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Dictionnaire en ligne: DUR, DURE, adjectif, adverbe et substantif.

Publié le 22/01/2016

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Dictionnaire en ligne: DUR, DURE, adjectif, adverbe et substantif. I.— Emploi adjectival. A.— [En parlant de choses] 1. [En parlant d'objet concret, de matières concrètes, de corps solides] a) [Par qualité naturelle] Qui, par sa consistance solide, compacte, oppose une forte résistance au toucher, à la pression, au choc, à l'usure; qui ne peut pas être facilement pénétré, entamé. Pierre, roche dure, métaux durs; dur comme (de) la pierre, un roc, le fer. Synonymes : solide, résistant; antonymes : mou, tendre. [On eût dit] des scies s'agaçant les dents sur une pierre dure (THÉOPHILE GAUTIER, Tra los montes, 1843, page 19 ). En pénétrant dans son lit, son genou heurta quelque chose de dur : un paquet, une surprise (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Le Pénitencier, 1922, page 775) : Ø 1. Et les rochers crevaient le sable par endroits, flanquant les mines de sel de leurs assises d'ébène dur comme du diamant noir et dont les vents en vain mordaient les crêtes. ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Citadelle, 1944, page 577. Remarque : On rencontre dans la documentation l'adjectif demi-dur (dans un emploi technique). Pierre dure ou demi-dure (Arts et littérature, 1935, page 2005). — Spécialement. · Fruit dur. Fruit à coque dure ou à chair ferme. Si les fruits durs annoncent leur maturité par le bruit de leur chute, ceux qui sont mous la manifestent par leurs parfums (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, page 96 ). Les noyers exotiques, qui me donnent en automne des noix très dures, à chair compacte bien défendue par un brou amer (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Paysages et portraits, 1954, page 115) : Ø 2. Dures grenades entr'ouvertes Cédant à l'excès de vos grains, Je crois voir des fronts souverains Éclatés de leurs découvertes! PAUL VALÉRY, Charmes, 1922, page 146. · Bois dur, blé dur. Variété de bois, de blé. Antonyme : tendre. Bois dur : chêne, hêtre, châtaignier, noyer, frêne; bois tendre : bouleau, aulne, peuplier; résineux enfin, qui sert aujourd'hui à tant d'usages (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1928, page 34 ). Il y avait de l'argent à faire en manufacturant les blés durs de Limagne (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, 1931, page 68 ). SYNTAXE : Acier, bec, caillou, chêne, noyau, sol dur; couche, écorce, neige, terre dure; dur comme l'acier, comme un caillou, comme de la craie, comme un croûton, comme du diamant, comme du granit, comme le marbre, comme du plomb, comme des semelles de bottes; dur et compact, dur et sec, dur et froid, dur et cassant. b) [Par défaut] — [de maturité] Fruit dur. Fruit trop ferme, qui n'est pas assez mûr. Antonymes : mûr, tendre, blet : Ø 3. On est peu à peu arrivé à ce temps où l'hiver s'amollit comme un fruit malade. Jusqu'à présent, il était dur et vert et bien acide, et puis, d'un coup, le voilà tendre. JEAN GIONO, Regain, 1930, page 54. — [de tendreté ou de cuisson] · Légumes durs. Légumes qui restent durs après la cuisson. Les carottes ne cuisent pas aussi vite que les pommes de terre. Elles sont encore dures quand on sert le fricot sur la table (JULES RENARD, Journal, 1909, page 1231 ). · Viande dure. Viande difficile à découper et à mâcher. Synonyme : coriace. J'aime mieux la viande dure : au moins on la sent passer. Mais le filet, par exemple, c'est comme si on ne mangeait rien (GEORGES DUHAMEL, Le Désert de Bièvres, 1937, page 133) : Ø 4. Il n'y avait là (...) pour tout dîner qu'un gigot fort dur, dont un étudiant (...) essaya de me détourner en me disant qu'un Anglais affamé, arrivé une heure avant moi, n'avait pu l'entamer et s'y était rebuté. VICTOR HUGO, Le Rhin, 1842, page 175. c) [Par opposition aux parties molles, en parlant de parties du corps] · Os durs; parties dures (du squelette : os, dents, cartilages). Antonyme : mou. Une maigreur nouvelle sculptait son visage, le réduisait aux parties dures et aux grands yeux (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 492 ). · Mains dures. Synonyme : calleuses. Mains dures et calleuses de paysans (ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, page 99 ). · Muscles durs, seins durs. Synonyme : ferme. Son mollet dur, serré dans des grèves blanches, saillissait nerveusement (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves, 1848, page 279 ). Les bras durs des sportives (HENRI DE MONTHERLANT, La Petite Infante de Castille, 1929, page 606 ). Elle a de beaux seins durs sous sa blouse de satin (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée, 1938, page 68 ). — PATHOLOGIE. Pouls dur. Pouls sans élasticité. Ils ont le pouls petit, tardif, dur : ils sont sujets à des maladies opiniâtres (PIERRE CABANIS. Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 1, 1808, page 43 ). Tumeur dure. L'abcès froid se présente sous l'aspect sous la peau d'une tumeur dure (ERNEST GARCIN, Guide vétérinaire, 1944, page 24 ). d) [Par transformation] — [Après cuisson] Qui a durci, qui a pris une consistance dure, ferme, épaisse par la cuisson. Caramel, nougat dur. Antonyme : mou. · Œuf dur. Œuf cuit dans sa coquille à l'eau bouillante jusqu'à ce que le blanc et le jaune aient pris une consistance solide, se soient coagulés. Antonymes : mollet, à la coque. Ils mangeront des oeufs durs avec la sauce verte, c'est excellent (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Souvenirs d'une petite fille, 1927, page 205 ). Purée d'épinards avec oeufs durs (ANDRÉ GIDE, Journal, 1944, page 257) : Ø 5.... tout en nous toisant avec leur face-à-main, ma grand'mère et moi, parce que nous mangions des oeufs durs dans la salade, ce qui était réputé commun et ne se faisait pas dans la bonne société d'Alençon. MARCEL PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, page 676. · Spécialement (Aliment) qui est devenu épais, ferme, qui a pris. Crème, gelée dure. — [Par dessication] Qui a durci en séchant Fromage dur. Antonymes : mou, frais (confer Faral, Vie temps Saint Louis, 1942, page 170). Pain dur. Pain très rassis. Antonymes : frais, tendre. Elle ne trouva (...) qu'un morceau de gros pain noir et si dur, qu'elle fut obligée de le faire ramollir dans de l'eau chaude (CHARLES, COMTE DE MONTALEMBERT, Histoire de Sainte Elisabeth de Hongrie, duchesse de Thuringe (1207-1231), 1836, page 49) : Ø 6.... [je] laisse rassir mon pain plusieurs jours, jusqu'à ce qu'il soit très dur, si dur qu'il m'arrive de le briser plutôt que le couper — le hachoir est très bon pour ça. Il est ainsi beaucoup plus facile à digérer. GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, page 1106. e) [Qui n'est pas souple, qui n'est pas flexible] — [Par nature] Carton dur, brosse, pinceau, poils dur(s). Synonyme : rigide; antonyme : souple. Une forte botte dont le cuir dur ne ployait pas (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves, 1848, page 330 ). Fort et dur cartonnage (JULES MICHELET, L'Insecte, 1857, page 296 ). Avec les corsets durs, à longs buscs, les mouvements manquaient plutôt de souplesse et de rapidité (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Souvenirs d'une petite fille, 1928, page 271 ). · Col dur. Synonyme : empesé; antonyme : souple. Le maigre Migeon, essoufflé, suant, passant le doigt dans son col dur (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 156 ). À six ans, tu portais un col dur, ça devait racler ton cou de poulet (JEAN-PAUL SARTRE, Les Mains sales, 1948, 3e. tableau, 1, page 69 ). · Crayon dur. Crayon à la mine dure. Antonyme : gras. Je dessinais avec du crayon noir et dur une tête en demi-relief (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Vie