Dictionnaire en ligne: ÉMOI, substantif masculin. A.— Domaine physique. 1. Trouble, agitation vive. L'émoi des abeilles, des feuilles, de la fourmilière; fauvettes, passereaux en émoi. Quel contraste entre ce lieu mort [le Carmel] et ce chemin de fer, toujours en émoi, qui le longe (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, La Cathédrale, 1898, page 356 ). Un émoi très spécial que les apiculteurs appellent le soleil d'artifice (MAURICE MAETERLINCK, La Vie des abeilles, 1901, page 168 ). 2. Par extension. Alarme, effervescence due au saisissement de la surprise, de la peur. Émoi général; la ville est en émoi. Chatillon avait pris la fuite. L'émoi, la surprise étaient partout (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, L'Île des pingouins, 1908, page 240 ). C'est une grande nerveuse, toujours tendue, toujours en émoi, une de ces femmes qui passent leur vie à épier la catastrophe (GEORGES SIMENON, Les Vacances de Maigret, 1948, page 90) : Ø 1. Comme il [Salvat] l'avait pensé, dès l'aube, la battue venait d'être organisée, on le traquait. Son coeur battit à grands coups, il eut l'émoi du gibier que cernent les chasseurs. ÉMILE ZOLA, Paris, tome 2, 1897, page 4. B.— Domaine affectif. Émotion, trouble émotif vécu affectivement. 1. Sur le mode de l'inquiétude, de la tristesse ou de la douleur. L'émoi du départ. Aujourd'hui, rien de l'émoi douloureux, de la tristesse de ces deux derniers jours (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1870, page 624 ). Un meurtre est commis sous ses fenêtres. Sa femme a pensé en mourir d'émoi et lui paraît très affecté de l'état où elle a été (PAUL VALÉRY, Correspondance [avec André Gide] , 1900, page 376) : Ø 2. Il attendait ce moment, sans émoi et sans trouble, avec une confiance tranquille, comme on attend un bonheur dont on est sûr. ÉMILE MOSELLY, Terres lorraines, 1907, page 213. 2. Sur le mode agréable de la sensualité, du sentiment ou de l'esthétique. Émoi charnel, divin, ineffable; un émoi délicieux; l'émoi du coeur; l'émoi du printemps, des rendez-vous; ravir quelqu'un d'émoi. La marquise entre. Émoi (PAUL DUVAL, DIT JEAN LORRAIN, Modernités, 1885, page 82 ). La vue de ces mains lui donnait un émoi délicieux, la tête lui tournait presque (JACQUES DE LACRETELLE, Les Hauts ponts, tome 3, 1935, page 21) : Ø 3. Il se sentait dans une atmosphère de contes de fées; et dans son coeur montait un émoi mystérieux. Le rêve de l'humanité l'enveloppait, — les fleurs étranges de l'âme... ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, La Foire sur la place, 1908, page 803. Ø 4.... chez Fouquet, chez Chardin, chez Corot, on retrouve cette joie à avouer un émoi charmant, un émoi d'enfant toujours émerveillé de sa découverte du monde... ÉLIE FAURE, L'Esprit des formes, 1927, page 133. SYNTAXE : Être pâle, rose, rouge d'émoi; mettre en émoi; semer l'émoi chez quelqu'un; palpiter, trembler, tressaillir d'émoi; revenir de son émoi; surmonter son émoi; ne manifester, ne ressentir aucun émoi; en émoi, en grand émoi, avec émoi. Remarque : Émoi, cité comme vieux par le Dictionnaire de l'Académie Française 1798, a été remis en usage par les romantiques et les symbolistes. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 507. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 214, b) 476; XXe. siècle : a) 1 265, b) 957.
