à agir, à faire quelque chose en exerçant sur lui une contrainte, une pression morale. Comment le supposez-vous en même temps assez amoureux de la guerre pour y entraîner ses chefs, qui ne la veulent pas? (ERNEST RENAN, Drames philosophiques, Le Prêtre de Nemi, 1885, III, 1, page 569 ). Il sait comment on entraîne les peuples et comment on les fanatise (FRANÇOIS COPPÉE, La Bonne souffrance, 1898, page 105) : Ø 15. Il n'y a qu'un mot à dire à ces impuissants de la liquidation : « ce qui est fait est fait », et les entraîner de force à de nouveaux destins. EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 453. · emploi absolu. Étienne lui-même, le meneur de la grève, est plus entraîné qu'il n'entraîne (JULES LEMAÎTRE, Les Contemporains, 1885, page 273 ). · Entraîner à + substantif. Par crainte d'entraîner maman au divorce (PIERRE DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, page 259 ). · Se laisser entraîner à, dans + substantif. Nous avons vu comment le crédule étranger s'est laissé entraîner à ce mariage clandestin, qui devait le perdre (ÉLÉMIR BOURGES. Le Crépuscule des dieux. 1884, page 197 ). Le petit s'était laissé entraîner par eux dans un facile cambriolage (ANDRÉ GIDE, Journal, 1910, page 323 ). Olivier se laisse facilement entraîner (ANDRÉ GIDE, Les Faux-monnayeurs, 1925, page 1187 ). — Spécialement. Susciter l'accord, l'assentiment de quelqu'un, persuader : Ø 16. Naturellement, la ferme avait grand intérêt à cette voie nouvelle, et le maire, pour entraîner le conseil municipal, comptait beaucoup sur son adjoint, intéressé lui aussi à une prompte solution. ÉMILE ZOLA, La Terre, 1887, page 62. Ø 17.... quelques hommes ont le pouvoir d'entraîner, de convaincre leurs semblables à l'aide de paroles banales, de les mener ainsi au combat, au sacrifice, à la mort. ALEXIS CARREL, L'Homme cet inconnu, 1935, page 316. · emploi absolu. Je me sentais comme toi le désir d'être au centre, de parler, d'entraîner (HENRI, ALBAN FOURNIER, DIT ALAIN-FOURNIER, Correspondance [avec Jacques Rivière] , 1907, page 113 ). II.— [L'idée dominante est celle de formation progressive] A.— SPORTS. [Le sujet désigne un animé] Préparer méthodiquement un sportif ou un animal à une épreuve, à une activité sportive ou à une compétition, en le soumettant à un régime spécial approprié et à des exercices progressifs et réguliers : Ø 18. À l'extrémité de chacun des secteurs, on mettait une écrevisse affamée. Il était rigoureusement interdit à chacun des parieurs de pousser la sienne ou de la faire changer de chemin (...). Mais on avait le droit de la nourrir à part, de la soigner, de l'entraîner, de lui donner des excitants... PIERRE MILLE, Barnavaux et quelques femmes..., 1908, page 254. Ø 19.... avant la course on peut, on doit raisonner. On peut entraîner son cheval avec intelligence, on peut lui chercher le meilleur engagement. Dès que le départ est donné, on ne pense plus... ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Dialogues sur le commandement, 1924, page 94. · emploi absolu. Personne n'entraînait comme lui [Lord David] . Le boxeur dont il consentait à être le « traîner » était sûr de vaincre (VICTOR HUGO, L'Homme qui rit, tome 2, 1869, page 6 ). · Emploi pronominal réfléchi : Ø 20. Il y a partout des courts de tennis, des champs de golf, des patinoires de glace artificielle, des piscines chauffées, et des arènes où les athlètes s'entraînent et luttent à l'abri des intempéries. ALEXIS CARREL, L'Homme cet inconnu, 1935, page 15. — [L'objet désigne un membre, un organe, etc.] : Ø 21. Ni trop grand, ni petit, développé comme un athlète, mais sans rien d'exagéré dans les muscles, parce qu'il avait toujours eu le soin d'entraîner aussi bien son bras gauche que le droit,... LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 40. B.— Par extension. [Le sujet désigne une personne] Former, soumettre quelqu'un à une activité physique ou intellectuelle de manière à créer une aptitude ou une habitude. Le coût de la seule mobilité du travailleur s'élève dangereusement dans les établissements où il est entraîné au maniement ou au contrôle d'appareils complexes (L'Univers économique et social (sous la direction de François Perroux) 1960, page 4412) : Ø 22.... quand il se mettait au piano, on croyait voir un comptable devant sa caisse; sous ses doigts, blanches, noires et croches s'additionnaient; il faisait la vérification du morceau. Assurément il aurait pu m'entraîner pour le mécanisme; mais il ne prenait aucun plaisir à enseigner. ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, page 457. — Emploi pronominal réfléchi : Ø 23. Parmi les moniteurs des chantiers de jeunesse, qui comptaient nombre d'anciens militaires, beaucoup s'entraînaient et entraînaient les autres en vue de prendre les armes. CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, page 229. Ø 24.... toute la journée je m'entraînais à réfléchir, à comprendre, à critiquer, je m'interrogeais; je cherchais avec précision la vérité... SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, page 178. Remarque : On rencontre dans la documentation le participe passé adjectivé entraîné. Qui est méthodiquement exercé, qui est bien préparé. Le plus grand empire, une armée nombreuse et entraînée, des généraux instruits par l'expérience de tant de campagnes reculaient devant quelques milliers d'hommes incultes, commandés par des chefs de hasard (Jean Tharaud, Jérôme Tharaud, Dingley, 1906, page 14). Philippe, moins entraîné qu'elle, avait de la souplesse, de l'aisance (André Maurois, Climats, 1928, page 204). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 6 881. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 11 112, b) 8 056; XXe. siècle : a) 7 611, b) 10 886. DÉRIVÉS : Entraînable, adjectif. Qui peut être entraîné facilement, influençable. L'homme est faible et bête, entraînable pour un rien, et lâche toutes les fois que ses sens sont excités ou domptés (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Les Soeurs Rondoli, 1884, page 1274 ). Remarque : S'emploie le plus souvent au figuré