de Henry Brulard, tome 2, 1836, page 257 ). — [Par défaut] Qui manque de souplesse, de flexibilité. Cuir dur. Synonyme : rigide; antonyme : souple. Elle le frotta brutalement avec les durs plis d'un mouchoir. Elle raclait la peau (PAUL ADAM, L'Enfant d'Austerlitz, 1902, page 3 ). Ses souliers lui faisaient mal, trop étroits et trop durs (GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion, 1945, page 167 ). · En particulier. Qui est rude au toucher par sa raideur. Draps durs, barbe dure. Synonymes : rêche, rugueux; antonyme : doux. Il a la peau douce, il n'a pas la barbe dure comme mon oncle, dont les baisers m'écorchent (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel, 1842, page 137 ). Cette bonne vieille étoffe à ramages, si dure qu'elle entrait dans la peau comme un paquet d'aiguilles quand on y appuyait le visage (MAXIME DU CAMP, En Hollande, 1859, page 225 ). Un menton à verrue où s'implantaient quelques poils revêches et durs comme des crins de vergette (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 21 ). [En parlant d'un mouvement] Qui manque de souplesse, d'élasticité. Pas dur. Synonymes : raide, rigide; antonymes : souple, élastique. Ses bras commençaient à se raidir, ses jambes avaient perdu leur flexibilité, ses mouvements devenaient durs et saccadés (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Christo, tome 1, 1848, page 260 ). f) Qui manque de douceur, de moelleux, de confort. Lit dur, siège dur. Antonymes : confortable, doux, moelleux. Mon canapé est trop dur pour y dormir, ce sont des cailloux cardés (HENRI MURGER, Scènes de la vie de bohème, 1851, page 82 ). Il ne sentait plus sous ses doigts, au lieu du plancher rêche et dur, qu'une espèce de mollesse cotonneuse (MAURICE GENEVOIX, Raboliot, 1925, page 46 ). Matelas dur comme la terre elle-même (ELSA TRIOLET, Le Premier accroc coûte deux cents francs, 1945, page 201) : Ø 7. Elle avait attendu, longtemps, assise dans le petit square, sur ce banc dur qui lui brisait les reins, à l'endroit même où Jacques lui avait dit : « Aucun être n'a jamais été aimé comme vous l'êtes par moi! » ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 649. — Dur à quelqu'un (ou à une partie du corps) = dur pour. L'étreinte de la corde trop serrée, trop dure à sa frêle poitrine (JOSEPH PEYRÉ, Matterhorn, 1939, page 229 ). — Par analogie. Eau dure. Eau à forte teneur en sels calcaires, rude à la peau, ne moussant pas avec le savon, et impropre à la cuisson des légumes. Antonyme : eau douce. Les plus mauvaises sont les eaux salines et dures, qui cuisent difficilement les légumes et les viandes (PIERRE CABANIS. Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 2, 1808, page 204 ). L'eau est joliment dure à Paris, dit-elle (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir, 1877, page 388 ). — Spécialement. MARINE. Mer dure. Mer agitée, aux vagues courtes. La mer était très-dure dans ce détroit, plein de remous formés par les contre-courants (JULES VERNE, Le Tour du monde en quatre-vingts jours, 1873, page 117 ). Vague dure. Nous avions un gros temps, la vague était dure (CHARLES-JULIEN LIOULT DE CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1832, page 145 ). 2. Par extension. Difficile à manoeuvrer, qui fonctionne mal, qui résiste à une manipulation. Arme dure; voiture dure; porte dure. La roue au dur moyen (VICTOR HUGO, Les Contemplations, tome 2, 1856, page 166 ). — Attendez! le verrou est dur. Rose y meurtrit la paume grasse de ses mains (JEAN GIONO, Le Grand troupeau, 1931, page 25 ). Augustin (...) tourna à deux reprises une clef dure (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 310) : Ø 8.... et, pendant le reste du temps, elles restaient debout à tourner une manivelle : une manivelle si dure que, pour la mettre en mouvement, elles devaient s'arcbouter du pied contre le mur. ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 370. 3. [En parlant de personnes ou de choses] Qui nécessite un gros effort physique, intellectuel ou moral. a) [Le substantif qualifié est concret] Route dure, côte dure, escalier dur. Synonymes : rude, pénible; antonymes : aisé, facile. Le chemin est dur. Vous allez avoir à franchir des ruisseaux, des haies (JEAN GIRAUDOUX, Judith, 1931, I, 8, page 97 ). Ces quatre étages sont un peu durs pour mes vieux os (SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, page 243) : Ø 9. La pente est très dure. Les chevaux sont obligés de se mettre au pas; et ils tirent par saccades, de toute l'encolure, en faisant des étincelles sur le pavé. LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Le 6 octobre, 1932, page 174. — Dur à quelqu'un. Ma route (...) est (...) si dure aux piétons, chevaux et carrosses (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 82 ). · Par métaphore. Les durs sentiers de l'ascèse (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 690 ). b) [Le substantif qualifié est abstrait] Vie dure; trajet dur; travail dur; dur métier, labeur. — [En fonction d'épithète] Un personnage lutte au prix de durs efforts (PAUL CLAUDEL, Le Soulier de satin, 1944, 1re. partie, 1re. journée, 2, page 981) : Ø 10. Le fils du seigneur féodal était soumis à un dur entraînement physique et moral. Un des héros de la Bretagne, Bertrand du Guesclin, s'obligea lui-même à braver chaque jour les intempéries et à combattre rudement avec les enfants de son âge. ALEXIS CARREL, L'Homme cet inconnu, 1935, page 277. — [En fonction d'attribut] Sa disgrâce physique a rendu la tâche infiniment plus dure à ses défenseurs (MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 3, 1902-04, page 156 ). La lecture d'affilée de l'énorme monument [les Mémoires d'Outre-Tombe] est dure (ALBERT THIBAUDET, Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours, 1936, page 37 ). · Locutions diverses. Le pas le plus dur est franchi; les commencements sont toujours durs; les débuts furent très durs; le dur travail des champs, de la mine. c) Dur à + infinitif. Difficile à (faire ou supporter). Instrument dur à manier; aliment dur à digérer. — [En parlant de pers] Demain, j'aurai une journée fatigante; les enfants sont durs à tenir le lundi (LÉON FRAPIÉ, La Maternelle, 1904, page 68) : Ø 11. « Est-ce que vous n'avez pas une nombreuse famille? — Que oui, m'sieu le curé... Que c'est dur à élever! » Rabot opinait de la tête, comme pour dire : « Oh! oui, c'est dur à élever. » GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Bête à Maît'Belhomme, 1885, page 198. — [En parlant de choses] · [Choses concrètes] : Ø 12. J'ai le respect du pain. Un jour que je jetais une croûte, mon père est allé la ramasser... « Mon enfant, m'a-t-il dit, il ne faut pas jeter le pain; c'est dur à gagner... » JULES VALLÈS, Jacques Vingtras, L'Enfant, 1879, page 36. · [Choses abstraites] J'eus un accessit ou un second prix aux mathématiques, et celui-là fut dur à enlever (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Vie de Henry Brulard, tome 2, 1836, page 349 ). Pressentant qu'il ne pourrait léguer à son fils toute cette coûteuse expérience de la vie, toute cette sagesse qui est si dure à acquérir (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, page 444) : Ø 13.... si tu me permets de te guider pour t'aider à gravir la plus haute montagne, j'ai des trésors pour toi si durs à conquérir que beaucoup y renonceront dans leur ascension,... ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, La Citadelle, 1944, page 736. · [Personne, par métonymie] J'arrive à mieux comprendre à présent Virgile; presque aisé à relire mais parfois fort dur à déchiffrer (ANDRÉ GIDE, Journal, 1944, page 278 ). — [Au sens de " pénible, rude à supporter "] Un dur moment à passer, des jours durs à traverser. Si le scalpel des chirurgiens est dur à sentir, il rend parfois la vie aux mourants (HONORÉ DE BALZAC, La Duchesse de Langeais, 1834, page 226 ). C'est dur à penser, mais il faut avoir pourtant le courage de le reconnaître (JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière, 1848, page 246) : Ø 14. Après la noyade d'Éphrem, Mathilde était morte. La grand-mère avait suivi de près. Trois deuils en trois ans, un dur lot à supporter pour une famille. Un malheur n'arrive jamais seul. GERMAINE GUÈVREMONT, Le Survenant, 1945, page 158. · Locution figurée. Être dur à cuire (confer dur à cuire). C'est dur à digérer, à avaler. C'est difficile à croire, à admettre. C'était un peu dur à avaler, n'est-ce pas, pour un homme de gauche, toute cette politique militaire de Poincaré (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 199 ). Je ne voudrais pas vous vexer, mais moi, votre histoire, je la trouve dure à avaler (MARCEL AYMÉ, Clérambard, 1950, page 183 ). d) Dur à + substantif déterminé. — Locution familière. Dur à la détente*. Dur à la vente (vieux, rare). Difficile à vendre, à écouler. Cette marchandise est dure à la vente (DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET. 1965). Ces messieurs feront faillite avant trois mois; mais je connais chez eux deux bons ouvrages dont la vente est dure (HONORÉ DE BALZAC, Les Illusions perdues, 1843, page 481 ). e) En emploi absolu, familier. Difficile (par ellipse à comprendre, à réaliser). Problème dur. Problème difficile à résoudre. Synonymes : ardu, compliqué; antonyme : facile. Exposé dur. Exposé difficile à suivre. Synonyme : ardu. — Locution verbale impersonnelle. C'est dur de, il est dur de + infinitif C'est difficile de. C'est dur de se remettre au dessin, à mon âge (ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY,Le Petit Prince, 1943, page 423 ). — Locution familière. C'est dur; ce n'est pas dur; c'est plus dur que je ne pensais; c'est trop dur pour moi : Ø 15. — Nous nous entraînons pour le record des mille kilomètres en vingt-quatre heures. Et Bénin ajouta, avec une pointe d'accent brésilien : — C'est plus dur qu'on ne pense. LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Copains, 1913, page 140. 4. Qui est pénible, désagréable, rude aux organes des sens. a) [En parlant du chaud, du froid, de la sensation tactile] · Climat, hiver dur Synonymes : rude, rigoureux; antonyme : doux. Le premier hiver de la guerre fut particulièrement dur. Je ne crois pas que l'on ait jamais autant souffert dans sa chair (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1925, page 238 ). L'été trop dur sèche les moissons (ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Citadelle, 1944, page 678) : Ø 16. — Armand... Armand, courage! dit le capitaine, nous ne serons pas toujours en Russie... Nous regagnerons des climats moins durs... Nous reverrons le soleil... PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 1, 1859, page 12. · Pluie dure. Pluie violente, drue, serrée. On entendit une pluie dure qui frappait du tambour dans les arbres fleuris (JEAN GIONO, Que ma joie demeure, 1935, page 149 ). · Soleil dur. Soleil intense, fort. Le soleil tombe, un dur rayon de soleil blanc Tape sur la maison en aveuglant les vitres (ANNA DE NOAILLES, L'Ombre des jours, 1902, page 164 ). Le soleil est doux à partir de février, dur en été (PIERRE-JEAN JOUVE, Paulina, 1925, page 253 ). · Vent dur. Vent âpre et violent. Un vent de nord-est dur et froid soufflait sans relâche (MAXIME DU CAMP, Le Nil, Egypte et Nubie, 1854, page 61 ). Le grand vent dur et incessant qui oblige les oliviers des dunes à pousser tout courbés (VALÉRY LARBAUD, A. O. Barnabooth, 1913, page 138) : Ø 17.... le grand vent de mer, le vent du large, le vent dur et salé, qui ronge et brûle comme le feu, dessèche et détruit comme les gelées d'hiver. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Toine, 1885, page 176. — Par extension, néologisme. Qui affecte violemment tout l'organisme. Drogue* dure, stupéfiant dur. b) [En parlant du goût] Vin, cidre dur. Vin, cidre âpre, acide, aigre. Les vins riches, tendres, rassemblent facilement leur lie; celle des vins durs adhère aux flancs de la bouteille (PIERRE HAMP, Marée fraîche, 1908, page 157 ). Un vin dur et plat, plus sombre que le jus des mûres, qui laissait aux verres des anneaux violets (ALEXANDRE ARNOUX, Les Gentilshommes de ceinture 1928, page 58) : Ø 18. Après m'avoir offert dans un cabaret du faubourg deux moques d'un cidre très dur, qui me fit mal à la tête, il m'emmena dans sa carriole au village de Saint-Pierre dont il était maire,... ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie en fleur, 1922, page 406. — Qui est dur sous la dent. · Qui est croquant, craquant, croustillant Je mangeais de fort bon appétit quelque gâteau compact et dur comme de la pierre (JULES MICHELET, Mémorial, 1820-22, page 217 ). · Qui résiste sous la dent, qui est difficile à croquer ou trop dur pour être croqué. Le notaire... but sa tasse, après avoir émietté dedans une petite galette trop dure pour être croquée (GUY DE MAUPASSANT, Pierre et Jean, 1888, page 305) : Ø 19.... il trouvait infailliblement la fève dans sa part de pâtisserie, et il proclamait reine Mme. Chantal. Aussi fus-je stupéfait en sentant dans une bouchée de brioche quelque chose de très dur qui faillit me casser une dent. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Mademoiselle Perle, 1886, page 629. c) [En parlant de l'ouïe] Qui blesse l'oreille, qui est aigu, ou rauque, désagréable. Durs accords; patois dur; dur grincement; bruit sec et dur. Synonymes : aigu, rauque. Le grasseyement, le grand nombre de k, et les consonnes doubles, rendent cette langue très-dure (Voyage de la Pérouse autour du monde (MILET DE MUREAU) tome 2, 1797, page 211 ). Aux durs accords des cors les cerfs s'en sont allés (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Les Cantilènes, 1886, page 100 ). Parfois une cuiller tombait (...) avec un bruit sonnant et dur (GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion, 1945, page 17) : Ø 20. La langue n'était plus le babil mellifluent ou, si vous voulez, le margouillis des Andalous, mais une langue dure, aigre, sifflante, qui me mettait dans une espèce de fureur physique : imaginez de l'allemand parlé avec l'accent américain. HENRI DE MONTHERLANT, La Petite Infante de Castille, 1929, page 595. · Dans le domaine littéraire ou artistique. Qui manque d'harmonie, de grâce. Style dur; vers durs. Je viens de lire Carmen de Mérimée; c'est bien, mais sec, dur, sans développement; c'est une Manon Lescaut plus poivrée et à l'espagnole (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Mes Poisons, 1869, page 98) : Ø 21. Elle [la phrase de Lemaître] a même, à certains moments, plus de mouillure, moins de sécheresse, un grain moins dur, moins cassant que la phrase de Voltaire... LÉON DAUDET, Études et milieux littéraires, 1927, page 89. · PHONÉTIQUE. Phonèmes durs, consonnes dures. Phonèmes, consonnes prononcés avec les muscles de la bouche contractés, tendus. Antonymes : doux, mou; mouillé, relâché (confer Lexique de la terminologie religieuse (JULES MAROUZEAU) 1933, pages 71-72). Fais quand même un effort pour ne pas prononcer les c durs comme des t. Tu dis : tarattère. C'est navrant (GEORGES DUHAMEL, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, page 14 ). · MUSIQUE. " Épithète appliquée, dans la langue allemande, au mode majeur " (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes). La sonate en C dur de Beethoven (op. 53) (ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, page 465 ). d) [En parlant de la vue] Qui blesse l'oeil ou éblouit, qui produit une sensation, une impression désagréable de froideur ou de rudesse. Couleur, lumière dure; éclat dur. Antonyme : doux. La mer découpe sa ligne d'un bleu plus dur sur le bleu joli et tendre du ciel (PAUL BOURGET, Profils perdus, 1884, page 280 ). La lumière dure du projecteur (ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, page 213) : Ø 22. C'était à l'aube du lendemain. Augustin fut pénétré par une couleur d'un blanc dur, une insistance de la lumière, blessant de moins solides parties de son rêve nocturne. JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 201. — En particulier, rare. [En parlant de l'éclairage, dans la technique photographique] Antonyme : flou. Selon qu'il est éclairé en « flou » ou en « dur » un visage change d'âme (ANDRÉ MALRAUX, Les Voix du silence, 1951, page 300 ). — Par extension. · [En parlant du visage] Qui manque de grâce, de douceur. Traits durs; profil, visage dur. Synonymes : accusé, ingrat. Lorsqu'il se tient ainsi, presque dans l'ombre, je ne distingue de son visage que des lignes dures : la barre presque droite des sourcils, l'arrête mince et éclairée du nez (ANDRÉ MALRAUX, Les Conquérants, 1928, page 141 ). · [Dans le domaine des arts plastiques, en dessin, en peinture] Qui manque de grâce, de légèreté dans le tracé, les contours ou les proportions. Paysage dur; dessin sec et dur. [En Flandre] Le dessin devient sec et dur, et rappelle à la fois les orfèvres contemporains de Pollaiolo et les disciples exagérés de Michel-Ange (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Philosophie de l'Art, tome 2, 1865, page 35 ). Il y a là surtout une nature morte [de Derain] : deux vases et un chandelier, c'est dur, métallique (MARCEL ARLAND, L'Ordre, 1929, page 165) : Ø 23.... je feuilletais, (...) une bible en images (...) dont les estampes, d'un style pompeux et dur, excitaient parfois ma surprise, mais ne me charmaient pas, car elles manquaient de cette douceur sans laquelle rien ne m'a jamais souri. ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Petit Pierre, 1918, page 237. — Par métonymie. Crayon, pinceau dur. Tracé appuyé, marqué, fortement accusé. Comme son dur pinceau [de Zurbaran] les laboure et les creuse [ses moines] ! (THÉOPHILE GAUTIER, Poésies, 1872, page 287 ). Et il marquait fort dans le milieu avec un coup de pinceau dur pour faire sentir l'éclat du soleil (CHARLES-FERDINAND RAMUZ, Aimé Pache, peintre vaudois. 1911, page 118 ). 5. Qui affecte péniblement, douloureusement une personne, qui est éprouvant, pénible à supporter. Dur traitement; dure existence. Antonyme : doux. a) En particulier. — Qui impose une contrainte. Dure punition; loi dure; être à dure école. Synonymes : sévère, rude, rigoureux. La condition des serfs était moins dure que celle des esclaves (GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, tome 1, 1817, page 7 ). Il répugne à se tenir à ce concept dur et tranché du déterminisme scientifique (HENRI MASSIS, Jugements, 1923, page 56 ). · Locution latine. Dura lex, sed lex. La loi est dure, mais c'est la loi (pour exprimer la nécessité de se soumettre à une règle pénible). Confer Victor Hugo, Le Rhin, 1842, page 287. — Qui fait souffrir, physiquement et/ou moralement. Dure épreuve, réalité; dur sacrifice. Une vie usée au dur labeur de l'enfantement (ÉMILE ZOLA, L'Œuvre, 1886, page 323 ). Le heurt avec la dure vérité des choses (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 188 ). Son coeur pétri de durs souvenirs se gonflait de chagrin : Éphrem s'est noyé, un midi de juillet; il n'avait pas seize ans (GERMAINE GUÈVREMONT, Le Survenant, 1945, page 102) : Ø 24.... Karl-Philipp eut une enfance très dure; l'indigence et la profonde mésentente de ses parents, l'ascétisme poussé à l'absurde de son père, l'humilité craintive de sa mère eurent tôt fait de créer chez l'enfant ce désir de fuite, cette inadaptation à la vie dont les traces se retrouvent à toutes les lignes de ses écrits. ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, page 22. SYNTAXE : Dure extrémité, nécessité, obligation, séparation; veuvage dur. b) Locutions verbales. — C'est dur! J'ai passé quinze ans ici, dans cette cave, sans feu l'hiver. C'est dur, cela (VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris, 1832, page 554 ). L'empereur me fit jurer de ne plus tirer à cinq. J'ai tenu ma promesse. Mais il y a des moments où c'est dur, dur (PIERRE BENOÎT, L'Atlantide, 1919, page 135) : Ø 25. Que le monde se trompât, soit! Mais que son vieil ami, qui connaissait toutes ses pensées (sauf celles qu'il lui cachait), pût se faire de la réalité une vue si fausse, et porter un jugement si injuste, cela, c'était dur. HENRI DE MONTHERLANT, Les Célibataires, 1934, page 913. — Il est dur (à quelqu'un) de + infinitif; c'est dur de + infinitif. Avoir de la peine à; faire de pénibles efforts pour. — Ah! ma chère femme, quand on est restée vingt-cinq ans avec un homme, il est bien dur de se quitter! Et ses yeux se mouillèrent de larmes (HONORÉ DE BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, page 75 ). Il est dur de quitter la maison de vos parents (PAUL CLAUDEL, L'Annonce faite à Marie, 1912, II, 5, page 61 ). Sur le moment, j'ai eu du mal à accepter. C'est dur (...) d'être condamné pour ce qu'on n'a pas fait (ANDRÉ GIDE, Feuillets d'automne, 1949, page 1097) : Ø 26. Au dernier évangile, j'ai bien remarqué qu'elle avait pleuré. Il est dur d'être seul, plus dur encore de partager sa solitude avec des indifférents ou des ingrats. GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, page 1057. — Les temps sont durs! La vie est difficile, pénible à vivre, les circonstances sont malheureuses. Les temps étaient durs, pourtant C'était au plus fort de la Révolution, quatre ans après l'année de la Grande Peur (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, 1922, page 50 ). · En particulier. [En parlant des difficultés économiques, financières, de la cherté de la vie] Les temps étaient durs en effet, et ce n'était pas le moment d'envoyer promener le beau-frère, et de cracher sur l'argent de Mme. Bergen (JOSEPH PEYRÉ, Matterhorn, 1939, page 78) : Ø 27. La poésie est le type de la mauvaise affaire. Le Président du Conseil me répondit que les temps étaient très durs, que le problème essentiel de l'heure était de vivre au jour le jour, de soutenir sa famille, et... de « faire marcher la baraque ». PAUL VALÉRY, Entretien avec Frédéric Lefèvre, 1926, page 96. — Faire, mener, rendre la vie dure à quelqu'un. Rendre quelqu'un malheureux, le malmener, le tourmenter physiquement et/ou moralement. Synonyme : en faire voir à quelqu'un. Des mécontentements et des répulsions mutuelles qui lui rendaient la journée triste et qui me rendaient la vie dure (ALPHONSE DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, page 65 ). Les autres enfants de la maison lui firent la vie si dure qu'il résolut de s'en aller (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, L'An prochain à Jérusalem, 1924, page 188 ). · Par métaphore. Les nouveaux venus, [les navires] qui menaient la vie dure aux premiers vapeurs (PIERRE ROUSSEAU, Histoire des techniques et des inventions, 1967, page 246 ). — Coup dur (familier). Confer aussi coup A 2 au figuré. · Incident imprévu qui cause de graves ennuis, une situation pénible. Il a eu des coups durs (...) mais il a toujours pris le dessus (SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, page 292 ). · Action violente. Toute la journée il ne parla que de Gilbert, de sa largesse, de son intelligence, des coups durs traversés ensemble, et de la bonne vie qu'ils coulaient quand le régiment était au repos (ROLAND LECALELÉ, DIT ROLAND DORGELÈS, Les Croix de bois, 1919, page 306 ). Son mari, un vrai costaud, auquel on faisait appel de temps à autre, pour les coups durs (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, page 532 ). · Choc psychologique. Boris vit avec satisfaction que la petite tapette s'amenait vers eux en dansant Mais quand il put le regarder de tout près, ce fut un coup dur : le mec avait bien quarante ans (JEAN-PAUL SARTRE, L'Âge de raison, 1945, page 37 ). — Un dur combat. Un combat violent, acharné, farouche. Je vis arriver le général Hache, épuisé de fatigue, à la suite des durs combats de la 40e. division (MARÉCHAL JOSEPH JOFFRE, Mémoires, tome 1, 1931, page 333 ). B.— [En parlant de pers] 1. Qui a une solide résistance physique et morale, qui supporte fermement la fatigue, la maladie, la douleur. Synonymes : endurant, énergique, résistant, stoïque. a) Dur à + substantif déterminé. — Dur au travail, à la peine, à la fatigue. Des soldats admirables et aussi bons à mener au feu que durs à la fatigue et aux privations (JOSEPH ARTHUR COMTE DE GOBINEAU, Correspondance [avec Alexis de Tocqueville] , 1856, page 254 ). Des femmes dures à la tâche, ménagères en diable, et qui savaient mener leur monde (GEORGES BERNANOS, Dialogues des carmélites, 1948, 3e. tableau, 3, page 1616 ). — Dur au mal, à la souffrance. Antonyme : douillet. Elle, si dure aux plus rudes souffrances, gémissait de ce qu'elle avait dû renifler, assurant que cela lui « plumait le nez » (MARCEL PROUST, Le Côté de Guermantes 1, 1920, page 66 ). Il est dur au mal, insoucieux du confortable (HENRI DE MONTHERLANT, Le Songe, 1922, page 40) : Ø 28. Christophe était dur au mal. Il tenait de son père et de son grand-père leur robuste constitution. On n'était pas douillet dans la famille : malade ou non, on ne se plaignait jamais,... ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, L'Aube, 1904, page 47. Remarque : On rencontre dans la documentation la construction rare (familier) dur sur + substantif. Dur sur la besogne, son garçon, oui; il se mettait au travail comme à la valse (MARCEL AYMÉ, Jument, 1933, page 206). b) Dur à + infinitif. Dur à mourir. Familier et figuré. dur à cuire (confer ce mot). Il est borgne et boite un peu d'une jambe, par suite d'une blessure à la cuisse; un coup de feu, dit-on; lui l'explique autrement; mais, comme un vieux sanglier dur à mourir, il n'en est pas moins alerte (EUGÈNE FROMENTIN, Un Été dans le Sahara, 1857, page 165 ). Une femme ne peut guère mourir de chagrin. C'est une bête si solide, si dure à tuer (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Vagabonde, 1910, page 38 ). — Par extension, locution familier. · Avoir la vie dure. Ne pas mourir vite, résister à ce qui provoque la mort. Les chats ont la vie dure. Déjà la taupe s'est brisé les pattes, fendu la tête, cassé le dos, et elle semble n'avoir pas la vie dure. Puis, stupéfait, Poil de Carotte s'aperçoit qu'elle s'arrête de mourir (JULES RENARD, Poil de carotte, 1894, page 45) : Ø 29. Il est impossible de considérer une année écoulée avec ses alternatives d'espérance et d'angoisse, (...) sans admirer combien la vie est puissante en nous. En vérité, nous avons la vie dure, comme on dit, aussi dure que celle d'un chat sauvage. FRANÇOIS MAURIAC, Le Bâillon dénoué, 1945, page 466. Par métaphore. On fit apporter de nouvelles bouteilles, pour tuer le temps qui a la vie si dure, et accélérer la vie qui coule si lentement (CHARLES BAUDELAIRE, Petits Poèmes en prose, 1867, page 196 ). Nous allons boire quelques bons coups à la santé de notre République. Elle se porte bien, elle aura la vie dure (ÉMILE ERCKMANN ET ALEXANDRE CHATRIAN, DITS ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 2, 1870, page 283 ). Par extension et au figuré. [Le sujet désigne une chose concrète ou abstraite] Persister, durer malgré tous les obstacles, être vivace, tenace, traverser le temps, malgré les tentatives de destruction; être difficile à détruire. Quelques pins grimaçants et décharnés, qui devaient avoir la vie dure pour résister, à cette hauteur, aux grands vents du large (JULES VERNE, L'Île mystérieuse, 1874, page 87 ). Tu ne peux pas savoir comme ça a la vie dure, une idée, comme ça doit être plus difficile à détruire qu'un homme (PAUL NIZAN, La Conspiration, 1938, page 238 ). Les incorrections, celles du moins qui ont la vie dure et résistent aux vitupérations du purisme (CHARLES BALLY, Le Langage et la vie, 1952, page 31 ). · Avoir les os durs. Être robuste, solide, endurer les chocs, les coups. Drôle, je te ferai rompre les os par mes laquais! (...) prenez garde, j'ai les os durs et les bâtons s'y briseront comme verre (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 209 ). — Ça y est, mon vieux! crève-les tous!... Mais tu vas te faire assommer. — Oh! dit Sandoz qui se leva et s'étira, j'ai les os trop durs. Ils se casseront les poignets (ÉMILE ZOLA, L'Œuvre, 1886, page 177 ). · Avoir la peau dure. Être endurci, physiquement et moralement, être devenu insensible, ou ne pas être susceptible. Je pense qu'il n'eût pas été au désespoir d'être sévèrement remis à sa place : ces gens hasardeux ont la peau dure (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, tome 1, 1836, page 167 ). Je puis vivre seul, Car j'ai la peau dure (CHARLES CROS, Le Coffret de santal, Drame en trois ballades, 1873, page 84 ). · Avoir le cuir dur. Être récalcitrant, résister avec entêtement. Il dit à ses damnés, à ceux qui avaient le cuir plus dur que les autres : — Allez me nettoyer la route (HONORÉ DE BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, page 174 ). [Dans une excursion aux environs de Plombières] ... le maudit animal [l'âne] fait le cuir dur et la sourde oreille (HECTOR BERLIOZ, Les Grotesques de la musique, 1869, page 140 ). 2. Qui ne veut pas obéir, qui refuse de se plier à une discipline. Enfant dur (familier). Synonyme : difficile. 3. [En parlant principalement d'une personne ou d'un organe sensoriel (généralement dans des locutions familières)] Qui n'est pas suffisamment sensible. a) [En parlant d'un cheval] — Avoir la bouche dure (Confer bouche* III spécialement). Par métaphore. Ce sont les chevaux qui ont la bouche dure. Tu n'as jamais eu la bouche dure. C'est pourquoi je t'ai gardée (HENRI DE MONTHERLANT, Malatesta, 1946, IV, 7, page 525 ). — Être dur au trot, avoir le trot dur. Avoir des réactions fortes. Sois bien doux (...) garde bien d'avoir un trot dur qui blesserait, qui meurtrirait ses membres délicats (ANDRÉ CHÉNIER, Élégies, 1794, page 114 ). Le trot dur de l'animal enfourché (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1928, page 58 ). — Cheval dur. Cheval peu docile. Synonyme : rétif. Je ne suis pas encore d'âge à redouter un cheval dur (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Le Marquis de Villemer, 1861, page 93 ). b) [En parlant d'une personne, d'un organe sensoriel ou d'une faculté humaine] — Avoir l'oreille dure; être dur d'oreille. Entendre mal; être un peu sourd. Antonyme : avoir l'oreille fine. Il avait l'oreille dure, ou plutôt il feignait d'être dur d'oreilles (LÉON CLADEL, Ompdrailles, le tombeau des lutteurs, 1879, page 205 ). « Parlez plus fort... Elle a l'oreille un peu dure » (ALPHONSE DAUDET, Lettres de mon moulin, 1869, page 120) : Ø 30. Je redoutais un peu (...) la fatigue d'une conversation avec quelqu'un un peu dur d'oreille. Mais non, le temps a passé le plus agréablement du monde, et Lacretelle, comme il advient parfois, entend mieux lorsque la parole flotte sur une rumeur continue. ANDRÉ GIDE, Journal, 1930, page 965. — Être dur de la feuille (populaire). Je viens demander au pape s'il est sourdingue... Comprenez je viens lui demander s'il est dur de la feuille (JACQUES PRÉVERT, Paroles, 1946, page 143 ). — Avoir la tête dure, le crâne dur. · Avoir l'esprit peu ouvert, ne pas comprendre facilement (Confer aussi crâne1 B 1). Il essayait de donner des leçons au petit; mais celui-ci n'écoutait guère; il avait la tête dure, refusait d'apprendre, sanglotant, regrettant l'époque où sa mère le laissait courir les rues (ÉMILE ZOLA, Le Ventre de Paris, 1873, page 641 ). Il a fait rentrer le latin dans ma tête dure : « Intelligent ce petit, mais un mulet » (ALBERT CAMUS, L'Exil et le Royaume, 1957, page 1578 ). · Être très entêté. Les cloches, ça ne change pas d'opinion si vite que ça!... Ça a la tête dure (VICTORIEN SARDOU, Patrie!, 1869, I, tableau1, 3, page 26 ). Mara. — Violaine, tu le sais, j'ai la tête dure. Je suis celle qui ne se rend pas et qui n'accepte rien (PAUL CLAUDEL, L'Annonce faite à Marie, 1948, III, 2, page 194 ). Remarque : On rencontre dans la documentation la locution employée au sens propre. Vous avez manqué me fendre le front, ... Heureusement que, dans la famille, nous avons la tête dure (ALEXANDRE DUMAS père, Fille de régent, 1846, II, 4, page 184). — Faire sa tête dure. Bouder, être fâché. Quand je fais ma tête dure, je reste pendant des huit jours comme fâché avec eux (JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Pêcheur d'Islande, 1886, page 247 ). — Avoir le sommeil dur. Dormir très profondément, ne pas être facilement réveillé. Antonyme : avoir le sommeil léger. Le voisinage de la Halle trop populeux et trop incommode pour les gens qui n'ont pas le sommeil dur (VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée-d'Antin, tome 2, 1812, page 136 ). Elle dormait... de ce dur premier sommeil que rien ne brise (GUY DE MAUPASSANT, Une Vie, 1883, page 115) : Ø 31. — Vous avez le sommeil dur, mademoiselle (...) Voici une lettre (...) Vous ayant entendue rentrer à trois heures, j'ai cru bien faire de frapper chez vous. Mais vous dormiez déjà si profondément que je n'ai pu vous réveiller. LÉON BLOY, La Femme pauvre, 1897, page 177. 4. Qui ne s'émeut pas, ne s'attendrit pas facilement; qui est ou se montre sans bonté, sans bienveillance ou sans douceur. Homme dur; être, se montrer dur pour, envers, avec, à l'égard de quelqu'un. — Que tu es dur! dit Berthe. Ça ne te fait donc rien que je souffre? (JACQUES CHARDONNE, L'Épithalame, 1921, page 313 ). — Un homme dur. En voilà un qui ne s'attendrissait pas sur les blessés ni sur les morts! (FRANÇOIS MAURIAC, Le Noeud de vipères, 1932, page 156) : Ø 32.... hautain aux États de Bretagne avec les gentilshommes, dur avec ses vassaux à Combourg, taciturne, despotique et menaçant dans son intérieur, ce qu'on sentait en le voyant [mon père] était la crainte. FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 26. — Dur à quelqu'un (littéraire). J'aurai toujours devant l'oeil cette soeur barbare indulgente à ses pensées et dure aux miennes (HONORÉ DE BALZAC, Correspondance, 1829, page 377 ). SYNTAXE : Dur et sec, dur et froid, dur et hautain, dur et intraitable; âpre et dur. — Par métonymie. [En parlant de choses] Qui exprime, traduit un manque de coeur, de bonté ou de douceur. Coeur, esprit dur. Synonymes : impitoyable, insensible. Les esprits aimables et doux ne se sentent aucun goût pour les tempéraments durs et malveillants (ÉMILE DURKHEIM, De la division du travail social. 1893, page 18) : Ø 33. J'ai voulu qu'en toute âme La pitié descendît, Et qu'à sa douce flamme Tout coeur dur s'attendrît; Et que, moins en colère Et moins de plus au front, L'homme à juger son frère Ne fût plus aussi prompt. AUGUSTE BARBIER, Ïambes et poèmes, 1840, pages 281-282. — En particulier. · [En parlant du visage, de l'expression, des traits] Air, regard, front, visage dur; yeux durs. Toi, tu sais supporter les longues bouderies, les regards durs et les silences obstinés (PAUL GÉRALDY, Toi et Moi, 1913, pages 88-89 ). · [En parlant de l'expression de la voix, de la parole] Mot, terme, ton, reproche dur; parole, réprimande dure; dire des choses dures. — Locution figurée. · Arrondir ses angles durs. Adoucir, améliorer son caractère, son comportement. Il était très doux (...) Il avait arrondi ses angles durs (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 245 ). · Avoir la dent dure. Confer dent C 2 exemple. Remarque : Dur peut avoir plusieurs nuances de sens a) Insensible, qui ne montre aucune sensibilité. Daniel ne pleurait pas : il continuait à avancer, très pâle, le regard dur fixé au loin en avant (Roger Martin du Gard, Les Thibaut, Le Cahier gris, 1922, page 644). b) Cruel, qui manque de bienveillance. On lisait chez lui (...) cette rancoeur, cet air mauvais et dur de ceux qu'un excès de misère a accablés (Maxence Van der Meersch, Invasion 14, 1935, page 361). c) Blessant, qui fait souffrir. J'ai une grâce à vous demander, lui dit un jour son amant : mettez votre enfant en nourrice à Verrières, Mme de Rênal surveillera la nourrice. — Ce que vous me dites là est bien dur... Et Mathilde pâlit (Henri Beyle, dit Stendhal, Le Rouge et le Noir, 1830, page 472). — Par extension. Qui est sévère dans la critique. Avant Pascal les durs moralistes médiévaux n'avaient cessé de dénoncer les mensonges de la fausse vertu (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 732 ). Vous avez à « l'Écho » un caricaturiste qui est un peu dur. Je sais que je ne suis pas très grand de ma personne, mais me représenter sous les traits d'un basset, tout de même (MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 2, 1958, page 187 ). II.— Emploi comme adverbe, familier. A.— Avec force, violemment. Frapper, cogner, saper dur. Synonyme : fort. L'auteur des deux gendarmes se mettait au piano, chantait fort, tapait dur, réveillait tout le monde (ALPHONSE DAUDET, Trente ans de Paris, 1888, page 96 ). B.— Avec intensité. Le soleil tape, le vent souffle dur; geler dur. Il avait fallu faire baisser la capote du fiacre, tant tapait dur le soleil (MARCEL PROUST, Sodome et Gomorrhe, 1922, page 741 ). C.— Beaucoup et avec énergie, en peinant Travailler, piocher dur. Synonymes : ferme, d'arrache-pied. Je me disposais à travailler dur. Papa aurait aimé que je cumule les lettres et le droit (SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, pages 167-168 ). D.— Locution verbale. Croire dur comme fer (à quelque chose, que...). Croire fermement, inébranlablement, avec forte conviction. Il croit dur comme fer qu'un être tout-puissant et parfait, son Dieu, préside à ces massacres (PAUL BOURGET, Le Sens de la mort, 1915, page 69 ). Il finissait par se prendre à son propre bluff et croire, dur comme fer, les histoires extravagantes et invraisemblables qu'il avait enfantées (LÉON DAUDET, La Police politique, 1934, page 223 ). III.— Emploi comme substantif. A.— Substantif masculin. 1. Ce qui est dur, solide, résistant (au toucher). Cela avait le toucher de la soie tricotée avec du dur à l'intérieur (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 304 ). Mesurer les délais de cuisson des oeufs, à les doser selon qu'elles veulent du tendrement mollet... ou du plus consistant, du dur (ALEXANDRE ARNOUX, Visite à Mathusalem. 1961, page 16) : Ø 34. Si nous voulions définir le dur ou le mou, le rude ou le lisse, le sable ou le miel comme autant de lois ou de règles du déroulement de l'expérience tactile, il nous faudrait encore mettre en elle le savoir des éléments que la loi coordonne. MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 365. a) Locution familière. Être d'un dur! Dans la chaleur humide de cette terre toujours trempée, les céleris en une nuit devenaient des arbres gigantesques et d'un dur! (ALPHONSE DAUDET, Port-Tarascon, 1890, page 182 ). b) Locution adjectivale ou adverbiale. En dur. — En matériau dur (béton, pierre, brique, etc.). Bâtiment, construction en dur. Antonymes : provisoire, en matériau léger, préfabriqué. Piscines construites en « dur » (béton et revêtement) (Le Monde, 9 janvier 1970 dans le Dictionnaire des mots nouveaux (PIERRE GILBERT) 1971 ). — Bétonné. Terrain en dur. Antonyme : en terre battue. On dessina le plan d'un grand aéroport avec quatre pistes en dur (Le Monde. 24 juin 1971 dans le Dictionnaire des mots nouveaux (PIERRE GILBERT) 1971 ). 2. Argot populaire. a) Train. Prendre le dur, louper son dur, rater le dur. Puis nous avons refait (...) le chemin de Strasbourg. Là nous avons repris le « dur », comme disait Judex (PAUL VIALAR, Risques et périls, 1948, page 203 ). Faut qu'ils [les Allemands] réparent les voies pour que le dur puisse passer, « Le dur, je leur en fais cadeau, dit Moulu » (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme, 1949, page 202 ). · Brûler le dur. Voyager sans billet. Une partie du trajet Paris-Anvers s'était faite à pinces, l'autre en brûlant le dur (BLAISE CENDRARS, Bourlinguer, 1948, page 72 ). b) Eau-de-vie. Un verre de dur. Je n'aime pas le vin, dit Geignolet avec mépris, je veux quatre sous de dur pour mettre dans ma bouteille (PAUL FÉVAL, Le Fils du diable, 1847, II, page 48 ). Avant de prendre son dur le fameux grog le « der des der » (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit, 1936, page 440 ). 3. Au figuré. a) Ce qui est difficile, pénible. Je crois que je ne ferai jamais fortune dans la photographie. Les premiers temps surtout ont été d'un dur (ALPHONSE DAUDET, Le Nabab, 1877, page 180 ). b) Ce qui est sans bonté. Un peu, chez lui, d'affectation théâtrale du dur, du terrible, du redoutable (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1866, page 290 ). Dur, mais non cruel, — grande différence, car le dur est commandé par quelque dessein ou quelque objet de pensée, et le cruel par la jouissance actuelle de l'être (PAUL VALÉRY, Tel quel I, 1941, page 114 ). B.— Substantif féminin. 1. Argot militaire. Viande. Des fayots à l'huile, de la dure, bouillie, et du jus. C'est tout (HENRI BARBUSSE, Le Feu, 1916, page 28 ). 2. Terre nue. On a mis la nappe sur la dure (JULES VALLÈS, Jacques Vingtras, L'Insurgé, 1885, page 346 ). — Locution verbale familière. Coucher sur la dure. Coucher à même le sol, par terre. Il couchait sur la dure, dans la cour de sa maison; en guise d'oreiller, une pierre sous la tête (JULIEN GREEN, Journal, 1936, page 53 ). — Par ellipse. Supporter la dure. Il faut supporter la dure, le froid, la pluie, surtout l'angoisse (CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1956, pages 250-251 ). 3. Locution adverbiale. À la dure. Sans douceur, de manière rude, mais non brutale. Mener quelqu'un à la dure; élever des enfants à la dure. Antonyme : dans du coton. Il faut élever les enfants à la dure, on leur fait ainsi des tempéraments forts (HONORÉ DE BALZAC, Pierrette, 1840, page 75 ). Oh! c'était souvent un prolétariat mené à la dure,... avec des règlements draconiens (JEAN JAURÈS, L'Armée nouvelle, 1911, page 369) : Ø 35. Édith, (...) bien portante, d'une santé à toute épreuve, (...) n'imaginait pas que cette bizarre existence pût avoir pour sa fille d'autre résultat que de la rendre plus robuste. Élever les gosses à la dure, dans le peuple, a toujours passé pour excellent. MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, page 82. — Au pluriel, locution familier. a) En dire de dures à quelqu'un. Faire des remarques, des réprimandes dures à quelqu'un. b) En voir de(s) dures. Subir des épreuves rudes, pénibles. Avant de faire la culbute, il pouvait encore en voir de bien dures : il n'était pas riche; et sans travail, adieu le pain (LÉON CLADEL, Ompdrailles, le tombeau des lutteurs, 1879, page 143 ). J'en verrai de dures sur le navire. Il faut que je me rompe d'avance, ou plutôt qu'on me rompe au métier (JULES VALLÈS, Jacques Vingtras, L'Enfant, 1879, page 171 ). · Par métaphore. [En parlant de choses] Être malmené. Si votre repasseuse sait bien se servir de la patte-mouille, qu'elle donne également un coup de fer à cette redingote. Elle en a vu de dures (JEAN GIONO, Le Bonheur fou, 1957, page 95 ). En faire voir de dures à quelqu'un. Faire subir des tourments, des épreuves à quelqu'un. Oh! il m'en a fait voir de dures! (...) J'ai été sa femme et sa bonne, tout, tout ce qu'il a voulu... et il m'en a fait pleurer (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Le Masque, 1889, page 1164 ). C.— Substantif masculin et féminin. 1. Familier. Personne qui résiste à la douleur, à la peur : Ø 36. Ma bouche se sèche instantanément, je ne peux plus rien avaler. Ce sont là des incommodités, sans plus. Je les supporte assez bien, je ne suis pas douillet, je ressemble à ma mère. « Ta mère était une dure », aime à répéter mon oncle Ernest. GEORGES BERNANOS, Journal d'un curé de campagne, 1936, page 1059. 2. Populaire. Personne prête à la bagarre et que rien n'ébranle. C'est un dur, un dur de dur; jouer les durs; faire son petit dur; un dur à cuire (confer dur à cuire), À peine libéré, il embauchait Marcotte et Bolot, un dur, évadé de Hoerdt (HERVÉ BAZIN, La Tête contre les murs, 1949, page 351 ). Je passe même pour un dur : c'est dire que j'aime le risque pour le risque (JEAN GIONO, Les Grands chemins, 1951, page 127) : Ø 37. Georges un petit mou, qui veut jouer les durs. Quand j'étais jeune avocat et que je m'occupais des enfants dévoyés, à leur seul regard je reconnaissais les durs et les mous, et ils avaient douze ans. Il y avait aussi ceux dont le regard révélait qu'ils étaient à la fois des durs et des mous, ceux au regard trouble. Les plus dangereux. HENRI DE MONTHERLANT, Demain il fera jour, 1949, I, 3, pages 715-716. 3. POLITIQUE. Personne qui a durci sa position jusqu'à l'intransigeance. On voit se profiler la menace d'un retour à une solution de force. En Amérique, les « durs » montrent l'intention de revenir sur ce qui a été dit (PM 27 AVRIL 1968 DANS LE DICTIONNAIRE DES MOTS NOUVEAUX (PIERRE GILBERT) 1971). Remarque : On rencontre dans la documentation les dérivés a) Duracine, substantif féminin, vieux, inusité. Variété de pêche à chair très ferme (Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)-Grand Larousse de la langue française en six volumes). b) Duraille, adjectif et substantif féminin pluriel, argotique a ) Adjectif Dur, difficile. C'est duraille (Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT) Supplément 1970 et Grand Larousse de la langue française en six volumes).ß Ils [les bobards] étaient durailles (Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit, 1936, page 424).) Substantif féminin pluriel, argot des voleurs. Pierres précieuses, diamants. La mère Martial nous aidera à lui pesquiller d'esbrouffe ses durailles d'orphelin [prendre de force ses pierreries] (Eugène Sue, Les Mystères de Paris, 1842-43, page 316). c) Duraillon, adjectif. Dur, difficile. C'est duraillon. Gagner le coquetier deux fois de suite, c'est duraillon, croyez-moi (Jean Giono, Un Bonheur fou, 1957, page 181). Confer aussi durillon. d) Duriuscule, adjectif, vieux, familier, par plaisanterie [Du Malade Imaginaire de Molière : " Le pouls est duriuscule, pour ne pas dire dur "] Un peu dur. a ) Pouls duriuscule. Pouls un peu dur, manquant d'élasticité. Nous en sommes encore à la période empirique des anciens médecins qui notaient avec précision les caractères du pouls capricant et du pouls duriuscule (docteur Pierre-Marie-Félix Janet, Les Obsessions et la psychasthénie, tome 1, 1903, page 399 ß ).) Au figuré Un peu difficile. Je n'ai lu qu'une fois ce jugement [de l'affaire Decazeville] , ça m'a paru duriuscule à comprendre et surtout à développer (Gustave Flaubert, Correspondance, 1866, page 81). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 8 117. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 7 315, b) 10 367; XXe. siècle : a) 14 362, b) 14 081. DÉRIVÉS : Duret, -ette, adjectif, familier, peu usité. Un peu dur. Le petit garçon lui tendit une poignée de ces fruits durets des rosiers, que les personnes sans dignité appellent des gratteculs (HENRI DE MONTHERLANT, Les Célibataires, 1934, page 784 ). Emploi comme substantif masculin. a) Variété de pomme. b) Variété d'érable. Le bois du duret... est si homogène qu'il est impossible d'y distinguer aucune couche annuelle (JACQUES-JOSEPH BAUDRILLART, Nouveau manuel forestier, tome 1, 1808, page 223 ).

« s'amollit comme un fruit malade.

Jusqu'à présent, il était dur et vert et bien acide, et puis, d'un coup, le voilà tendre. JEAN GIONO, Regain, 1930, page 54. — [de tendreté ou de cuisson] · Légumes durs.

Légumes qui restent durs après la cuisson. Les carottes ne cuisent pas aussi vite que les pommes de terre.

Elles sont encore dures quand on sert le fricot sur la table (JULES RENARD, Journal, 1909, page 1231 ). · Viande dure.

Viande difficile à découper et à mâcher. Synonyme : coriace.

J'aime mieux la viande dure : au moins on la sent passer.

Mais le filet, par exemple, c'est comme si on ne mangeait rien (GEORGES DUHAMEL, Le Désert de Bièvres, 1937, page 133) : Ø 4.

Il n'y avait là (...) pour tout dîner qu'un gigot fort dur, dont un étudiant (...) essaya de me détourner en me disant qu'un Anglais affamé, arrivé une heure avant moi, n'avait pu l'entamer et s'y était rebuté. VICTOR HUGO, Le Rhin, 1842, page 175. c) [Par opposition aux parties molles, en parlant de parties du corps] · Os durs; parties dures (du squelette : os, dents, cartilages).

Antonyme : mou.

Une maigreur nouvelle sculptait son visage, le réduisait aux parties dures et aux grands yeux (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 2, 1933, page 492 ). · Mains dures.

Synonyme : calleuses.

Mains dures et calleuses de paysans (ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, page 99 ). · Muscles durs, seins durs.

Synonyme : ferme.

Son mollet dur, serré dans des grèves blanches, saillissait nerveusement (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves, 1848, page 279 ).

Les bras durs des sportives (HENRI DE MONTHERLANT, La Petite Infante de Castille, 1929, page 606 ).

Elle a de beaux seins durs sous sa blouse de satin (JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée, 1938, page 68 ). — PATHOLOGIE.

Pouls dur.

Pouls sans élasticité.

Ils ont le pouls petit, tardif, dur : ils sont sujets à des maladies opiniâtres (PIERRE CABANIS.

Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 1, 1808, page 43 ).

Tumeur dure.

L'abcès froid se présente sous l'aspect sous la peau d'une tumeur dure (ERNEST GARCIN, Guide vétérinaire, 1944, page 24 ). d) [Par transformation] — [Après cuisson] Qui a durci, qui a pris une consistance dure, ferme, épaisse par la cuisson.

Caramel, nougat dur. Antonyme : mou. · Œuf dur. Œuf cuit dans sa coquille à l'eau bouillante jusqu'à ce que le blanc et le jaune aient pris une consistance solide, se soient coagulés.

Antonymes : mollet, à la coque. Ils mangeront des oeufs durs avec la sauce verte, c'est excellent (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Souvenirs d'une petite fille, 1927, page 205 ).

Purée d'épinards avec oeufs durs (ANDRÉ GIDE, Journal, 1944, page 257) : Ø 5....

tout en nous toisant avec leur face-à-main, ma grand'mère et moi, parce que nous mangions des oeufs durs dans la salade, ce qui était réputé commun et ne se faisait pas dans la bonne société d'Alençon. 2. »

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